Le Cameroun à l époque des Allemands
304 pages
Français

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Le Cameroun à l'époque des Allemands , livre ebook

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Français

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Description

Si la présence allemande au Cameroun date de 1851, c'est en 1884 que se déclencha véritablement un processus d'exploitation systématique du pays à partir des ambitions de l'Allemagne. L'annexion sur le papier fut suivie par la conquête et l'occupation, et en l'espace de trois décennies, les sociétés du Cameroun vécurent l'intrusion de nouvelles conduites politiques, de nouvelles forces économiques, d'une nouvelle religion et d'une nouvelle langue. Voici un éclairage sur cette période mal connue, tant dans ses méthodes que dans ses résultats.


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Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2014
Nombre de lectures 131
EAN13 9782336356655
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Titre
Albert Pascal Temgoua



Le Cameroun

à l’époque des Allemands


1884-1916
Copyright

© L’Harmattan, 2014
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.harmattan.fr
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

EAN Epub : 978-2-336-70676-4
REMERCIEMENTS
La réalisation de cet ouvrage a nécessité l’aide et la collaboration de plusieurs personnes et structures à l’égard desquelles je me sens redevable.

Je tiens à remercier la Deutscher Akademischer Austauschdienst (Office allemand d’échanges universitaires) qui a entièrement financé mes séjours de recherche en Allemagne.

Mes remerciements vont également à tous les membres de l’Association germano-camerounaise pour la recherche historique qui m’ont largement encouragé et soutenu dans mes recherches. Ils m’ont fait des remarques pertinentes qui m’ont aidé à améliorer la structure et le contenu de cet ouvrage.

J’adresse ma profonde gratitude au Professeur Leonhard Harding de l’Université de Hambourg qui a lu, critiqué et commenté mon premier manuscrit.

Mes sincères remerciements à mes collègues et doctorants du Département d’Histoire de l’Université de Yaoundé 1 pour leurs multiples concours.
INTRODUCTION
Dans le Manifeste du parti communiste de 1848, Karl Marx faisait preuve de génie en montrant que le capitalisme libéral engendrait l’impérialisme et en prédisant trente ans à l’avance la ruée coloniale de la fin du XIX e siècle. Le cas du Cameroun est exemplaire dans cette perspective macro-sociologique, puisque la colonisation ici peut être lue comme la victoire des intérêts commerciaux des firmes de Hambourg et de Brême sur les réticences d’Otto von Bismarck, le « chancelier de fer ». Le développement du capitalisme en Allemagne, et surtout l’importance prise par le commerce et l’industrie imposaient la recherche des marchés et des sources de matières premières dont la possession permettrait le maintien de l’hégémonie allemande en Europe.

La propagande coloniale réalisa en Allemagne un travail immense sans lequel les colonies allemandes n’auraient sans doute jamais vu le jour. L’objectif était d’une part d’éveiller l’intérêt des Allemands pour les questions coloniales en général et pour l’Afrique en particulier, notamment en intégrant le continent noir dans une réflexion globale sur l’économie allemande, et d’autre part de réussir à obtenir du Reich que ce dernier soutienne et encourage les capitaux privés allemands qui, en Afrique, préparaient l’avènement de la colonisation allemande. Ce travail de sensibilisation suscita l’intérêt des explorateurs allemands ; on vit se déferler subitement sur l’Afrique une vague d’explorateurs, entre autres Heinrich Barth (1851), Gustav Nachtigal (1872), Robert Eduard Flegel (1882-1883), qui sillonnèrent le Cameroun.

Mais si la présence allemande au Cameroun date de 1851, c’est en 1884 que se déclencha véritablement un processus d’exploitation systématique du pays à partir des ambitions de l’Allemagne, les ambitions commerciales ayant eu besoin d’un renfort politique pour s’exercer pleinement. L’accroissement du commerce colonial, le mouvement des affaires et la crainte qu’il avait de voir les Anglais prendre le Cameroun, mirent Adolf Woermann, le président de la très active firme Carl Woermann, sur la voie de l’occupation de ce territoire par les Allemands. C’est en utilisant le biais de ses rapports personnels avec le chancelier Bismarck qu’il put l’amener à accepter ses points de vue sur la nécessité de protéger le commerce allemand au Cameroun. Le traité germano-douala du 12 juillet 1884 marqua le début d’une collaboration mettant au premier plan la souveraineté, entre une partie parlant et agissant au nom de certains groupes camerounais, et une autre partie, un groupe d’intérêts opérant pour le compte de l’Allemagne. L’annexion du Cameroun sur le papier fut suivie par la conquête et l’occupation, conformément à la notion d’occupation effective.

Après avoir pris officiellement possession de la côte en juillet 1884, les Allemands se lancèrent dans la course vers le lac Tchad, avec pour objectif de détourner vers la côte le trafic commercial qui se faisait vers l’Afrique du Nord, les États haoussa et le Baguirmi. En butte à l’hostilité des populations locales, les missions dépêchées dans cette direction (Eugen Zintgraff, Kurt von Morgen, Maximiliam von Stetten, Edgard von Uechtritz et Siegfried Passarge) se retirèrent sans avoir atteint leur objectif. Les Allemands procédèrent alors à une concentration des moyens militaires, et la conquête qui s’ensuivit fut spectaculaire et sanglante. Elle rencontra de la part des populations locales une résistance décidée et souvent lente à réduire. La résistance sous forme de guerre ouverte eut lieu essentiellement dans les villages qui jouissaient d’une vieille tradition guerrière. Le tempérament fougueux de leurs guerriers les poussa au-devant des expéditions allemandes. Les affrontements qui en résultèrent furent par conséquent les plus téméraires, les plus longs, mais aussi les plus ruineux.

Après la conquête, les autorités coloniales allemandes démantelèrent tout l’appareil militaire des sociétés camerounaises et enlevèrent aux chefs investis du pouvoir traditionnel toute possibilité de disposer des anciens moyens de contrainte. En conséquence, à partir du moment où ces chefs, autrefois indépendants, se virent privés de tout droit de disposer d’une force militaire, leurs pouvoirs vis-à-vis de leurs populations furent gravement compromis, particulièrement dans les lamidats peuls de l’Adamaoua et les chefferies bamiléké où, avant l’occupation allemande, il était difficile de dissocier de la notion d’autorité l’idée de force et de protection, et où le chef n’était considéré qu’en fonction de sa valeur guerrière ou de ses capacités d’arbitrage. Mais la privation des moyens traditionnels de contrainte n’atteignit pas seulement le prestige ou la position des anciens chefs ; elle mit également en cause à la fois le fondement de leur légitimité et tout l’ensemble du système qui la conditionnait. La réorganisation territoriale entraîna de profondes modifications dans leur statut. Ceux qui avaient jadis autorité sur un territoire considérable virent leurs pouvoirs réduits au ressort d’une petite unité administrative. La paix germanique détermina un ensemble de transformations qui favorisèrent l’introduction d’habitudes et de valeurs nouvelles. Celles-ci eurent à leur tour des répercussions indirectes sur l’efficacité de l’autorité coutumière, de même que certains changements socioculturels.

En détruisant par les armes les forces vives des populations locales, les militaires allemands tarirent dans ses sources une main-d’œuvre précieuse, une main-d’œuvre indispensable au développement des vastes territoires s’étendant de la côte au lac Tchad. Pendant toute la durée de l’occupation allemande, le besoin en main-d’œuvre sera toujours un gros problème. Depuis les débuts, alors que le protectorat se réduisait encore aux régions côtières, jusqu’en 1914 où le pouvoir colonial contrôlait également l’intérieur, il y avait toujours pénurie de main-d’œuvre. À cette date, l’expansion du commerce et des plantations avait entraîné une hausse très forte de la demande de main-d’œuvre qui dépassa les réserves apparemment disponibles dans le territoire. Les Camerounais participèrent à cette transformation à la fois comme porteurs de marchandises, comme travailleurs dans les plantations, les chantiers forestiers et les chantiers de construction de routes, et comme employés subalternes de l’administration.

Plus que les autres ressources naturelles, la faune et la flore constituèrent un enjeu majeur de la présence allemande au Cameroun. Avec ses immenses superficies de forêt primaire, le Cameroun était considéré comme la plus importante possession pour les activités forestières allemandes, et les actions entreprises en matière faunique et ligneuse étaient davantage guidées par le désir d’extraire le maximum de ressources possibles au profit de la métropole. En d’autres termes, ces actions étaient beaucoup plus un outil de domination coloniale que de conservation ou de préservation de la nature tropicale. Dans ce travail de transformation du colonisé et de son système économique, le chef traditionnel était considéré comme un élément de pression directe qui devait amener la population à s’adapter à l’économie de marché et à ses exigences.

Les Camerounais furent en outre très étroitement associés au travail des missions. Il faut bien le dire, le revirement du chancelier Bismarck &

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