Ce livre ne traite ni de grandes théories guerrières, ni de mouvements de troupes, ni de stratégies militaires maintes fois évoquées dans le passé. Simplement, il nous fait vivre aux côtés des PCDF, « Pauvres couillons du front » ! Au fil des pages, nous suivons les Poilus, blancs ou noirs, dans leurs tranchées, pendant leurs permissions, en patrouille, ou même devant un mutiné condamné à être fusillé. Que ce soit sur terre, dans les airs ou sur l’océan, nous côtoyons des héros anonymes, trop souvent victimes, hélas, de la folie des hommes. Daniel Appriou est expert judiciaire près la cour d’appel de Rennes. Après avoir écrit dans la presse régionale bretonne de nombreux articles sur la vie en Angleterre, il commença une série de livres d’histoire, tout d’abord locale, intervenant de 1992 à 1998 sur Radio Bretagne Ouest pour une série d’émissions évoquant les Bretons et Bretonnes célèbres. Puis il contribua à divers quotidiens et revues. Il a également publié une série de quatre tomes sur les châteaux et manoirs en baie de Morlaix, suivis d’une évocation historique du château du Taureau avec Marie-Claude Appriou. Il a aussi publié de nombreux ouvrages de référence expliquant les expressions historiques de la langue française, les grands événements qui ont fait l’Histoire, les surnoms historiques, et bien d’autres.
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Extrait
1. La guerre dans l’Histoire
Des repères pour tous
Même en période de paix, les guerres servent à situer dans le temps un événement passé ; nous dïrons vooners :»avant a guerre « C’étaït ou»a guerre « Pendant . Cependant, vu e nombre de conlïts, ï est devenu ïndïspensabe d’apporter queques précïsïons. En France, nous parerons de « a guerre de 70 », de a « Grande Guerre », de « a seconde guerre mondïae », de cee d’Indochïne ou d’Agérïe.
Les différents types de guerre
Même si les conflits ont tous en commun les pertes en vies humaines, les destructions, ravages et autres fléaux, les raisons qui ont été à la source des confrontations ne sont pas toutes identiques. En sïmpïfïant à ’extrême, nous parerons de guerres défensïves orsque e pays se trouve vïctïme d’agressïon. Dans ce cas, s’ï est permïs de porter un jugement, a guerre devïent un moyen de survïe et donc sembe justïfïée. A ’opposé, ï est des guerres de conquêtes où un pays agresse un autre pays, pour des raisons très variées, tentation d’hégémonie, raisons politiques, économiques, reli-gïeuses, ïdéoogïques, ethnïques, hïstorïques, désïr de vengeance… C’est maheureuse-ment ce dont l’Histoire fut le plus souvent témoin. Louis XIV, Louis XV, Napoléon et Hitler n’en sont que quelques exemples tragiques. Les guerres de Reïgïon quï, sï ees ont ravagé par e passé notre pays et bïen d’autres, ne sévissent plus en Occident. Cependant, de nombreuses régions du monde subissent encore, de nos jours, des attentats ou bataïes rangées quï ont pour orïgïne des désac-cords religieux. Sï ’on peut parer de degré pour quaïfïer ’horreur d’une guerre, a pïre sembe être a guerre civile. Celle qui a surtout marqué les Français demeure la guerre civile espagnole à cause de sa proximité géographique et de son caractère récent. I exïste égaement ce qu’ï est convenu d’appeer es guerres coonïaes, orsqu’un pays occupé par une autre puïssance désïre secouer e joug pour accéder à son ïndé-pendance. Cee quï marqua e pus profondément a France fut a guerre d’Agérïe que, d’ailleurs, les autorités n’appelaient pas ainsi puisque, pendant toute la durée du conflit, il n’y était fait allusion que sous les termes d’« événements d’Agérïe ».
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Une« bonne guerre »
Combien de fois n’avons-nous pas entendu ces mots dans la bouche de personnes aigries et parlant inconsidérément :« Ce qu’ï eur faudraït, c’est une bonne guerre. Aors à, ïs comprendraïent ! » L’assocïatïon de cet adjectïf avec e mot « guerre » est des pus surprenantes. Une guerre peut-elle être bonne si l’on met en balance les souffrances directes des victimes et cees, ïndïrectes, des famïes de ces dernïères ? En faït, ï n’y a pas de bonne guerre ; seules existent de bonnes raisons pour la faire, c’est du moins ce que pensent ceux qui la décident.
« Une bonne guerre, une mauvaïse païx, ça n’exïste pas. »(B. Franklin)
Quatre dénominations originales plus ou moins récentes
La guerre sainte I s’agït ïcï de guerres de Reïgïon dont font partïe es croïsades au Moyen Age orsque es chrétïens vouurent reprendre Jérusaem. Pus tard, a utte contre es cathares peut également être qualifiée de guerre sainte. Pus près de nous, e djïhad peut aussï se défïnïr comme une « guerre » de ’ïsam contre les non-musulmans.
La drôle de guerre Guerre étrange que connut l’armée française dans les derniers mois de 1939. La France étaït offïcïeement en guerre contre ’Aemagne depuïs près de quatre moïs (3 septembre, 17 heures), et les troupes françaises et anglaises, soit 129 divisions, étaient prêtes. Sï ce n’est queques échauffourées très ïmïtées en temps et en ïeu, e front étaït calme, les soldats attendaient des ordres que les généraux Gamelin et Georges ne don-nèrent pas. Cette ïnactïvïté, quï sembe rappeer une guerre de posïtïons, surprït pus d’un offïcïer comme celui qui déclara à un correspondant de guerre :« C’est quand même une drôe 1 de guerre! » Pendant que ’ennemï s’actïvaït de ’autre côté de a frontïère, a France, confïante en la ligne Maginot, était prête à affronter ce qui ne devait être qu’un mauvais orage. Lorsque es Aemands percèrent e front à Sedan, es dïvïsïons bïndées de Guderïan et les troupes de von Kleist, malgré les communiqués optimistes de la presse française,
1. On avance égaement que cee expressïon seraït due à une traducon erronée d’un terme angaïs uïséen langage familier,« phoneywar »: fausse guerre.
culbutèrent les divisions du général Corap mal équipées pour arrêter une telle vague d’invasion. Les armes une foïs tues, ’armïstïce sïgné, aaït aors commencer « une drôe de païx ».
La guerre froide Aïés contre ’Aemagne pendant a seconde guerre mondïae, es Etats-Unïs et ’URSS ne purent s’entendre après la victoire, chaque pays voulant imposer son influence sur une partïe de ’Europe. Dès ors, ï y eut deux bocs, ceuï de ’Ouest et ceuï de ’Est sym-boïsés par a créatïon de ’OTAN et du pacte de Varsovïe. Le mot « guerre » faït ïcï essentïeement référence à des confïts dïpomatïques et politiques. Symbolisé par la construction du mur de Berlin et les bases soviétiques ins-tallées à Cuba, ce conflit entre deux parties du monde n’a cependant pas causé de vic-times directes comme lors de luttes armées sur un champ de bataille. Il n’en demeure pas moins que cette tension permanente eut des conséquences économiques pour des millions de personnes dans le monde.
La guerre des étoiles Non content de se battre sur terre, sur mer et dans les airs, l’homme trouva un autre théâtre d’affrontement : l’espace. Ce que l’on a appelé la guerre des étoiles (du nom d’un film de science-fiction) date de 1983 lorsque Ronald Reagan, président des Etats-Unis, proposa de mettre en œuvre un programme de destruction des missiles sovié-tiques qui menaçaient la sécurité américaine. Il espérait que cette menace dissuaderait les Soviétiques et préserverait ainsi une paix souvent fragilisée.
La réalité de la guerre
La première guerre mondiale I y eut 9 mïïons de morts soït pus de 6 000 morts par jour pendant quatre ans ! Même si ces chiffres ne sont que très approximatifs, ils donnent une idée du désastre. Voïcï un aperçu du nombre des mobïïsés et des pertes subïes :
1 700 000 morts 1 900 000 morts 1 200 000 morts 1 390 000 morts dont 27 % de moïns de 28 ans 776 000 morts 500 000 morts 115 000 morts 350 000 morts
Près de 20 nations participèrent au conflit, mobilisant environ 70 millions d’êtres humains et en perdant près de 9 millions.
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La seconde guerre mondiale La seconde guerre mondiale fut encore pire que la première. Il y eut 55 millions de morts, 35 millions de blessés et 3 millions de disparus. Si on se livre au même calcul que pour la première guerre mondiale, calcul forcément inexact mais ô combien suggestif, nous arrïvons à un chïffre de pus de 30 000 morts par jour pendant toute a durée du confït ! Pour a premïère foïs dans ’hïstoïre de ’humanïté, es cïvïs payèrent un trïbut exceptïonneement éevé. De 20 à 30 mïïons d’entre eux pérïrent pendant ces années de conflit. Voïcï un aperçu du nombre des mobïïsés et des pertes subïes :
Russiemïïons de morts dont 700 000 cïvïsmïïons 18 22 Allemagnemïïons 4,2 mïïons de morts dont 780 000 cïvïs 17 Etats-Unismïïons 298 000 morts 14 Empire britannique12 mïïons 466 000 morts dont 12 000 cïvïs France000 morts dont 350 000 cïvïs 563 Près de 6 mïïons de juïfs pérïrent pendant ces années de guerre.
Jugements sur la guerre
« Depuïs sïx mïe ans a guerre Plaît aux peuples querelleurs Et Dïeu perd son temps à faïre Les étoïes et es feurs. » (Victor Hugo,Les Chansons des rues et des bois)
« Sï tous es roïs de a terre pouvaïent contemper un te spectace, ïs seraïent moïns avïdes de guerres et de conquêtes. »(Napoléon, 1807)
Au endemaïn de sa vïctoïre sur es Russes (8 févrïer 1807), e champ de bataïe d’Eyau étaït couvert de cadavres. Eyau fut ’un des pus grands carnages de notre Hïstoïre ; dans des condïtïons cïmatïques terrïfïantes, es 55 000 hommes de a Grande Armée défïrent es 72 000 Russes du généra Bennïgsen.
« J’aï ’horreur éternee de a guerre. »(Hitler)
Cette phrase fut prononcée par Hitler le 9 septembre 1933 alors que, étant chancelier depuis seulement quelques mois, il venait de se voir confier les pleins pouvoirs pour quatre ans par les députés du Reichstag.
« Maheur aux vaïncus. »(« Vae vïctïs ») (Brennus)
En 390 av. J.-C., e généra gauoïs Brennus bat es Romaïns sur a rïvïère Aïa. Poursuïvant sa progressïon, Brennus marche sur Rome où ï pénètre sans opposïtïon, a popuatïon ayant fui devant l’envahisseur. La seule résistance qu’il rencontre est celle des défen-seurs du Capitole qui soutiennent un siège de sept mois. Brennus, après avoir pillé et brûé a vïe, accepte d’évacuer Rome contre une rançon de 1 000 ïvres d’or, soït envïron 326 kïos. Au moment de s’acquïtter de ce traïté, e représentant des Romaïns accusa Brennus de fausser la pesée de l’or en utilisant des faux poids. Fou de rage (peut-être parce que a tromperïe étaït découverte), e chef gauoïs ajouta dans a baance son glaive et son baudrier en s’écriant :« Maheur aux vaïncus ! »
« Je n’aï rïen d’autre à vous proposer que du sang, du travaï, des armes et de a sueur. »(Wïnston Churchï, 1874-1965)
Le Premier ministre britannique faisait malheureusement preuve de clairvoyance le 13 mai 1940, lorsqu’il prononça ces mots terribles devant la Chambre des communes. Troïs jours pus tôt, ’Aemagne avaït décenché ’une des pus gïgantesques tragédïes de l’Histoire. Hïter avaït promïs ’apocaypse aux Angaïs et ï tïnt sa promesse en envoyant a Luftwaffe. Au moïs de juïet, a RAF dut effectuer pus de 600 sortïes par jour et, entre e 10 juïet et e 10 août, ee perdït 96 appareïs maïs avaït abattu 217 avïons ennemïs. Le 7 septembre 1940, 300 bombardïers et 600 chasseurs parvïnrent à ancer eurs bombes explosives et incendiaires sur l’est de la ville qui s’embrasa. Les Londoniens découvraient l’horreur du Blitz.
« Puïsqu’ï faut faïre a guerre, je préfère a faïre à mes ennemïs putôt qu’à mes enfants. »(Louis XIV)
Citations
« Quand es rïches font a guerre, ce sont es pauvres quï trïnquent. »(Jean-Pau Sartre)
« Heureux ceux quï sont morts dans une juste guerre. »(Charles Péguy)
« La guerre ! C’est une chose trop grave pour a confïer à des mïïtaïres. » (Georges Clemenceau)
« Dans a païx, es fïs enseveïssent eurs pères ; dans a guerre, es pères enseveïssent eurs fïs. »(Hérodote)
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L’archiduc François-Ferdinand et son épouse, la duchesse de Hohenberg.
2. « Et l’on n’y croyait pas… »
Le coup de feu qui fit plus de 8 millions de morts
Sarajevo, 28 juïn 1914. L’archïduc Françoïs-Ferdïnand, archïduc d’Autrïche, prétendant au trône, héritier de l’Empire austro-hongrois, venait d’être visé par un attentat mais s’en étaït sortï ïndemne. Ce jour-à, vouant aer rendre vïsïte aux bessés, son cortège boqué dans a foue, ï est atteïnt d’un coup de feu tïré à moïns de 4 mètres par un jeune nationaliste serbe du nom de Gavrilo Princip. L’épouse de l’archiduc est touchée à l’abdo-men et François-Ferdinand au cou. Tous deux décèdent dans les minutes qui suivent.
L’Autrïche-Hongrïe accusa ïmmédïatement a Serbïe d’être responsabe de cet assassïnat et lui lança un ultimatum. La Russie, alliée de la Serbie, considéra cet ultimatum comme inacceptable. Un mois après l’attentat, la mobilisation générale fut décrétée en Serbie. Le premier pas vers la catastrophe venait d’être franchi. En effet, depuïs ongtemps, un système d’aïances ïaït dïvers pays entre eux. L’Aemagne, quï vouaït annexer ’Asace et a Lorraïne, aïée de ’Autrïche, aaït former a Trïpe-Aïance avec ’Autrïche-Hongrïe et ’Itaïe. Face à ces pays se formaït a Trïpe-Entente entre la France, la Grande-Bretagne et la Russie.
L’état politique de l’Europe en 1914
En cette année, l’Europe était composée de 21 Etats qui, selon leur régime politique, se répartissaient de la façon suivante : – les Etats monarchiques: Norvège, Suède, Danemark, Royaume-Unï, Pays-Bas, Empïre aemand, Begïque, Luxembourg, Autrïche-Hongrïe, Roumanïe, Serbïe, Bugarïe, Monténégro, Itaïe, Abanïe, Empire Ottoman, Grèce, Espagne. – les Républiques: France, Suisse, Portugal.
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Le 20 juïet, Tïsza, ancïen Premïer mïnïstre hongroïs, tenta bïen d’empêcher une attaque de ’Autrïche contre a Serbïe en décarant à ’empereur qu’une tee décïsïon aaït agïr comme une tranée de poudre ; ’ïnterventïon ïnévïtabe de a Russïe mettraït e feu à ’Europe entïère. I ne fut pas écouté et, vïngt jours pus tard, ’Autrïche décaraït a guerre à la Serbie. Tous pensaïent que e conlït seraït de courte durée. Cependant, e généra françaïs Lyautey, pus ucïde, dans un soupïr, conia :« Is sont fous ! Une guerre entre Européens c’est une guerre cïvïe, a pus monumentae ânerïe que e monde n’aït jamaïs faïte. » I avaït maheureusement raïson. La suïte se déroua comme prévu ; par e jeu des diverses alliances entre nations, une quinzaine de pays allaient participer à celle que ’on n’appeaït pas encore a « premïère guerre mondïae ». Ee aaït faïre 8 mïïons de victimes et porterait en son sein la graine qui, quelques années plus tard, allait germer et décencher a « seconde guerre mondïae ». Cette dernïère feraït pus de 50 mïïons de morts.
« Ils ont tué Jaurès »
I faït chaud à Parïs ce 31 juïet 1914. Rue Montmartre, es Parïsïens déambuent avec cannes et chapeaux de païe ; dans es cafés, es hommes boïvent de a bïère et de’absïnthe maïs e cœur n’y est pas ; es nouvees ne sont pas bonnes ; a presse françaïse a des tïtres aarmïstes : « Aons-nous vers a guerre ? », « Encore ces Aemands ! », « On pare de mobïïsatïon chez es Russes », « L’Autrïche s’apprête à mobïïser » et, queques jours pus tard, « L’Autrïche décare a guerre à a Serbïe », « L’Aemagne sou-tïent ’Autrïche », « Une tranée de poudre des Bakans jusqu’à Parïs »… Au café du Croïssant, es serveurs n’ont nï e temps de réféchïr à a menace nï d’écou-ter les commentaires des clients, ils se faufilent entre les tables avec leurs plateaux en équïïbre. Pour eux, es affaïres marchent bïen, e Croïssant, comme tous es jours vers 21 heures, est plein. – Bonsoïr, monsïeur Jaurès. Le petït homme moustachu et barbu répond à peïne au saut. I est soucïeux et se dirige vers le fond de la salle. Trois tables sont mises bout à bout, et il s’assied lourde-ment sur la banquette dos au rideau que l’on a tiré devant la fenêtre entrouverte pour séparer es consommateurs des gens de a rue. Avec Jaurès, ï y a messïeurs Renaude et Longuet, députés, Weï, député protestataïre au Reïchstag, Landrïeux, Dubreuï, Dumoïs, monsïeur et madame Poïsson. – I faut manger vïte et retourner au journa, on ne peut pas attendre. Longuet ït eDaïy Cïtïzen ouvert sur la table et traduit les dernières nouvelles d’Angeterre. – Que va faïre Asquïth ? – Il fera une déclaration lundi, traduit Longuet.
Jean Jaurès utte contre a venue de a guerre et se bat contre la loi des trois ans de service militaire. La loi est votée en 1913 malgré le rassemblement du Pré-Saint-Gervais le 25 mai 1913, où Jaurès faït un dïscours devant 150 000 personnes.
– Lundi seulement, le temps presse pourtant, sou-pïre Jaurès en sortant de ses poches des coupures de journaux et des notes qu’ï étae devant uï, entre les couverts. Déjà, ï n’écoute pus es conversaons de ses amïs. Son arce de demaïn dansL’Humanité, il faut vïte ’écrïre et e transmere au journa. Jaurès saït mieux que quiconque, en ce lieu, sur quelle pou-drière le pays va s’endormir, pourtant il ne peut pas y croïre. A a Chambre, ï vïent d’apprendre que’Aemagne a déjà boucé certaïnes de ses fron-ères. Demaïn, a Hoande et a Suïsse feront de même. Les hommes sont devenus fous. L’Europe est prïse de verges.
« Ça n’est pas possïbe », dit-il pour lui-même. Soudaïn, Bertre, secrétaïre de rédacon deL’Humanitévïent de es rejoïndre, quï remarque une personne debout derrïère e rïdeau, quï a été ré. L’homme est ïmmobïe et regarde vers leurs tables. – Maïs ï n’y a vraïment pas d’autre pace où s’ïnstaer ? s’étonne-t-ï. – Non, répond Renaudel, lorsque nous sommes arrivés, toutes les autres tables étaient déjà occupées. Pendant ce temps, Jaurès contïnue à trïer ses papïers et à prendre des notes. – Voilà Marius, dit-il en levant les yeux. Marïus Vïpe vïent d’entrer dans e restaurant et s’approche de eurs tabes. I apporte les dernières nouvelles. – Ecoutez ce qu’Asquïth a décaré aux Communes :venons d’apprendre, non« Nous de Saïnt-Pétersbourg maïs d’Aemagne que a Russïe a procamé a mobïïsatïon géné-rale de son armée et de sa flotte et, qu’en conséquence, la loi martiale a été procla-mée en Aemagne. Nous croyons savoïr que cecï sïgnïfïe que a mobïïsatïon suïvra en Aemagne sï a mobïïsatïon russe est générae… » – Décïdément, ça ne s’arrange pas. Autour de Jaurès, tout e monde se taït ; ce qu’ïs craïgnent est sur e poïnt de se produire. – Cette foïs, a guerre est ïnévïtabe ! Sauf… peut-être Wïson, s’ï ïntervenaït… es Amérïcaïns pourraïent encore empêcher cea…
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2. « Et l’on n’y croyait pas… »
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– I faut y aer. On se retrouve au journa. Près de eurs tabes, des amïs, journaïstes auBonnet rouge, commentent, eux aussi, es événements. Un peu à part, René Doïe, un amï de Landrïeux, regarde une photo. – Tiens, dit-il, tu as vu ma petite fille. – Montre-a-moï, dït Jaurès en tendant e bras et en se penchant en avant. A ce moment précïs, e rïdeau quï se trouve derrïère uï s’écarte ; un bras armé d’un revover jaïït, ï y a une ueur jaune et un bruït terrïfïant quï écate dans e restau-rant. Un homme agenouillé sur le rebord de la fenêtre demeurée entrouverte fait feu à bout portant par troïs foïs. Dans ’ïnstant quï suït, une sorte de panïque s’empare des témoïns quï se jettent au so dans un fracas de verre brïsé et de tabes renversées.Des crïs couvrent bïentôt e bruït de a bouscuade : – Is ont tué Jaurès ! Le corps atteïnt de deux baes s’affaïsse entement. Renaude, quï a aperçu une sï-houette s’enfuir dans la rue, bondit par-dessus une table, prend une lourde bouteille siphon, rattrape le fuyard et l’assomme. Déjà, a rue se rempït de curïeux, des dïzaïnes d’hommes en canoers répètent a terrible phrase :« Is ont tué Jaurès ! » « Is »? La poïce se saïsït bïentôt du meurtrïer! Quï donc a pu rer sur e député assommé par Renaude tandïs que e corps de a vïcme est aongé sur des tabes. – I faut appeer un médecïn… – C’est faït, ï arrïve ! Pendant tout ce temps, Renaude tente, avec une servïette, d’arrêter e sang quï s’écoule au bas du crâne. – Voïà e médecïn ! Après avoïr ouvert a chemïse de Jaurès, ce dernïer pose son oreïe sur a poïtrïne du malheureux pendant une longue minute. Tous, dans la salle, retiennent leur souffle lorsqu’il se relève : – Monsïeur Jaurès est mort.
L’homme que la police vient d’arrêter s’appelle Raoul Villain. L’enquête révèle bien vite qu’ï est né en 1885 à Reïms où son père est greîer. I étudïaït ’égyptoogïe au Louvre et, après son service militaire en 1910, il s’était installé à Rethel comme régisseur agri-coe. Inluencé par ses amïs de ’assocïaon Asace-Lorraïne, ï racontaït à quï vouaït l’entendre :« I faut une guerre pour reprendre auKaiser les territoires qu’il nous a voés. A mortHerrJaurès ! Ce âche, ce tratre à son pays… A nous, a revanche… »
Le endemaïn de ’assassïnat, Vïvïanï, présïdent du Conseï depuïs juïn, faït apposer sur es murs de a capïtae ’aîche suïvante :« Cïtoyens, un abomïnabe attentat vïent d’être commïs. Monsïeur Jaurès, e grand orateur quï ïustraït a trïbune françaïse, a été âche-ment assassïné. Je me découvre personneement et au nom de mes coègues devant la tombe si tôt ouverte du républicain socialiste qui a lutté pour de si nobles causes et quï, en ces jours dïffïcïes, a, dans ’ïntérêt de a païx, soutenu de son autorïté ’actïon