Les habitants des chambres de bonne à Paris
240 pages
Français

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Les habitants des chambres de bonne à Paris , livre ebook

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240 pages
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Description

Dans cet ouvrage, l'auteur fait l'historique de la chambre de bonne en tant qu'élément architectural. Il dresse des comparaisons avec des espaces exigus similaires, présents dans des films ou des documentaires. L'auteur revient sur les rapports qui s'établissent entre le chercheur et les personnes filmées. L'analyse de dix courts-métrages réalisés dans ce cadre, puis l'exposé critique des entretiens réalisés, permettront de dégager une sociologie des habitants des chambres de bonne à Paris. Un DVD, Quelques mètres carrés, accompagne cette étude.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 octobre 2016
Nombre de lectures 12
EAN13 9782140021299
Langue Français
Poids de l'ouvrage 6 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1300€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

AnjaHESS
Les habitants des chambres de bonne à Paris Étude filmique des usages de l’espace quotidien
DVD INCLUS
L O G I Q U E S S O C I A L E S
Les habitants des chambres de bonne à Paris
Logiques sociales Collection dirigée par Bruno Péquignot En réunissant des chercheurs, des praticiens et des essayistes, même si la dominante reste universitaire, la collection « Logiques Sociales » entend favoriser les liens entre la recherche non finalisée et l'action sociale. En laissant toute liberté théorique aux auteurs, elle cherche à promouvoir les recherches qui partent d'un terrain, d'une enquête ou d'une expérience qui augmentent la connaissance empirique des phénomènes sociaux ou qui proposent une innovation méthodologique ou théorique, voire une réévaluation de méthodes ou de systèmes conceptuels classiques. Dernières parutions Christophe CAMUS,?, Enquête sur lesMais que fait vraiment l’architecte pratiques et modes d’existence de l’architecture, 2016.Roland GUILLON,Mes années 1950 et 1960 ou l’éveil d’une sensibilité,2016. Louis DURRIVE,Compétence et activité de travail, 2016. Laurent AUCHER,Le Tribunal des ouvriers, Enquête aux prud'hommes de Vierzon, 2016. Benoît SOUROU,Stratégies identitaires chez les migrants turcs en France,2016. Michel BOURDINOT,Vers de nouvelles fonctions pour le permanent UD CFDT ?,2016. Isabelle PAPIEAU,Il y avait des fois,La Belle et la Bête. Réalités et magie à l’italienne, 2016. Yvon CORAIN,L’expérience dans tous ses états, Une approche méthodologique, 2016. Cécile NOESSER,La résistible ascension du cinéma d’animation.Socio-genèse d’un cinéma-bis en France (1950-2010),2016.Aurélien CINTRACT,La mort inégale. Du recul de la mort à l’analyse socio-historique de la mortalité différentielle, 2016. Éric LE BRETON,Mobilité et société dispersée, Une approche sociologique, 2016. Lenita PERRIER,Couleur de peau et reconnaissance sociale, L’expérience vécue des afro-brésiliens émigrés à Paris, 2016. Michel BONNET,Mobilités, l’ombre d’un père, 2016. Dieudonné KOBANDA NGBENZA,Enfants isolés étrangers, Une vie et un parcours faits d’obstacles, 2016. Marie Zoé MFOUMOU,La professionnalisation des métiers féminins. L’exemple du secrétariat au Gabon, 2016.
Anja HESSLes habitants des chambres de bonne à Paris
Étude filmique des usages de l’espace quotidien
Cet ouvrage a été élaboré à partir d’une thèse de doctorat sous la direction de Claudine de France. © L’Harmattan, 2016 5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris www.harmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-08387-2 EAN : 9782343083872
INTRODUCTION
Mon intérêt pour les chambres de bonne remonte à 1993, lors de mon arrivée en France. J’occupais moimême ce type de logement dans le ème 16 arrondissement de Paris et exerçais le métier provisoire de femme de ménage dans une famille habitant le même immeuble. Le loyer de la chambre était déduit de mon salaire non déclaré. Je travaillais le matin, excepté en fin de semaine ; j’avais la possibilité de prendre une douche quotidienne chez mon employeur après le travail ; les autres jours, je me rendais à la piscine. L’aprèsmidi, j’explorais la ville et apprenais le français en écoutant les gens dans la rue et autres lieux publics.
De ces moments de solitude, j’ai gardé le goût de l’observation, fort utile à mon futur parcours. Habitant au sixième étage d’un immeuble, dans des conditions précaires, je commençais à observer mon voisinage. Des contacts se nouaient avec mes voisins, tous très différents. Cet univers m’étonnait, car en tant qu’allemande, il m’était difficile d’imaginer un tel inconfort dans mon pays d’origine.
Par le biais de mon statut d’employée de maison, j’ai également pris conscience du décalage qui régnait entre les étages nobles et l’escalier de service, que j’empruntais quotidiennement y compris pour me rendre dans la cuisine de mes employeurs. Souvent me venait à l’esprit que les personnes qui habitaient mon étage luttaient toutes pour leur survie : il s’agissait d’un couple d’immigrés polonais, d’une artiste et d’une femme âgée au comportement étrange, dont j’ignorais la profession, auxquels s’ajoutait la fille de la concierge, d’origine portugaise. J’étais intriguée par les différences d’âge, de statut, d’origine de tous ces habitants.
Au cours de cette première année parisienne en chambre de bonne, je m’étais familiarisée avec les problèmes de logement, comprenant que l’espace était, dans une grande ville, un luxe. La chambre de bonne représentait, pour les moins fortunés, l’un des rares moyens de se loger à Paris même.
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Lorsque je suis en entrée en DEA de Cinéma, j’ai tout naturellement souhaité travailler sur les chambres de bonne et leurs habitants,recherche que j’ai tenté de prolonger et d’approfondir en Doctorat.
Très vite m’est apparu que l’outil cinématographique était le moyen le plus approprié pour mener une telle enquête. Comme j’ai expérimenté moimême cet espace exigu, je souhaitais en rendre compte quasi « phy siquement » et la caméra était, dans ce cas, le meilleur instrument pour cette immersion.
J’ai commencé à filmer dès le début de l’enquête et poursuivi les tour nages pendant plusieurs années, avec les difficultés que je décris plus en détail dans le chapitre consacré à l’insertion.
Dès les premiers instants, il devint clair que le corps jouait un rôle impor tant dans ce type d’enquête, en raison de l’exiguïté de l’espace. Cette exi guïté semblait avoir une influence directe, non seulement sur le comporte ment des habitants, mais aussi sur la manière de partager le territoire de la chambre de bonne entre habitants et cinéaste. Ne déterminaitelle pas la manière même de filmer ? C’est pourquoi, dans le présent texte ainsi que dans les films réalisés par moi, le corps et ses activités matérielles, dans le 1 quotidien de la chambre de bonne, occupent une place dominante.
L’une des questions centrale et constante de ma recherche a été : comment s’adapteton à un espace restreint ? Plus précisément : quelles stratégies quotidiennes adopte l’habitant de la chambre de bonne pour investir son espace, l’assumer ou le transformer ?
J’ai choisi de filmer des situations différentes, quant à l’espace (taille et degré de confort de la chambre, type d’immeuble et d’environnement) ; aux caractéristiques de l’habitant (pays d’origine, âge, sexe, profession) ; enfin aux modes d’utilisation de l’espace par ce dernier. Cependant il est important de préciser que je n’ai pas, ce faisant, cherché à offrir un échan tillon représentatif de la population des habitants de chambre de bonne, mais une simple étude de cas différant par un petit nombre de traits.
1 « Le corps est le premier et le plus naturel instrument de l’homme. Ou plus exactement, sans parler d’instrument, le premier et le plus naturel objet technique, et en même temps moyen technique, de l’homme, c’est son corps ». Marcel Mauss,Les techniques du corps inSociologie et anthropologie, 2006, p.372.
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Une autre question centrale s’est posée à moi tout au long des tournages, concernant à présent la mise en scène filmique : comment rendre intelli gible sur l’image l’espace de la chambre de bonne lorsque l’on est engagé dans une délicate mise en scène de l’intime ?
En dehors de l’expérience de terrain, je me suis également nourrie de références en provenance d’autres domaines que le cinéma.
Il m’a paru en effet important de consacrer quelques pages préléminaires à la question des conditions d’apparition des chambres de bonne dans les immeubles parisiens. C’est pourquoi j’ai été amenée à consulter et à citer plusieurs ouvrages d’historiens, d’urbanistes et d’architectes.
En littérature, se sont révélés une riche source d’information les romans d’Émile Zola, notammentPotBouillequi portaient sur les domestiques ème occupant des chambres de bonne à la fin du XIX siècle. Il semble que le thème des habitants de chambres de bonne continue à inspirer un certain nombre d’écrivains contemporains tels qu’en France Georges Perec (Un homme qui dort) ou Anne Gavalda (Ensemble, c’est tout), en Allemagne Patrick Süskind (Le Pigeon), en Espagne Enrique VilaMatas (Paris ne finit jamais).
Disposant de peu de références cinématographiques qui traitent unique ment des chambres de bonne, j’ai choisi d’élargir le cadre de mes sources filmiques à d’autres exemples d’espaces, comparables, par certains aspects, à la chambre de bonne et témoignant d’un mode de vie transi toire ou définitif : chambre d’hôtel, roulotte, cellule de prison etc. C’est ainsi que j’ai visionné de nombreux films documentaires ou de fiction dont les évènements ou l’intrigue se déroulaient dans un espace exigu. Quelquesuns d’entre eux sont examinés dans les pages qui suivent.
Si certaines œuvres littéraires ou cinématographiques concernent direc tement les chambres de bonne, elles ne se consacrent pas véritablement à la vie quotidienne dans cet espace exigu. Aussi m’a til paru intéressant de faire porter tout particulièrement mon enquête filmique sur cet aspect.
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