Eclats de mai
154 pages
Français

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Eclats de mai , livre ebook

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Description

Après des décennies, au coeur de la foule, Georges et Sarah se retrouvent. Eux qui, avec Pontus, Joseph et Nobodie, formaient un petit groupe d'étudiants parisiens, inscrits en écopo, soumis, comme tous les groupes, à ses forces et tensions souterraines. Insouciante, cette période de leur vie? Non, car ils étaient de cette génération qui vécut le printemps 68, qui adhéra, plus ou moins convaincue, aux idéaux de toute une époque, pressentant qu'ils évoluaient sur le rasoir, que la tension n'irait qu’en s'accroissant... Jusqu'au point de rupture... Et si celle-ci ne s'était pas produite là où on le pense? Refusant ce romantisme lié à la jeunesse qui se soulève, loin de l'exaltation ou des stéréotypes attachés au contexte, c'est une vision toute nuancée et réaliste qui travaille ces "Éclats de mai". Mettant en place une galerie de portraits en contrepoint, qui s'attirent et se cherchent, s'apprivoisent ou s'éloignent les uns des autres, Françoise Decoster-Ville crée un récit contrasté, hanté par la figure lunaire, presque trop indépendante et à l'écart des autres, de Nobodie.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 17 août 2010
Nombre de lectures 10
EAN13 9782748355383
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0068€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait















Éclats de mai


Du même auteur
Sous le pseudonyme de Maud Stricane



Le Voyage,
nouvelle, 1993

Le Palais dans tous ses états,
chroniques bourguignonnes, 2002

Une journée au bord de la mer,
nouvelle, 2003

L’Oubliée de Hautecombe,
roman historique, éditions Publibook, 2005

Honnit soit qui Malain pense,
recueil de nouvelles, 2005 Françoise Decoster













Éclats de mai



















Publibook Retrouvez notre catalogue sur le site des Éditions Publibook :




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14, rue des Volontaires
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Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55






IDDN.FR.010.0115039.000.R.P.2010.030.31500




Cet ouvrage a fait l’objet d’une première publication aux Éditions Publibook en 2010


À Maïa et Floriane
À Corentin et Romane
À Katell, née l’année de ces événements


L’histoire s’écrit à la place de l’absence
Michel de Certeau

La vie ne vaut rien mais rien ne vaut une vie
André Malraux
La Condition Humaine





Jeudi 29 janvier 2009
Une rumeur urbaine, sourde et lointaine réveilla
Georges, pas très en forme ce matin-là. Après une rapide
toilette, il enfila un pantalon noir, un polo, un anorak, mit
de bonnes chaussures de cuir et décida de partir sans
réveiller sa compagne Line qui dormait à poings fermés.
Un instant il la regarda, caressa sa joue, quitta doucement
la chambre et coupant son Blackberry, sans emprunter
l’ascenseur, il partit à pied dans la ville.

Dehors un vent frisquet soufflait sur Paris. Georges
aimait ce Paris discret, secret, désert, quand les boutiquiers
s’éveillent, ouvrent leur volet roulant, chuchotent avec
leur voisin, ce Paris où les livreurs embouteillent les rues
dès le petit matin. Tout semblait au ralenti. Remonter la
rive gauche de la Seine en direction du quartier Latin,
musarder empli de nostalgie, cela ne lui arrivait plus
guère : Pont de l’Alma, la Chambre des députés, l’église
Saint-Germain, la brasserie Vagenende qu’il affectionnait
tant, la Rhumerie, la place de l’Odéon, les thermes de
Cluny. Ne pas avoir de but, ne pas chercher à se repérer.
Le temps s’ouvrait devant lui temps, beaucoup de temps.
Le rendez-vous était à quatorze heures. Partir de bonne
heure était nécessaire pour vider son esprit. Mais les
tourments ne s’évacuaient pas comme cela. Trop de
souvenirs arrivaient en ordre dispersé, bousculant son
organisation chronologique, tapant à la porte de ce qui lui
restait de ses souvenirs de jeunesse, ouvrant les tiroirs
d’images toutes plus ou moins écornées ou peu visibles.
Marcher sans repère. Comme tout vieux Parisien, guidé
11par le fleuve. L’allure restait très mécanique. Un relevé de
tête, par moments, lui permettait d’entrevoir les façades
d’immeubles. Un clin d’œil jeté de côté sur le labyrinthe
des rues. humant le parfum des quartiers, Georges reniflait
l’odeur de cette ville-monde, si intime au creux des
arrondissements, des squares, des couloirs d’immeubles,
des arrière-boutiques, des chambres sous les toits, des
détours et raccourcis, des palissades cachant les impasses,
véritable itinéraire souvenir. C’est au milieu de ces
senteurs qu’il était né. Qu’est devenu le Paris de la chiffe,
des artisans ferrailleurs ou autres, de la vie picaresque où
l’on s’encanaillait auprès des bonimenteurs, des bougnats
et des amuseurs publics ? Les Halles la nuit, le marais le
jour, le vieux Paris baroque ne présente plus aujourd’hui
que des palais de pierre ou de verre, gris et froids, de
l’esbrouffe ou de la violence. Comment peut-on se sentir
étranger dans un lieu dans lequel on a vécu si longtemps ?
La solitude, l’éloignement des siens, la transformation des
lieux faisaient de Georges un errant. Soudain, il retrouva
une perspective, reconnut un immeuble, un carrefour
inchangé, des endroits restés inscrits dans sa mémoire.
Aujourd’hui cette ville avait perdu son âme et ses miracles
quotidiens comme lui ses rêves.

Vers onze heures trente, non loin de la place
SaintMichel, Georges pénétra dans une brasserie, hésita à
manger un steak tartare, opta pour le plat du jour suivi
d’un petit dessert. Sa prise de décision l’enivrait en
quelque sorte, malgré son impression de solitude dans ce
Paris qui lui était tant familier. Curieusement cela le
rendait plus léger, loin de ses soucis. Le repas terminé,
direction place de la République. Georges estimait faire
partie des nantis. Gagnés par le travail : trois garages dont
un à Marseille, dix concessions, des sociétés de
covoiturage et de location. À nouveau il se demanda ce
qui l’avait poussé à prendre une telle décision aujourd’hui,
12rejoindre ce mouvement social, comme cela avait été le
cas, de façon intempestive, il y a quarante ans. Pourtant il
ne voulait pas reculer. Une contradiction se niche et se
cache en lui, le freine parfois. Aujourd’hui elle l’éclatait.
C’était douloureux et rédempteur à la fois. Son pas
s’accéléra. Petit à petit les rues et les trottoirs se
remplissaient d’une foule très hétéroclite. Georges n’était
plus seul à errer. Des jeunes le doublèrent, crièrent. Des
bandes d’individus étiquetés comme des hommes
sandwichs, parlant fort et riant, l’encadrèrent. À la
Bastille, les cortèges avaient commencé à se former, se
dirigeant d’un bloc vers la République, lieu de
rendezvous de ce jeudi noir annoncé. Pourquoi était-il là ? Pour
lui, aucune revendication sociale. À quel groupe ou
mouvement allait-il se joindre ? Malgré beaucoup de
travail depuis des années, sous l’impulsion de son père et
de son grand-père. Georges était préoccupé depuis
quelques mois. Le parc automobile était en péril. Il ne
supporterait pas de ne pas garder son train de vie, de
perdre sur certains placements, de descendre
lamentablement à la fin de sa vie l’escalier social. Était-ce
le faix de ses responsabilités ou celui des ans qui l’avaient
transformé ? Souvent, au fond de lui, le paradoxe tordait
ses intestins, nouait ses muscles, pesait sur son sternum.
Un jour ce paradoxe pourrait l’étouffer. Une faille
profonde le divise, le blesse, l’empêche de vivre. Peut-elle
devenir salvatrice ? À vingt ans Georges voulait changer
le monde, être plus fort que son père, être plus grand. Il
n’a jamais été un utopiste mais les illusions sont
maintenant perdues. Vivre avec un pansement pour guérir
le paradoxe. Et d’abord faut-il le guérir, l’atténuer,
l’enfouir ou s’y habituer et continuer à se regarder dans la
glace en pensant qu’avec un visage d’homme bien nourri,
tout était en place pour cicatriser la blessure ? N’y avait-il
pas une botte secrète ?
13Apercevant les banderoles de la ligue des Droits de
l’Homme, Georges se joignit discrètement à eux l’esprit
vide, légèrement euphorique, esseulé au milieu de la
manifestation, suivant l’allure. Parfois les souvenirs se
télescopent, s’appellent, se conjuguent. Ils sont
programm&

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