Voir un tableau : entendre le monde
154 pages
Français

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Voir un tableau : entendre le monde , livre ebook

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Description

Le plan du tableau, en retrait de toute oeuvre d'art à même d'éveiller un sentiment de présence, ne se voit pas à première vue. Il faut retourner à l'oeuvre souvent et, plusieurs années durant, accepter maints combats avant qu'il ne transparaisse, et que le mystère ne commence à s'éclaircir. Qu'appelle-t-on voir ? A quel voyage le plan du tableau, pour être rejoint, convie-t-il le regard ? Par quel subterfuge convoque-t-il celui qui ne peut encore le voir ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2011
Nombre de lectures 211
EAN13 9782296466128
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

VOIR UN TABLEAU : ENTENDRE LE MONDE
Ouverture philosophique
Collection dirigée par Aline Caillet, Dominique Chateau,
Jean-Marc Lachaud et Bruno Péquignot

Une collection d’ouvrages qui se propose d’accueillir des travaux originaux sans exclusive d’écoles ou de thématiques.
Il s’agit de favoriser la confrontation de recherches et des réflexions qu’elles soient le fait de philosophes "professionnels" ou non. On n’y confondra donc pas la philosophie avec une discipline académique ; elle est réputée être le fait de tous ceux qu’habite la passion de penser, qu’ils soient professeurs de philosophie, spécialistes des sciences humaines, sociales ou naturelles, ou… polisseurs de verres de lunettes astronomiques.


Dernières parutions

Franck ROBERT, Merleau-Ponty, Whitehead. Le procès sensible , 2011.
Nicolas ROBERTI, Raymond Abellio (1944-1986). La structure et le miroir , 2011.
Nicolas ROBERTI, Raymond Abellio (1907-0944). Un gauchiste mystique , 2011.
Dominique CHATEAU et Pere SALABERT, Figures de la passion et de l’amour , 2011.
François HEIDSIECK, Henri Bergson et la notion d’espace , 2011.
Rudd WELTEN, Phénoménologie du Dieu invisible (traduction de l’anglais de Sylvain Camilleri) , 2011.
Marc DURAND, Ajax, fils de Telamon. Le roc et la fêlure , 2011.
Claire LAHUERTA, Humeurs, 2011.
Jean-Paul CHARRIER, Le temps des incertitudes. La Philosophie Captive 3, 2011.
Jean-Paul CHARRIER, Du salut au savoir. La Philosophie Captive 2, 2011.
Jean-Louis BISCHOFF, Lisbeth Salander. Une icône de l’en-bas , 2011.
Serge BOTET, De Nietzsche à Heidegger : l’écriture spéculaire en philosophie , 2011.
Philibert SECRETAN, Réalité, pensée, universalité dans la philosophie de Xavier ZUBIRI , 2011.
Camille Laura VILLET


VOIR UN TABLEAU : ENTENDRE LE MONDE
Essai sur l’abstraction du sujet à partir de l’expérience picturale


L’Harmattan
© L’HARMATTAN, 2011
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@.wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-55331-6
EAN : 9782296553316

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
À Christophe Galent
Remerciements
Ces pages, fruit de dix années de recherche où se mêlèrent constamment l’art, la psychanalyse et la philosophie, n’achèvent rien. Au mieux elles définissent le cadre de ce qui, d’ores et déjà, est à repenser.
Elles m’ont été transmises. Je n’ai rien inventé, tout juste repris, tentant de faire mien un enseignement, d’accueillir la pensée et de soutenir la grâce de moments magnifiques.
Qu’il me soit donc permis de remercier Jean-Luc Marion et Jacqueline Lichtenstein, mes professeurs.
Qu’il me soit également permis de témoigner ma profonde reconnaissance à Linda et René Gandolfi, pour la création de ce lieu, source de savoir et de considération, qu’est l’École d’anthropologie pragmatique.
Merci aussi à Audrey Rieber, qui me lit et me relit avec, chaque fois, la même vigilance.
Merci à Caroline Delmotte, Götz Arndt, Frédéric Prat et Albert Weis, dont les œuvres n’ont pas toujours ici trouvé place, mais avec qui il est si précieux de pouvoir dialoguer.
Merci enfin à Christophe Galent, à qui ces pages sont dédiées, sans qui, jamais, elles n’eussent été réécrites. Il fut le guide, pudique et généreux, de cette traversée.
P ROLOGUE Dans la caverne de Platon
You must become an ignorant man again
And see the sun with an ignorant eye
And see it clearly in the idea of it…
How clean the sun when seen in its idea.
Washed in the remote cleanliness of heaven
That has expelled us and our image.
Barnett Newman {1}


Apprendre à voir un tableau ne relève pas, comme l’indique le titre de cet essai, d’un savoir esthétique ou historique. Connaître l’histoire de l’art ainsi que les problématiques esthétiques liées à telle ou telle école, telle ou telle période peut aider, dans le sens où l’intelligence peut prendre appui sur telle phrase, telle doctrine, telle querelle pour alimenter ce mouvement d’abstraction qui doit la conduire au tableau. C’est pourquoi il ne s’agit nullement de les négliger. Le voir, lorsqu’il s’exerce au tableau, requiert cependant une toute autre approche, une toute autre patience. Voir exige de nous un abandon. Il faut s’en remettre… mais à qui ? À quoi ? Cette question constitue probablement le fil rouge de notre interrogation. Nous réalisons alors qu’elle exige de nous bien plus qu’une simple réflexion. A l’autel de cette question, il nous faut abandonner nos armes, ce que nous avions, jusqu’alors, toujours considéré comme un savoir : notre culture, notre éducation, nos a priori psychologiques, moraux, que sais-je ?, notre bagage « intellectuel ». Ce qui constituait une force, ce qui nous faisait croire solides, « armés », comme on dit, « pour la vie », prêts à affronter la « dure réalité »… Tout cela, au tableau, n’est que fatras, tout au plus érudition, vanité. Tout ce que nous savons déjà s’avère un poids et donc un frein à cet élan d’abstraction, à ce voyage intérieur dont la destination est le tableau. Faut-il alors nous débarrasser joyeusement de nos livres d’écolier ? Il s’agit plutôt de les avoir avalés, digérés et métabolisés, de les avoir dans le corps, jusque dans les pieds, d’avoir fait sien ce que professe l’école, au point de pouvoir abandonner le discours du maître, « le discours du semblant », comme dirait Lacan.

Voir indique le seuil d’une entrée en vérité. Mais qu’est-ce que la vérité ? Se pourrait-il qu’abandon et vérité procèdent d’un même mouvement et que ce mouvement soit, précisément, abstraction ? Souvenons-nous un instant de la trop fameuse allégorie de la caverne :

« Maintenant, repris-je, représente-toi notre nature, selon qu’elle est ou qu’elle n’est pas éclairée par l’éducation, d’après le tableau que voici. Figure-toi des hommes dans une demeure souterraine en forme de caverne, dont l’entrée, ouverte à la lumière, s’étend sur toute la façade ; ils sont là depuis leur enfance, les jambes et le cou pris dans des chaînes, en sorte qu’ils ne peuvent bouger de place, ni voir ailleurs que devant eux, car les liens les empêchent de tourner la tête ; la lumière d’un feu allumé au loin sur une hauteur brille derrière eux ; entre le feu et les prisonniers il y a une route élevée ; le long de cette route figure-toi un petit mur, pareil aux cloisons que les montreurs de marionnettes dressent entre eux et le public et au-dessus desquelles il font voir leurs prestiges. » {2}

Trop souvent, il nous est enseigné que l’ignorance, entendons ici le manque d’éducation, est la cause de nos illusions. L’allégorie de la caverne sert alors à justifier le professeur qui nous fait la leçon, à lui rendre raison. C’est là bien mal entendre Platon pour qui l’éducation, paideia , terme construit sur la racine pais qui signifie enfant, traduit le processus qui fait de l’enfant un homme. L’éducation procède d’un éveil à soi-même, d’une certaine connaissance de soi par l’activation en soi d’un pouvoir voir ou plutôt revoir en un tout le particulier, à travers le particulier le tout. La connaissance, mieux encore la co-naissance, c’est-à-dire ce avec quoi nous naissons, mais que nous oublions en nous incarnant, n’est pas donnée à celui qui s’attache simplement aux choses sensibles, s’applique à les ordonner, à les hiérarchiser et à les maîtriser mais à celui qui sait dialectiser. Au bon élève, la connaissance discursive. Au dialecticien, l’intelligence : l’entente des intelligibles, l’accès à la lumière spirituelle du tout, au soleil. Le dialecticien est celui qui détient l’art de la diarésis et de la sunagôgê. Par la sunagôgê se donne une vue d’ensemble, par la diarésis , l’ensemble ainsi aperçu est disséqué et présenté en ses jointures et articulations, de manière à permettre la saisie d’une autre vue d’ensemble. Les articulations, pour révéler leur cohérence les unes par rapport aux autres, demandent un travail, non de réflexion mais de mémoire, une logique de l’être. Alors seulement font-elles à nouveau unit&#

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