Frontières et identités en terres mayas

Carine Chavarochette

Description

La frontière Guatemala-Mexique oscille, depuis sa création en 1882, entre le modèle de frontier, frontière mobile et ouverte, et celui de border, ligne qui divise. La propriété de la terre et sa gestion y déterminent les identifications des populations mayas et non mayas. Les crises politiques et sociales du XXe siècle ont conduit ces populations, exploitées et spoliées, à valoriser une nouvelle identité au moyen de cultes religieux spécifiques et de pèlerinages transfrontaliers...

Sujets

• Histoire
• Anthropologie
• Ethnologie
• Civilisation

Informations

• Publié par: L'Harmattan
• Date de parution: 01 novembre 2011
• Nombre de lectures: 3
• EAN13: 9782296471948
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 12 Mo

Extrait

Frontières et identités
en terres mayas

Recherches Amériques latines
Collection dirigée par Denis Rolland
et Joëlle Chassin

La collection publie des travaux de
recherche de toutes disciplines scientifiques sur cet espace qui
s’étend du Mexique et des Caraïbes à l’Argentine et au Chili.

Dernières parutions


Christian Edward Cyril LYNCH, Brésil. De la monarchie à
l’oligarchie, 2011.
J.-P. BLANCPAIN, Les Européens en Argentine. Immigration de
masse et destins individuels (1850-1950), 2011.
J.-P. BERTHE et P. RAGON (eds), Penser l’Amérique au temps de
e ela domination espagnole, Espace, temps et société, XVI – XVIII
siècle, Hommages à Carmen Val Julian, 2011.
Henri FAVRE, Changement et continuité chez les Mayas du
Mexique, Contribution à l’étude de la situation coloniale en
Amérique latine, 2011.
Marcos EYMAR, La langue plurielle. Le bilinguisme
francoespagnol
dans la littérature hispano-américaine (1890-1950), 2011.
Pauline RAQUILLET, Alfred Ebelot. Le parcours migratoire d’un
eFrançais en Argentine au XIX siècle, 2011.
Pierrette BERTRAND-RICOVERI, Mitología shipibon 2010.
German A. de la REZA, Les nouveaux défis de l’intégration en
Amérique latine, 2010.
João Feres Júnior, Histoire du concept d'Amérique latine aux
Etats-Unis, 2010.
Marie-Cécile BENASSY-BERLING, Sor Juana Inés de la Cruz.
Une femme de lettres exceptionnelle. Mexique XVIIe siècle, 2010.
Florencia Carmen TOLA, Les conceptions du corps et de la
personne dans un contexte amérindien, 2009.
Marcio Rodrigues PEREIRA, Le théâtre français au Brésil de
1945 à 1970 : un outil de la diplomatie française contre le recul de
son influence culturelle, 2009.
Carine Chavarochette







Frontières et identités
en terres mayas
e eMexique-Guatemala (XIX -XXI siècle)





Avant-propos de Henri Favre
Préface de Jean Piel















































© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
[e-mail]
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ISBN : 978-2-296-56559-3
EAN : 9782296565593
À Giuliana et William
Mexique.indd 5Mexique.indd 5 11/10/11 16:40:2511/10/11 16:40:25Remerciements
Je tiens tout d’abord à remercier les Tojolabal, Chuj, Jacaltek, Tzeltal, Mam, Mexicains et
Guatémaltèques qui m’ont invitée à passer leur seuil et à partager leur vision du monde,
et plus particulièrement, Delfi na et Rolando. À tous ceux qui sur le terrain, à Nenton,
La Trinitaria, Comitan et Huehuetenango ont facilité mes enquêtes.
Ma reconnaissance, mes remerciements vont également à Alain Breton et Jean Piel,
codirecteurs de la thèse dont est issu cet ouvrage pour leur indéfectible soutien et
leurs précieux commentaires ; à Mario Humberto Ruz pour m’avoir convaincue de
travailler avec les Tojolabal et de les suivre dans leur pèlerinage au Guatemala ; à Edith
Kauff er, Ruth Piedrasanta, Jan de Vos et tant d’autres collègues qui ont accepté de
partager leurs connaissances sur les populations de ces régions frontières ; à Françoise
Vergneault-Belmont pour sa passion des cartes, à Magali Demanget pour nos longues
discussions anthropologiques et mexicaines ; aux collègues du MASCIPO-CNRS, du
GERM, du SEDET et du CREDA-CNRS ; à Joëlle Chassin pour sa relecture attentive
et ses suggestions ; à Sébastien Velut et Olivier Compagnon pour le soutien fi nancier
du CREDA-CNRS à la publication ; à Claire Rouyer pour son appui et ses conseils ; à
William Foix pour avoir partagé les phases de tempêtes et de joie inhérentes à ce travail,
pour sa relecture et enfi n à ma famille.
Mexique.indd 6Mexique.indd 6 11/10/11 16:40:2511/10/11 16:40:25Avant-propos
« Frontière nomade » – comme dirait Aguilar Camín – que celle qui sépare
le Guatemala du Mexique en son État fédéré du Chiapas ? Frontière à
tout le moins poreuse, dirons-nous. Âprement négocié, son tracé a été
etardivement fi xé vers la fi n du xix siècle, mais la circulation des hommes
et l’échange des biens entre les deux pays ont continué comme par le passé.
Pas plus qu’elle n’a gêné le mouvement des populations du Tacaná qui se
répandent encore chaque année dans les plantations du Soconusco pour
y récolter le café, la limite internationale n’endigue les récentes vagues
de migrants venus maintenant jusque des lointaines Andes pour gagner
la Terre Promise au nord du río Grande. Troupeaux de bovins, trains de
mulets, commerçants ambulants n’ont cessé de la fouler. Aujourd’hui,
les narcotrafi quants narguent (ou corrompent) et les marchands d’armes
bafouent (ou soudoient) ceux qui sont censés y monter la garde. Suite aux
accords de paix qui ont mis fi n aux guerres civiles d’Amérique centrale
et dont le dernier a été signé en 1996, M16 et AK47 sont allés s’off rir
œcuméniquement, parfois dans leur emballage d’origine, aux zapatistes
comme à leurs adversaires priistes, à des prix défi ant toute concurrence.
Sans doute fallait-il que les ex-guérilleros fi nancent leur recyclage dans la
politique et que les armées nationales soutiennent le pouvoir d’achat de
leurs chefs désormais privés de primes de risque.
Trop d’intérêts se coalisent pour maintenir cette frontière dans toutes
ses béances. Cependant, leur force tient d’abord à la faiblesse des appareils
étatiques qui ont théoriquement la charge de son contrôle. Côté
guatémaltèque, l’État n’a pas encore réussi à s’extraire tout à fait des limbes.
Côté mexicain, le gouvernement fédéral, qui dispose pourtant d’une
administration autrement mieux étoff ée, n’a jamais rencontré au Chiapas
un pouvoir susceptible de relayer localement son action ou de la
démultiplier. La tradition très centraméricaine de municipalisme qui y demeure
vivace fait de l’entité chiapanèque une sorte d’amphictyonie de villes et de
bourgs tissant entre eux des relations d’alliance et de confl it dont la crise
zapatiste a bien mis en lumière les réseaux complexes et mouvants. Par
ailleurs, les crispations diplomatiques récurrentes de gouvernements au
nationalisme chatouilleux ne favorisent guère la coordination nécessaire
à une consolidation frontalière. Au début des années 1960, le tronçon
7
Mexique.indd 7Mexique.indd 7 11/10/11 16:40:2511/10/11 16:40:25guatémaltèque de la route panaméricaine venait se perdre sur une berge
du Suchiate, tandis que le tronçon mexicain débouchait dans cet autre
cul-de-sac qu’était alors Ciudad Cuauhtemoc, quelque cent cinquante
kilomètres plus loin. Les diffi cultés que rencontre la mise en œuvre de
projets binationaux ou multinationaux comme le Plan Puebla Panama ou
la Ruta Maya ne sont pas seulement d’ordre fi nancier ; elles résultent aussi
d’une faible volonté politique de coopération intergouvernementale.
Toute frontière unit aussi bien qu’elle sépare. C’est vrai de la frontière
mexicano-guatémaltèque comme de la frontière franco-suisse.
Anthropologue tout autant qu’historienne, Carine Chavarochette étudie la
population qui vit à cheval sur la ligne de démarcation entre les deux pays,
et elle nous la manifeste dans son foisonnante variété. À la suivre dans
son exposé, il semblerait que l’histoire se fût ingéniée à diviser les
habitants de ces confi ns par un empilement de clivages de tous ordres qui
se recoupent plutôt qu’ils ne se superposent. Clivage culturel d’abord,
hérité de la colonisation espagnole, mais qui tend aujourd’hui à
s’estomper tout en connaissant parfois de brusques reviviscences : il oppose les
ladinos (Blancs et métis)