Miracle de Jean Genet
200 pages
Français

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Miracle de Jean Genet , livre ebook

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200 pages
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Description

Inclassable et dérangeant, Miracle de Jean Genet n'est pas un ovni. C'est une exégèse sans les murs, sans l'académisme universitaire habituel. C'est un long poème écrit par une captive amoureuse aussi déjantée qu'érudite ; c'est une bombe littéraire sans retardement, tout comme on a parlé de la « bombe Genet » (Jean Cocteau) au sujet de l'auteur de Miracle de la rose. Le Miracle de Jean Genet, c'est celui de la poésie qui pulvérise tous les paradigmes éculés, fait voler en éclats les flicages quels qu'ils soient, y compris ceux de la pensée.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2015
Nombre de lectures 21
EAN13 9782336366180
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Copyright
REMERCIEMENTS
Brigitte Sy,
Julien Denieuil – mise en page,
Marie-Hélène Bourcier,
Xavier Reinoso,
Marie Rousset,
Daniel Rousset,
Mounir Diari – Association J’veux m’en sortir ,
Estelle Beauvais,
Guillaume Deschamp,
Ju – La Mutinerie, Alain Cugno.









Voir catalogue L’ECARLATE en fin de volume.

ISBN : 978-2-336-71629-9
Titre

Brigitte B RAMI








Miracle de Jean Genet















L’ECARLATE
Citation


« Jamais je n’ai copié la vie – un événement ou un homme – (…) mais la vie a tout naturellement fait éclore en moi, ou les éclairer si elles y étaient, les images que j’ai traduites soit par un personnage, soit par un acte ».
Jean Genet, dans une lettre à Roger Blin

« Car le feu qui me brûle est celui qui m’éclaire »
Etienne de la Boétie
Dédicaces


À la mémoire de Marie-Thérèse Lebatteur
À la mémoire de Jean Genet
À Noémie Saidi-Cottier
À Philippe Brami
I. L E THÉÂTRE DU POUVOIR

* * *
Afin de faciliter la fluidité de la lecture, j’ai choisi de mettre, lorsque la nécessité s’imposait, à la fin des citations et entre parenthèses les abréviations des titres des œuvres de Jean Genet dont elles sont extraites selon la convention suivante :
Notre-Dame-des-Fleurs : N.D.D.F.
Miracle de la rose : M.D.L.R.
Journal du voleur : J.D.V.
Querelle de Brest : Q.D.B.
L’Ennemi déclaré : L.E.D.
Un Captif amoureux : U.C.A.
Haute surveillance : H.S.
Splendid’s : S.
Les Bonnes : L.B.
Comment jouer Les Bonnes : Comment jouer L.B.
Le Balcon : L.BA.
Les Paravents : L.P.

* * *
Prémisses, Du Pouvoir, des pouvoirs…
Au commencement, cet opuscule se croyait consacré au pouvoir dans l’œuvre fictionnelle de Jean Genet. Motif récurrent et certes majeur, pris dans ses différentes acceptions, déclinaisons, et rehaussé dans la synergie subtile de sa conjugaison par d’autres thématiques telles que la création du personnage conceptuel du criminel, la beauté sublimée et célébrée de ce dernier, mais aussi du théâtre, du rire, et de la révolte des femmes.
C’est dans sa forme surplombante, et au sens foucaldien de rapports de force, de relations de pouvoir et de points de résistance mécaniquement et aussitôt surgis, qu’il me semblait nécessaire que le pouvoir soit mis en perspective. Car il n’est pas uniquement Le Pouvoir, indélogeable et installé à une place indépassable, tirant les ficelles dirigeant les sans-grades et les “exclus” de tous poils du système ; non, il est aussi des pouvoirs, des pouvoirs accessibles, immédiats, voisins des couches sociales qui leur obéissent, dans une très longue chaîne où chaque maillon en possède une part sous une forme identifiable et fragmentée.
Si Machiavel a érigé sa pensée avec son incontournable Prince ; Foucault a réinventé le pouvoir devenu pouvoirs au pluriel, avec précision, finesse et complexité en utilisant des outils méthodologiques qui l’installent davantage dans l’immanence que dans la transcendance.
L’auteur de Surveiller et punir a su, avec justesse, se défaire du mythe d’un absolu du pouvoir appartenant à une certaine caste, s’exerçant dans les palais, les tribunaux, les institutions, les ministères ou dans des officines particulières. Le philosophe des systèmes et des représentations s’arrête sur la notion essentielle de rapports de forces qui ne se conçoivent pas obligatoirement de façon hiérarchique, explosent en tous lieux, en toutes circonstances, et sont entre les mains de personnes qui en semblent apparemment dépourvues.
Les entretiens, articles, et autre écrits plus directement politiques – que constituent les premiers articles publiés dans le Nouvel Observateur jusqu’à son dernier livre, Un Captif amoureux – n’ont pas été préférés ici car ils possèdent l’inconvénient d’exclure ou de méconnaître une donnée essentielle chez Genet : l’obliquité.
La poésie de Genet ne se soumet à aucune grille d’analyse. Toute démarche académique fait plier l’injonction, quelle que soit l’injonction, et a fortiori celle de l’exégèse, car elle requiert de la compréhension, et pour comprendre, il faut saisir l’objet, s’en emparer comme un voleur en col blanc – et souvent au corps blanc 1 prétendument cultivé . L’interprétation alors échoue, les méthodes canoniques sont prises une à une en flagrant délit (en flagrant délire ? ) d’inutilité, de grossièreté, de brutalité, voire de flicage. On arrête alors le poète comme on arraisonnait le voleur ; mais le poète a pris soin de fuir les constantes de sa propre fantasmagorie, devenant introuvable aux places assignées par les études, souvent vaines, entreprises sur son œuvre.
Il faudrait préciser en exergue que l’on butera toujours sur le noyau irréductible de ses textes. Il faudrait invariablement commencer par dire que tenter de mettre en examen un homme – dont la poésie a elle-même su déjouer les mécanismes très complexes du pouvoir, et des pouvoirs, jusqu’à créer en miroir une imposture certes, mais une imposture poétique : celle d’une nouvelle langue qui invente divinement un nouveau monde – est chose aporétique.
Il faudrait aussi rassurer, ou plutôt inquiéter, les esprits avides de nouvelles théories : l’approche systématique qui essaierait d’analyser le fonctionnement de la littérature genetienne ne peut être que spéculative, voire spécieuse. Genet se lit avec un engagement physique – j’allais écrire « viscéral » –, il se lit avec l’acceptation d’un ébranlement du corps et de la raison, ou il ne se lit pas. Tout commentaire sur un livre, une œuvre d’art, un film, etc., est par définition une tromperie. Le seul commentaire possible et honnête est de répondre par un autre livre, une autre production artistique, un film différent, etc., mis non pas en-dessous ni au-dessus de la production dont il est question mais à ses côtés.
La dénaturation – la mienne – du genre commence avec une suprématie accordée non aux textes mais à leurs constantes. Ainsi, la pièce Haute surveillance est perçue au même titre que les romans. Le premier Genet inclut romans et pièces de théâtre et possède la particularité d’intégrer des textes qui montrent davantage un pouvoir pyramidal classique qu’une explosion de rapports de force. Dans Haute Surveillance, le Pouvoir, majusculé, hiérarchisé, est représenté par le regard du surveillant général à qui rien n’a échappé depuis l’œilleton de la cellule. Dans une des versions de « cette pièce-brouillon » 2 , le représentant local de l’ordre se fait connaître à la toute fin, il a assisté à une tragédie humaine qui lui a procuré une grande satisfaction. Les conflits qui naissent entre les détenus se révèlent in fine être un divertissement offert aux instances de la domination – ici les surveillants, ou plus exactement un gardien, substantif que l’on retrouve beaucoup plus volontiers chez Genet, obéissant eux-mêmes à la direction de l’administration pénitentiaire. Administration n’étant que l’ombre effrayante et démesurée de la monstruosité qu’est le corps du ministère de la justice…
Dans sa définition stricte, le Pouvoir signifie nommer et révoquer. Dans son acception politique, le Pouvoir a besoin de théâtralité, à l’instar d’un spectacle, pour s’ériger. C’est par une mise en scène soigneuse et un partage des taches rigoureux de sa brutalité qu’il réussit à la légitimer. Sa crudité première est certes toujours présente mais atténuée par de multiples oripeaux très élaborés, sans cesse réactualisés par un travail incessant d’anticipation et d’intériorisation des lignes jaunes considérées comme ne plus devoir être franchies, mais aussi par des acceptations concédées par la force de mouvements naturellement historiques .
Les figures du Pouvoir sont elles-mêmes creuses, interchangeables, évanescentes : dans Le Balcon , le Chef de la Police est censé obéir à

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