Cent raisons d être
200 pages
Français

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Cent raisons d'être , livre ebook

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200 pages
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Description

Avec force, authenticité et sans complaisance, ce roman donne voix à la détresse d'une femme sous l'emprise de violences conjugales. Léonore plonge dans une grave dépression. Mais, page à page, nous la suivrons vers sa reconstruction qui passe par un séjour en clinique psychiatrique, puis par une retraite dans un petit village du Péloponnèse en Grèce, où des événements insolites la ramènent à la vie.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2011
Nombre de lectures 216
EAN13 9782296803510
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

CENT RAISONS D’ETRE
 
 
© L’HARMATTAN, 2011
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-54404-8
EAN : 9782296544048
 
Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Véronique Boureau di Vetta
 
 
CENT RAISONS D’ETRE
 
 
L’Harmattan
Du même auteure
 
 
La Pisse-dru
Editions L’Harmattan
Collection : Ecriture
 
L’écorce et la sève -Magie hellénique
Editions L’Harmattan
Collection : Graveurs de mémoire
 
De Châteaufort à Ecos – Parfums d’antan
Editions La Société des Ecrivains
 
Merci à mes muses
 
Régine Lilensten
Marie-Thérèse Quénel
 
Et à toi
 
Gabriele Croppi
 
Ce livre est dédié à mon frère Denis…
 
CHAPITRE I
La Maison Italienne
 
 
M on visage agréable au joli sourire plaisait aux hommes. Grâce aux séances d’entraînement à l’école des sœurs aînées, consistant à marcher une pile de livres en équilibre sur la tête, j’intégrais un fameux port altier aux fesses mouvantes. Emilio le chevalier m’avait prise sans cheval blanc. Ah, Emilio ! A cette époque, j’élevais Violette, ma fille de cinq ans que j’avais voulue pour moi seule. Je m’étais lancée dans cette aventure hors du cocon familial où l’apprentissage de la vie avait été pour le moins hétéroclite. Outre le fait que j’avais été une bonne élève, mes parents peu ordinaires m’avaient enseigné l’art, la littérature, mais heureusement aussi, ils m’avaient appris la débrouillardise. Les dernières années, difficiles, avaient forgé en moi une maturité d’esprit d’une bonne longueur d’avance sur celle de mon amoureux.
Le soir de notre rencontre, nous avions vingt cinq ans, j’avais eu le coup de foudre pour ce garçon pétillant. Pourtant Emilio n’était pas mon type, rien du bel italien dont rêvent certaines femmes. Tout au contraire, il avait, et quel dommage, banalement pris le physique fade de sa mère, et non celui de son père, sosie de Errol Flynn. Ses jambes étaient courtes, la peau laiteuse, une grosse tête et de petits yeux écartés du nez. Adolescent, il repassait sa chevelure car pour son malheur la mode n’était pas aux cheveux frisés. Il avait eu tort de s’en faire car rapidement devenu dégarni, il lui restait tout de même la couronne de César pour porter les lauriers de sa réussite professionnelle, ceux de Monsieur le Notaire dont la sonorité prenait une véritable suavité dans la bouche de son père Angelo.
Il venait d’un milieu où l’on parlait le patois napolitain, éducation réduite au minimum par des parents analphabètes. Ainsi, il se lançait dans la vie, vierge en tout, ne connaissant aucune règle régentant la communauté française et particulièrement celle de la vie parisienne. Ses manques allaient de l’harmonie des couleurs à la façon de s’habiller, de se tenir à table, de se comporter en société ou plus simplement d’allumer un feu dans la cheminée. Conscient de ses carences, son désir d’apprendre était immense, l’esprit fertilisable à souhait, il goûtait à tout d’un appétit d’ogre et déchiffrait les codes qu’il appliquait par mimétisme. Je trouvais ses efforts attendrissants, je l’aimais pour cela aussi. Nous prîmes alors le même chemin avec l’habitude de marcher main dans la main.
— Le jour où tu me la lâcheras, notre histoire sera finie, lui assurais-je en empoignant cette main toujours chaude et douce.
Il me la lâcha après trente ans de vie commune. Violette et moi, les pièces rapportées, étions restées en marge de sa famille où primaient les liens du sang. Notre ménage avait tenu contre vents et marées une trentaine d’années malgré nos divergences et nos complémentarités. Mais surtout grâce à l’amour fidèle et soumis que je lui vouais.
Débarquée à la fin des années cinquante, la famille d’Emilio avait amené dans ses maigres bagages traditions et modes de vie de la paysannerie italienne. Ils étaient jeunes, à peine une trentaine d’années. Leurs enfants, par manque de soins dans la pauvre Italie de l’époque avaient dû se faire hospitaliser dès leur arrivée. Angelo et Josepha avaient reconstitué l’Italie dans un hameau de la banlieue parisienne d’où ils ne sortaient que pour le marché, les mercredis et samedis matins. Un demi-siècle n’avait pas réussi à les intégrer. Cinquante années où enfants et petits enfants avaient usé les bancs de l’école républicaine sans n’avoir pu rapporter, collée aux semelles, la moindre curiosité à ces êtres hermétiques. Angelo le maçon donna sa sueur à la France, en contrepartie, elle nourrit les siens, les éduqua, les soigna, mais sans qu’une once de sa culture n’infiltre la minuscule enclave. Le germe n’avait pas pris.
 
— Madonna della putanna… Ce gosse pouvait prendre au moins diecimila par mois en tant qu’ouvrier P2 ! Je te le dis net et clair, Zépi, au moins dix mille balles !
Angelo fulminait le regard perdu dans son verre de vin. Il n’y avait pas de plus grande honte, pour la famille, qu’Emilio quitte le collège après avoir échoué au CAP Maçonnerie. La communauté italienne toute entière jasait sur son manque d’autorité… Le temps passait et Angelo comprenait de moins en moins ce fils indigne qui abandonnait l’accordéon, instrument suprême du Napolitain pour le piano, qui se laissait pousser les cheveux, qui clamait des vers et qui s’était mis en tête de passer le BAC. Malgré de terribles scènes, la détermination d’Emilio avait été la plus forte et il réussit malgré de graves lacunes à sortir de sa condition sociale.
Quelques années plus tard, lorsqu’Emilio ramena la femme « à la langue bien pendue et il suo bastardo » ses parents s’étranglèrent de colère. Mais, il était devenu notaire, alors… Le résultat sans aucun doute revenait au père méritant qui le claironnait partout, oubliant volontairement que j’avais joué un rôle non négligeable dans cette laborieuse victoire.
 
 
Je me souviens de nos premières vacances passées en Italie au village natal d’Emilio. Si l’histoire ne l’avait frappé d’un destin tragique, la bourgade ne serait restée dans les annales. Son abbaye avait été détruite par les Allemands lors de la 2ème guerre mondiale, condamnant avec elle toute une population venue s’y réfugier.
Nous traversions la place du marché animée et pittoresque où les amoncellements de vêtements, chaussures et étalages variés si peu chers, attiraient mon attention. Le fond de l’air était un peu piquant de si bon matin, puisque Angelo nous avait jetés du lit à l’aube. Le soleil levant teintait d’une douceur particulière la forêt de parasols, les étalages couleur locale des légumes où se mêlaient les odeurs fortes de poisson, de melon et de pain sorti du four. Le petit déjeuner, mon repas préféré et sacré, ne devait pas être une habitude en Italie, j’avais dû les suivre le ventre creux. Je prenais donc le temps d’absorber avec délice le nectar vitaminé pressé à la demande par le vendeur ambulant entre des monts d’agrumes, dévorais une pizza tendre et croquante à la fois, toute chaude, caressée simplement de fines tranches de tomates. Les braillements des marchands dominaient à peine le brouhaha des discussions à la méridionale, des cris déchirants des cochons et poulets maltraités.
Marchant au pas de course, Angelo tenant son fils à l’épaule attrapait au vol le plus de connaissances possibles dans la cohue. Egarée par tant de choses à voir, je tricotais des jambes à les rattraper et arrivais trop tard pour les présentations qui n’avaient d’importance pour personne, d’ailleurs. L’étrangère n’aurait rien apporté à leur curiosité puisqu’elle n’était pas mariée au notaire et qu’elle ne savait dire que gracié et si .
En vacances, Angelo traînait de vieilles savates, un short déformé sous lequel ballottaient librement ses parties génitales. Bombant le torse de petit coq imberbe et dénudé, il oubliait que la seule ambition qu’il avait eue pour Emilio était celle d’ouvrier P2.
— Tchao, tchao ! Mio figlio Emilio, fa il notaio a Parigi… Tchao, mio figlio Emilio, fa il notaio ! chantait la voix rocailleuse d’Angelo, étalant sa fierté à tout va.
Emilio venait d’acheter une étude… Un fils notaire, il fallait que c

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