L étranger dans la ville
202 pages
Français
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Description

Cet ouvrage se propose d'explorer la problématique de "l'étranger dans la ville" dans le monde anglophone, à la fois dans le champ de la littérature britannique et américaine, ainsi que dans le domaine du cinéma américain. On trouvera dans ce recueil des essais éclairant la diversité du regard de l'étranger sur la ville telle qu'elle apparait sous la plume d'auteurs britanniques et américain, et la caméra de cinéastes américains du 19e au 21e siècle.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2013
Nombre de lectures 12
EAN13 9782336323695
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Sous la coordination de Odile Boucher-Rivalain, Peggy Blin-Cordon, Françoise Martin-McInnes et François Ropert
L’étranger dans la ville
L’étranger dans la ville
Sous la direction de
Odile Boucher-Rivalain, Peggy Blin-Cordon,Françoise Martin-McInnes et François Ropert
L’étranger dans la ville
CICC (Laboratoire de recherche Civilisations et Identités Culturelles Comparées, EA 2529)
Couverture :31st street, Backgroundsarchive
© L’Harmattan, 2013 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-00603-1 EAN : 9782343006031
INTRODUCTION
Le colloque organisé par le C.I.C.C., laboratoire de re-cherches transdisciplinaire de l’Université de Cergy-Pontoise, en mars 2012, se proposait d’explorer la problématique de « l’étranger dans la ville » dans le monde anglophone, à la fois dans le champ de la littérature britannique et américaine, ainsi que dans le domaine du cinéma américain.
S’interroger sur « l’étranger dans la ville » dans toute l’ambiguïté de l’expression suppose d’étudier les modalités fluctuantes d’inscription de la place de l’étranger dans le con-texte urbain.
Dans la section de cet ouvrage dédiée à la littérature bri-tannique, les textes présentés ont pour théâtre une ville ima-ginaire comme Christminster et Casterbridge, dansThe Mayor of Casterbridge etJude the Obscure de Thomas Hardy (texte de Peggy Bin-Cordon), la ville anonyme en ruines deThe Lost TravellerRuthven Todd (texte de Françoise Dupeyron- de Lafay) mais aussi des villes réelles du Royaume Uni : le Londres de la deuxième guerre mondiale dansNon Combat-tant and OthersRose Macaulay (texte de Juliana Lopouk- de hine), et le Dublin contemporain deThe Swing of Things de Sean O’Reilly (texte de Michel Brunet). Mais même dans son aspect le plus réaliste, la ville présente un caractère fan-tasmatique qui reflète les psychoses du sujet qui tente de l’investir.
La ville, dans un premier temps, se fait refuge. Il s’agit d’un lieu de conquête pour des personnages bien souvent en fuite : ils veulent laisser derrière eux des origines modestes
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ou un lourd passé chez Hardy et O’Reilly, ou la guerre chez Macaulay. Cependant, ce refuge synonyme de tant, de trop d’espoirs, se révèle être un lieu pour le moins hostile, et par-fois toxique. La projection mentale des personnages sur les murs de la ville transforme celle-ci en révélateur de leur re-foulé. La ville exsude le désarroi de Christopher et révèle sa folie, elle offre un terrain parfait pour faire renaître le passé honni de Henchard et Jude, elle accueille, en plein cœur de Londres, un champ de bataille dans lequel Alix se retrouve malgré elle, et redevient prison pour Noel, qui rejoue une incarcération traumatisante dans les geôles d’Irlande du Nord. Dans cet espace métamorphique et versatile, le sujet perd tout point de repère.
La ville insaisissable semble également accueillir une tem-poralité altérée, voire corrompue, où présent, passé et futur se confondent pour achever de déstabiliser le sujet. Atempo-relle et anamorphique chez Todd, présentant l’effraction du présent d’un ailleurs qui ne parvient jamais à se sédimenter chez Macaulay, diachronique entre autres chez Hardy, ou « surmoderne » chez O’Reilly, la cité offre une dynamique temporelle complexe. Les personnages, en perpétuel déca-lage, ne parviennent pas à s’y inscrire, à l’image de Boyle, le personnage de O’Reilly, sans cesse en retard, «out of sync», nous dit le texte. Cette problématique temporelle est bien souvent relayée par la narration elle-même qui, dans beau-coup d’ouvrages étudiés, s’affranchit d’une certaine linéarité pour mêler catalepses, répétitions et analepses.
Corps étranger que la ville ne parvient pas à digérer, le su-jet dans les textes présentés ici devient anonyme (Henchard chez Hardy), est dépossédé de son identité, de sa voix, voire même métamorphosé au sens kafkaïen du terme lorsque le personnage de Todd se transforme en oiseau, alors irrémé-
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diablement devenu étranger à lui-même. La ville est en effet le théâtre de multiples hallucinations (les fantômes de Jude à Christminster, les hallucinations de Boyle à Dublin, les illu-sions d’Alix à Londres) : elle semble même provoquer cette effraction de la réalité du sujet, qui, à présent vulnérable dans un monde sans repères, est, comme l’écrit Françoise Du-peyron-Lafay, « égaré » au sens psychique du terme.
Ses murs, dans un mouvement spéculaire révélateur, tra-hissent les événements extérieurs (les placards deNon Com-battant and Others), la décrépitude d’un sujet (les ruines de Ruthven Todd), ou l’inadaptabilité des personnages à l’environnement urbain (le nom de Farfrae vient recouvrir celui de Henchard à l’endroit où celui-ci a travaillé). La mé-taphore du palimpseste est donc naturellement présente dans les trois textes, tout particulièrement dansNon Combattant and Others, dans lequel les signes se succèdent, inscrits les uns sur les autres sur les murs de la ville, réaffirmant l’idée que tout est transitoire. Il en va de même pour Dublin dansThe Swing of Things, cité sans mémoire dans laquelle s’écrit un moment de l’histoire auquel le personnage principal ne semble pas appartenir. La cité devient alors incompréhen-sible, et les signes qu’elle affiche sont autant de hiéroglyphes insaisissables, une langue étrangère pour un étranger à la ville. Celle-ci échappe au sens. Chez Hardy, c’est au contraire une ville saturée de références inscrites dans la pierre et les monuments de Christminster, à l’histoire lourde et scléro-sante, qui tue dans l’œuf les ambitions universitaires d’un paysan en quête d’utopie intellectuelle. Parfois, lorsque les murs de la cité recouverts de ces signes se mettent à parler, leur voix vient du fond des âges pour couvrir celle des per-sonnages, qui en sont alors dépossédés (Jude citant sans cesse Job chez Hardy, Alix, mutique et balbutiante chez Ma-
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