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Description

Luna Necis est nouvelle au Lycée Michael Angeli, lycée où sont formés les futurs protecteurs de la nation. Avec l'aide de son partenaire Alexander Fastus, elle va devoir affronter les démons de son passé, mais aussi de nouvelles émotions qu'elle n'avait jamais connues...

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Publié par
Publié le 28 octobre 2013
Nombre de lectures 594
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

A
Blandine
et Julie
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1
Un jour j’ai fait un rêve. C’était la rentrée des classes. Deuxième année de lycée, nouvelles têtes, filles et garçons, des personnes que je n’avais jamais rencontrées mais que je savais connaître, des inconnus aux visages floués, bref, les gens qui faisaient parti de ma classe de première. J’ai des amis. Je les aperçois et les rejoins. Nous parlons, rions, nous plaignons. Je suis heureuse et insouciante. C’est une journée banale d’une fille banale avec des histoires banales. Mais je ne suis pas banale. Ce fut la pensée qui me parvint juste avant de rentrer dans la classe, précédée du professeur. Ce n’était pas la rentrée mais quand même mon premier jour dans ce lycée. J’entrais, me postais devant les élèves qui me fixaient de façon intriguée et entamais ma présentation : - Je m’appelle Luna Necis. Je viens de la campagne. Je suis désormais étudiante au Lycée Michael Angeli. Le Lycée Michael Angeli…C’est une des raisons de ma non banalité. Ce lycée fut créé par Michael Angeli, avec l’intention de former ce que le gouvernement appelle « justiciers »et de rendre le monde meilleur. Je n’aime pas ce mot, je trouve que ça fait trop bande dessinée. Je qualifierais les gens sortant de cette école plutôt comme « assassins ». En effet, les enfants entrent dans cette institution dès leur plus jeune âge et y restent toute leur scolarité. Ils y apprennent l’art de ce battre, de créer des pièges et des stratégies pour atteindre une cible. Ici, les contrôles ne se résument pas à sortir des réponses toutes faites sur une feuille de papier. Non, ici les élèves doivent prouver leurs capacités sur le terrain en s’occupant au début de petits gangsters et, au fil des années, de plus gros bandits. Bien sûr, tout le monde ne peut pas y entrer, cet établissement est secret. On ne peut l’intégrer que lorsque l’on a de solides recommandations. Les élèves tiennent le plus souvent des recommandations venant de leurs parents, qui tiennent eux-mêmes des recommandations de leurs parents. Certains prétendent être les descendants directs de Michael Angeli. C’est comme une sorte de grande entreprise familiale dont on se voit obligé de reprendre la succession. Quant à moi, j’arrivais là, au milieu d’une grande famille, quasiment trois mois après la reprise des cours et à moins de deux ans du diplôme final. Cela n’allait pas m’apporter beaucoup de popularité. Mais je m’en fichais, je n’étais pas ici pour ça. D’ailleurs, dès que j’eus fini de me présenter, une fille, que j’identifiais comme étant la « boss » de la classe, se leva et s’exclama : - Une nouvelle élève à cette période de l’année. J’espère que vous plaisanter, ou alors elle a de très bonnes recommandations. Entendez par là qu’elle a été pistonnée ! Alors quoi, tu es de la famille du Directeur lui-même ? Devons-nous t’appeler mademoiselle? Pourquoi ne pas autoriser l’accès de l’école à tout le monde pendant qu’on y est ! C’est vraiment du grand n’importe quoi. Alors que je me faisais incendier par une fille que je ne connaissais depuis approximativement deux minutes, la professeur regardait la scène comme un film. Il est vrai que je voyais dans ses yeux le même désaccord que je voyais dans les yeux de mes camarades. Pauvres petites choses, à se croire l’élite du monde. Si seulement ils avaient vu et vécu hors de leur cage dorée, ils seraient moins prétentieux et ne se monteraient pas la tête pour si peu de choses. Devant tant d’idioties, je préférais feindre l’ignorance. Autre preuve de la vanité de mes camarades, cela les fit enrager : - Regardez-la se pavaner. Elle se croit meilleur que nous.
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- Retourne dans ta province ! -Ouais, paysanne ! La « boss » reprit la parole : -Sais-tu au moins que nous pratiquons les armes alchimiques. Tu ne dois avoir aucune spécialité, tu ne pourrais pas tenir juste deux jours et… - La faux, l’interrompis je ne tenant plus, je suis une spécialiste de la faux. Cela mis fin au chaos qui régnait dans la salle. Même la professeur semblait bouche bée. Enfin, le garçon qui m’avait traité de « paysanne » mis fin au lourd silence : - Tu manies la faux ? Il n’y a quasiment plus personne qui ne la manie. C’est bien trop lourd et encombrant. Pourquoi avoir choisi cela ? - Nous prenons la vie des gens et la mort est depuis toujours représentée par une Faucheuse. Disons que j’ai un faible pour les classiques, répondis-je avec l’assurance que j’avais. C’est alors que la porte s’ouvrit brusquement sur un autre garçon. A ce moment là, la tension que j’avais accumulée sembla disparaître au profit de l’attention que les personnes de la classe portaient au retardataire. J’en concluais donc que cet individu était indiscutablement le chef des premières. Il ne l’était pas pour rien car, à peine entré, son charisme envahit la pièce. J’avoue qu’il était séduisant. Il semblait assez musclé et sa taille dépassait sans doute les 1m80. Ses cheveux noirs se reflétaient bleu nuit. Et ses yeux noirs, si noirs qu’on avait l’impression, en le regardant, de plonger dans un abîme sans fond. Lui aussi me détailla et, malgré tout déstabilisée par le changement d’ambiance, je gardais le masque neutre que je m’étais forgé durant ces dernières années. Enfin, après une attente qui me sembla infini, il s’approcha en souriant et me dit : - Alors comme ça tu es nouvelle et tu manies la faux. Je ne dirais rien à propos du tapage que tu as causé car j’en suis une mais j’espère n’avoir jamais à collaborer avec toi. Quitte à travailler, autant que ce soit avec une jolie fille. Autre particularité non banale de cet établissement : les armes utilisées sont des humains. Pour une raison encore inconnue, certains humains ont la capacité de se transformer en arme. On les appelle « armes alchimiques ». C’est de là que vient la spécialisation. En fonction de l’entente entre le « manieur » et l’« arme », et les capacités du manieur, des duos ce forme et parfois pour la vie. On a déjà vu un manieur épouser son arme et avoir des enfants avec elle. Cela n’a rien de bizarre, après tout, excepté pouvoir se métamorphoser, les armes alchimiques sont comme nous. La nature des enfants dépend ensuite complètement du hasard. Bien sûr, cette petite différence est cachée du grand public. C’est sur ces mots qu’il se détourna pour aller s’asseoir vers « miss-je-m’énerve-toute-seule » qui pouffait de rire. Moi, cette réplique me désarçonna et aucune idée ne me parvint lorsque je voulus lui répondre. Heureusement ma gêne fut de courte durée car la professeur sembla enfin s’intéresser à moi : - C’est vrai qu’il faut que tu fasses équipe avec quelqu’un. Voyons, Toscambh est seul. Tu t’assiéras à côté de lui et vous formerez un duo. Le dénommé Toscambh se leva et s’écria, guère enchanté qu’on me mette avec lui : -Mais Madame, je ne suis pas une faux, je suis un fouet ! Comment pourrait-on collaborer ? - C’est vrai, ajoutais je n’ayant aucune envie d’aller avec un petit rebelle pleurnichard qui ne savait pas se soumettre aux ordres, n’y a-t-il réellement aucune faux seule ? Le regard de Mme Rondaigne se tourna vers le retardataire dont j’ignorais encore le nom, mais le regard qu’il lui renvoya était si noir qu’elle s’empressa de détourner les yeux. J’étais donc forcée de m’associer avec un garçon pour qui je savais que je ne porterais aucune affection. Je voyais dans ses yeux la même déception que je tentais de cacher. Il est vrai que 4
je ne devais pas leur porter une bonne impression. Une fille plutôt grande sans talons, des cheveux bruns longs qui, même attachés, descendaient le long du dos, un dos droit qui relevait d’avantage la fille, et un visage, un visage qui ne semblait ressentir aucune émotion, avec une bouche qui paraissait n'avoir jamais souri et des yeux verts ternes qui pourtant, je le savais, souriait autrefois d’un air béat et brillaient d’un vif éclat. Mais eux ne le voyaient pas. Ils me voyaient telle que j’étais devenue, froide et distante, repliée et méfiante, ironique et assurée, touchant presque l’orgueil et le mépris. Je m’étais forgée une carapace indestructible dont ils avaient peur. Alors que je commençais à rejoindre ma place attribuée, la porte s’ouvrit une seconde fois. Je reconnus le nouvel arrivé comme M. Combasse, un des professeurs les plus importants. Les élèves se levèrent pour l’accueillir ainsi que la professeur, ce qui prouva de l’autorité de l’homme. Il ordonna aux élèves de s’asseoir et me fixa, toujours plantée au milieu des rangées. Enfin, il déclara de sa voix forte que seul un adulte responsable peut acquérir : -J’ai un message de M. le Directeur pour Mlle Luna Necis. Il déplia une feuille de papier tandis que je m’interrogeais sur le sujet de la missive. J’avais déjà rencontré le Directeur. C’est d’ailleurs lui qui m’avait faite entrer ici. J’avais d’abord été étonnée par sa jeunesse et ne l’avais pas cru lorsqu’il m’avait parlé de ses fonctions. Puis j’avais été forcée de me rendre compte de l’importance qu’il avait dans la société. Je commençais à me souvenir de notre première rencontre quelque mois avant, la pluie, les chiens aboyant, les sentiments qui se bousculaient alors en moi mais M. Combasse m’interrompit en démarrant sa lecture : - Mlle Necis Luna, élève au Lycée Michael Angeli, manieuse de faux se voit attribuer comme arme alchimique, la faux Fastus Alexander. Dès aujourd’hui, ces deux personnes se voient dans l’obligation d’avoir une relation manieur/arme. Pour une meilleure entente entre cette nouvelle équipe, Mlle Necis et M Fastus ont l’honneur de se faire offrir un appartement commun dans les environs de l’école. Nous espérons que Mlle Necis s’intégrera bien mieux en compagnie de quelqu’un appartenant à l’école depuis sa plus jeune enfance. Ceci est un ordre non discutable venant de la part du Directeur de l’école Michael Angeli. M. Combasse s’en fut après sa lecture et nous laissa dans l’état le plus glacial qui soit. Puis, doucement, je me retournais vers celui que je pensais être mon nouveau partenaire. C’était lui, et il me fixait déjà. Plusieurs secondes passèrent et on entendit dans le silence la sonnerie d’une montre qui marquait neuf heures. Ce fut le déclic. Je fis un saut en arrière pour éviter Miss-je-m’énerve-toute-seule qui se jeta sur moi avec une de ses sbires. Elle cria : -Cette fille a soudoyé le Directeur afin de faire équipe avec Alexander. Elle doit être punie pour cela. Attrapez-la ! Pour la deuxième fois en une heure je créais une cacophonie digne de l’enfer. Une bonne partie de la classe s’empara de moi en essayant de m’immobiliser. J’identifiais la situation, la professeur n’ayant aucune intention d’intervenir, la Miss me lançant un regard de haine, des personnes me maintenant au sol et Alexander Fastus qui n’avait pas bougé et qui me regardait comme un insecte. Un accès de rage m’envahit. Qui étaient-ils pour me soumettre, moi, qui avais fait des choses qu’ils n’oseraient imaginer ? Je feignais alors la totale soumission pour que mes agresseurs relâchent la pression et dès que ce fut fait je me relevais, en profitant pour donner un coup de pied à celui qui me tenait la tête. L’effet de surprise me permis de faire un salto arrière pour me placée derrière la troupe. Je mettais un coup de coude dans le dos du garçon le plus proche de moi et le lança en direction d’un groupe de trois filles qu’il déséquilibra. Je m’élançais alors vers celle responsable de tout cela, me mis derrière elle, agrippa fortement ses cheveux roux bouclés et
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appuya avec mon pied dans son dos. Elle poussa un cri et les autres, voyant leur chef en mauvaise posture, se calmèrent tous pour me regarder. J’entamais alors : - Je n’ai aucune leçon à recevoir de vous. Dire que j’ai soudoyé quelqu’un est une insulte très dégradante alors que comme je vous l’ai démontré, je suis plus douée que la plupart d’entre vous. J’augmentais la pression sur le dos de ma prisonnière qui lâcha un autre cri pour appuyer sur ma déclaration. Je continuais : - Vous pouvez me haïr si vous le souhaiter mais venez me le dire et nous réglerons ça comme les personnes civilisées que nous sommes. Et si jamais vous m’insultez encore une fois et bien…, je pense que vous avez compris que je pouvais être très méchante. A l’expression de leur visage, je compris que j’avais dérapé et je repris mon masque de neutralité. Je relâchais mon otage qui pleurnichais et me relevais, digne. Alors que je pensais avoir maîtrisé la situation, une voix que j’avais oubliée s’éleva : -Et moi je t’interdis de les menacer. Bianca est juste trop impulsive. Je pense qu’une discorde serait mal venue entre nous sachant que nous allons maintenant travailler ensemble alors évitons les menaces et les faux-semblants. Je me retournais pour regarder Alexander qui s’était levé et m’observait avec un nouvel intérêt. Comprenant que Bianca était le nom de la rouquine je lui répondis : -En effet un désaccord est à éviter entre partenaire mais je ne m’excuserais en aucun cas. - Non, bien sûr que non, mais je devrais peut-être les remercier car grâce à eux j’ai pu avoir une matinée intéressante avec un événement particulièrement inhabituel qui m’a permis de me distraire. J’espère que les prochains jours seront aussi divertissants. Bien, enchaîna-t-il en se déplaçant vers la porte, je vais demander notre nouvelle adresse. Ne t’inquiète pas, je te la ferais parvenir. Je te conseille de sécher les prochains cours si tu veux vivre, moi, c’est ce que je compte faire. A ce soir. Ah oui, faillit-il oublié en se retournant, passe faire des courses en rentrant. Il passa la porte sur ces mots. Alors que la classe se remettait de ces événements je me rendis compte qu’il ne me comparait qu’à un jouet mais que malgré tout, il acceptait la décision du directeur. Bianca se réveilla alors : -Je refuse que… Mais j’étais déjà sortie de la salle, décidant de suivre le conseil de mon nouveau partenaire.
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Je passai la porte d’entrée du lycée afin de trouver un endroit calme pour réfléchir lorsqu’une personne me barra la route. Elle portait une grande cape noire de velours et un chapeau haut-de-forme qui laissait dépasser de fins cheveux blonds. Ses mains gantées tenaient une canne dont le pommeau semblait en or. Il releva quelque peu la tête et j’entrevis deux malicieux petits yeux bleus. Je reconnus immédiatement le Directeur. Ici, le Directeur a tous les droits sur les élèves. Il peut les favoriser ou, au contraire, les dégrader jusqu’à l’expulsion. Cela en fait un personnage craint et respecter. Personne ne peut le contredire, même si son ordre me concernant a faillit être dénié. Le rencontrer est aussi très rare et j’aurais du me sentir honorer qu’il vienne à moi de lui-même mais je n’éprouvais pas pour lui les mêmes sentiments que les autres. Pour moi, c’était une personne avec un peu de 6
pouvoir mais contre qui je me méfiais. Les seules personnes que je respectais étaient moi-même etLuiAprès quelques secondes d’observation il me lança : -Les cours ne sont pas finis et vous pourriez avoir une punition pour ça. -Mon premier jour ici a juste été horrible et je vous le dois. Si vous n’aviez pas fait en sorte que je sois avec Alexander Fastus je n’aurais jamais eu à me battre. - Oh, cela en ait même venu aux mains. - Bien sûr, ce n’était pas ce que vous aviez prévu, fis-je pleine d’ironie, Réellement, pourquoi m’avoir mis avec Fastus ? Ce doit être celui qui a le plus d’autorité auprès des élèves après vous. Si je fais équipe avec lui je vais me faire tuer avant la fin de la semaine. - Rassurez-vous Luna, il vous a acceptée et dès lors, rien ne vous arrivera. Vous avez  vous-même deviné l’influence d’Alexander et personne n’osera faire de mal à sa partenaire. Au fait, voici votre nouvelle adresse, Alexander l’a déjà. C’est un immeuble qui appartient à l’école donc vous y serez en sécurité. - Merci, et… En ce qui concerne le marché…  - Il ne doit pas en être au courant, bien entendu. -Oui, bien entendu… Le directeur me contourna et rentra dans l’établissement. Je restais là, à fixer le bout de papier où était écrite mon adresse et réfléchit. Je repensais comment j’étais arrivée là, comment j’avais fini par faire un pacte avec ce démon au visage d’ange. J’étais insensible et fourbe ? Alors qu’était-il lui ? Les souvenirs commençaient à remonter. « L’orage. Les cris. La fuite, les chiens, les larmes. De souffrance et de désespoir. La peur, la faiblesse et cette ombre venant vers moi. Une menace ? Un aide ? Je ne sais pas, je ne distingue pas le visage de celui qui me regarde, moi, petite chose effrayée assise dans une ruelle. Que pense-t-il de moi à cet instant ? Je ne sais pas, je n’ai plus la force de réfléchir. De vivre. Je sens mon corps se ramollir. Les aboiements des chiens ne sont plus très clairs. L’univers bascule et mon corps s’étale sur la chaussée. Les pieds de l’ombre s’approchent. Va-t-il me t..?Je n’ai pas le temps de me poser la question, mon esprit s’enfuit dans le brouillard de l’inconscient. » Le retentissement sonore de la cloche me ramena à la réalité. Elle indiquait dix heures, l’heure de la pause. Je me hâtais de sortir du parc afin de ne croiser personne et me dirigeais vers le super marché le plus proche. Ce n’était pas que j’effectuais l’ordre que m’avait donné Alexander, non il se débrouillerait pour manger, mais il fallait bien que je me nourrisse moi. J’achetais donc quelques ingrédients de cuisine et entrepris le trajet jusqu’à mon nouveau chez moi. J’atterris au pied d’une vieille bâtisse qui semblait dater du XIXe siècle. J’entrais donc avec une certaine appréhension et fut grandement soulagée de voir que tout le confort nécessaire était là. L’intérieur, comparé à l’extérieur, ressemblait à un studio. Rien de trop exagéré, il y avait de la place pour deux personnes et même pour trois. Le salon avait des canapés accueillant avec une petite table basse si nous voulions avoir des invités. La cuisine était équipée de tous les appareils nécessaires pour faire de bons plats et les chambres étaient assez grandes pour faire rentrer un large lit, un bureau, une armoire et d’autres choses que nous pourrions aménager nous-mêmes. Le studio restait dans les tons blancs/gris taupe et les deux chambres se différenciaient par deux types de couleur. L’une était d’un rose pâle et l’autre d’un bleu très léger. J’en concluais donc que j’intégrais la chambre rose. Je ne pus m’empêcher de remarquer que ma chambre était légèrement plus grande que l’autre. Je rangeai dans le frigo les aliments que j’avais achetés et allai déballer mes affaires déjà transportées. Une fois cela terminé, je décidai de sortir déjeuner dehors. J’allai dans un petit
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restaurant près d’un parc et mangeai sereinement. Tous les soucis de ce matin semblaient s’être enfoncés tout au fond de ma mémoire et je n’y pensai plus l’après-midi durant. Quand vint le soir je décidai de rentrer au studio. J’étais seule, Alexander n’étant visiblement pas rentré. Je me préparai le repas du soir juste pour moi, allai me doucher et m’endormis en peu de temps. Tandis que je rêvai, j’entendis la porte s’ouvrir et se fermer. Quelqu’un entrait dans la maison. Il sembla fouiller les pièces une par une et arriva au seuil de ma chambre. Il s’approcha doucement de mon lit et se pencha vers moi juste assez pour que je sente son souffle dans ma nuque. Je l’entendis faire un mouvement mais je ne le laissai pas aller jusqu’au bout car je me jetai sur lui, armée d’un couteau que j’avais glissé sous mon oreiller. Je me heurtai à du métal, l’individu était armé. J’essayai de forcer sa défense et je le fis basculer à terre. Je me retrouvai donc à califourchon sur mon agresseur et essayai de l’immobiliser. Il me parla alors et je le reconnu : - Hé ho, calme-toi ! J’habite ici aussi. Je réalisai alors que j’étais en short et en t-shirt à bretelle sur Alexander Fastus à une heure avancée de la nuit. Je me relevai précipitamment et le disputai : -Quelle idée d’entrer dans ma chambre à une heure pareille. J’ai cru à un voleur. -Et quelle idée de dormir avec un couteau, tu aurais pu me tuer ! Heureusement que j’ai de bons réflexes. Je me rendis compte que son bras s’était transformé en lame. Voici donc d’où venait le métal. Son bras reprit sa forme originelle lorsqu’il comprit que je le regardais. Je demandai : -Pourquoi es-tu entré dans ma chambre ? - Parce que je n’ai pas encore mangé et que j’ai faim Je le regardai bouche bée. Ce moucheron m’avait réveillée pour ça ? J’eus alors une profonde envie de le frapper mais je me contentai d’utiliser l’arme que je maniais le mieux : le sarcasme. - Tu sais, il y a quelque chose qui s’appelle cuisiner en ce monde et même si tu ne sais pas le faire, des établissements appelés restaurants se feront un plaisir de t’accueillir. Alors, la prochaine fois que tu auras faim au beau milieu de la nuit, tu te débrouilles comme le garçon pubère que tu es et tu me laisses dormir tranquille ! J’avais prononcé les derniers mots plus forts que je ne l’aurais voulu. Il lâcha un petit rire et je le fusillai du regard. Il répondit à ma question muette par : - Heureux d’apprendre que tu as des émotions et que tu n’es pas un robot. J’avais peur que tu sois un genre de « miss parfaite » mais tu es comme tous les êtres humains au réveil. Irritable et pénible. Au moins, ça nous fait un point commun. Je fus tellement surprise que je ne trouvai rien à redire. Je me contentai de le fixer bêtement, sous le choque de son changement d’humeur. Je me dirigeai alors vers la cuisine et revins dans la chambre quelque temps après avec une assiette d’œufs au plat. -J’en avais fait un peu trop. Mange. Il me regarda, me sourit, et regagna la cuisine pour finir les restes. Je restai immobile repensant aux dernières minutes qui venaient de s’écouler. J’avais été tellement étonnée par sa remarque que je n’avais pu résister à un accès de gentillesse. C’était la première chose qu’il me disait sincèrement. Une sorte de gaieté gonfla en moi. Je me ressaisis juste à temps. Il fallait que je fasse plus attention. Ce garçon avait fait une faille dans ma carapace. J’entendis Alexander mettre l’assiette dans le lavabo et gagner sa chambre. C’était juste la fatigue qui m’avait affaiblie. Demain irait mieux. Je rejoignis mon lit et mis beaucoup plus de temps que la première fois pour m’endormir.
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Je me réveillai le lendemain à sept heures tapantes. Je me préparai et je fus prête quinze minutes avant le début des cours, c’est-à-dire 7h45. Le lycée étant à cinq minutes du studio, j’avais encore dix minutes à tuer. Je repensai alors à mon colocataire que je n’avais pas encore vu. Je me dirigeai vers sa chambre et ouvris la porte. La pièce était dans le noir complet. Une masse difforme s’étirait sur le lit. Je m’approchai de cette forme et soulevai rapidement la couette qui la recouvrait. Je découvris un Alexander en caleçon, les yeux clos et un filet de bave dégoulinant de sa bouche grande ouverte. Ce fut plus fort que moi, j’éclatai de rire. Cet accès d’hilarité réveilla en sursaut Alexander qui ne comprenait rien à mon tapage. Alors qu’il m’interrogeait du regard, je réussis à caser entre deux gloussements : -Sérieusement c’était génial ! Le grand Alexander à demi nu avec un filet de bave c’est juste excellant ! J’aurais dû prendre une photo. Alors que je commençais à pleurer de rire, Alexander prit enfin conscience de son état. Il se leva précipitamment et s’habilla en vitesse puis alla vérifier l’heure dans la cuisine. Il lâcha un juron en voyant qu’il était en retard et se hâta de petit-déjeuner. Lorsqu’il eu fini, il se dirigea vers la porte d’entrée avec son sac. Je réalisai alors : Tu ne te laves même pas. Mais t’es super sale en fait. Ah, que dirait Bianca si elle savait que -son prince ressemblait plus à un animal qu’à autre chose ! Il se retourna brusquement et dit : -Si jamais tu oses dire ça à qui que ce soit, je te jure que tu le paieras. Il était sérieux en me disant ça mais il en fallait plus pour me faire peur. Je décidais malgré tout de le calmer : - C’est bon, arrête de t’inquiéter. Je sais respecter l’intimité des autres. Tu aurais dû comprendre que je plaisantais. Tu devrais être habitué maintenant…Mais je ne savais pas que Bianca comptait autant pour toi. A quand les gosses ? Aïe, je n’avais pas pu résister. Je fis un saut en arrière et me retrouvai plaquée contre le mur. Alexander pointait son bras/lame sur ma gorge. Il y avait dans ses yeux un éclat que je n’aurais jamais pensé voir ici. Je l’avais vraiment énervé. Mais il ne me tuerait pas, je le savais. En fait, les élèves ne peuvent tuer que les personnes ayant commis un délit. Si quelqu’un tue un innocent, il est condamné à la peine capitale. Il n’y a que cet établissement où cette sanction est encore autorisée. Mais ce n’était pas pour ça qu’il n’allait pas me tuer-je n’étais pas toute à faite une innocente. S’il ne me tuerait pas, c’est juste qu’il ne l’avait jamais fait. C’était une faux et il n’avait jamais dû trouver de manieur assez compétent pour lui. Jamais le sang impur des criminels n’avait coulé sur la lame avec laquelle il me menaçait. Je le compris à cet instant. Voilà pourquoi le directeur nous avait associé. Sous ses airs de combattant, il était encore pur. Le directeur voulait juste que je le corrompe. Après quelques instants de silence il retira la lame de ma gorge et son bras repris sa forme. Durant tout ce temps nous ne nous étionnasit -pial sd leâ cmhoéis  ?d eÉs yeuxe . eJnec coroem umnee néçnaiisg mà e, une comprendre Alexandre, mais lui, que compre tais-j fille très lunatique qui n’avait pas de réel caractère ? Ou avait-il lui aussi commencer à me comprendre ? Je penchais plutôt sur la première hypothèse. Il le valait mieux pour lui et pour moi. Nous prîmes le chemin de l’école en silence. Aucun de nous ne s’excusa pour ce qu’il avait fait. Nous finîmes par entrer dans la classe où nous fûmes soudain le point de tous les regards. Ni lui ni moi n’y fîmes attention et nous nous essayâmes à nos places respectives,
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côtes à côtes. Mme Rondaigne arriva et les élèves s’assirent à leur tour. Le cours pu commencer : - Bien, aujourd’hui nous allons continuer le cours d’hier. Quelqu’un peut-il me rappeler ce que nous avons fait ? demanda-t-elle – plusieurs mains se levèrent, voyons voir, Luna ? - Je ne sais pas madame, répondis-je en gardant mon masque alors que j’étais indignée de lintérieur. - Pourquoi ne savez-vous pas ?  - Parce que je n’étais pas en cours hier, fis-je toujours sur le même ton monocorde.  -Et pourquoi n’étiez-vous pas en cours hier, dit-elle alors que je sentais qu’elle riait intérieurement. J’en avais assez de ce jeu. Si j’étais venu ici c’était pour apprendre, pas pour devoir m’expliquer avec une dinde en talon. - Madame, je ne pense pas que nous soyons ici pour discuter de mes faits et gestes. Le cours à commencer depuis maintenant une dizaine de minutes et nous n’avons toujours rien abordé. Que vous le supportiez ou non je suis désormais élève ici et donc si vous voulez rendre des comptes à quelqu’un, allez donc vous adresser au Directeur, déclarais-je sur un ton plus ferme. - Vous osez insinuez que c’est M. le Directeur en personne qui vous à fait inscrire ici, N’avez-vous pas honte !? s’offusqua-t-elle. Croyez-vous réellement que je prendrais un tel risque si celui-ci n’était pas véridique ? -Cette remarque arrêta les conciliabules de ma professeur qui était maintenant toute rouge. Si elle voulait me défier sur les mots, il aurait fallut qu’elle ait à son actif plusieurs années d’entraînement. Les mots et les phrases étaient mon terrain de jeux et personne ne pouvait me vaincre à cela. Mme Rondaigne interrogea une autre personne qui fit la synthèse du jour précédent : - Nous avons étudié l’influence des sentiments dans un rapport manieur/arme. Nous avons vu que plus l’entente est bonne plus la force de l’arme augmente et plus les attaques sont puissantes. - Très bien. Quelqu’un peut-il me dire ce qui peut se passer s’il y a une mésentente entre le duo ? - Le manieur peut ne plus savoir comment manier sont arme et l’arme peut blesser son manieur, voire l’entraîner jusqu’à la mort. Ce fut mon partenaire qui répondit. Le ton qu’il utilisa m’arracha un frisson. M’étais-je donc trompée ? Avait-il déjà tué quelqu’un ? Dans ce cas, quel était mon rôle dans tout ça? A quoi pouvait donc penser le Directeur ? Personne ne réagi à la façon dont il prononça sa réponse, et la professeur continua son cours sur les risques d’une discorde entre un manieur et son arme. Je continuai de réfléchir sur le sens de la phrase d’Alexander. Je lui jetai un coup d’œil et me détournai rapidement car il me fixait déjà. C’est là que je compris. Je ne m’étais pas trompée, il n’avait jamais tué personne. Ce qu’il avait dit était un avertissement. Un avertissement qui m’était destiné. Il me disait que si nous restions dans le climat dans lequel nous étions en ce moment, il pourrait nous arriver quelque chose. M’arriver quelque chose. Pendant ce temps, la professeur déblatérait toujours son cours : Le sentiment qui peut rendre le plus puissant est l’amour entre les deux partenaires. Ce -sentiment leurs donnera envie de se surpasser pour protéger l’autre. C’est encore plus intense lorsque l’amour est pur. Il n’y a vraiment rien de plus puissant.
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Je ne pu retenir un sifflement désapprobateur. Le regard des personnes dans la classe se tourna vers moi. J’expliquais : - Le sentiment d’amour destructeur est bien plus puissant que le pur. - Mlle Necis, fis la professeur, d’où tenez vous cette histoire d’amour destructeur ? Autant dire la vérité : - De ma propre expérience. -Vous pourriez dans ce cas nous raconter votre « expérience ». - Cela relève du domaine du privé et je n’ai aucune obligation de vous le révéler. Sachez seulement que la destruction est beaucoup plus facile à atteindre et enivrante que la pureté. La cloche sonna pour signifier le changement de matière. Mme Rondaigne sortit de la classe pour laisser place un à homme avec des lunettes. J’eus la bonne idée de me retenir de lui sauter dessus lorsque je reconnus cette tête brune. Il se présenta : -Bonjour à tous. Je m’appelle Esteban Venenu et je suis le remplaçant de M. Mensonnier. J’espère que nous aurons une année agréable ensemble. Il me vit et me lança un regard joueur. Je lui répondis avec des éclairs avant de détourner les yeux pour ne pas attirer l’attention sur nous. J’irais lui parlé après le cours durant la pause. Ce cours fut consacré aux différents moyens d’empoisonner quelqu’un ou au contraire de fabriquer des contrepoisons avec les moyens du bord. Je connaissais déjà quasiment toute la première partie du cours mais prêtai plus attention à la deuxième dont j’ignorais la majeure partie. Enfin le cours se termina et les élèves sortirent un par un. J’attendis que la salle soit vide pour me diriger vers le bureau. - Esteban Venenu, dit « la brume », alors, on s’offre une petite reconversion ? - Tu sais bien que j’ai toujours aimé enseigner. Par contre, j’ai été déçu que tu n’aies pas écouté plus que ça au début du cours. - Tu m’avais déjà appris tout ça il y a bien longtemps. Je te rappelle que je savais tuer quelqu’un avec du cyanure et ne laisser aucune trace à l’âge de dix ans. - Tu as toujours été précoce. Ce fut un plaisir de te voir grandir et de t’apprendre ce que je savais. - En tous cas ce n’est pas un plaisir pour moi de te revoir. Sérieusement, qu’est-ce que tu fais là ? - Je me suis réellement reconverti et ton merveilleux Directeur à accepter de m’engager ici. -Ilt’a laissé partir comme ça ? -Ilnous laisse partir quand nous le voulons.Ilveille juste à ce que nous ne disions rien à personne, -ses yeux gris devinrent alors sérieux-, ton cas est spécial car tu es toi. Tu es différente des autres et pourLui. Mais maintenant qu’Ilsait ce que tu as conclu avec le Directeur tu devrais faire plus attention.Ilva s’amuser avec toi jusqu’à ton épuisement et à ce moment,Ilportera son coup de grâce.Ilfaudra que tu te dépêches. - Je sais commentIlje compte bien me servir de ses points faibles. Ne t’inquiètefonctionne et pas tout sera bientôt fini. La cloche retentit et je retournai à ma place laissant Esteban partir au profit d’un autre professeur et des élèves qui revenaient. Les deux heures de cours qui suivirent ne furent pas très intéressantes et je fus soulagée d’entendre la cloche de midi. J’allais manger seule étant donné que les filles de la classe me craignaient. Je me levai donc et me dirigeai vers la porte lorsqu’une fille blonde platine m’arrêta. Je m’attendais à une nouvelle attaque mais elle me dit simplement :
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