Lettres choisies de Mme de Sévigné
121 pages
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Lettres choisies de Mme de Sévigné , livre ebook

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Description

Extrait : "DE MADAME DE SEVIGNE AU COMTE DE BUSSY. A Paris, ce 25 novembre 1655. Vous faites bien l'entendu, M. le comte ; sous ombre que vous écrivez comme un petit Cicéron, vous croyez qu'il vous est permis de vous moquer des gens : à la vérité, l'endroit que vous avez remarqué m'a fait rire de tout mon cœur ; (...)"

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Publié par
Nombre de lectures 49
EAN13 9782335007312
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0006€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

EAN : 9782335007312

 
©Ligaran 2014

De Madame de Sévigné à Ménage
Paris, dimanche 12 janvier 1654.
Je suis agréablement surprise de votre souvenir, monsieur, il y a longtemps que vous aviez retranché les démonstrations de l’amitié que je suis persuadée que vous avez toujours pour moi. Je vous rends mille grâces, monsieur, de vouloir bien les remettre à leur place, et de me témoigner l’intérêt que vous prenez à mon retour et à ma santé. Mon grand voyage, dans une si rude saison, ne m’a point du tout fatiguée et ma santé est d’une perfection que je souhaiterais à la vôtre. J’irai vous en rendre compte, monsieur, et vous assurer qu’il y a des sortes d’amitié que l’absence et le temps ne finissent jamais.

La marquise de Sévigné.
Au Comte de Bussy
Paris, le 14 juillet 1655.
Voulez-vous toujours faire honte à vos parents ? Ne vous lasserez-vous jamais de faire parler de vous toutes les campagnes ? Pensez-vous que nous soyons bien aises d’entendre dire que M. de Turenne mande à la cour que vous n’avez rien fait qui vaille à Landrecies ? En vérité, c’est avec un grand chagrin que nous entendons dire ces choses-là ; et vous comprenez bien de quelle sorte je m’intéresse aux affronts que vous faites à notre maison. Mais je ne sais, mon cousin, pourquoi je m’amuse à plaisanter, car je n’en ai pas le loisir, et, si peu que j’aie à vous dire, je le devrais dire sérieusement. Je vous dis donc que je suis ravie du bonheur que vous avez eu à tout ce que vous avez entrepris. Je vous ai écrit une grande lettre de Livry, que je crains bien que vous n’ayez pas reçue ; j’aurais quelque regret qu’elle fût perdue, car elle me semblait assez badine.
Je me trouvais hier chez madame de Monglas qui avait reçu une de vos lettres, et madame de Gouville aussi : je croyais en avoir une chez moi ; mais je fus trompée dans mon attente, et je jugeai que vous n’aviez pas voulu confondre tant de rares merveilles. J’en suis bien aise, et je prétends avoir un de ces jours une voiture à part. Adieu, mon cousin, le gazetier parle de vous légèrement : bien des gens en ont été scandalisés, et moi plus que les autres ; car je prends plus d’intérêt que personne à tout ce qui vous touche. Ce n’est pas que je ne vous conseille de quitter Renaudot de ses éloges, pourvu que M. de Turenne et M. le cardinal soient toujours bien informés de vos actions.
Au Comte de Bussy
À Paris, ce 25 novembre 1655.
Vous faites bien l’entendu, monsieur le comte ! Sous ombre que vous écrivez comme un petit Cicéron, vous croyez qu’il vous est permis de vous moquer des gens : à la vérité, l’endroit que vous avez remarqué m’a fait rire de tout mon cœur ; mais je suis étonnée qu’il n’y eut que cet endroit de ridicule, car, de la manière dont je vous écrivis, c’est un miracle que vous ayez pu comprendre ce que je voulais vous dire, et je vois bien qu’en effet vous avez de l’esprit, ou que ma lettre est meilleure que je ne pensais : quoi qu’il en soit, je suis bien aise que vous ayez profité de l’avis que je vous donnais.
On m’a dit que vous sollicitiez de demeurer sur la frontière cet hiver : comme vous savez, mon pauvre comte, que je vous aime un peu rustaudement, je voudrais qu’on vous l’accordât ; car on dit qu’il n’y a rien qui avance tant les gens, et vous ne doutez pas de la passion que j’ai pour votre fortune : ainsi, quoi qu’il puisse arriver, je serai contente. Si vous demeurez sur la frontière, l’amitié solide y trouvera son compte ; si vous revenez, l’amitié tendre sera satisfaite.
Adieu, mon cher cousin : mandez-moi s’il est vrai que vous vouliez passer l’hiver sur la frontière, et croyez bien que je suis la plus fidèle amie que vous ayez au monde.
À Ménage
23 juin 1668.
Votre souvenir m’a donné une joie sensible, et m’a réveillé tout l’agrément de notre ancienne amitié. Vos vers m’ont fait souvenir de ma jeunesse, et je voudrais bien savoir pourquoi le souvenir de la perte d’un bien aussi irréparable ne donne point de tristesse. Au lieu du plaisir que j’ai senti, il me semble qu’on devrait pleurer : mais, sans examiner d’où peut venir ce sentiment, je veux m’attacher à celui que me donne la reconnaissance que j’ai de votre présent. Vous ne pouvez douter qu’il ne me soit agréable, puisque mon amour-propre y trouve si bien son compte, et que j’y suis célébrée par le plus bel esprit de mon temps. Il faudrait, pour l’honneur de vos vers, que j’eusse mieux mérité tout celui que vous me faites. Telle que j’ai été, et telle que je suis, je n’oublierai jamais votre véritable et solide amitié, et je serai toute ma vie la plus reconnaissante comme la plus ancienne de vos très humbles servantes.

La marquise de Sévigné.
Au Comte de Bussy-Rabutin
À Paris, ce 4 septembre 1668.
Levez-vous, comte ; je ne veux point vous tuer à terre, ou reprenez votre épée pour recommencer notre combat. Mais il vaut mieux que je vous donne la vie, et que nous vivions en paix. Vous avouerez seulement la chose comme elle s’est passée, c’est tout ce que je veux. Voilà un procédé assez honnête : vous ne me pouvez plus appeler injustement une petite brutale.
M. de Montausier vient d’être fait gouverneur de M. le Dauphin.

Je t’ai comblé de biens ; je t’en veux accabler.
Adieu, comte. Présentement que je vous ai battu, je dirai partout que vous êtes le plus brave homme de France, et je conterai notre combat le jour que je parlerai des combats singuliers. Ma fille vous fait ses compliments. L’opinion que vous avez de sa fortune nous console un peu.
Au Comte de Bussy-Rabutin
À Paris, ce 4 décembre 1668.
N’avez-vous pas reçu ma lettre où je vous donnais la vie, et où je ne voulais pas vous tuer à terre ? J’attendais une réponse sur cette belle action ; vous n’y avez pas pensé ; vous vous êtes contenté de vous relever et de reprendre votre épée, comme je vous l’ordonnais. J’espère que ce ne sera pas pour vous en servir jamais contre moi.
Il faut que je vous apprenne une nouvelle qui, sans doute, vous donnera de la joie : c’est qu’enfin la plus jolie fille de France épouse, non pas le plus joli garçon, mais un des plus honnêtes hommes du royaume ; c’est M. de Grignan, que vous connaissez il y a longtemps. Toutes ses femmes sont mortes pour faire place à votre cousine, et même son père et son fils, par une bonté extraordinaire ; de sorte qu’étant plus riche qu’il n’a jamais été, et se trouvant d’ailleurs, et par sa naissance, et par ses établissements, et par ses honnêtes qualités, tel que nous le pouvions souhaiter, nous ne le marchandons point, comme on a accoutumé de faire : nous nous en fions bien aux deux familles qui ont passé devant nous. Il paraît fort content de notre alliance ; et aussitôt que nous aurons des nouvelles de l’archevêque d’Arles son oncle, son autre oncle l’évêque d’Uzès étant ici, ce sera une affaire qui s’achèvera avant la fin de l’année. Comme je suis une dame assez régulière, je n’ai pas voulu manquer à vous en demander votre avis et votre approbation. Le public paraît content, c’est beaucoup ; car on est si sot, que c’est quasi sur cela qu’on se règle.
À M. de Grignan
À Paris, ce mercredi 6 août 1670.
Est-ce qu’en vérité je ne vous ai pas donné la plus jolie femme du monde ? Peut-on être plus honnête, plus régulière ? Peut-on vous aimer plus tendrement ? Peut-on avoir des sentiments plus chrétiens ? Peut-on souhaiter plus passionnément d’être avec vous, et peut-on avoir plus d’attachement à tous ses devoirs ? Cela est assez ridicule que je dise tant de bien de ma fille ; mais c’est que j’admire sa conduite comme les autres, et d’autant plus que je la vois de plus près, et qu’à vous dire vrai, quelque bonne opinion que j’eusse d’elle sur les choses principales, je ne croyais point du tout qu’elle dût être exacte sur toutes les autres au point qu’elle l’est. Je vous assure que le monde aussi lui rend bien justice, et qu’elle ne perd aucune des louanges qui lui sont dues. Voilà mon ancienne thèse qui me fera lapider un jour ; c’est que le public n’est ni fou ni injuste : madame de Grignan doit être trop contente de lui pour disputer contr

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