De la curiosité
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De la curiositéPlutarqueVictor BÉTOLAUD, Œuvres complètes de Plutarque - Œuvresmorales, t. I , Paris, Hachette, 1870[1] Lorsqu'une maison manque d'air, qu'elle est obscure, trop froide ou malsaine, lemieux est peut-être de l'abandonner. Si pourtant on s'y est attaché par habitude, ilest possible, en déplaçant les fenêtres, en changeant la disposition des escaliers,en ouvrant telles portes, en supprimant telles autres, de la rendre plus claire, mieuxaérée, plus saine. Il y a même des villes que des transformations de ce genre ontmerveilleusement améliorées. Ma patrie en est un exemple. Elle était située àl'Ouest, et ne recevait que le soir, du côté du Parnasse, les rayons du soleilcouchant. On dit qu'elle fut tournée vers le levant par Chéron. Le naturalisteEmpédocle, en bouchant au pied d'une montagne une excavation d'où s'exhalaitdans la plaine un brûlant et pestilentiel vent du midi, passe pour avoir délivré de lapeste toute une contrée. Il est pareillement certaines affections malsaines, funestes,qui portent la tempête dans l'âme et l'obscurcissent. Le mieux serait de lessupprimer et de faire table rase, de manière à donner à l'âme de la sécurité, de lalumière et un souffle pur. Mais si la chose est impossible, il faut du moins changer etmodifier l'âme d'une manière quelconque, en lui donnant un autre tour et une autredirection. Sans aller chercher plus loin, la curiosité, ce désir de connaître les défautsdes autres, est une maladie qui ne semble ...

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De la curiosité Plutarque Victor BÉTOLAUD,Œuvres complètes de Plutarque - Œuvres morales, t. I , Paris, Hachette, 1870
[1] Lorsqu'une maison manque d'air, qu'elle est obscure, trop froide ou malsaine, le mieux est peut-être de l'abandonner. Si pourtant on s'y est attaché par habitude, il est possible, en déplaçant les fenêtres, en changeant la disposition des escaliers, en ouvrant telles portes, en supprimant telles autres, de la rendre plus claire, mieux aérée, plus saine. Il y a même des villes que des transformations de ce genre ont merveilleusement améliorées. Ma patrie en est un exemple. Elle était située à l'Ouest, et ne recevait que le soir, du côté du Parnasse, les rayons du soleil couchant. On dit qu'elle fut tournée vers le levant par Chéron. Le naturaliste Empédocle, en bouchant au pied d'une montagne une excavation d'où s'exhalait dans la plaine un brûlant et pestilentiel vent du midi, passe pour avoir délivré de la peste toute une contrée. Il est pareillement certaines affections malsaines, funestes, qui portent la tempête dans l'âme et l'obscurcissent. Le mieux serait de les supprimer et de faire table rase, de manière à donner à l'âme de la sécurité, de la lumière et un souffle pur. Mais si la chose est impossible, il faut du moins changer et modifier l'âme d'une manière quelconque, en lui donnant un autre tour et une autre direction. Sans aller chercher plus loin, la curiosité, ce désir de connaître les défauts des autres, est une maladie qui ne semble être exempte ni de jalousie ni de malignité. « Homme jaloux, pourquoi sur les défauts des autres Porter un œil perçant ? Occupez-vous des vôtres. » Reportez du dehors et retournez à l'intérieur de vous-même cette curiosité. Si vous aimez à feuilleter une histoire de maux, vous avez en vous de quoi vous occuper. « L'Alize a moins de flots, le chêne, moins de feuilles » que vous ne trouverez de fautes dans votre conduite, de passions dans votre âme, et de négligences dans l'accomplissement de vos devoirs. Car, comme Xénophon dit que les personnes qui règlent bien leur maison ont un endroit particulier pour les vases destinés aux sacrifices, un autre pour la vaisselle de table, que les instruments de labour sont placés ailleurs, et les armes de guerre, à l'écart ; de même vous avez en vous, ici les défauts qui proviennent de la haine, là ceux de la jalousie, ailleurs ceux de la lâcheté, ailleurs ceux de l'avarice. Voilà les objets qu'il faut examiner, dont il faut dresser l'inventaire. Fermez les jours qui vous ménagent une vue sur le voisin. Barrez les passages par où s'échapperait votre curiosité. Ouvrez-lui d'autres issues, d'autres fenêtres : celles qui donnent dans votre appartement, dans celui de votre femme, dans le logis de vos serviteurs. Elle aura là, cette curiosité, de quoi se créer des occupations qui ne seront ni stériles ni malveillantes. Ce sera une investigation utile et salutaire offerte à votre désir de tout connaître, de vous mêler de tout. Que chacun se dise à soi-même : « Où me suis-je attardé ? qu'ai-je fait ? qu'ai-je omis ? »
[2] Je continue. Comme la Fable raconte que Lamia dort aveugle chez elle, déposant au fond d'un petit vase ses yeux qu'elle s'ajuste de nouveau pour voir clair quand elle va sortir ; de même chacun de nous met au service de sa malveillance, en guise d'œil, cette curiosité qui le pousse à regarder hors de son logis et chez ses voisins. Le plus souvent nous nous heurtons contre nos propres fautes, contre nos propres vices, ne les connaissant pas parce que nous négligeons d'y porter la lumière qui nous les ferait voir. C'est pour cela que le curieux est plus utile à ses ennemis. Il constate et publie leurs défauts, il leur montre ce qu'il doivent éviter et corriger. Mais il ferme le plus souvent les yeux sur ce qui l'intéresse au dedans de lui, à cause de la préoccupation que lui donne ce qui se passe au dehors. Ulysse dans les enfers a le courage de ne pas parler même à sa mère avant d'avoir reçu du Devin les instructions qu'il est venu chercher. C'est quand il les connaît, qu'il se tourne vers elle et qu'il interroge les autres femmes, Tyro, et la belle Chloris, qu'il demande quelles raisons déterminèrent Epicaste à s'étrangler, pendue au toit de son palais. Nous, au contraire, tout à fait insoucieux et ignorants pour ce qui nous touche, nous ne nous en occupons pas, mais nous dressons la généalogie des autres. Nous découvrons que le grand père de notre voisin était de Syrie ; sa
nourrice, de Thrace ; qu'un tel doit trois talents, et qu'il n'en a pas payé les intérêts. Nous allons jusqu'à nous informer des plus petits détails. D'où revenait la femme d'un tel ? Quels propos celui-ci et celui-là échangeaient-ils secrètement dans un coin ? Mais de quoi Socrate s'informait-il ? Des moyens de persuasion qu'avait employés Pythagore. Lorsqu'Aristippe aux jeux Olympiques rencontre Isomaque, il le questionne sur les discours par lesquels Socrate se rend la jeunesse si affectionnée ; et quand il a recueilli quelques petits germes, quelques échantillons de cette doctrine, il s'y attache avec tant de passion que son corps succombe. Il devient tout pâle et tout maigre. Il n'a pas de repos qu'il n'ait fait voile pour Athènes. Il y apaise la soif qui le consume, il puise à la source même. Il approfondit le sage, ses discours, et sa philosophie qui enseigne aux hommes à connaître leurs défauts et à s'en débarrasser.
[3] Mais il en est pour qui leur vie particulière est le spectacle le plus odieux. Ils n'ont pas le courage de la regarder en face, de reporter la lumière de la raison sur leur conscience pour l'en éclairer. Leur âme chargée de maux de toute sorte frissonne et s'épouvante à la vue de ce qu'elle est au dedans d'elle-même. Elle ne songe qu'à s'élancer au dehors, à errer autour des misères d'autrui, cherchant pour sa malice un aliment et une pâture abondante. Car, de même que dans nos maisons une poule néglige souvent la nourriture jetée devant elle, et va dans un coin gratter et fouiller la terre, « Cherchant dans le fumier un grain de mil ou d'orge » ; de même les curieux, passant par-dessus les sujets d'entretien communs à tout le monde, par-dessus les questions instructives, matières à propos desquelles personne ne les empêcherait de s'enquérir et dont la poursuite ne serait nuisible à personne, les curieux, dis-je, recueillent dans chaque maison les maux secrets que l'on veut cacher. On cite une réponse spirituelle d'un Egyptien à qui un individu demandait ce qu'il portait caché soigneusement : « C'est afin que tu ne le saches pas que je le tiens enveloppé. » Et vous, homme curieux, pourquoi vouloir connaître ce qu'on veut garder secret ? Si ce n'était pas quelque chose de mal on ne le cacherait pas. L'usage est de n'entrer dans une maison étrangère qu'après avoir frappé à la porte. Aujourd'hui il y a des portiers ; mais autrefois il y avait seulement aux portes des marteaux avec lesquels l'on frappait pour donner avis de son entrée. De cette manière la maîtresse de la maison ou sa jeune fille n'était pas surprise au milieu de son appartement par un étranger. Celui-ci ne voyait pas l'esclave qu'on châtiait, les servantes qui criaient. Or, c'est là que se glisse plus volontiers le curieux. Le calme et la régularité d'un intérieur n'intéressera que médiocrement son attention, même si on la sollicite. Mais les secrets en vue desquels ont été inventés clefs, verrous et portes, voilà ce qu'il aime à dévoiler et à produire à tous les regards. Les vents qui nous déplaisent le plus, comme dit Ariston, sont ceux qui relèvent nos vêtements. Le curieux ne relève pas le manteau des voisins, ni leur tunique : il abat leurs murailles, il ouvre leurs portes. Subtil comme un souffle, il glisse et s'insinue en quelque sorte à travers le corps de la tendre et délicate jeune fille, s'enquérant de ses plaisirs, de ses danses, de ses divertissements de toute une nuit.
[4] Comme le Cléon de la comédie avait « Les mains en Étolie et la tête en Clopide », de même l'esprit des curieux est à la fois dans les palais des riches et dans l'humble demeure des pauvres, à la cour des rois et près du lit des nouveaux mariés. Il s'informe de tout : des affaires des étrangers comme de celles des princes. Ce n'est pas, toutefois, sans courir des dangers qu'il se livre à ces investigations. Si quelqu'un avalait de l'aconit pour connaître les propriétés de cette substance, il périrait avant d'avoir pu en apprécier le goût. De même ceux qui cherchent à surprendre les maux des grands se perdent eux-mêmes avant d'avoir pu rien savoir. Ils sont semblables à des hommes qui, peu contents de cette lumière abondante que les rayons du soleil répandent sur tous, oseraient regarder l'astre lui-même avec l'orgueilleuse prétention de pénétrer jusqu'au centre de sa lumière, et qui y perdraient les yeux. Aussi le poète comique Philippidès répondit-il fort spirituellement à l'invitation du roi Lysimaque : « Dans tout ce que j'ai, dis-moi ce que tu veux que je te donne. » — « Seigneur, répondit-il, exceptez-en seulement vos secrets ». Ce que les rois ont de plus agréable et de plus beau est tout extérieur : je veux dire leurs festins, leurs richesses, leurs fêtes, leurs libéralités. Mais s'ils ont quelques secrets, gardez-vous d'y pénétrer, gardez-vous de les soulever. Il n'y a rien de mystérieux dans la joie d'un souverain qui est heureux, dans ses ris et ses ébats, dans ses projets de faire le bien et d'être agréable. Mais ce qu'il cache, voilà ce qu'il y a de terrible. Ce sont projets sinistres, sombres, impénétrables. Ce sont trésors de colère amoncelés, vengeances méditées avec une haine profonde ; jalousies inspirée par une épouse ; soupçons dirigés contre un fils ; défiances éveillées sur le compte d'un ami. Fuyez ce nuage épais et noir. Vous ne manquerez pas d'entendre le tonnerre qui s'en dégagera, de voir les éclairs qui s'en échapperont lorsqu'aura crevé ce qu'il recèle dans son sein.
[5] Quel est donc le moyen de se garantir d'un semblable péril ? C'est de faire prendre le change à sa propre curiosité, comme nous l'avons dit, et de lui donner
une autre direction, surtout en détournant son esprit vers des objets et plus beaux et plus honnêtes. Appliquez cette curiosité à ce qui se passe dans le ciel, sur la terre, dans l'air et dans la mer. La nature vous a sans doute inspiré le désir de la contempler soit dans ses petits tableaux, soit dans ses grandes scènes. Si vous préférez les merveilles imposantes, soyez curieux d'étudier le soleil : sachez où il se couche et d'où il se lève. Examinez les changements qui s'opèrent dans la lune, comme vous le feriez sur une créature humaine. Demandez-vous comment elle a perdu toute sa lumière et d'où elle l'a ensuite recouvrée. Demandez-vous
« Pourquoi sombre d'abord, son disque dans les cieux S'augmente, et s'embellit d'un éclat radieux ; Pourquoi, se dissipant de nouveau dans l'espace, Le feu de ses rayons disparait et s'efface ? »
Ce sont là des secrets de la nature ; mais elle ne s'irrite point contre ceux qui les pénètrent. Que si vous désespérez d'atteindre à ces grands objets, concentrez votre curiosité sur d'autres plus petits. Sachez pourquoi certains végétaux fleurissent, verdoient, et se plaisent, en toute saison, à étaler leur richesse, tandis que d'autres, après leur avoir un instant ressemblé, font comme les mauvais économes qui prodiguent tout d'une fois leurs trésors et restent nus et appauvris. Sachez pourquoi les fruits que donnent les arbres sont les uns allongés, les autres anguleux, d'autres arrondis et de forme sphérique. Mais peut-être ces mystères ne piqueront-ils pas votre intérêt, parce qu'il n'y a pas lieu d'y découvrir du mal. Et bien ! si votre active curiosité demande toujours des choses mauvaises pour aliment et pour pâture, comme au serpent il faut des herbes vénéneuses, menez-la dans les champs de l'histoire, et présentez-lui quantité innombrable et affluence de tous maux. Là votre curiosité pourra voir des héros qui succombent, d'autres qui se débarrassent de la vie, des épouses séduites, des esclaves révoltés, des amis perfides. Ce ne sont qu'empoisonnements, haines, jalousies, ruines de maisons, chutes de souverains. Gorgez-vous en, faites-en vos délices, sans importuner ni affliger aucun de ceux avec qui vous conversez.
[6] Mais il paraît que la curiosité n'aime pas les malheurs anciens. Il lui en faut de tout récents, de tout frais. Les tragédies nouvelles sont pour ses yeux un agréable spectacle, tandis qu'aux comédies, non plus qu'aux tableaux joyeux, elle n'assiste pas avec un bien vif intérêt. Un mariage, un sacrifice, une pompe religieuse, sont des récits que le curieux entendra sans attention, avec négligence : « J'ai ouï cela cent fois, dira-t-il au narrateur ; abrégez, passez à autre chose. » Au contraire, qu'assis à côté de lui un quidam vienne à raconter qu'une fille a été séduite, qu'une femme a trompé son mari, qu'on prépare un procès, que des frères se sont brouillés, il ne sera plus endormi ou distrait. « Avide de détails, il dresse les oreilles » ; et ces deux vers :
« Mauvaises nouvelles, hélas ! S'apprennent plus vite que bonnes »,
sont bien justement applicables aux curieux. De même que les ventouses attirent à la surface de la peau le sang le moins pur, ainsi l'oreille du curieux absorbe les discours qui sont les plus mauvais. Ou plutôt, comme il y a dans les villes certaines portes néfastes et sinistres par lesquelles on emmène les condamnés à mort et par où l'on fait sortir les immondices ainsi que les victimes expiatoires, sans que jamais rien de pur ni de sacré entre ou sorte par là ; de même rien de bon, rien d'agréable n'entre et ne circule dans l'oreille de l'homme curieux. Ce ne sont que des propos où il est question de meurtres, que des anecdotes scandaleuses et impures qui y trouvent accès. « On n'entend que sanglots chanter en ma demeure ». Les curieux n'ont pas d'autre Muse, pas d'autre Sirène : c'est pour eux le plus délicieux des concerts. La curiosité est une manie d'apprendre ce que les autres cachent et dissimulent. Or comme, loin de cacher ce qu'ils possèdent de bon, les gens s'attribuent même le bien qu'ils n'ont pas, il en résulte que le curieux, ne désirant apprendre que les mauvaises choses, est atteint d'une maladie que j'appellerai « joie du chagrin des autres ». C'est là une joie qui est sœur de la haine et de l'envie. L'envie est la douleur du bien qui arrive aux autres, et la passion du curieux est la joie du chagrin qu'ils éprouvent. L'une et l'autre ont pour principe la méchanceté, sentiment sauvage et cruel.
[7] Or, il est si pénible pour chacun de mettre à nu ses propres maux, qu'on en a vu beaucoup aimer mieux se laisser mourir que de révéler aux médecins certaines maladies cachées. Supposez qu'Hérophile, Erasistrate, ou Esculape lui-mème lorsqu'il était homme, munis de leurs drogues et de leurs instruments, se fussent présentés de maison en maison, demandant si quelqu'un avait une fistule à l'anus, ou si une femme avait un cancer à la matrice, (et pourtant la curiosité, en médecine, fait le salut du malade), tout le monde, je pense, aurait chassé l'indiscret qui,
n'attendant pas qu'on eût recours à lui, se mettait, sans en être requis, à la découverte des maladies des autres. Eh bien ! les curieux vont pareillement à la recherche de maladies pires encore ; et ce n'est pas pour les guérir, c'est seulement pour les dévoiler. Aussi la haine dont ils sont l'objet est-elle bien judicieuse. Quand ne pouvons-nous pas supporter et exécrons-nous les agents de la douane ? Ce n'est pas lorsqu'ils inspectent les objets que nous faisons entrer à découvert ; c'est quand, pour trouver ce qu'ils supposent caché par nous, ils bouleversent nos autres bagages et nos autres ballots. Or c'est la loi qui les autorise à le faire, et il y a dommage pour eux quand ils y manquent. Mais les curieux négligent et ruinent leurs propres affaires pour s'occuper de celles d'autrui. Il est bien rare qu'ils aillent aux champs. Le calme et le silence de la solitude leur est insupportable. Quand ils s'y hasardent de temps en temps, c'est pour examiner les vignes du voisin plus attentivement que les leurs propres ; c'est pour s'informer du nombre de bœufs morts chez lui, du nombre de ses pièces de vin qui ont tourné. Aussitôt qu'ils ont fait ample provision de semblables nouvelles ils décampent. Le vrai cultivateur n'accueille même pas avec plaisir les propos qui viennent le trouver de la ville. Il dit :
« Voilà que le drôle, en sarclant ma terre, Me parle de paix, me parle de guerre. Maudit curieux ! Il n'en finit pas ».
[8] Oui : les curieux fuient le séjour de la campagne comme languissant, froid et stérile en événements tragiques. C'est aux marché des échantillons, à la place publique, sur le port, qu'ils se précipitent. « N'y a-t-il rien de nouveau ? » — « Eh quoi ! n'étiez-vous pas ce matin sur la place ? » — « Eh bien ? » — « Eh bien ! en trois heures pensez-vous que la ville ait changé de face ? » Que quelqu'un ait une nouvelle à produire, voilà notre curieux qui descend de cheval, lui serre la main, l'embrasse, et se place devant lui pour l'écouter. Si au contraire celui qu'il a rencontré déclare ne rien savoir de nouveau, notre homme parait mécontent. « Que dites-vous ? murmure-t-il. Vous n'avez donc pas été sur la place ? Vous n'avez pas poussé jusqu'au Tribunal des Stratéges ? Vous n'avez pas rencontré ceux qui arrivent d'Italie ? » J'approuve ce que firent un jour les magistrats des Locriens. Un homme qui revenait de voyage ayant demandé s'il n'y avait rien de nouveau, ils le condamnèrent à l'amende. Comme les cuisiniers souhaitent une extrême abondance de gibier, et les pêcheurs, des poissons en grande quantité, de même les curieux souhaitent qu'il arrive beaucoup de malheurs, que les embarras se multiplient, qu'il y ait des changements, des révolutions. C'est une occasion pour eux d'avoir toujours à faire la chasse et à dépecer. Le législateur des Thuriens fit sagement lorsqu'il interdit de stigmatiser dans les comédies aucun citoyen, à l'exception des adultères et des curieux. Il semble, en effet, que l'adultère soit une espèce de curiosité du plaisir d'autrui, un besoin de chercher, de fouiller dans ce qui est mis en réserve et dérobé aux regards de la multitude. À son tour la curiosité est une manière de violer, de mettre à nu, les secrets des autres.
[9] Qu'à la manie de s'informer de tout se joigne celle de parler sans relâche, c'est ce qui arrive constamment. Aussi Pythagore imposait-il à ses néophytes un silence de cinq ans ; et il avait donné à cette épreuve le nom d'échémythie. La curiosité est nécessairement suivie de la médisance. Ce qu'on entend avec plaisir, avec plaisir on le redit. Ce qu'on a hâte de recueillir des uns, on est joyeux de le colporter chez les autres. Mais cette maladie, entre plusieurs inconvénients, a celui d'être un obstacle à l'accomplissement des propres désirs de celui qui en est atteint. Tous se gardent du curieux, tous se cachent de lui. On n'aime pas à faire, à dire quoi que ce soit si un curieux doit le voir ou l'écouter. On diffère tout projet, on ajourne tout examen jusqu'à ce que de tels importuns aient disparu. Si une affaire secrète est sur le tapis, si l'on s'occupe de quelque opération sérieuse et qu'un curieux survienne, il semble que ce soit un chat à l'arrivée duquel on fait disparaître et l'on cache un plat de viande. Si bien, que souvent ils sont les seuls qui n'aient ni entendu ni vu ce qu'on laisse entendre et voir à tout le monde. C'est par la même raison que le curieux n'obtient aucune espèce de confiance. À des domestiques, à des gens d'un autre pays nous confions nos lettres, nos papiers, nos cachets, plus volontiers qu'à des proches et à des amis, quand ces proches et ces amis sont des curieux. Le célèbre Bellérophon, porteur d'une lettre écrite contre lui-même, ne l'ouvrit pas, et il respecta le secret qu'y avait déposé le Souverain. Il était animé du même sentiment de continence qui lui avait fait repousser les offres de la reine. Car le curieux est coupable d'incontinence, aussi bien que l'homme adultère ; il y ajoute de plus l'irréflexion et l'étourderie. Laisser de côté tant de femmes qui sont publiques et à tout le monde, pour courir après celle qui est tenue sous clef, après celle qu'il faut acheter fort cher, et qui souvent, (cela se rencontre), est fort laide, c'est le comble de la folie et de la démence. Voilà précisément ce que font les curieux. Ils négligent un grand nombre de choses belles à voir, belles à entendre, ils renoncent aux amusements et aux exercices les plus honnêtes, pour fouiller dans la
correspondance d'autrui, pour appliquer leur oreille contre la cloison du voisin, pour chuchoter avec des domestiques et des servantes ; et cela le plus souvent avec danger, toujours avec honte.
[10] Ce qui peut être fort utile pour détourner de la curiosité les gens atteints de ce vice, c'est qu'ils veuillent bien se remettre en mémoire ce qu'ils ont vu et su précédemment. Car, de même que Simonide disait que quand par intervalles il ouvrait ses coffres il trouvait toujours plein celui de l'argent et toujours vide celui de la reconnaissance ; de même, si les curieux ouvraient de temps en temps le coffre de leur curiosités et constataient ce qu'il renferme d'inutile, de vain et de désagréable, peut-être leur vice se présenterait-il à eux et leur apparaîtrait-il dans toute sa laideur et toute son inanité. Car, enfin, admettez une supposition. Qu'un homme, en parcourant les écrits des anciens, fasse un recueil de ce qu'ils renferment de plus mauvais, et en compose un petit livre où seront réunis, par exemple, les vers incomplets d'Homère, les solécismes des tragiques, les boutades inconvenantes et obscènes d'Archiloque contre les femmes, boutades qui l'ont déshonoré lui-même : un tel compilateur méritera bien certainement cette imprécation tragique :
« À qui rassemble ainsi les misères humaines Malheur ! »
Mais sans mériter une telle malédiction, c'est faire une besogne sans profit et sans honneur, que d'aller partout recueillant les fautes d'autrui. Cela me remet en mémoire la ville que Philippe peupla des hommes les plus mauvais et les plus difficiles à conduire, et à laquelle il donna le nom de Ponéropolis. Les curieux rassemblent et réunissent, non pas dans les vers et dans les poëmes, mais dans la vie des hommes, ce qu'il y a de manqué, d'insuffisant, d'irrégulier. Leur mémoire devient un répertoire ambulant des plus vilaines choses : répertoire aussi odieux qu'il est peu poétique. De même qu'à Rome certains amateurs ne font aucun cas des peintures, des statues, ni même des belles formes des esclaves de l'un et de l'autre sexe qui sont à vendre, et qu'ils ont la singulière manie d'acheter les monstruosités, les hommes sans jambes, à bras tortus, les créatures qui ont trois yeux, celle dont la tête ressemble à celle d'une autruche ; de même qu'ils se tiennent aux aguets, cherchant à savoir s'il se trouve quelque part « D'éléments opposés quelqu'affreux assemblage » ; (et cependant, si on les menait continuellement voir de tels spectacles, ils en concevraient bientôt de la satiété et du dégoût) : de même ceux qui dans les maisons étrangères sont à la recherche de quelques mécomptes, de quelques taches de naissance, de quelques irrégularités, devraient se rappeler que leurs premières découvertes en ce genre ne leur ont jamais procuré ni agrément ni profit.
[11] Le meilleur moyen de détourner cette passion, c'est de la combattre par une accoutumance contraire. En commençant de loin que l'on s'exerce, que l'on apprenne à devenir son maître. Car les progrès du mal croissent avec l'habitude, et prennent peu à peu des développements considérables. Ce que nous savons sur la manière de se réformer ainsi par l'exercice, nous allons l'exposer incidemment. Nous commencerons par les cas les moins compliqués et de moindre importance. Est-il bien difficile de se défendre de lire sur son chemin les épitaphes des tombeaux ? Est-il bien pénible dans ses promenades de détourner sa vue de ce qui est écrit sur les murs ? On se dira que ces écritures n'offrent rien d'utile ou d'agréable. C'est un tel qui consacre une mention laudative à un tel : « Il est le plus dévoué des amis. » La plupart des inscriptions sont aussi insignifiantes que celle-là. Il semble qu'il n'y ait pas d'inconvénient à ces sortes de lectures ; et cependant elles sont nuisibles sans qu'on s'en aperçoive, parce qu'elles nous donnent l'habitude de nous occuper de ce qui ne nous regarde pas. Comme le chasseur ne laisse pas à ses chiens la liberté de se détourner et de suivre toute odeur, mais qu'il les mène en laisse et qu'il les retient, afin de conserver à leur odorat toute sa finesse et toute sa précision pour ce qui est leur affaire propre, c'est-à-dire afin de les attacher avec plus d'ardeur « À suivre avec leur nez la trace de la bête » ; de même, il faut interdire au curieux ces excursions et ces écarts à travers les objets qui frappent ses yeux ainsi que ses oreilles, et l'en distraire pour le ramener aux choses utiles. Car, comme les aigles et les lions replient leurs griffes quand ils marchent, de peur d'en affaiblir la pointe et le tranchant, de même nous devons, considérant ce désir d'apprendre comme un outil vigoureux et de bonne trempe, ne pas le gâter ou l'émousser sur des choses mauvaises et viles.
[12] Vient une seconde recommandation. Habituons-nous, en passant devant une porte étrangère, à ne pas regarder au dedans, à n'y pas faire en quelque sorte main-basse avec l'œil de notre curiosité. Ayons toujours présent à l'esprit ce mot de Xénocrate, qui disait : « Il n'y a pas de différence entre mettre les pieds dans la maison d'autrui et y porter les yeux. » Il n'est ni juste, ni beau, ni même agréable de
se donner un tel spectacle. « L'intérieur, cher hôte, offre un tableau hideux ». Car enfin, que voit-on le plus souvent dans les maisons ? Les ustensiles de ménage épars çà et là, des servantes accroupies, rien de sérieux, rien de satisfaisant. Ces regards jetés ainsi de côté donnent de mauvaises distractions à l'âme, et la détournent honteusement de son but : la coutume n'en vaut rien. Dioxippe, vainqueur aux jeux olympiques, faisait son entrée sur un char ; et comme une femme très belle contemplait le cortège, le triomphateur ne pouvait détacher d'elle sa vue : il la suivait des yeux et se détournait de son côté. Diogène s'en aperçut : « Regardez cet athlète, dit-il, qui se laisse tordre le cou par une femmelette. » Vous verriez de même les curieux tourner le cou à droite et à gauche pour suivre chaque objet qui se présente : tant ils ont pris l'habitude et la manie de porter leurs yeux dans toutes les directions ! Il faut, à mon avis, empêcher que les sens ne se répandent et ne tourbillonnent au dehors, comme feraient de méchantes petites esclaves. Lorsqu'ils sont dirigés par l'âme sur des objets extérieurs, les sens doivent promptement se mettre en communication avec ces objets, en faire leur rapport, et ensuite se tenir sur la réserve, attentifs à ce que leur commandera la raison. Mais, au contraire, il arrive ce que dit Sophocle :
« L'habitant d'Énia n'est plus maître du frein : L'ardent coursier l'entraine... »
Si les sens, comme nous l'avons dit, n'ont pas été bien dressés et sagement exercés, il arrive plus d'une fois qu'ils prennent les devants sur la raison. Ils l'emportent, et la précipitent où elle ne devrait pas aller. Sans doute il est faux de dire que Démocrite s'éteignit volontairement la vue en la fixant sur un miroir ardent, dont la réverbération frappait ses regards : il voulait, dit-on, que ses yeux ne pussent le troubler en appelant sa pensée au dehors, et qu'ils lui permissent, comme fenêtres fermées sur la rue, de vaquer en lui-même aux choses intellectuelles. Mais ce qui est plus vrai que tout ce qu'on pourrait dire, c'est que les sens agissent le moins chez ceux dont l'esprit s'exerce le plus. En effet les temples des Muses se plaçaient très loin des villes, et l'on a donné à la nuit le nom de « Bonne conseillère », (Euphroné), parce qu'on regardait le calme et l'absence de toute distraction comme très propices à la découverte et à la méditation des vérités que cherche l'esprit.
[13] Il n'est pas non plus bien pénible et bien difficile, lorsque deux hommes se querellent dans la place publique et se disent des injures, de ne pas s'approcher d'eux, ou bien de rester assis lorsqu'il se forme quelque part un rassemblement, ou bien encore, si l'on n'y peut tenir, de se lever et de quitter la place. Vous n'aurez rien à gagner si vous vous mêlez aux curieux. Il y aura au contraire grand profit à détourner de force votre curiosité, à la faire disparaître en prenant l'habitude d'obéir à la réflexion. Par suite, et pour se fortifier encore dans cet exercice, il sera bon de passer sans y entrer devant un théâtre d'où partent des applaudissements d'auditeurs, de repousser des amis qui insistent pour qu'on aille voir avec eux un danseur ou un comédien, de ne pas se retourner lorsqu'on entend des cris s'élever du stade ou de l'hippodrome. De même que Socrate recommandait de s'abstenir des aliments qui font manger sans faim et des breuvages qui font boire sans soif, de même nous devons éviter et fuir tout ce qui est de nature à captiver et à séduire, sans qu'il y ait aucune utilité, nos yeux et nos oreilles. Cyrus ne voulut pas voir Panthée ; et comme Araspe lui disait que la beauté de cette princesse méritait d'être vue : « Eh bien, répondit-il, c'est pour cela que je dois m'en défendre encore davantage. Si à ta persuasion je me rendais auprès d'elle, peut-être une autre fois me déterminerait-elle à y aller quand je n'en aurais pas le loisir ; et pour la voir, pour rester à ses côtés, je négligerais des affaires de grande importance. » Semblablement Alexandre ne se présenta pas aux regards de la femme de Darius, que l'on disait être fort belle. Il alla visiter la mère du roi, laquelle était très âgée, et il eut le courage de ne pas voir une jeune princesse pleine d'attraits. Nous, au contraire, jusque dans les litières des femmes nous plongeons les yeux. Nous nous suspendons à leurs fenêtres, et nous ne croyons pas faire mal quand nous ménageons à notre curiosité une pente si rapide et si glissante vers toutes sortes de dangers.
[14] Il est salutaire, pour s'exercer à la justice, de laisser de côté les gains même qui sont légitimes, afin de s'habituer à ne jamais recueillir ceux qui ne le sont pas. Pareillement, pour s'accoutumer à la tempérance il faut s'interdire quelquefois sa propre femme, afin de ne jamais sentir de convoitise pour celle d'autrui. Appliquez cette pratique à la curiosité. Tâchez dans votre propre maison de ne pas tout entendre, de ne pas tout voir. Si l'on veut vous apprendre quelque chose de ce qui s'y passe, remettez les gens à une autre fois ; refusez d'écouter les propos tenus sur votre compte. Œdipe fut plongé dans les plus grands malheurs par la curiosité. Ce fut en cherchant à savoir à quelle contrée étrangère il appartenait, puisqu'il n'était pas de Corinthe, qu'il rencontra Laïus, qu'il le tua, qu'il épousa sa propre
mère en montant avec elle sur le trône. Dans une situation en apparence si fortunée il veut encore savoir qui il est. Malgré l'opposition de la reine il n'en presse que davantage le vieillard qui possède ce secret, le contraignant de force à le lui révéler. À la fin, comme déjà les explications le mettent sur la voie, et que le vieillard s'écrie : « Malheur ! Je vais vous dire un terrible secret », emporté, malgré tout, par sa passion et palpitant d'impatience, Œdipe lui répond : « N'importe, il faut l'entendre. Allons !me voilà prêt ». Tant est à la fois amère, douce et irrésistible cette demangeaison de la curiosité ! Il semble que ce soit un ulcère, que l'on fait saigner à mesure qu'on le frotte. Mais l'homme qui s'est délivré de cette maladie et qui est calme par nature, pourra dire, lorsqu'il aura ignoré une nouvelle fâcheuse : « Heureux oubli des maux, que je te trouve sage ! »
[15] C'est pourquoi il est encore une habitude que vous devez prendre. Quand une lettre vous est apportée, ne mettez point d'empressement et de précipitation à l'ouvrir, comme font presque tous les hommes, qui coupent les attaches avec leurs dents si les mains sont trop lentes. Lorsqu'un messager vient de quelque endroit ne courez pas au-devant de lui, ne vous élancez pas. Lorsqu'un ami vous annonce qu'il a quelque chose de nouveau à vous dire, répondez-lui : « J'aimerais mieux que ce fût quelque chose de profitable et d'utile. » Un jour à Rome je faisais une leçon publique. Rusticus, celui que Domitien fit périr depuis parce que le tyran était jaloux de cette gloire, se trouvait au nombre des auditeurs. Survint un soldat qui, traversant le groupe des personnes présentes, lui remit une lettre de l'empereur. Il se fit un grand silence. Je m'interrompis moi-même, afin que Rusticus prît connaissance de la lettre. Il n'y voulut pas consentir. Il ne l'ouvrit que quand j'eus terminé ma leçon et que la séance fut levée ; ce qui donna lieu à tous d'admirer la gravité du personnage. Mais lorsque nourrissant, même de choses permises sa curiosité, on l'a rendue forte et puissante, il n'est plus facile de maîtriser la fougue avec laquelle, par suite de l'habitude, elle s'élance vers les choses défendues. Dès lors on ouvre, sans en avoir le droit, les lettres de ses amis ; on s'ingère dans les assemblées secrètes ; on s'arrange de manière à devenir spectateur de ce qu'il n'est pas licite de voir ; on pénètre dans des lieux prohibés ; on cherche à être instruit de ce que font et ce que disent les souverains.
[16] Les tyrans doivent, par nécessité, tout connaître. Mais rien pourtant ne les rend plus odieux que cette race de délateurs nommés « oreilles du prince. » Le premier qui eut des espions à son service fut Darius le Jeune. Il se défiait de lui-même ; il soupçonnait, il redoutait tout le monde. Les Denys en introduisirent à Syracuse d'autres, qu'on appelait les Prosagogides. Aussi, quand la révolution éclata ceux-ci furent-ils les premiers que saisirent les Syracusains pour les faire périr sous le bâton. La classe des calomniateurs appartient également à la race des curieux : c'est la même famille. Les calomniateurs cherchent si quelqu'un a médité ou accompli quelque méfait ; les curieux sont à la piste des malheurs, même involontaires, arrivés à leurs voisins, et ils divulguent ces mésaventures. On dit que c'est la curiosité qui a donné naissance au mot Alitère. Il paraît qu'une grande famine s'étant déclarée autrefois dans Athènes, ceux qui avaient du blé ne le déclaraient pas : ils le faisaient moudre chez eux la nuit et en cachette. Les curieux rôdaient à l'entour, épiant le bruit des meules : d'où ils furent surnommés alitères. L'origine du mot sycophante est à peu près la même. L'exportation des figues étant prohibée, ceux qui faisaient connaître les délinquants et qui les dénonçaient furent appelés sycophantes. Que ce soit là pour les curieux un sujet de méditations qui ne seront pas inutiles. Ils rougiront sans doute de faire un métier qui leur donnerait de la ressemblance et de l'affinité avec les hommes les plus méprisés et les plus haïs.
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