Du sang sur le cachemire
142 pages
Français

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Description

Alors que la Sologne rougeoie sous ses couleurs d’automne, deux cadavres, que rien, à priori, ne relie, sont découverts à Bois-Guibert, vaste propriété d’un notable local, sur ces terres de chasse, de bois, d’eau et de mystères. Et cela fait désordre au moment où s’engage une nouvelle campagne électorale qui oppose deux anciens amis aujourd’hui adversaires acharnés. Il n’en faut pas plus pour mettre en émoi tout ce que la Sologne compte de notables, de gendarmes, de commères et de braconniers. Les amitiés d’enfance, l’amour effréné des différents protagonistes pour un même terroir, la Sologne, survivront-ils aux vieilles histoires, aux rancunes tenaces et à cette hécatombe meurtrière ? Enfin, quand la séduisante et brillante commissaire, Camille Baudu, se saisira du dossier au mépris de toutes les règles et prudences policières, c’est dans les remous de l’Histoire, bien loin de la Sologne, qu’elle plongera et découvrira la vérité. Et si cette vérité l’emmenait au-delà de l’Histoire ?

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 45
EAN13 9782365752046
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Christian Goemaere



Du sang sur le cachemire







Tout est imaginaire dans cet ouvrage de fiction. Les événements relatés ne recouvrent aucune réalité connue de l’auteur. Par conséquent, toute ressemblance avec des faits, des lieux ou des personnages de la vraie vie serait purement fortuite.


À Léo-Paul, Élia, Josépha, Maé, Paul-Émile, Jeanne et Pia, mes petits-enfants, ma tribu.
Qu’ils découvrent à leur tour l’amitié, « cette âme en deux corps » .


Si on me presse de dire pourquoi je l’aimais,
Je sens que cela ne se peut exprimer qu’en répondant :
« Parce que c’était lui, parce que c’était moi »

Michel de Montaigne,
Essai s : « De l’amitié »


1

Le temps était maussade en cette fin de matinée d’octobre et quelques lourds nuages s’étiraient au-dessus de la Seine, annonciateurs d’un orage certain.
Mais le climat était encore plus lourd et menaçant dans le vaste bureau de Bertrand Maxet, commissaire divisionnaire, directeur adjoint de la Direction régionale de la police judiciaire à la préfecture de police de Paris, située au 36, quai des Orfèvres.
Les six patrons des brigades centrales contre le crime organisé, la fine fleur de la police française à l’avenir prometteur, sauf accident majeur toujours possible dans ce métier, subissaient depuis maintenant plus d’une heure le courroux de Bertrand Maxet. Et jamais ce dernier n’avait autant mérité son surnom de « Max ». Aujourd’hui, c’était max d’engueulades et chacun pressentait que ce patron apprécié avait dû lui aussi passer un sale quart d’heure avec son directeur, peut-être même avec le directeur central de la police judiciaire.
Autoritaire mais chaleureux, compétent et ambitieux, sans prudence excessive contrairement à beaucoup de carriéristes arrivés à son niveau, Bertrand Maxet avait toujours eu la réputation de couvrir ses équipes. Mais là, il se lâchait et c’était max de violence. Froide et grossière, barbare aurait dit Camille Baudu, la chouchoute de Bertrand Maxet, qui pour l’heure se faisait toute petite au fond du bureau et tentait de se faire oublier, consciente qu’elle portait une large part de responsabilité dans la bourde commise par les équipes.
– Bordel, vous avez été nuls, sur toute la ligne, incapables de vous coordonner et finalement vous anéantissez six mois de travail. De plus, vous nuisez gravement à l’image de la police. Mais qui est-ce qui m’a foutu une bande de cons pareils ? Ma parole, ce n’est pas à l’ENSEP que vous avez été formés mais à l’école des gardiens de la paix !
Chacun sentait qu’il devenait urgent de circonscrire cette logorrhée mais personne n’osait intervenir.
– Patron, c’est injuste, vous savez fort bien que nous avons été à deux doigts de réussir et que nous avons vraiment manqué de chance.
Alors que Bertrand Maxet s’apprêtait à répondre et à clouer sur place le courageux mais inconscient commissaire de la deuxième brigade, le téléphone sonna.
– Oui, j’avais demandé à ne pas être dérangé, aboya Max.
– Je sais, monsieur le directeur, mais c’est personnel, un ami qui dit appeler d’une cabine téléphonique et il insiste.
– Passez-le moi, coupa-t-il sèchement. Bertrand Maxet, qui est à l’appareil ?
Pour toute réponse Bertrand entendit un sifflement qui le plongea instantanément quarante ans en arrière. Quelques notes d’Art Tatum, le célèbre Tea for Two dont il comprit instantanément la signification. Livide il ajouta :
– C’est toi ?
– Oui, j’ai besoin de toi, Bertrand. C’est urgent. Retrouvons-nous ce soir au Club. Tu vois, là où j’ai mes habitudes?
– Oui, oui, je vois. Dix-neuf heures trente, c’est OK ?
– Merci, parfait à ce soir.
En même temps qu’il enregistrait le clic du raccrochement, Bertrand pensa qu’il devrait faire effacer la bande d’enregistrement de cet appel.
Intrigués par le comportement de leur patron, la tête rentrée dans les épaules, les commissaires attendaient résignés la reprise du remontage de bretelles.
– Foutez-moi le camp maintenant, au boulot, et la prochaine fois concertez-vous et ne laissez plus filer un gros poisson aussi facilement. Sinon, c’est à un autre patron qu’il vous faudra fournir des explications.
Trop heureux de s’en tirer à si bon compte, les commissaires entreprirent de quitter le bureau. Seule Camille ,avant de passer la porte du bureau directorial, se hasarda à une dernière question :
– Ça va, patron ?
– Oui, oui, mais comprenez quand même dans quelle situation nous sommes.
Il avait dit, « nous sommes », et pas « vous me mettez ». C’est à ces nuances, au demeurant notables, que Max s’était forgé sa réputation parmi ses équipes. Et Camille lui sut gré, une fois de plus, de faire corps avec ses hommes. Elle observait attentivement Max, son visage si calme, si serein, même après cette difficile conversation. Oui, voilà bien le genre d’homme qu’elle aurait aimé rencontrer, elle qui errait d’erreurs en déceptions et qui faisait plus souvent qu’à son tour des dîners en tête-à-tête avec son réfrigérateur.
– La presse va faire ses choux gras de cette filature avortée et ne manquera pas d’ironiser sur nos méthodes, nos moyens et cela au moment où nous demandons une rallonge budgétaire. Et c’est moi et moi seul qui vais devoir assurer le point presse. Dans ces cas-là, vous le savez bien, tous les scribouillards, tous les politiques de la maison se défilent.
– Oui, bien sûr, nous avons compris et cela nous servira de leçon. On nous l’a pourtant suffisamment rabâché. Ne pas confondre vitesse et précipitation. Mais ce n’est pas à ce sujet que je vous questionnais, mais au sujet de votre coup de fil. On a tous eu l’impression que vous alliez défaillir. Pas de problèmes personnels au moins ?
– Non, non, oubliez cela, tout va bien. Merci Camille.
Dès que la porte de son bureau fut refermée, le commissaire divisionnaire oublia instantanément la mine dépitée de ses collaborateurs, ainsi que sa prochaine et difficile conférence de presse. En homme avisé il savait que la meute de journalistes ne manquerait pas de se coller à ses basques dans les prochains jours et il ne connaissait que trop bien leur pugnacité. Mais il avait aussi, au fil du temps, appris à les tenir à distance. Il méprisait ce métier de journaliste, qui plaçait en tête des priorités de la profession le sacro-saint droit à l’information, au mépris de l’efficacité policière. Mais Bertrand savait aussi combien il importait d’entretenir de bonnes relations avec la presse, fussent-elles un peu factices et de façade. Celles-ci pouvaient, parfois, servir les intérêts policiers. Au demeurant, Bertrand avait su nouer au fil du temps quelques solides amitiés dans le milieu journalistique, amitiés non pas basées sur la notoriété du journaliste ou l’importance du tirage d’un titre mais sur le professionnalisme et le respect de la parole donnée.
Debout devant la vaste baie vitrée de son bureau, Bertrand observait d’un œil distrait le lent passage des péniches sur la Seine. Il se surprit à idéaliser le métier de batelier, le réduisant à ce moment de bonheur absolu que devait être la traversée du Paris historique, éternel, à la vitesse de huit nœuds.
Mais très vite son esprit revint à Art Tatum et à ces quelques notes qu’ils avaient si souvent sifflées. Pourquoi son interlocuteur, qu’il avait immédiatement identifié, ne s’était-il pas présenté à sa secrétaire comme il en avait l’habitude ? D’ailleurs, il n’était pas exclu que cette dernière l’ait reconnu. Oui, à bien y réfléchir, elle ne se serait pas permise de déroger aux instructions directoriales et de transférer l’appel téléphonique si tel n’avait pas été le cas. Il faudrait vérifier ce point. Mais alors pourquoi son interlocuteur avait-il utilisé ce code de leur enfance, code qu’instantanément Bertrand avait identifié, reconnu bien qu’ils ne l’aient plus utilisé depuis au moins vingt-cinq ans ? Autant de questions qui ne cessaient de préoccuper Bertrand.


2

– Albertine, j’ai changé mon programme. Je pars pour Paris.
– Mais enfin monsieur, je vous ai prép

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