Chronique d une aventure surréaliste IV
226 pages
Français

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Chronique d'une aventure surréaliste IV , livre ebook

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226 pages
Français

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Description

Cette chronique en quatre volumes n'obéit qu'au temps de la poésie. Loin de rendre compte d'une banale activité quotidienne, ces journaux placés délibérément sous le signe ascendant sont comme une vaste plage imaginaire sur laquelle s'inscrivent, à la manière des laisses déposées par la mer, les traces du flux et du reflux des jours et des nuits. Ce long récit permet de croiser des personnes et des thèmes récurrents - Nerval, Hölderlin et les romantiques allemands, André Gaillard, Joë Bousquet, André Breton et les surréalistes qui furent des amis proches de l'auteur.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2012
Nombre de lectures 19
EAN13 9782296480025
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0950€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Chronique d’une aventure surréaliste
DU MÊME AUTEUR
Introduction à la lecture de Benjamin Péret (Le terrain vague)
René Crevel (Seghers, « Poètes d’aujourd’hui »)
Carrefour des errances (Éric Losfeld, »Le désordre »)
La Voix pronominale (Ellébore)
Ah ! vous dirai-je maman ! (Ellébore)
Bonjour Monsieur Courtot ! (Ellébore)
Victor Segalen (Henri Veyrier)
Le Ferouer (Ellébore)
Léautaud (Artefact)
Une Épopée sournoise (José Corti)
Rivages et mirages d’un promeneur, Gilles Ghez (Galerie Pascal Gabert)
Journal imaginaire de mes prisons en ruines (José Corti)
L’Obélisque élégiaque (François Bourin)
Les Pélicans de Valparaiso (le cherche midi)
La Barre d’appui (Manière noire)
Je de mots (Bari, Italie, Crav. B.A.Graphis)
Les Ménines (le cherche midi)
Ouvrages collectifs
Discours (Plasma)
Benjamin Péret (Henri Veyrier)
Blaise Cendrars (Henri Veyrier)
Debenedetti sur l’outre-vif (Ellébore)
Du surréalisme et du plaisir (José Corti)
Lettres à la cantonade, de Pierre Schumann Audrycourt (Éric Losfeld)
André Breton ou le surréalisme, même (L’Âge d’homme)
Jean Schuster, Une île à trois coups d’aile (le cherche midi)
Jean Bazin, Figures de proie (Le Grand Tamanoir)
Jérôme Duwa, 1968, année surréaliste (Imec éditeur)

Traduction en collaboration avec l’auteur
La Plaisanterie, de Milan Kundera (Gallimard)
Claude Courtot


Chronique
d’une aventure
surréaliste

IV


L’Harmattan
Illustration de couverture :
Guy Roussille, Wantok ou le vol des libellules , 2010


© L’Harmattan, 2012
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-56899-0
EAN : 9782296568990

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Journal 52 janvier ~ février 2008
3 janvier
« Je referme la partition en souriant. »
Pourquoi nier que pendant quelques secondes la pensée me vint de mettre ici un point final à ces laisses ? Ce serait précisément rechercher une fin littéraire. Or il s’agit de poésie.
4 janvier
Le musée de la musique présente une exposition d’œuvres plastiques inspirées par Wagner, Visions d’artistes. Ensemble décevant, parfois même consternant, mais sauvé naturellement par la musique de Wagner diffusée dans les écouteurs fournis par le musée. On ne saurait mieux démontrer ce que j’ai toujours soutenu : on peut mettre de la musique sous des textes ou des images, mais illustrer la musique – je ne dis pas rêver à partir d’elle – est nécessairement réducteur. Je me suis plusieurs fois surpris au cours de ma visite, en train d’écouter les pages de Wagner sans rien regarder des tableaux qui les racontaient. Au mieux la musique ne peut susciter que des œuvres abstraites.
Quant à la prétendue « musique » des vers ou des phrases – sonorités, rythme et autres sanglots longs des violons – à laquelle se réfère Yves Bonnefoy dans son trop ambitieux essai L’Alliance de la poésie et de la musique (2007) que vient de m’offrir mon ami Jean Bazin avec une attention pleine d’humour, elle n’a strictement rien à voir avec la musique, c’est proprement là un abus de langage.
Bach composant à partir des lettres de son nom BACH qui, en allemand, désignent des notes, ou Schumann écrivant ses Variations ABEGG, du nom de Melle Pauline Abegg (ABEGG = la si-bémol mi sol sol) soulignent bien l’aspect souverainement arbitraire de la musique par rapport à la langue. La poésie de la musique ne passe en aucun cas par les mots. Dans les lieder ou l’opéra, la musique demeure parallèle au texte – l’ensemble donne à ces œuvres une puissance qui transcende le texte (ce qui est particulièrement évident lorsque celui-ci est médiocre).
Quant aux fameuses correspondances
« Il est des parfums frais comme des chairs d’enfants,
Doux comme des hautbois, verts comme les prairies… »
on remarquera qu’elles s’établissent entre « les parfums, les couleurs et les sons ». Les mots n’y participent pas. Ils ne sont là que pour dire les synesthésies.
6 janvier
Nul n’a mieux parlé de Rimbaud que son ami Verlaine. Il est bon d’oublier un moment le fatras d’exégèses qui recouvre la vie et l’œuvre de Rimbaud pour en revenir à l’origine, au tout premier témoignage, celui du poète qui partagea ses délires, ses illusions et ses souffrances. Je relis avec bonheur les textes que Verlaine lui a consacrés. Il y a là, exprimées depuis plus d’un siècle, des paroles définitives. Ainsi ce texte daté de 1884, une époque où tous ignorent ce que Rimbaud est devenu, mais où seul Verlaine sait ce qu’il vaut :
« Félix Fénéon a dit, en parlant comme il faut des Illuminations d’Arthur Rimbaud, que c’était en dehors de toute littérature et sans doute au-dessus. On pourrait appliquer ce jugement au reste de l’œuvre, Poésies et Une saison en enfer . On pourrait encore reprendre la phrase pour mettre l’homme en dehors, en quelque sorte, de l’humanité et sa vie en dehors et au-dessus de la commune vie. Tant l’œuvre est géante, tant l’homme s’est fait libre, tant la vie passa fière, si fière qu’on n’a plus de ses nouvelles et qu’on ne sait pas si elle marche encore. Le tout simple comme une forêt vierge et beau comme un tigre. Avec des sourires et de ces sortes de gentillesses ! »
Il faut croire que j’associe désormais – depuis l’été dernier – Rimbaud à Marseille où il vint s’échouer pour mourir. Il a suffi que je relise cet hommage de Verlaine pour que cette nuit, je parcoure, guidé par un jeune garçon, secret échanson de quelque dieu obscur, la ville de Marseille, du tribunal jusqu’au Vieux-Port, à la recherche de je ne sais quel personnage de ma connaissance, perdu de vue depuis des années.
8 janvier
Ma fille, grande admiratrice du baryton allemand Matthias Goerne, m’a offert un de ses disques, magnifique : le Liederkreis opus 39 et les 12 Gedichte opus 35 de Schumann. Le Liederkreis est composé à partir de poèmes d’Eichendorff qui évoquent tous les grands thèmes du romantisme allemand : le Rhin et les châteaux qui le bordent, la Lorelei, les forêts… Les 12 poèmes de Kerner datent de 1840, une époque heureuse de la vie de Schumann – il vient enfin d’épouser Clara – et pourtant son inspiration demeure sombre.
Qu’est-ce qui fascine Schumann dans l’interrogation de Kerner ? Brigitte François-Sappey rappelle que Kerner fut médecin, disciple du docteur Autenrieth de Tübingen qui tenta de soigner Hölderlin : « Peut-être parce qu’il était entré dans l’intimité de Hölderlin et de Lenau, les deux grands poètes fous de l’Allemagne, Kerner avait inspiré au Robert de 17 ans ses tout premiers essais mélodiques, et aussi à la très jeune Clara. » ( Schumann , Fayard, p. 44)
Pourquoi cette question de Schumann, par Kerner interposé
« Wer machte dich so krank ? » (Qui t’a rendu si malade ?)
Le dernier lied Alte Laute (Vieux airs) n’évoque peut-être le passé que pour conjurer le futur.
« Die Tage sind vergangen ;
mich heilt kein Kraut der Flur ;
und aus dem Traum, dem bangen,
weckt mich ein Engel nur »
(« Les jours se sont enfuis, nulle herbe ne saurait me guérir ; et seul un ange pourrait me tirer de mon songe angoissé. »)
Schumann a-t-il l’obscur pressentiment de la folie qui le condamnera au silence, ce silence dans lequel il ne percevra plus que la musique des anges ?
16 janvier
J’aperçois dans une librairie, sur un présentoir publicitaire, plusieurs exemplaires d’un même roman d’une ancienne élève. Je reconnais sa photographie sur la bande du livre. Elle est toujours aussi charmante. Née en 1972, elle a l’âge de ma fille. Elle ne fut jamais dans ma classe, mais élève de première dans une institution privée voisine en laquelle elle avait peu confiance, elle prenait avec moi au lycée Janson-de-Sailly des cours particuliers de français. Ses parents affirmaient qu’elle avait la vocation d’écrivain chevillée au corps depuis la petite enfance. C’était une jeune fille brillante, très intéressée en effet par la littérature, sensible à la poésie

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