Talleyrand et l affaire X, Y, Z
278 pages
Français

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Talleyrand et l'affaire X, Y, Z , livre ebook

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Français

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Description

La guerre franco-américaine aura-t-elle lieu ? Consacré à une affaire habituellement occultée par la fulgurante ascension du général Bonaparte, en Italie et en Egypte, cette étude minutieuse des archives diplomatiques et navales franco-américaines a permis de reconstituer cet épisode méconnu. On y retrouve, outre Talleyrand et Bonaparte, Washington, Thomas Jefferson, Beaumarchais, Lafayette, Dupetit-Thomas, Surcouf, etc.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2013
Nombre de lectures 5
EAN13 9782296535435
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1200€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Titre
Éric Sinou-Bertault






TALLEYRAND
ET L’AFFAIRE X, Y, Z

Étude historique
Du même auteur
Naissance et baptême breton de la Marine américaine , 2011.
Copyright

© L’Harmattan, 2013
5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

EAN Epub : 978-2-336-66511-5
Citation

« La guerre est le prolongement de la politique par d’autres moyens. »
Carl Von Clauzewitz (1780-1831)
Avant-propos
Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord est certainement, après Napoléon et Louis XIV, l’un des personnages de l’histoire de France sur lequel on a le plus écrit. Son exceptionnelle et longue carrière oblige généralement ses biographes à ne retenir que les faits essentiels.

Ainsi, son rôle sous le Directoire n’est pas le plus étudié ; il est vrai que lui-même, dans ses mémoires, parle peu de cette période. Michel Poniatowsky, un de ses descendants, a publié à la librairie académique Perrin, il y a une trentaine d’années, un impressionnant volume de près de neuf cents pages : Talleyrand et le Directoire . Une quarantaine de pages seulement sont réservées à l’affaire X, Y, Z. Par ailleurs, l’historienne franco-américaine Ulane Bonnel, a étudié les effets de cette histoire dans un chapitre de son livre paru il y a une cinquantaine d’années : La France, les États-Unis et la guerre de course (1797-1815) , Éditions Latines, Paris, 1961.

Mais aucun livre n’avait été consacré uniquement à cette affaire et à ses conséquences dans l’histoire maritime. Il est vrai qu’au même moment, l’ascension de Bonaparte, ses campagnes d’Italie et d’Egypte, son coup d’état du 18 brumaire, ne pouvaient laisser beaucoup de place dans les livres d’histoire à ces ténébreuses négociations américaines. D’autant que les États-Unis n’étaient encore qu’une nation de second ordre comptant bien peu sur l’échiquier diplomatique.

En me plongeant dans les volumineuses archives et publications américaines ainsi que dans les archives diplomatiques et maritimes françaises, j’ai tenté de dénouer les fils de cette tumultueuse affaire, et, avec une rigueur d’historien, de présenter un récit vivant des négociations et des combats…

La Baule, le 14 février 2013.
Chapitre Premier Un Américain à Paris…
Une voiture fatiguée transporte une famille qui l’est tout autant aux portes de la capitale. Débarqués à Bordeaux, les passagers ont longtemps attendu leurs bagages retenus sur le bateau par le mauvais temps. Ils ont affronté la poussière des routes défoncées, cahoteuses, caillouteuses qui harassent les essieux et les reins. Par deux fois les roues se sont brisées. Il a fallu en changer trois sur quatre. Dix jours de voyage. L’équipage vient de parcourir cent cinquante lieues ou plutôt six cents kilomètres selon le nouveau système métrique créé, il y a guère plus d’un an, le 1 er vendémiaire de l’an IV 1 . Que de bouleversements attendent ce voyageur qui arrive le 5 décembre 1796 d’outre-Atlantique en compagnie de sa femme et de sa frêle fille de douze ans. Jeune homme, il y a vingt-cinq ans, il a étudié une année en France au fameux collège militaire royal de Beaumont-sur-Auge. Sommes-nous toujours dans ce même dix-huitième siècle ? Oui, mais il s’achève dans un formidable chambardement. La plus vieille monarchie d’Europe décapitée se mue en république. En si peu de temps, la France se donne à la révolution qui s’adonne à la terreur. Aujourd’hui, sous le Directoire, les conventionnels rescapés se vautrent dans le luxe et l’agiotage...

Dans le labyrinthe des ruelles parisiennes le peuple survit, souvent le pain est rare. Depuis plus de quatre ans la guerre déverse dans la ville ses vagues d’estropiés. L’hôtel des invalides, au dôme royal « sans-culottisé », déborde de bataillons de sans jambes, sans menton, sans nez, sans bras. Fournisseurs aux armées corrompus et financiers s’engraissent. « Jamais depuis la Régence la volonté de s’enrichir n’avait été aussi forte 2 . » Les voitures transportant les nouveaux maîtres rasent les rues étroites et sans trottoir, au risques et périls des piétons. « Ils montent si orgueilleusement des chevaux d’appareil, nourris au préjudice des chevaux de combat. Ce sont là les dévorateurs de la subsistance du peuple, qui dînent avec tant de splendeur et de sensualité, qui font les princes aux bals parés 3 . » Pour eux Paris redevient une fête, la gastronomie sort des hôtels particuliers. Les cuisiniers et domestiques mis à pied, perdus sans maître, en devenant « marchands de bonne chère » aux cartes raffinées inventent le restaurant. Chez Véry au Palais-Royal – ci-devant Palais-Egalité – où les truffes sont célèbres, madame Véry trône sur une estrade. Dans les deux salles du rez-de-chaussée une domesticité stylée propose une carte de plus de cent cinquante plats : huit potages, quatorze hors-d’œuvre, onze entrées de bœuf, dix de mouton, seize de veau, vingt-sept de volailles, seize poissons, treize rôtis, dix pâtisseries, vingt-neuf entremets, vingt-six desserts, cinquante-cinq vins français et étrangers, vingt-cinq sortes de liqueurs. À l’étage les salons sont réservés pour les agapes discrètes. L’on va chez Baliane pour ses poissons, chez Méot pour ses sauces et chez le pâtissier Bailly rue Vivienne car y officie le réputé Carême. « Ce sont ces êtres de paille, de foin, d’avoine et de farine qui ont remis en vogue les soupers fins 4 . » Rue des Lombards le Grand Monarque, devenu le Grand Vainqueur, propose confiseries et autres sucreries. Dans les jardins, les Tivolis, sur les boulevards, aux Champs-Elysées, dans les demeures où brillaient hier encore les ci-devant nobles raccourcis, l’on danse. L’on danse à vingt-quatre sous par cavalier, à douze sous par citoyenne à la maison de La Modestie rue des filles-Saint-Thomas, l’on danse à l’hôtel de la Chine rue neuve-des-petits-Champs, chez Loiseau rue Prouvaires, chez Maréchal rue Jusienne, chez Guittet place Vendôme. Au noviciat des jésuites, au couvent des carmélites du marais, aux Filles de Sainte Marie et même dans l’ancien cimetière de Saint-Sulpice, l’on danse. Faubourg-Saint-Germain, où l’on sautille la gavotte de Vestris, premier danseur de l’opéra, un éphémère et incongru bal des victimes réunit les parents des guillotinés. Au palais du Luxembourg un étonnant quintette mène le bal. Cinq directeurs dirigent la France. Paul Barras, ci-devant vicomte, domine ses quatre complices qui sont tour à tour la cinquième roue de ce carrosse républicain.

Mais que vient faire dans cette sauterie cet Américain distingué dont les manières raffinées pourraient révéler un aristo honni ? Le général Charles Cotesworth Pinckney vient servir son pays. Un militaire ? Pas seulement. Avocat né en 1746 dans une riche famille de planteurs de Caroline du sud, il se forme en Angleterre, à Oxford, au sein de l’aristocratie anglaise. Il épouse la cause de sa terre natale et signe la déclaration l’indépendance. À la tête de son régiment de grenadiers il se heurte aux troupes britanniques à Charleston. Prisonnier, il refuse avec panache l’offre de l’adversaire de changer de camp :

« Si j’avais une seule veine dans laquelle ne coule pas l’amour de mon pays, je l’ouvrirais moi-même. Si j’avais une seule goutte de sang déshonorante, je la laisserais couler. »

Relâché lors d’un échange, Washington, dont il a toute la confiance, le nomme major-général et lui confie la tâche délicate de négocier avec l’ennemi vaincu. Aujourd’hui, il est à Paris afin de remplacer au poste d’ambassadeur James Monroe révoqué depuis le 22 août pour cause de francophilie chronique. Un poste où a brillé l’illustre Benjamin Franklin mais qui, depuis la tornade révolutionnaire, n’est plus une sinécure.

En l’accueillant, Monroe lui montre un courrier du ministre français des Relations extérieures. Informé de son arrivée, il lui demande ses lettres de créances et la lettre de rappel de son prédécesseur. Accompagné du major Henry Rutledge, leur secrétaire, les deux représentants du nouveau monde se rendent au ministère le 9 décembre en début

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