C est ici que je suis
52 pages
Français

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C'est ici que je suis , livre ebook

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Description

Quatre monologues sont regroupés sous le titre générique de ce volume. Nous ne sommes pas ailleurs que là où nous pensons être, et que là où nous le disons, quelquefois par catastrophe, comme dans Une absence (de mémoire), dans ce que nous croyons comme dans Combats, dans nos deuils, comme dans Transitions, ou dans la réminiscence comme dans Etat des Lieux.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 septembre 2009
Nombre de lectures 185
EAN13 9782296237704
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0350€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

C’EST ICI QUE JE SUIS
Du même auteur


Mémoire de chair , théâtre, L’Harmattan, 2009.
Autonomie d’un meurtre , roman, réédition, L’Harmattan, 2009.
L ’ ombre et le pinceau , théâtre, L’Harmattan, 2007.
L’ordre et le silence , théâtre, L’Esprit du Temps, 2004.
J’irai seul , roman, Fiction & Cie, Le Seuil, 2003.
Êtra ou la clarté de l’éphémère, théâtre, L’Esprit du Temps, 1999.
Dancing , théâtre, L’Esprit du Temps, 1998.
Autonomie d’un meurtre , roman, Calmann-Levy, 1998.
Dutzoll-Frontier, théâtre, L’Esprit du Temps, 1997.
Sacrifice , Théâtre, L’Esprit du Temps, 1996.
Fatsflat , théâtre, L’Esprit du Temps, 1996.
En faire quoi , théâtre, L’Esprit du Temps, 1991.

Sous le nom d’Alain J. Brun
Un siècle de psychanalyse , Essai biographique,
L’Esprit du Temps, 2008.


© L’Harmattan, 2009
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.hannattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-10005-3
EAN : 9782296100053

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Alain Julien R UDEFOUCAULD


C’EST ICI QUE JE SUIS


Théâtre


L’Harmattan
La ponctuation des textes qui suivent est strictement théâtrale et non syntaxique.
COMBATS
A : Vous êtes sec, pauvre, soumis, un petit homme. Vous avez capitalisé et récupéré les prémices de votre soumission. À présent, usez donc de votre force ! Il doit en rester des traces, si vous ne les avez pas effacées par une vaste frénésie spéculatrice. Désormais, au moins, rêvez ! Dans l’éveil !
Suivez le rougeoiement brillant des notes de musique. Voyez l’écume des chants qui brasse ses propres messages. Goûtez, la bouche ouverte, la langue humide, goûtez le son, et sentez, dans votre gorge, le roulement sonore des ortolans.
Humez, si vous pouvez, le rythme des saisons, et battez, dans votre intimité, le frémissement des bambous.
Ayez de l’audace. Caressez l’épaisseur des nuées. Elles coiffent votre tête, et nimbent votre esprit. Écoutez le roulement sauvage des silences. Écoutez la violence du rouge, l’espoir du vert, le désespoir mutilé du jaune.
Percevez, avec rigueur et précision, le vivant désordre qui vous habite.
Il nous est à tous, nécessaire, d’avoir dans notre besace, un arsenal humain. Mettez-y de l’ordre, et vous aurez quelque épanchement, à vos sursauts d’esclave.
Par exemple, inversez les sens. Vous obtiendrez un monde désordonné, ou bien d’un autre point de vue, l’épanouissement d’une désorganisation stéréotypée, sans aspérité ni saillie, qui puisse vous arrêter. Bien. Voyons ce qu’un tel exercice peut donner. Au lieu de dire : – Goûtez le silence. Dites : – Goûtez les ortolans.
D’un coup, tout prend un autre sens. Cela reste monotone et connu. Mais ceci : – Goûtez le son du rythme des saisons et humez le chant des ortolans, hein ? Mmh ?
Voyez, petit homme, la chose est simple. Cela ne signifie pas qu’il n’y a aucun effort à produire.
Pour que l’allègement vous gagne, violez donc la grammaire, et faites-lui un enfant. Le langage est ainsi qu’il bâtit une prison à celui qui s’y soumet. Mais respectez les règles et vous n’aurez que plus de plaisir à vous en affranchir.

B : Voilà ce que vous promettez : d’autres mots que ceux m’ayant aidé, enfant, à me repérer.
Cette galerie de dérèglements ne produira ni plus ni moins qu’un hors-la-loi. C’est donc là le destin que vous me proposez ! Par votre invite, vous dessinez, ouvert, l’espoir à l’esclave. Aussi, refermez tout. Vous avez beau jeu de me regarder – agité depuis la trémulation de la naissance – me dépêtrer dans la myriade des mots, balbutier mes besoins, mes désirs et mes amours !
Sous vos remarques acerbes, je m’agace, sans avancer ni reculer, et ne serait cette force d’attraction qui m’y retient, je quitterais volontiers cette galaxie pour d’autres mondes, où régneraient, pour toute causalité l’entropie et le désordre.
Oui, l’esclave qui parle est un être qui se révolte. Immobile ! Je reste ici cloué par mes racines. Nommer autrement les choses, n’atténue pas la douleur !
Les sens, que vous me conseillez d’utiliser, en les pervertissant, sont donnés par la nature. Nous n’avons pas le choix. Vous vient-il l’idée absurde de de la rebellion ? Par ailleurs, quel plaisir avez-vous à enfreindre les règles de notre parole ? Devrais-je dire : – Vous réglez son compte à notre syntaxe et vous possédez l’effraction du plaisir, ou bien vous possédez notre syntaxe et vous réglez notre plaisir ! Je me fais fort d’appliquer le débordement, que vous proposez, tout d’abord à vous-même, et permettez qu’au lieu d’affirmer : – Je pèle une orange, je déclare : – Je pèle votre peau. Et qu’au lieu de : – Je vous aime bien, je m’avance à prononcer : – Je vous mange bien, car, je ne peux pas vous sentir ! Laissez à l’esclave que je suis le soin de défendre des idées. Nous aurons l’allègement que vous proposez. À respecter les règles, nous n’aurons que plus de plaisir à nous en affranchir certes, et de celle-ci en premier lieu : – Nous sommes tous des esclaves !
Je vous laisse.
Chacun se soumettra à lui-même et sera son maître.
TRANSITIONS
LUI : On pourrait par exemple partir seuls. Tous les deux. Évidemment, ce serait quoi ? La mer. Le ciel bleu. Et puis on serait deux. Parce que c’est comme ça. Et que, surtout, ça ne peut pas être autrement.
Pour l’heure du départ, je ne sais pas, mais on aurait roulé. Je pourrais toujours causer, te raconter ce qu’on voit et ce qu’on ne voit pas, pourquoi c’est là et pourquoi c’est arrivé. Je ne dirais que des propos justes et variés. Tu entendrais et tu t’en foutrais.
Dans la journée, la seule chose qui t’intéresserait serait que je cache tes seins avec la main. Pas n’importe où. Sur la plage ou dans la forêt, jamais en conduisant. – Ça va pas ! Tu criais parfois : – Tu aurais pu demander !
Jamais en conduisant. Mais ailleurs. Les eucalyptus, la méditerranée, les oursins, le goudron et les graviers, les bois flottés, l’écume ressassée, la remontée sous le soleil, le poids des parasols, et la clameur de l’été, les grillons, et le silence, les odeurs, lichens, et sable souillé, crissement dans les souliers.
Sous la pluie, y’avait ma voiture. Tu avais payé le plein d’essence. Puis jeté à un pauvre gars vêtu à la six-quatre-deux, quatre sous et le polaroïd.
Le type est parti, sans se retourner, longtemps sous ton regard. J’ai lancé le démarreur.

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