Résignation - Partie 5
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Résignation - Partie 5 , livre ebook

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Description


Cinquième épisode



Elle rêve d'un nouveau départ, mais c'est la mort qui l'attend au tournant. Recueillie par ceux qui l'ont arrachée aux mains de ses agresseurs, c'est dans un monde de ténèbres qu'elle devra tenter de survivre.
Tout a commencé un soir de lune bleue, et tout se terminera dans le sang...










Novella feuilleton en six parties, à raison d'une partie par mois. Chaque partie est écrite et corrigée pour le mois même de sa publication.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 27 septembre 2014
Nombre de lectures 21
EAN13 9782919550920
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

BaDMOonRiSinG

5eme partie - Résignation

Marika Gallman

Éditions du Petit Caveau - Sang%numérique


Doyle me place un sac sur la tête peu après m’avoir fait monter dans une fourgonnette. Je me tiens parfaitement immobile et ne prononce pas un mot. Lui et ses hommes se lancent des indications en anglais. Je connais cette langue, mais pas les termes qu’ils utilisent. Il y a nombreux mots qui ressemblent à du jargon militaire, et il m’est impossible de comprendre ce qu’ils se racontent. Lorsque le véhicule démarre, je suis dans le noir, dans tous les sens du terme. Un quart d’heure s’écoule. Peut-être moins. Être privée d’un sens comme la vue a un impact non négligeable sur la notion du temps. Ce que je prends pour cinq minutes n’est peut-être que trente secondes. J’attends, espérant que quelque chose en moi ressentira le moment où on franchira la barrière magique, celle constituée par de l’urine de vampire — ou de Marcus, je n’ai toujours pas la réponse à cette question —, et que ceux qui seront bientôt mes semblables pourront me sentir. Mais rien de tel ne se produit. Je ne ressens rien, à part l’angoisse grandissante de ne pas savoir où nous allons, si Marcus viendra, ou si ce qui me tuera, au final, sera des vampires ou des militaires. J’ignore même si ces derniers en sont réellement. Ils en ont le langage et la dégaine, pourtant une partie de moi espère que ces gens n’opèrent pas pour une organisation officielle. Doyle a quelque chose de vicié, de mauvais. Ça transpire par tous les pores de sa peau et explose au travers de ses paroles et de ses actes. Grâce aux fonctions de diplomates de mon père, j’ai déjà eu l’occasion de remarquer que nos dirigeants ne sont pas toujours les personnes les plus humaines qui soient, mais je continue à espérer malgré tout.

— Vous n’êtes pas très bavarde.

J’ai beau ne pas voir Doyle, j’ai conscience qu’il m’observe. Son regard me brûle en dépit du sac que j’ai sur la tête. Alors je me redresse, relève le menton et garde le silence. Il m’a peut-être enlevée, mais il ne me fera pas plier.

— Parlez-moi un peu de vous, Neela, continue-t-il.

Je n’ai aucunement l’intention de faire la conversation à cette ordure. Il m’a bien fait comprendre que j’allais lui révéler ce que je sais que je le veuille ou non, il peut toujours courir s’il pense qu’il va arracher le peu d’informations que je possède grâce à sa fausse gentillesse.

— Vous connaissez l’essentiel.

— Je ne connais que votre prénom, objecte-t-il.

Je n’ajoute rien, espérant qu’il comprendra par là que c’était exactement ce que j’ai voulu dire. Je l’entends soupirer, mais c’est presque un soupir amusé. Ça ne me plaît pas.

— Vous avez un nom de famille ? essaie-t-il.

— Oui.

Cette fois-ci, il rit franchement. Je sens le bruissement de l’air qu’il chasse en se penchant dans ma direction, puis sa main, qu’il pose sur mon genou.

— Je sens que nous allons beaucoup nous amuser, dit-il sur un ton de confidence.

Sans le sac que je porte sur la tête, je lui aurais craché dessus, même si c’est à cent lieues de la personne que j’étais encore la veille. Ou peut-être à ses pieds. Viser son visage aurait été une trop grande marque d’intérêt. Au lieu de ça, et comme mes mouvements sont limités, je tourne vivement les genoux pour me débarrasser de sa main.

Le reste du trajet se déroule dans un silence de plomb. Je suis persuadée qu’il continue à m’observer, ce qui me fait presque apprécier la présence du sac. Il me fait peut-être imaginer le pire, mais au moins je n’ai pas la confirmation — si tel est le cas — que Doyle me regarde comme un bout de viande.

Soudain, un homme annonce que nous arriverons à destination dans deux minutes, et la camionnette prend vie. Des gens se lèvent, le véhicule s’arrête, tangue sous les pas des personnes qui y bougent, puis on me relève. Lorsque les portes sont ouvertes et qu’on me tire vers la sortie, je suis déçue de n’avoir senti aucun vampire. J’ignore même si je serais réellement capable de les repérer, mais, si Marcus en est capable, je devrais également.

Je suis trimballée sur ce qui m’apparaît comme des dizaines de mètres. J’entends une porte s’ouvrir, lourde vu le bruit, puis se refermer derrière nous. Si je me fie à l’écho que produisent les voix des soldats, nous sommes dans une pièce qui doit elle aussi être immense. Je ne suis pas en mesure de sentir l’odeur des lieux. La cagoule m’en empêche et, quand un effluve me parvient, c’est celui des hommes autour de moi. Transpiration, after-shave, gel douche. Peut-être que cet endroit n’a pas d’odeur, ou que c’est la même que celle des hommes qui m’entourent.

Rapidement, de nouvelles voix résonnent. Les échanges entre les soldats sont toujours brefs, souvent rien qu’une salutation, et nous continuons à avancer. Aucun nom n’est prononcé. Je ne connais que celui de Doyle, mais je dirais qu’il y a au moins vingt voix différentes. Vu leur espacement, je devine sans problème que l’endroit est bien gardé. C’est bien ma veine. Avec le recul, tout ce qui s’est produit au cours des dernières heures — jours — est bien ma veine. Marcus ne viendra jamais me chercher ici, si tant est qu’il soit en mesure de trouver où se situe cet ici. Je suis seule.

Pendant deux bonnes minutes, l’homme qui tient fermement mes bras à la hauteur de mes liens continue à me faire avancer. Finalement, quelqu’un ouvre une autre porte, et je suis jetée sur le sol.

— Doucement, Harry, ordonne Doyle à un soldat invisible. Nous ne voulons pas qu’elle soit malmenée, n’est-ce pas ?

Il fait exprès de s’exprimer en français. Tous ses hommes parlent anglais entre eux, il n’a utilisé ma langue que par... par quoi ? Courtoisie, certainement pas. J’imagine sans peine Doyle jouer le bon et le mauvais flic en même temps. Il me cassera un petit doigt tout en s’excusant de l’avoir fait et en m’adressant un sourire mielleux du bout des lèvres. Bon sang, je déteste ce type.

— Je vous laisse quelques instants pour réfléchir, Neela.

Il a accentué mon prénom, comme s’il s’agissait d’un secret entre nous, d’un lien qui nous unit. Il peut aller rôtir en enfer. Je suis même prête à allumer le barbecue.

— À quoi ? je demande tout de même.

— À ce que vous comptez me révéler exactement.

Jusque-là, j’étais restée au sol. Je n’ai pas atterri dans la position la plus confortable, mais, au milieu de tout ce qui se déroule, c’était le cadet de mes soucis. Or, je ressens à présent le besoin de me redresser comme je l’ai fait dans la camionnette. Je veux que ce type comprenne qu’il ne me fait pas peur. Il ignore que mes jours sont de toute façon comptés. Tout ce qu’il peut faire, c’est abréger ce qui pour moi est une souffrance, même si elle n’a rien de physique.

— Vous ne me retirez pas la cagoule ?

Je suis frappée par la stupidité de ma question dès qu’elle franchit mes lèvres. Si telle avait été son intention, ça aurait déjà été chose faite. De plus, ça ne fera que renforcer ce lien qui n’existe pas mais auquel il veut me faire croire.

J’entends des pas fouler le sol devant moi, puis, de manière étouffée, l’odeur de Doyle me parvient. Le tissu autour de ma tête bouge, mais on ne me le retire pas. Non, cet enfoiré vient de le réajuster.

— Vous savez ce qu’on dit, Neela, répond-il en accentuant encore une fois mon prénom. La nuit porte conseil. Un peu d’obscurité vous fera le plus grand bien pour réfléchir.

L’air me chatouille la peau lorsqu’il se relève, puis la porte se referme, et je me retrouve seule.

Aucun son ne me provient. Aucune odeur. Je ne vois rien. J’ai lu quelque chose à ce sujet. La privation sensorielle. Il me coupe du monde pour me priver de tout repère et me déstabiliser. Je voudrais dire que, dans la mesure où je sais très bien ce qu’il fait, cela ne fonctionne pas. Pourtant mon corps n’est pas du même avis. Mon cœur s’emballe, la panique me gagne. Je ne sais même pas pourquoi. Ce n’est pas comme si ma situation avait empiré depuis le départ de Doyle, ou comme si ma vie était emplie d’espoir ces derniers temps. L’issue, quoi qu’il advienne, est la mort. Marcus ne voulait pas me donner de faux espoirs, je n’en ai pas. Tuer la Reine est très difficile quand on sait où elle se trouve, ce qui n’est même pas le cas. Ou alors le chasseur ne me l’a pas dit. Non, ça fait longtemps que l’espoir m’a quittée comme les rats fuient un navire qui sombre. Alors pourquoi ai-je autant de peine à respirer ? Pourquoi mes poumons me semblent-ils aussi durs que du béton et chaque inspiration un millier de poignards enfoncés dans mes terminaisons nerveuses ?

L’idée de partir en compagnie de Marcus et Gemma était douce...

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