L exil des enfants de la guerre d Espagne
187 pages
Français

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L'exil des enfants de la guerre d'Espagne , livre ebook

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187 pages
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Description

Entre 1936 et 1939, la guerre d'Espagne a provoqué l'évacuation forcée de plus de trente mille enfants qui furent accueillis dans d'autres pays. L'auteur, une de ces "ninos de la guerra", nous conte en toute simplicité ses souvenirs de petite fille, son périple durant le début du conflit et son accueil final en Belgique. Dix ans plus tard, elle retrouve avec désenchantement une Espagne qu'elle ne reconnaît plus. Elle joint à son témoignage celui de compagnons de route qui, comme elle, refusent que l'exil qu'ils ont vécu tombe à jamais dans l'oubli.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2005
Nombre de lectures 583
EAN13 9782336256924
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© L’Harmattan, 2005
9782747586856
EAN : 9782747586856
L'exil des enfants de la guerre d'Espagne

Emilia Labajos-Perez
Sommaire
Page de Copyright Page de titre DU MÊME AUTEUR : Dedicace AVANT-PROPOS I - LÀ-BAS, AVANT LA BELGIQUE II - BELGIQUE, DERNIÈRE ÉTAPE ? III - LES ANNÉES DE SILENCE (première partie) IV - LES ANNÉES DE SILENCE (seconde partie) V - TÉMOIGNAGES D’ENFANTS VI - AUTRES DOCUMENTS VII - MAINTENANT, APRÈS FRANCO RÉCITS, MÉMOIRES, TÉMOIGNAGES
DU MÊME AUTEUR :
Les Niños – Histoire d’enfants de la guerre civile espagnole réfugiés en Belgique (1936-1939), Bruxelles, 1993
Los Niños españoles refugiados en Bélgica 1936-1939 (Version espagnole de Victoria Pagadigorria), Namur, 1997
La Casa de los Geranios (version espagnole de Manuel Pedraza Laborda), Bruxelles, 2003
À la mémoire de ma mère qui, courageusement, nous avait arrachées à l’Espagne en guerre pour nous perdre en Belgique.
À mes sœurs Carmen et Manola.
À mon mari, mes enfants et petits-enfants, qui ont découvert cette histoire en même temps que vous.
Un jour, j’ai commencé à écrire mes souvenirs d’enfant réfugiée en Belgique; j’avais fait la promesse, en quittant l’Espagne, de ne rien oublier de ma petite enfance.
Ce journal, qui avait été souvent oublié mais toujours repris, comme ça, par périodes, selon les besoins de l’actualité, j’ai eu parfois l’envie de le détruire.. .
Pour le riche qui veut garder ses privilèges, l’ouvrier doit rester profondément convaincu d’avoir à racheter par son travail, chaque jour, le déshonneur de sa pauvreté.
(Georges BERNANOS)
AVANT-PROPOS
La guerre civile d’Espagne fut pour nous, les enfants victimes de cette folie, un événement suffisamment dramatique pour ne pas le perdre en route. Pardonnez-nous d’être encore là pour vous le rappeler, non pas pour crier vengeance, mais pour que les générations qui nous suivent n’aient pas à revivre pareille situation.
Soixante ans après, de ceux qui mirent le feu à la mèche et n’eurent pas la noblesse de l’éteindre lorsqu’il était encore temps, très peu sont encore en vie, mais la plupart de leurs descendants ne les désavouent pas, nous en avons même rencontré qui en sont fiers; cela porte un nom qui fait peur !

Souviens-toi ! ...
... Que cette guerre fit un million de morts et cinq cent mille exilés et fit basculer le pays tout entier dans une répression cruelle et sauvage qui ne fut jamais condamnée officiellement.

Souviens-toi ! ...
... que cette répression fut un acte politique prémédité qui eut besoin de beaucoup d’acteurs pour la faire fonctionner. Et pourtant, après la mort de Franco, on laissa s’installer l’amnésie. Cependant, malgré cette décision des autorités en place, dans toute l’Espagne des associations se créent, associations des veuves de la République pour, entre autres, faire connaître les charniers où sont enterrés des milliers de suppliciés et leur donner enfin une sépulture décente.
Bien d’autres associations ont vu le jour, par exemple celle des enfants évacués, des orphelins de la République, oubliés dans les pays où ils furent amenés à vivre. Pour nous, il nous a fallu toutes ces années pour apprendre les mots qui nous manquaient pour pouvoir le dire.
Ce livre se veut un recueil de la mémoire, trop longtemps discrète, mais vigilante et tenace. J’ai donné la parole à d’autres témoins qui, comme moi, avaient la volonté de sortir de leur réserve.
Dans cette guerre inutile, il y eut beaucoup de victimes dans les deux camps. Mais la répression qui suivit fut féroce et lâche, lâche de s’attaquer à des êtres désarmés et de n’épargner personne, pas même des enfants.
I
LÀ-BAS, AVANT LA BELGIQUE

Madrid 1936
Ce jour-là, Madrid était en fête, le Front Populaire avait remporté les élections... Les rues étaient pleines de monde ; spontanément, des cortèges s’étaient formés et la foule déferlait vers le centre de la ville par toutes les rues principales. Ils étaient là par milliers, tout ce que Madrid comptait de progressistes... De Carabanchel, le cortège descendait vers la « calle General Ricardos ».
Ma famille suivait le mouvement, mon père, ma mère et mes deux sœurs qui avaient neuf et six ans ; moi, je venais d’en avoir cinq, et c’était pour moi un événement qui resterait gravé dans ma mémoire. J’avais tout le loisir de capter ce qui se passait autour de moi, persuadé qu’était le reste de ma famille que j’étais trop petite pour comprendre. C’était passionnant ! Un jour, je leur dirai à tous que je me souvenais, mais pour l’instant, il fallait tout regarder et ce n’était pas facile : j’étais si petite !... Il semblait se passer à la fois tant de choses et rien de spécial, sinon que la joie se lisait sur tous les visages. Certains dansaient, d’autres chantaient l’Internationale, l’hymne de Riego aussi ; il y avait des groupes d’enfants vêtus de blanc, un mouchoir rouge noué autour du cou. Un jour, j’aimerais défiler comme eux, je le dirais à mon père, plus tard... J’étais si petite encore. Mon père me prit sur ses épaules, comme s’il avait compris ma pensée, mon désir d’en voir plus. Du haut de mon perchoir, je mesurais l’importance du rassemblement ; c’était mon premier bain de foule. Je me sentais forte, j’expérimentais sans bien me rendre compte ce que pouvait être la solidarité collective.

Une foule innombrable et enthousiaste massée sur la Plaza de la Cibeles à Madrid célèbre la victoire du Front populaire aux élections de février 1936
Les jours suivants, le calme revenu, chacun repartit vers ses occupations, les enfants reprirent le chemin de l’école... Sur ce qui suivit, ma mémoire a gardé le souvenir d’une période agitée qui n’avait pas retenu mon attention, ne connaissant pas la gravité de ce qui arriverait, habituée à des situations d’effervescence sans importance, et donnant la priorité à des réalisations dont le côté positif camouflait tout le reste.

Soudain, la nouvelle...
Madrid, le 18 juillet 1936, c’est la grève des garçons de café. Soudain, la nouvelle : la veille, les garnisons du Maroc se sont soulevées contre la République. Ses chefs, quatre généraux : José Sanjurjo, Emilio Mola, Queipo de Llano et Francisco Franco. Francisco, Franco déclare à la radio de Tétouan : « Vous tous qui ressentez le saint amour de l’Espagne, vous tous qui avez juré de la défendre contre ses ennemis jusqu’à perdre la vie, vous tous, la nation vous appelle à sa défense. L’armée a décidé de rétablir l’ordre en Espagne. » Immédiatement, sur le territoire de l’Espagne, 50 garnisons se soulèvent, 50 batailles s’engagent entre les militaires insurgés et les partisans de la République. Par traîtrise, par ruse ou par conviction, tombent aussitôt : Algésiras, Cordoue, Grenade, l’Andalousie, la Navarre, Oviedo et Saragosse. Le Pays Basque, Málaga, Barcelone, Madrid résistent victorieusement et désarment les rebelles. Franco déclare: « L’Espagne est sauvée. » Manuel Azaña proclame : « La République continue. » En fait, la guerre civile commence.

(Frédéric ROSSIF et Madeleine CHAPSAL, Mourir à Madrid , Éditions Seghers, Bibliothèque Marabout Université, Paris, 1963, p. 16)
Le 18 juillet 1936 (j’avais cinq ans et demi), quelques mois seulement après les élections, on parla de guerre, de coup d’État militaire. Je ne comprenais pas le sens de ces mots étranges, nouveaux dans notre vocabulaire. A l’école, l’institutrice nous avait parlé longuement, elle avait essayé de nous faire prendre conscience de la situation, mais les mots semblaient lui manquer. Elle nous dit : « Vous devez être courageux ; nous allons vivre des moments difficiles, des événements graves... » Certains jours, il n’y avait pas classe.
Très vite, Madrid serait bombardée chaque jour et il fallait s’organiser en fonction de ces attaques, fuir vers les abris ; les rues éventrées, les maisons effondrées deviendront un spectacle habituel. Malgré tout, l’espoir est là, il faut tenir. « Ce sera vite réglé disaient les adultes. C’était si bon de les croire.
Mais la réalité é

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