La philosophie dans ses rapports avec la science et la religion
94 pages
Français

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Description

Extrait : "Ce n'est pas une apologie de la philosophie qu'on a prétendu faire dans les pages qui vont suivre : la philosophie peut s'en passer ; on a simplement voulu expliquer une idée qui est en général trop peu comprise. La philosophie a eu des détracteurs et des ennemis dans tous les temps depuis Socrate ; de nos jours, elle n'est pas beaucoup mieux vue, quoiqu'on ne la poursuive plus par des supplices."

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Nombre de lectures 79
EAN13 9782335038378
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0006€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

EAN : 9782335038378

 
©Ligaran 2015

PREMIÈRE PARTIE La philosophie au XIX e siècle
Ce n’est pas une apologie de la philosophie qu’on a prétendu faire dans les pages qui vont suivre : la philosophie peut s’en passer ; on a simplement voulu expliquer une idée qui est en général trop peu comprise. La philosophie a eu des détracteurs et des ennemis dans tous les temps, depuis Socrate ; de nos jours, elle n’est pas beaucoup mieux vue, quoiqu’on ne la poursuive plus par des supplices. Mais bien des gens très sérieux la dédaignent comme une rêverie ; d’autres la repoussent comme dangereuse ; le plus grand nombre l’ignore. Les dédains et les craintes ne peuvent être justifiés ; l’ignorance seule est excusable et inoffensive. C’est pour dissiper de fâcheuses préventions que nous essayerons, après tant d’autres, de montrer ce que la philosophie est en elle-même, et quels sont ses rapports avec les sciences et avec la religion. Ces rapports, qui ont existé à toutes les époques, subsisteront tant que l’esprit humain sera ce qu’il est ; mais peut-être ne s’en est-on pas toujours rendu compte assez précisément. Aujourd’hui, il est plus facile qu’autrefois de faire voir ce qu’ils sont. Si l’on y est parvenu dans ce livre, il ne sera pas tout à fait inutile.
La philosophie n’est que l’exercice de la raison dans toute son indépendance et dans sa portée la plus haute ; et comme l’esprit humain dans tous ses actes, quelle qu’en soit l’application, extérieure ou intérieure, s’affirme implicitement lui-même en ayant foi aux facultés dont il se sert, il en résulte que la philosophie est nécessairement spiritualiste. Tous les systèmes sans exception ont cette base commune et inévitable ; mais les uns la reconnaissent ; les autres, tout en s’y appuyant instinctivement, ne savent pas que, sans elle, ils seraient impossibles. La démonstration de cette vérité primordiale fait la gloire de Descartes. C’est l’ aliquid inconcussum , qu’on pouvait sentir vaguement avant le Discours de la méthode, mais que, depuis cette révélation irréfutable, on ne saurait contredire, pour peu qu’on y réfléchisse. Qu’on ne s’étonne donc pas de trouver ici l’affirmation absolue de cet axiome, le premier et le plus évident de tous ; sans lui, il n’y a pas de philosophie réelle. En réponse à ceux qui nient ce principe, on peut leur recommander, avant tout, de s’entendre avec eux-mêmes et de savoir ce qu’ils font.
Il est d’autant plus opportun d’insister sur ce point, que la crise morale et politique que traverse notre pays est plus grave. La philosophie ne peut à elle seule guérir un mai aussi profond ; mais elle peut contribuer au salut public en une certaine mesure. Ce serait encore son devoir de se faire entendre, même en supposant qu’elle parlât dans le désert. La discipline philosophique est fort austère ; elle ne peut jamais avoir qu’un très petit nombre d’adhérents. Mais la philosophie n’a pas à s’inquiéter du succès ; elle ne recherche que la vérité, bien assurée qu’une vérité découverte n’est jamais stérile. Le matérialisme ajoute de nouveaux désordres à tous ceux qui menacent notre société ; il tarit les sources les plus vives de l’âme humaine. Le combattre, c’est agir en bon citoyen, au moins autant qu’en philosophe. À cette heure, il a une vogue que secondent les rapides progrès de la démocratie ; mais il est hors d’état de remporter une victoire définitive. Comme toujours, il devra périr sous la réprobation du genre humain ; mais son triomphe éphémère pourra causer bien des désastres. Les sciences se font ses complices, par faiblesse, et peut-être aussi par un orgueil mal placé. C’est un motif de plus pour que la philosophie ne garde pas le silence, et pour qu’elle montre, une fois encore, quels sont les fondements sur lesquels reposent la dignité et la force des nations. La nôtre ne fait pas exception ; et les lois éternelles lui sont applicables, ainsi qu’à toutes les nations qui ont figuré, avant nous, sur le théâtre de l’histoire.
Quel est l’état actuel de la philosophie dans le monde ? Quelle place tient-elle aujourd’hui dans la vie des peuples ? Quel est son avenir ? C’est là une question qui, au premier coup d’œil, paraît bien vaste, mais qui n’est difficile qu’en apparence ; elle est très claire dans ses traits les plus généraux. À cette heure, on connaît l’humanité tout entière ; on sait à quel degré de science et de lumières sont parvenues chacune des races qui la composent. Il est de ces races qui ne sont pas encore arrivées à la philosophie ; peut-être même sont-elles condamnées à n’y arriver jamais. L’histoire doit les négliger, en attendant qu’elles méritent d’attirer ses regards et ses études. Ainsi, l’immense continent de l’Afrique n’offre pas trace de pensée philosophique. Cependant l’Islamisme, qui domine cette partie de la terre, n’a pas toujours ignoré la métaphysique ; il l’a cultivée, à plusieurs moments de son existence, et dans quelques-unes des contrées qu’il a successivement conquises ; mais nulle part, il ne paraît, de notre temps, s’en préoccuper de nouveau.
En Asie, deux grandes nations, peut-être les plus anciennes du globe, l’Inde et la Chine, ont abordé la philosophie. Mais la Chine, tout ingénieuse qu’elle est et quoique fort intelligente, n’a pas pu s’élever au-dessus des essais les plus informes ; et elle ne semble pas près de faire mieux. Confucius et Lao-tseu figurent à peine parmi les philosophes, malgré l’influence morale qu’ils ont eue sur leurs compatriotes.
Quant à l’Inde, elle est métaphysique jusqu’à l’excès. Elle a même de vrais systèmes de philosophie, bien que ces systèmes soient peu méthodiques. Les Darçanas (ou théories) sont de temps immémorial au nombre de six, et ils n’ont jamais été davantage. Fort anciens, ils sont restés uniques ; et depuis vingt siècles, ils sont les seuls que le génie hindou ait produits. Ce génie redeviendra-t-il un jour plus fécond ? À l’école de la science reçue de l’étranger, retrouvera-t-il des inspirations mieux réglées ? L’avenir nous l’apprendra.
Reste l’Europe. Entre les nations dont elle est formée, il n’y en a guère que quatre où la philosophie fleurisse : l’Allemagne, l’Angleterre, la France et l’Italie. Et encore, chez la plupart de ces nations, la philosophie est-elle loin d’être pratiquée dans toute son étendue. L’Allemagne, à la fin du siècle dernier et aux premières années de celui-ci, a jeté le plus vif éclat. Un instant, on a pu croire que Kant allait restaurer la métaphysique, comme il le projetait ; mais il n’a fait que la rendre encore moins recommandable qu’elle ne l’avait paru au XVIII e  siècle. Il l’a perdue dans des subtilités et dans un demi-scepticisme, qui, chez ses successeurs immédiats, ont abouti bien vite à un idéalisme exagéré. L’esprit allemand n’a pu se tenir sur ces bases étroites et instables ; et bientôt il s’est précipité dans un matérialisme athée, ou dans un pessimisme romanesque, qui n’est qu’une réminiscence et un contrecoup des aberrations bouddhiques, encore assombries. Le pessimisme est un cri de désespoir, qui n’atteste que la défaillance de ceux qui le poussent ; et ces angoisses, qui peuvent bien n’être pas entièrement sincères, sont un spectacle plus douloureux qu’instructif. On peut plaindre les individus qui les endurent ; mais ce n’est pas une école à laquelle se mettra le genre humain.
En Angleterre, la philosophie a rencontré d’autres obstacles, qui l’entravent singulièrement. Jamais, dans ce noble pays, d’une énergie si puissante en tous genres, la philosophie n’a trouvé sa véritable voie. Bacon a contribué le premier à l’égarer. Le bruit de sa gloire a dépassé de beaucoup ses services. Sa méthode, fort mal employée par l’auteur lui-même, n’avait rien de neuf. Bien avant ses conseils, l’observation des phénomènes avait été à l’usage de l’Antiquité. Sans doute, il était bon de la ressusciter, après le Moyen Âge, qui l’avait fatalement négligée ; mais ce n’était pas une découverte, ni surtout un instrument inconnu, Novum Organum, que le chancelier d’Angleterre apportait à l’esprit moderne. Est-ce que Dieu n’avait pas, dès l’origine, donné à l’homme toutes les facultés nécessaires, et n’était-ce pas une tentative bien vaine que de prétendre y ajouter ? Bacon a eu aussi le tort d’inaugurer la soi-disant philosophie naturelle, qui ne serait, si l’on n’y prend garde, que la négation et l’abandon de la philosophie même.
Depuis Bacon, l’esprit anglais n’a cessé de glisser sur cette pente irrésistible, que le sage Locke lui-même avait subie. Les Écossais, Hutcheson et Reid en tête, ont versé, eux si prudents, dans cette &

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