Le Curé et l ivrogne
272 pages
Français

Le Curé et l'ivrogne , livre ebook

272 pages
Français

Description

En 1864, un jésuite, Le Révérend Père Ducreux, organise une croisade anti-alcoolique dans le Haut Doubs, sa région natale. Son ambition est de refonder une communauté chrétienne unanime et préservée des erreurs du siècle, une identité provinciale, catholique et conservatrice qui devient un modèle politique, un projet de société susceptible de renouer avec l'âge d'or.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2003
Nombre de lectures 296
EAN13 9782296316690
Langue Français
Poids de l'ouvrage 7 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LE CURÉ
ET
L'IVROGNE
UNE HISTOIRE SOCIALE ET RELIGIEUSE
DU HAUT DOUBS AU XIxe SIÈCLE@L'Hannatlan,2003
ISBN: 2-7475-4103-7Vincent PETIT
LE CURÉ
ET
L'IVROGNE
UNE HISTOIRE SOCIALE ET RELIGIEUSE
DU HAUT DOUBS AU XIxe SIÈCLE
L'Harmattan Hongrie L'Harmattan ItaliaL'Harmattan
Hargita u. 3 Via Bav~ 375-7~rue de I~École-Polytechnique
75005 Paris 1026 Budapest 10214 Torino
FRANCE HONGRIE ITALIEAVANT -PROPOS
A l'origine d'un livre
Tous ceux qui ont un jour entrepris des recherches
historiques savent que leur travail peut prendre un tour
inattendu au hasard de l'ouverture d'un carton d'archives.
C'est dans le dédale des archives diocésaines de Besançon,
où je travaillais sur un mémoire de Diplôme d'Études
Approfondies sur le catholicisme social qui devait être
soutenu en septembre 1997, que je découvris la matière
première de ce livre.
Le montagnon que je suis lut avec avidité un recueil de
lettres rapportant les efforts du père Ducreux, pour
combattre l'ivrognerie dans le haut Doubs au milieu du
XIXe siècle. Si l'essentiel de la correspondance du P.
Ducreux avec Mgr Mathieu a été conservé dans un dossier
à part, sous la référence TI G 2 et intitulé "œuvres
diverses" , en revanche, les rapports que les curés
envoyaient à l'archevêque ont été classés dans les archives
de leurs paroisses respectives. En les cherchant,
j'exhumais des lettres décrivant l'abus d'alcool dans les
campagnes, ainsi que d'autres « désordres» pour employer
le vocabulaire de l'époque, comme la contrebande ou la
prostitution. Se révélait un envers peu connu, qui
répondait à mon ambition de travailler sur l'histoire des
mentalités comme on ne dit plus, d'écrire une histoire à la
fois sociale et religieuse.
La rédaction de l'article prit une partie de l'été 1998. Il
parut d'abord sous le titre « L'ivrognerie dans les
montagnes catholiques du Doubs au milieu du XIXesiècle» dans la Revue historique neuchâteloise (n01,
janvier-mars 1999, p. 61-83) et La Racontotte. Nature et
traditions comtoises (n056, printemps 1999, p. 20-27 et
n057, automne 1999, p. 20-28). Légèrement remanié et
accompagné du texte de l'opuscule du père Ducreux, il est
publié sous le titre « Le clergé contre l'ivrognerie dans les
montagnes catholiques du Doubs au milieu du XIXe
siècle », dans Barbizier. Revue de Folklore comtois (n022,
1998-99, p. 251-281). Enfin, la revue Histoire et Sociétés
rurales acceptait de l'éditer sous une forme et un titre
différents: « Le clergé contre l'ivrognerie. La campagne
du père Ducreux dans les montagnes du Doubs
(18641869)>>(n013, 1ersemestre 2000, p. 93-118).
Visiblement, le sujet intéressait. La revue L'Histoire en
fit deux comptes-rendus successifs, dans sa livraison de
décembre 1999 (n0238, p. 95) et celle d'octobre 2000
(n0247, p. 109).
Après avoir retrouvé de nouveaux documents, je me
suis convaincu de reprendre l'ensemble de mes recherches
en vue d'en faire un livre qui puisse bénéficier d'une
diffusion plus large qu'un article de revue. Je tenais aussi à
revoir certaines hypothèses que je n'avais pas jusqu'à
présent été en mesure de développer. Enfin, je comptais
user d'une pleine et entière liberté d'écriture, dans le
respect des règles de l'investigation historique mais loin
des contraintes universitaires.
Je n'ai pas cherché à découvrir absolument le côté
obscur, à révéler les scandales, à forger une légende noire
du haut Doubs. Seulement je me suis attaché à décrire le
désarroi du clergé devant les mutations économiques et
sociales du XIXe siècle, devant l'irruption de la démocratie
et du libéralisme jusque dans les campagnes. C'est
pourquoi j'ai multiplié les citations, pour donner au lecteur
un accès à ces lettres pleines de colère ou de résignation,
pour en respecter l'humeur et l'authenticité, pour mieux
connaître ceux qui les avait écrites. Dans le même esprit,
je n'ai pas cherché à vérifier leurs dires, à corroborer leurs
8constats, à quantifier les « désordres» : c'est leur
perception du monde, fût-elle fausse, incomplète ou
fantasmée, qui détermine leurs réactions, leurs initiatives,
leur attitude au sein de la communauté rurale. Sans doute
pourra-t-on me reprocher une démarche trop peu
scientifique, un dépouillement d'archives qui n'a rien de
systématique, une analyse insuffisante des structures
socio-économiques. Mais, au-delà de l'effet accablant que
procure la lecture d'autant de faits, parfois navrants,
souvent tristes, peut-être drôles, je persiste à penser que la
parole des curés de campagne exprime mieux la réalité
telle qu'elle fut vécue qu'une histoire fondamentalement
quantitative.
Ce que je signe relève de ma pleine et seule
responsabilité, et je revendique ici une démarche et un
style avant tout personnels - sinon, pourquoi écrire? -
tributaires de mes lectures et de mes centres d'intérêt. Mais
je dois associer à mon travaille soutien, la bienveillance et
l'amitié que n'ont cessé de me témoigner Gaston Bordet et
Michel Vernus, Jacques Solé, Jacques Chatelain éditeur de
la revue Regards sur le Haut-Doubs, l'abbé Joseph
Lemaire conservateur des archives diocésaines de
Besançon, Manuel Tramaux responsable de la
Bibliothèque du Grand séminaire, le P. Bernard de
Vregille s. j., Jean-Marc Barrelet archiviste de l'Etat de
Neuchâtel, le personnel des Archives départementales du
Doubs et de la Bibliothèque municipale de Besançon. Je
salue aussi celles et ceux qui m'ont apporté leur concours,
Claude Guillaumin pour ses traductions latines, Valérie
Arnaud pour la cartographie, et enfin ceux qui m'ont fait
l'amitié de lire tout ou partie du manuscrit, Nicolas
Arnaud, Jean-Pierre Costille, Pierre-Yves Donzé, Claude
Ragondet, Yves Solé.
9L'auteur
Né en 1971, Vincent Petit est agrégé d'histoire et
professeur au lycée de Lons le Saunier (Jura). Après des
études à l'université de Besançon et à Gottingen, il
entreprend des recherches sur l'histoire religieuse de la
Franche-Comté. Outre de nombreux articles, il a publié un
ouvrage sur les sociétés musicales du haut Doubs au XIXe
siècle intitulé La clef des champs (éditions Regards Sur le
Haut-Doubs, 1998). Il est aussi l'auteur d'un essai, Les
continentales, consacré à l'unification politique de
l'Europe (L'Harmattan, 2001).
10A mes parents
A elleQuelle vie mène-t-on privé de vin?
Il a été créé pour la joie des hommes.
L'Ecclésiastique, 31, 27.
INTRODUCTION
Au milieu du XIXe siècle, après que les scansions de
1830 et de 1848 ont rappelé en écho le grand
bouleversement de 1789, les catholiques, par l'histoire
surtout, construisent l'image mythique d'un haut Doubs
anti et anté-révolutionnaire, qui recouvre tout à la fois une
économie agro-pastorale associée à des pratiques
communautaires et à un système patriarcal, un paysage
dont la beauté et la majesté exaltent la Création et
ennoblissent ses habitants, une identité catholique,
ultramontaine et contre-révolutionnaire avec le souvenir
de l'insurrection de la Petite Vendée de 1793. Ainsi, sous
des expressions diverses, « Tyrol de la France », « hautes
montagnes du Doubs », « Franche-Montagne », se crée
une identité propre à cette région frontalière qui va de
Saint-Hippolyte à Morteau: celle d'un conservatoire des
valeurs traditionnelles et des vertus chrétiennes.
Or cet âge d'or, qui exhale un romantisme tardif et un
catholicisme militant, s'élabore à un moment où les
principes qui l'inspirent semblent le plus menacés par les
soubresauts politiques, la diffusion de l'activité horlogère,
le rôle plus prégnant de l'économie marchande, le
développement de la contrebande, de l'influence des villes
et de l'anticléricalisme. La contradiction n'est
qu'apparente. Le clergé n'est pas sans adversaires, son
action n'est pas sans limites, les curés de paroisse
n

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