Principes de la théorie des richesses
195 pages
Français

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Principes de la théorie des richesses , livre ebook

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Description

Extrait : "– La racine tudesque rik ou reich, qui a passé dans toutes les langues romanes comme un signe de la conquête, exprimant vaguement une idée de supériorité, de force, de puissance. Los ricos hombres se dit encore en espagnol des nobles de distinction, des grands seigneurs ; et telle est l'acceptation des mots riches hommes dans le français de Jonville. Notre idée moderne de la richesse ne pouvait être conçue par les hommes de race germanique, ni à l'époque de..."

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Nombre de lectures 14
EAN13 9782335043013
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0006€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

EAN : 9782335043013

 
©Ligaran 2015

AU LECTEUR
J’approchais déjà de la quarantaine et je n’avais encore fait paraître que des morceaux détachés, je ne m’étais essayé que dans le métier de critique, d’éditeur ou de traducteur, lorsque j’ai décidément abordé le métier d’auteur en publiant en 1838 un mince volume intitulé : Recherches sur les principes mathématiques de la théorie des richesses . Malgré le mauvais succès de quelques devanciers qui avaient visiblement fait fausse route, je m’étais figuré qu’il devait y avoir de l’avantage à appliquer les signes mathématiques à l’expression de rapports et d’idées qui sont certainement du ressort des mathématiques : et je comptais encore sur un nombre honnête de lecteurs, dans un siècle où l’on étudie surtout les mathématiques pour être ingénieur, et où l’on recherche l’état d’ingénieur en vue surtout de se faire admettre sur un bon pied dans les grandes entreprises qui donnent la richesse. Je m’étais trompé. Quand on veut aller contre les habitudes prises, ou l’on fait une révolution (ce qui heureusement est fort rare), ou l’on n’attire point l’attention, et c’est ce qui m’est arrivé. On a vu paraître ; depuis 1838, des théories marquées au coin de la nouveauté et de l’originalité, comme celles de M. Stuart Mill, de Frédéric List, de Frédéric Bastiat ; il y a eu de grandes révolutions tentées ou effectuées dans le monde économique et des discussions bien vives à propos de ces révolutions, sans que les hommes habiles qui les ont faites, préconisées ou combattues, aient paru se douter que j’avais tâché d’appliquer aux questions intéressantes de l’économie sociale ma logique et mon algèbre, avant de m’en servir (non sans quelque succès, je crois) pour débrouiller d’autres questions plus délicates encore, et depuis plus longtemps débattues. Je voudrais voir aujourd’hui si j’ai péché par le fond des idées ou seulement par la forme : et à cette fin j’ai repris mon travail de 1838 en le corrigeant, en le développant là où les développements manquaient, en le complétant sur les points auxquels je m’étais abstenu de toucher, et surtout en le dépouillant absolument de l’attirail d’algèbre qui effarouche tant en ces matières. Non seulement j’ai repris toutes les pages de mon premier ouvrage, qui pouvaient cadrer avec mon nouveau plan, mais je ne me suis fait nul scrupule d’en transcrire quelques autres que mon plan réclamait, et qui ont déjà paru dans mon Traité de l’enchaînement des idées fondamentales , où les idées fondamentales de la science économique ont dû figurer à leur rang.
Puisque j’ai mis vingt-cinq ans à interjeter appel de la première sentence, il va sans dire que je ne compte pas, quoi qu’il arrive, user d’une autre voie de recours. Si je perds une seconde fois mon procès, il ne me restera que la consolation qui n’abandonne guère les auteurs disgraciés : celle de penser que l’arrêt qui les condamne sera un jour cassé dans l’intérêt de la loi , c’est-à-dire de la vérité.
Au reste, j’ai voulu que l’étiquette ne pût tromper personne, et que le titre du présent ouvrage indiquât nettement qu’il s’agit toujours de principes et de théorie . La théorie ne doit pas être confondue avec les systèmes, quoique nécessairement, dans l’enfance des sciences, l’esprit de système se charge d’ébaucher les théories. J’ajouterai que la théorie doit toujours avoir sa part, si petite qu’on veuille la lui faire, et qu’il doit être permis à un vétéran du corps enseignant, plus qu’à tout autre, d’envisager exclusivement du point de vue de la théorie un sujet d’intérêt général, qui a tant de faces diverses.
À chacun sa tâche. J’ai cru que la mienne était de soumettre à une critique nouvelle, non des faits, mais des idées, en rapprochant dans ce but des idées que la marche du travail scientifique tend trop à isoler, comme on rapproche dans un herbier, pour les mieux connaître, des plantes que la Nature a fait naître à de grandes distances. C’est un genre de spécialité comme un autre, et qui a aussi son utilité. Dans le cas présent, j’ai donc dû m’attacher de préférence à bien caractériser la nature de cette science à laquelle on donne communément le nom d’ économie politique (et qu’Aristote avait bien mieux désignée par le mot de chrématistique , dont notre titre n’est que la traduction française), à montrer ses affinités avec d’autres sciences, sa place dans le cadre scientifique, les idées sur lesquelles elle se fonde, les procédés qu’elle emploie, la valeur des résultats auxquels elle peut atteindre, la part qu’elle laisse nécessairement à l’empirisme et aux entraînements de l’opinion. J’espère que ceux qui auront pris la peine de me lire attentivement comprendront mieux tout ce qui nous manque pour donner la solution vraiment scientifique d’une foule de questions que la polémique quotidienne tranche hardiment, et sur lesquelles il faut bien que la pratique gouvernementale prenne un parti.
Toutefois, je n’ai pas entendu faire seulement une œuvre d’analyse et de critique : il y a aussi dans mon travail une partie dogmatique, un essai de synthèse nouvelle, une méthode de calcul substituée à d’autres que je regarde comme inexactes, ou dont je crois même avoir démontré l’inexactitude. J’ai fait tous mes efforts pour être à la fois clair et succinct, pour conserver la rigueur de l’esprit géométrique sans employer l’appareil de démonstration des géomètres : mais les calculs sont toujours arides, les raisonnements sont parfois subtils, les causes d’erreur sont nombreuses ; j’ai donc bien des motifs de réclamer l’indulgence et la patiente attention du lecteur.

Paris, mai 1863.

N.B. Les chiffres entre parenthèses indiquent les n os du texte auxquels on renvoie.
LIVRE PREMIER Les richesses
CHAPITRE PREMIER Des richesses en général et de la valeur d’échange
1. – La racine tudesque rik ou reich , qui a passé dans toutes les langues romanes comme un signe de la conquête, exprimait vaguement une idée de supériorité, de force, de puissance. Los ricôs hombres se dit encore en espagnol des nobles de distinction, des grands seigneurs ; et telle est l’acception des mots riches hommes dans le français de Joinville. Notre idée moderne de la richesse ne pouvait être conçue par les hommes de race germanique, ni à l’époque de leur invasion dans le monde romain, ni même aux temps bien postérieurs où la féodalité subsistait dans sa vigueur. Les idées analogues qu’avait déjà suscitées la civilisation romaine, quand le poète disait :

Dives agris, dives positis in fœnore nummis,
disparurent avec cette civilisation ; et comme la langue se moule sur les idées, les mots dives, divitiœ, opes disparurent aussi de la langue des vaincus, tandis que le mot pauper y resta. Si, dans notre français moderne, le mot opulence rappelle une de ces racines oubliées, il n’appartient pas à la langue populaire, et il n’a été mis que tardivement en circulation par les lettrés, avec beaucoup d’autres.
Les distinctions de maîtres, de serviteurs et d’esclaves, le pouvoir, la propriété, les droits et les privilèges, l’abondance et l’indigence, tout cela se retrouve au sein des peuplades les plus voisines de ce que nous nommons l’état sauvage, et semble dériver presque immédiatement des lois naturelles qui président à l’agrégation des individus et des familles… On ne conçoit pas non plus que des hommes puissent vivre quelque temps rapprochés les uns des autres sans pratiquer l’échange des choses et des services : do ut des, do ut facias, facio ut des, facio ut facias . Toutefois il y a loin de cet acte naturel et pour ainsi dire instinctif à l’idée abstraite d’une valeur d’échange  : idée qui implique que les objets évalués sont dans le commerce , et qu’en les possédant on possède virtuellement toute autre chose de valeur égale, contre laquelle il plaira de les échanger ! Or, les choses auxquelles l’état des relations commerciales et les institutions civiles permettent d’attribuer une telle valeur d’échange sont celles que, dans le style moderne, on appelle des richesses  ;

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