Le Chapeau-cloche
172 pages
Français

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Le Chapeau-cloche , livre ebook

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Description

Une histoire d'amour au coeur de la Grande Guerre et le combat d'une femme pour sa liberté. Juin 1914. L'été s'annonce radieux. Maxime Bedu est chargé de photographier Blanche qui doit épouser, six semaines plus tard, un riche veuf de plus de vingt ans son aîné. En s'entretenant avec la jeune fille, il apprend qu'elle s'est jetée dans cette union par dépit amoureux. La rencontre entre les deux jeunes gens se transforme en idylle. Eclate alors la guerre avec son cortège de deuils et de destructions. Eprise de liberté et de justice, Blanche, ne supporte pas sa condition d'épouse soumise. Le souvenir de Maxime, dont elle ignore le sort, et son amour pour lui, vont l'aider à s'affranchir et à prendre sa destinée en main. Arrivera-t-elle à trouver le bonheur et reconstruire sa vie sur les ruines fumantes de l'ancien monde ? A travers le combat de Blanche pour s'émanciper apparaît en filigrane celui des femmes qui, au sortir de la première guerre mondiale, militent pour obtenir plus de reconnaissance et le droit de vote.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 28 février 2015
Nombre de lectures 39
EAN13 9782365752701
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Michèle Dassas



Le Chapeau-cloche


Parcours de femme






Préface

Dans les premières décennies du XX e siècle, les femmes étaient marginalisées dans presque tous les secteurs de la société. Elles ne pouvaient ni voter, ni exercer une profession, elles n’avaient pas plus le droit de posséder des biens propres. Elles représentaient en fait tout un peuple obscur, anonyme, privé d’identité, qui passait, comme le voulait le code Napoléon, d’une sujétion à une autre, du père au mari. Elles se taisaient, travaillaient, s’usaient, s’épuisaient, mais leur silence était traversé de murmures, de plaintes et de récriminations. Elles voulaient des choses folles, pouvoir s’instruire à l’égal des hommes, fréquenter les mêmes écoles, accéder aux universités, disposer, quand elles travaillaient, de leur salaire, devenir en un mot maîtresses d’elles-mêmes.
Blanche, l’héroïne du Chapeau cloche , appartient à cette armée d’insoumises. Mariée à un homme qu’elle croyait aimer, elle se heurte à un tyran, monstre de misogynie. Inconsciente de sa chaîne, elle en prend conscience trop tardivement, car le piège, déjà, s’est refermé sur elle. D’abord discrètes, les réprimandes du maître-époux deviennent sèches, impérieuses, cassantes. Elle se découvre prisonnière, au sens propre du terme, puisque son mari n’hésite pas à l’enfermer à double tour. Une créature courbée, voilà ce qu’il entend faire d’elle. Mais Blanche n’est pas une de ces femmes-esclaves qui se laissent dévorer sans mot dire. Elle veut en sortir à tout prix. Fuir... À cette époque, les mots « désertion conjugale » suffisaient pourtant bien souvent à réprimer toute envie de rébellion. Se séparer, divorcer, c’est pour une famille de la bourgeoisie bien-pensante comme celle de Blanche l’infamie. Fuir... Ce qui commence va être difficile, mais elle sait que ce sera de toute façon meilleur. Ce qui commence, c’est l’indépendance, le travail, la liberté. Dans cette quête difficile, Blanche a une seule alliée, un modèle qui l’inspire et lui insuffle courage : Colette.
Devant Colette, ses romans, ses héroïnes, elle questionne sa propre vie. À ses yeux, l’auteur de La Vagabonde représente ce qu’elle est pour bien des lecteurs, aujourd’hui encore : une femme libre, errante, déséquilibrée parfois, qui souffre d’abandon, mais qui suit son chemin contre vents et marées, en ne comptant que sur elle. Colette, Blanche, que de ressemblances.
Très tôt, dans son œuvre, Colette a mis en scène des modèles d’indépendance. À commencer par Claudine, sa première héroïne. Jeune villageoise que le hasard a transporté dans les bras d’un mari parisien et mondain, elle goûte avec avidité à l’amour auprès de ce maître ès-volupté. Elle se prête aux exigences de son mari, Renaud, qui dans son désir de la posséder lui interdit même de fermer les yeux sous prétexte que « leur tournoiement lui appartient ». Malgré la nouveauté des plaisirs qui lui sont découverts et la satisfaction qu’elle y trouve, Claudine ne se laisse pas enfermer. Si elle souhaite que la « volonté de Renaud courbât la [sienne], que sa ténacité vint assouplir [ses] sursauts indociles », elle est sur la pente de la réaction, car elle constate que la volonté, la ténacité de Renaud ne réussissent pas à la dominer ; « Claudine, se dit-elle à elle-même, dois-tu toujours rester maîtresse de toi-même ? »
Ce désir de rester soi-même, cette volonté qui ne s’abandonne pas totalement aux mains de l’homme vont se trouver exacerbés chez Renée Néré l’héroïne de La Vagabonde . La fêlure que Claudine sentait s’accentuer entre elle et son mari n’a pas eu le temps de s’agrandir, car Renaud a eu le bon esprit de tomber malade et de mourir. Il laisse ainsi à Claudine le souvenir d’un amour tel qu’elle aurait voulu qu’il fût. Ce n’est pas le cas de Renée Néré qui a payé cher ses premières expériences matrimoniales. La jeune femme avait fait de son mari « l’unique ». Son idole avait été placée sur un piédestal trop élevé et elle n’existait que dans son ombre. Il l’a trompée, trompée comme on respire. Elle a d’autant plus souffert qu’elle n’était pas préparée à la trahison. Mais une femme de la trempe de Renée Néré – et de Blanche – ne meurt pas de chagrin ; les peines d’amour lui donnent au contraire des nerfs solides qui l’arment contre l’homme. Ce modèle de robustesse, Blanche se l’applique à elle-même et les mots de Colette semblent faits pour la décrire :
« ‘‘Elle meurt de chagrin… Elle est morte de chagrin…’’ Hochez, en entendant ces clichés, une tête sceptique plus qu’apitoyée : une femme ne peut guère mourir de chagrin. C’est une bête si solide, si dure à tuer ! […] Soyez sûrs qu’une longue patience, que des chagrins jalousement cachés ont formé, affiné, durci cette femme dont on s’écrie :
« – Elle est en acier !
« – Elle est ‘‘en femme’’, simplement et cela suffit. »
La Vagabonde , véritable hymne à la liberté, devient celui de Blanche. Comme Renée Néré, elle dénonce l’asservissement des femmes, l’oppression exercée par l’autorité maritale :
« Le mariage, c’est… c’est : ‘‘Noue-moi ma cravate !… Fous la bonne à la porte !… Coupe-moi les ongles des pieds. Lève-toi pour faire de la camomille…» […] C’est : ‘‘Donne-moi mon complet neuf, et remplis ma valise, pour que je file la retrouver…’’ Intendante, garde-malade, bonne d’enfant – assez, assez, assez ! »
Renée, brutalement trompée, ne s’abandonne pas au désespoir. Elle se ressaisit et regarde la vie en face. Elle quitte son mari et reconquiert sa liberté qui lui semblait appartenir au domaine des chimères. Tout le monde lui tourne alors le dos, car elle est une divorcée, c’est-à-dire une déclassée. Et elle, courageusement, elle fait front, et n’en relève que mieux la tête. Au lieu de se sentir humiliée, elle assume avec orgueil sa toute nouvelle condition de femme affranchie.
Colette, c’est la voix qui crie fiévreusement ce qu’on a coutume de taire, qui jette tout haut la plainte de bien des femmes privées de parole. Elle met en scène des héroïnes qui, loin de s’occuper de maternité ou de travaux ménagers, donnent à leur indépendance un tel prix qu’elles y consacrent toute leur énergie. Blanche trouve là un modèle de rupture avec tous les conformismes de la soumission. Son histoire traverse la Belle Époque finissante, la Grande Guerre, les années folles... époques de transformations profondes pour les femmes. En même temps que quelques autres, elle est en train d’inventer une société nouvelle.
Autre point de similitude, la libération du corps, maltraité, gainé, comprimé, enchaîné. Là encore, Blanche est sensible aux propos de Colette qui, dès 1909, montre les femmes condamnées, par l’étroitesse de leurs jupes, à n’avancer qu’à petits pas. Elle s’indigne surtout des corsets qui empêchent les femmes de vivre, comme cette femme qui tremble qu’« un ruban de [ses] souliers ne se dénoue », parce qu’il lui est impossible de se pencher. Voilà les femmes « transformées en saucisson rose », dit Colette. Certaines sont condamnées à ne jamais s’asseoir de la journée et elle cite même le cas d’une femme morte après avoir réduit sa taille à 38 cm. Tout comme Colette, Blanche fait partie de celles qui ont lancé le mouvement en dénouant ce carcan. La romancière était allée plus loin, en 1902, en sacrifiant sa chevelure longue d’un mètre soixante. Là encore son geste ouvrira la voie.
Par sa vie, par son œuvre, par la qualité de son regard, Colette a su et pu affirmer une indépendance qui va plus loin que la revendication féministe. Elle a su imposer une parole de femme différente, attaquer le pouvoir masculin. Elle a incité les femmes à l’exigence et à l’endurance, les poussant à organiser leur défense. Résistance à l’épreuve, au chagrin, à la guerre, au temps qui passe. Son combat est un combat personnel pour sa propre autonomie, mais il a servi tout

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