Cul-de-sac !
281 pages
Français

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Description

Le commissaire Tahar Agnelli vient d’enterrer son père en Corse. En tant qu’aîné d’une fratrie insulaire devenue orpheline, la joie, l’honneur et l’avantage de gérer au mieux la petite famille lui reviennent de droit.
Après les terribles attentats terroristes qui ont traumatisé Paris et ses habitants, le policier n’a pas le temps de s’ennuyer. Côté vie privée, sa jeune sœur Sarah songe à prendre le voile et son frère Simon est amoureux transi d’une beurette universitaire, ambitieuse et studieuse. Hélas pour elle, la demoiselle est affublée de deux consanguins belliqueux, l’un trafiquant de drogue et l’autre apprenti djihadiste.
Enfin, s’ajoutent à ce sac de nœuds quelques nantis qui font des leurs. L’un d’eux, chasseur de têtes professionnel, trouve plaisante l’idée de se faire trucider dans le parking d’un des clients du cabinet où il officiait.
Dans une atmosphère lourde et menaçante, Agnelli va devoir mettre de côté ses bonnes vieilles valeurs, renoncer à ses principes et se recentrer sur l’essentiel. Heureusement pour lui, quelques alliés surprenants, mais non moins fidèles, vont lui apporter leur aide.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 24 octobre 2016
Nombre de lectures 1 716
EAN13 9782370114945
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Cul-de-sac !

Agnès Boucher



© Éditions Hélène Jacob, 2016. Collection Polars . Tous droits réservés.
ISBN : 978-2-37011-494-5
À la mémoire de mes parents,
Vivants à jamais dans mon cœur.
Prologue


Il fait un temps de chien ce matin-là. Phénomène exceptionnel sur l’île. L’horizon est plus breton que corse. Ce n’est pas le célèbre crachin qui arrose l’humus, plutôt de véritables hallebardes qui tombent sans discontinuer depuis le lever du jour et transforment le sol en une gadoue guère attrayante.
Avec une grimace de contrariété, Tahar Agnelli remonte au maximum le col de son imperméable. Cela évitera que l’eau ne s’infiltre dans son cou. Peine perdue. De grosses gouttes tiédasses parviennent à se faufiler de manière pernicieuse entre le tissu et sa peau. Encore heureux que le thermomètre n’ait pas pris ses quartiers hivernaux.
Les yeux rivés alternativement sur le bout de ses chaussures et l’eucalyptus qui surplombe majestueusement la vallée, le commissaire doit fournir un effort démesuré pour ne pas céder au flot de larmes qui s’amoncelle derrière ses prunelles sombres. Ce n’est pas son genre de pleurer devant tout le monde. En même temps, l’instant est unique.
On n’enterre pas son géniteur tous les matins.
Il ne pensait pas être à ce point ébranlé par la disparition de Dominique Agnelli. Les relations avec son père n’ont jamais été simples. Le paternel ne cachait pas son admiration pour ce premier-né devenu un des plus fins limiers de la Police nationale. Leurs caractères, à la fois marqués et aux antipodes, ont eu moult occasions de se heurter, notamment durant l’adolescence du rejeton. La vie les a éloignés. La maladie, foudroyante, n’a pu les réunir.
Dans la main d’Agnelli, celle de Sarah se recroqueville convulsivement. Ou bien est-ce la sienne qui broie les doigts menus de sa sœur ? Car, se tenant bien droite à côté de lui, la jeune femme semble ne rien remarquer de cette pression. Elle reste indifférente au déluge qui inonde ses joues minces et dont on ne peut deviner s’il provient des nuages ou de ses yeux. Se penchant un peu vers elle, le commissaire a la surprise de découvrir qu’un délicat et énigmatique sourire illumine son visage.
Sur son flanc gauche, la situation est moins glorieuse. Simon est littéralement recroquevillé sur lui-même. Ses bras enserrent son torse comme pour se fabriquer une carapace protectrice. Secoué par les sanglots, il renifle continuellement, ressemblant à s’y méprendre au gamin fragile et torturé qu’il fut. Dépassant son indécrottable pudeur, son frère aîné le prend par les épaules, pose sa main sur les boucles brunes et attire contre lui la tête du jeune homme. Le plus étonnant est que Simon se laisse faire, anéanti par le chagrin.
Car devant eux, il y a ce maudit trou béant. Chacun à sa manière s’efforce de ne pas le regarder. Pourtant, il ne peut leur échapper. Un cercueil est en train d’y être descendu prudemment. Les cordes qui le retiennent encore glissent lentement sur les épaules des porteurs.
Dominique Agnelli a fini par succomber à son plus gros défaut, le tabac. Un cancer des poumons ne lui a laissé aucune chance, le foudroyant en l’espace de trois mois. Sarah a eu juste le temps de rentrer en catastrophe pour accompagner ses dernières semaines. Les deux frères l’ont rejointe lorsque le trépas s’est présenté comme imminent.
Dominique a dû être content, a croassé une voisine, ses trois enfants étaient là pour son passage dans l’autre monde.
Cette remarque, pleine d’un bon sens terrien, n’a consolé personne. Seule Sarah prend les choses avec une philosophie déconcertante, due en grande partie à sa foi chrétienne ; Tahar et Simon ont été intraitables lorsqu’elle a voulu parler de paix et de joie en rédigeant l’avis de décès.
T’es complètement maboule, a tonné le second. On dirait que tu imagines que Papa est mieux mort que vivant !
Pas mort, Simon, ressuscité, a-t-elle répondu d’une voix douce.
Ta gueule ! Tu fais chier avec tes bondieuseries !
Il a raison, a renchéri Agnelli qui, pour une fois, n’a pas cru bon de rabrouer son frère, j’accepte la paix si ça peut te faire plaisir, mais aucunement la joie.
Entendant les réticences de ses aînés, Sarah a écrit un texte plein de retenue ; face à la réalité du décès, elle continue d’afficher une apparence de sérénité bienveillante et extatique qui inquiète bougrement le commissaire. Sa sœur virerait-elle mystique ? Il ne manquerait plus que cela ! En même temps, si c’est sa manière d’affronter la mort de leur père, pourquoi le lui reprocherait-il ?
Dominique rejoint donc ses deux compagnes, Maryam et Elena, disparues avant lui, et dont les caractères bien trempés lui promettent quelques solides scènes de ménage dans le caveau familial.
À l’issue des obsèques, leurs enfants respectifs sont obligés d’endurer le vin d’honneur, en compagnie des copains de leur père. Ils ne peuvent pas faire moins, ayant déjà échappé au folklore funéraire que quelques anciens du village tenaient absolument à offrir à leur vieux compagnon. Et s’ils ont accepté le défilé des voisins et amis dans la chambre mortuaire, toute l’autorité d’Agnelli a été nécessaire pour éviter la veillée funèbre, avec toute la dramatisation qu’elle peut encore conserver dans certains coins reculés de l’île.
D’instinct, voire par superstition, ils ont quand même voilé les miroirs de la maison. Ils ont ouvert la fenêtre de la chambre où reposait Dominique. Ce rituel a permis que son âme s’envole plus facilement. Enfin, c’est ce que prétend la tradition. Puis il a fallu choisir ses derniers vêtements. Là encore, le commissaire s’est rebellé contre la coutume, refusant qu’on enfile à son père son unique costume.
Papa était un paysan. Il partira en paysan ! s’est-il emporté lorsque la représentante des pompes funèbres s’est mise à prendre d’autorité la tenue du défunt.
Simon et Sarah ont approuvé et l’embaumeuse leur a obéi sans ciller, revêtant le cadavre d’un pantalon de velours côtelé marron et d’une chemise à larges carreaux.
Jusqu’au moment éprouvant de fermer le grand domaine, sans bien savoir ce qu’il allait devenir, et, pour chacun des enfants de Dominique Agnelli, de rentrer chez soi sur le continent.
Chapitre 1


Situé en retrait du Quartier latin, dans la rue de La Vache, le petit troquet est paisible en ce début de matinée. Seul un jeune couple s’est installé dans le fond de la salle, invisible depuis l’extérieur, cherchant à se dissimuler des regards. Lui a les bras posés sur la table. Il tient dans ses doigts les fins poignets de sa compagne. Elle est accoudée devant une tasse de thé vert. On sent une certaine tension planer entre eux, menaçant de se transformer en cataclysme s’ils n’y prennent garde.
Le patron est assis à l’exact opposé, derrière le comptoir. Les lunettes en équilibre sur son nez long et étroit, il est plongé dans la lecture de son quotidien favori et semble se désintéresser de ses clients. En fait, il laisse traîner une oreille bienveillante. Il faut dire qu’il les connaît bien. Depuis près d’un an, ils se retrouvent plusieurs fois par semaine dans son établissement, chacun révisant ses cours entre deux baisers tendres. Il les a pris en sympathie. Dès le début, il lui a paru évident que leur histoire était compliquée et contrariée. Il aimerait bien les aider et, en même temps, il hésite à transgresser son principe de base. Il ne se mêle des affaires personnelles de ses habitués sous aucun prétexte.
Aujourd’hui encore, il feint le désintérêt pour mieux se concentrer sur leurs propos. Cela fait quelques semaines qu’il les sent plus fiévreux qu’à l’ordinaire. Il soupçonne une vague histoire de famille, hostile à leur amour, mais n’en détient aucune preuve formelle. Il s’empêche de leur dire de tout envoyer paître et de vivre ouvertement ce qui leur est donné, même si leur histoire n’est pas destinée à être éternelle. La chance file trop vite. Il ne faut pas gâcher les bons moments.
Tu te rends bien compte que ça ne peut pas durer ? chuchote le jeune homme.
Et que veux-tu que je fasse ?
Dénonce-le !
Tu es complètement fou !
Et pourquoi non ? Samia ! Ce taré te menace d’enlèv

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