Le Poids des langues
325 pages
Français

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Le Poids des langues , livre ebook

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Description

"Ca pèse combien une langue ?" C'est à cette question qu'ont tenté de répondre les participants au colloque Le poids des langues qui s'est tenu à l'Université de Provence en septembre 2007. Cette métaphore, dont la pertinence a fait l'objet d'un regard critique, a motivé des réflexions relatives à ce que pourrait être le "poids" des langues. Quels critères faut-il prendre en compte ? Quels sont les facteurs déterminants qui confèrent à une langue un certain "poids" au niveau local ou international ? Quels effets ce "poids" peut-il exercer sur les rapports mutuels entre les langues ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2009
Nombre de lectures 209
EAN13 9782336261638
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1250€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© L’Harmattan, 2009
5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
9782296073678
EAN : 9782296073678
Le Poids des langues

Cécile Petitjean
Sommaire
Page de Copyright Page de titre PREFACE INTRODUCTION - LA METAPHORE DU POIDS DES LANGUES ET SES ENJEUX PARTIE I - CRITERES DEFINITOIRES DU « POIDS » DES LANGUES
CHAPITRE I - LA METAPHORE DU POIDS EST-ELLE PERTINENTE POUR TRAITER DE LA LANGUE ? Chapitre II - LE POIDS DES LANGUES VERS UN « INDEX DES LANGUES DU MONDE » CHAPITRE III - GRAVITE ET RELATIVITE DU PESAGE DES LANGUES : AVANTAGE, INCONVENIENTS ET LIMITES D’UNE METAPHORE CHAPITRE IV - POIDS, IMPORTANCE ET DEFINITION DES LANGUES CHAPITRE V - HERMENEUTIQUE DU PESAGE DES LANGUES
PARTIE II - LES EFFETS DU « POIDS » DES LANGUES
CHAPITRE I - POIDS DES LANGUES : DE LA METAPHORE AU PARAMETRAGE LE CAS DE L‘AMAZIGHE CHAPITRE II - L’ARABE : LE POIDS DU PASSE PLOMBE-T-IL LES ESPOIRS DE L’AVENIR ? CHAPITRE III - LA PARTICIPATION DES MIGRANTS A LA CONFIGURATION DES PLURILINGUISMES REGIONAUX CHAPITRE IV - LE « POIDS » DES VARIETES A L’INTERIEUR DE L’ALLEMAND: LE CAS DE LA COMMUNAUTE LINGUISTIQUE DE BERLIN CHAPITRE V - « POIDS » DES LANGUES OU « POIDS » DES IMAGINAIRES DES LANGUES ? SUR TROIS SITUATIONS DE NORMALISATION D’UNE LANGUE MINOREE CHAPITRE VI - RAPPORTS DE DOMINATION LINGUISTIQUE ET ACTIONS SOCIALES : ANALYSE DE QUELQUES INTERACTIONS VERBALES EN MILIEU CREOLOPHONE
PARTIE III - LE « POIDS » DES LANGUES : APPLICATIONS ET PERSPECTIVES
CHAPITRE I - LE POIDS DE LA LANGUE FRANÇAISE, ENTRE SENTIMENT DE MENACE ET DYNAMIQUES LANGAGIERES CHAPITRE II - LE POIDS DE LA LANGUE PREMIERE DANS L’APPROPRIATION DES LANGUES SECONDES EN MILIEU NATUREL CHAPITRE III - LE POIDS DES LANGUES QUI N’ONT PAS DE POIDS L’EXEMPLE FRANÇAIS DES LANGUES REGIONALES CHAPITRE IV - LE « POIDS » DES LANGUES SUR INTERNET. LA REVANCHE DES « POIDS PLUME » ?
Espaces Discursifs
PREFACE 1
Le poids des langues... L’expression renvoie irrésistiblement à l’univers des « poids et mesures ». Mais comment « pèse »-t-on une langue ? Comment « mesure »-ton une langue ? Comment évalue-t-on la place qu’elle occupe dans l’espace (son extension géographique) ou dans le temps (comment évolue-t-elle dans l’histoire, de quand peut-on dater son apparition, situer dans la durée le moment de sa disparition éventuelle, etc.) ? Ce qui dans les deux cas nous renvoie à des pratiques langagières, aux conditions dans lesquelles une langue est employée dans une société ou sur un territoire, à ses usages (constants, épisodiques ou circonstanciels...) et en dernière instance, à l’attrait qu’elle exerce ou qu’elle n’exerce pas (ou plus), c’est-à-dire à l’intensité de son rayonnement. On voit bien que la question du poids des langues ne saurait s’épuiser dans le dénombrement statistique de locuteurs répartis sur des territoires, car ce qu’il faudrait pouvoir « apprécier », au sens fort du terme (quantitativement et qualitativement), en fait, ce sont des situations d’interlocution et leur importance relative, en les comparant — et pas seulement en nombre, mais en « qualité » — d’une langue à l’autre ; et c’est là que les difficultés commencent. Car quelle serait l’unité de mesure ?

Sans en trahir la direction d’intention, je voudrais profiter de ce colloque pour risquer une hypothèse en vous proposant une approche un peu différente. Non pas une « toise » pour étalonner une extension, non pas un boulier ou une machine à calculer pour compter des individus, non pas un calendrier pour retracer une histoire, ni même une balance pour évaluer un poids (fût-elle, comme le propose Louis-Jean Calvet, composée de plusieurs éléments), mais ce que j’appellerais volontiers un « indicateur de rayonnement ».

L’hypothèse est la suivante. Une langue n’existe pas isolément ; ce n’est pas un composé chimiquement pur, et ce qui fait le grand intérêt de la démarche que vous avez entreprise, cher Louis-Jean Calvet, c’est que vous vous proposez de mesurer l’importance relative des langues. A très juste titre ! Un exemple : si on le considère isolément, en chiffres absolus, le français progresse ; si on le considère par rapport à d’autres langues, en chiffres relatifs, le français recule. Une langue existe toujours en relation avec d’autres langues, avec lesquelles elle entretient des rapports de force assez complexes ; et s’il est arrivé en effet, dans l’histoire de l’humanité, que des langues aient pu se développer en vase clos, à l’abri d’influences extérieures (au risque d’ailleurs de dépérir en même temps que les cultures qu’elles ont exprimées), la plupart des langues se sont construites et continuent de se construire dans un dialogue avec d’autres langues : elles se métamorphosent en permanence les unes par les autres, et ce dialogue (dont il faudrait — ce n’est pas le lieu ici — étudier précisément les figures) est sans doute le facteur le plus actif de leur évolution. Comment ne pas penser à Rémy de Gourmont : « une langue est toujours pure », écrivait-il, « quand elle s’est développée à l’abri des influences extérieures ». Mais toutes les langues sont impures, car elles ne se développent jamais à l’abri d’influences extérieures, ou alors elles se fanent et meurent.

Mais s’il en est ainsi, ce constat emporte deux conséquences, qui intéressent l’une la constitution des sciences du langage (la linguistique, la sociolinguistique, l’histoire des langues, etc.), l’autre la mise en œuvre d’une politique de la langue. La première, c’est qu’une langue — cet objet complexe qu’on appelle une langue, cet ensemble de compétences actives (parler, écrire) ou réceptives (comprendre, lire) correspondant à un système de communications qui a son lexique, sa morphologie, sa syntaxe... — ne saurait être appréhendée en tant que telle, isolément : il faut toujours la mettre en rapport avec d’autres langues, dont elle se nourrit et qu’elle influence à son tour. La seconde, c’est qu’une politique de la langue ne peut être qu’une politique des langues, ou plus exactement une politique de relations entre les langues. Le seul objectif qu’elle puisse raisonnablement s’assigner est d’organiser leur coexistence, et c’est à la lumière de cet objectif qu’il faut considérer leur transmission, leur apprentissage, leur répartition fonctionnelle, leur usage, leur statut dans la société, leur distribution éventuelle sur une échelle de valeurs. Le défi que nous avons à relever en Europe, notamment, c’est d’avoir à penser et à organiser la coexistence des langues, à concevoir et à maîtriser leur interaction.

Ouvrons ici une parenthèse. On voit bien ce qui fait la vitalité d’une langue, sinon son « poins » c’est l’incitation qu’il peut y avoir à la transmettre. Une langue qui se transmet de moins en moins d’une génération à l’autre, ou d’un bassin de locuteurs à l’autre (c’est-à-dire que l’on apprend de moins en moins), est une langue en régression (ces deux types de transmission ne sont d’ailleurs pas sans lien l’un avec l’autre). Il suffit pour ce faire de s’interroger sur les principaux facteurs de transmission d’une langue : la vitalité d’une langue dépend d’abord de son efficacité , c’est-à-dire de sa capacité à exprimer le réel, et en particulier, de sa capacité à désigner les réalités nouvelles qui apparaissent au fur et à mesure que le monde change. Il faudrait évoquer ici toute la problématique de l’aménagement ou de l’équipement d’une langue (enrichissement volontaire ou spontané, travaux de terminologie, etc.), mais aussi, et de plus en plus, son équipement technologique (traitement de texte, correcteurs orthographiques ou grammaticaux, etc.). La vitalité d’une langue dépend ensuite de sa fonctionnalité: il est clair, par exemple, que l’utilité réelle ou supposée d’une langue sur le marché de l’emploi conduit les parents à davantage la transmettre à leurs enfants. La place qu’on lui réserve dans les médias, dans la vie culturelle, dans les systèmes scolaires, dans le monde du travail, de l’enseignement, de la recherche, est évidemment capitale. Mais sa vitalité dépend également de ce qu’on pourrait appeler sa « littérarité » (pardon pour ce néologisme), c’est-à-dire de sa capacité à produire des œuvres marquantes, ou, si l’on veut, de la fécondité de la culture qu’elle soutient, exprime et enrichit. De ce point de vue, je trouve très heureux que dans son index comparatif, Louis-Jean Calvet ait introduit des critères tels que la production et l’exportation de films, de livres et de disques, le nombre de Prix Nobel de littérature, etc. même si chacun d’eux est en soi contestable (le dernier en particulier). L’attrait exercé par une langue tient pour une tr

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