Evil E.T. 2 - Les passagers de l apocalypse
34 pages
Français

Evil E.T. 2 - Les passagers de l'apocalypse

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
34 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

La séquelle tant attendue d'Evil E.T. ! ^^
Prologue + 3 chapitres

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 21 mai 2012
Nombre de lectures 112
Licence : Tous droits réservés
Langue Français

Extrait

 
 
 
 
TEZKAL
 

LES PASSAGERS
DE L’APOCALYPSE
 

 24 Aout 2012 – Sombre sommeil - Rosa, tu fais quoi ?! Je commence à m’endormir ! Lorsqu’elle entendit la voix de son compagnon, la jeune femme sortit la tête de la salle de bain et se tourna vers la chambre à coucher. - Encore un peu de patience ! répondit-elle. J’ai presque fini ! Rosalia Mendez retourna s’assoir sur le bord de la baignoire. Elle était vêtue d’un ensemble Aubade qu’elle avait acheté dans un magasin de lingerie de la Défense en sortant du travail. De couleur griotte et ornés de motifs rouges représentant des cerises, le tanga et le soutien-gorge balconnet épousaient magnifiquement ses voluptueuses courbes. Après avoir appliqué un peu d’anticerne ainsi que quelques touches de fond de teint au ton pêche, elle apposa du fard à joues et examina une nouvelle fois son visage dans le miroir. Ça pouvait aller, elle était satisfaite. Le maquillage à la fois harmonieux et naturel mettait bien en valeur son teint mat. Elle éclaira ensuite ses yeux noisette d’un simple trait noir et d’une pointe de mascara. Vendeuse dans une grande parfumerie, très coquète de surcroit, c’était une seconde nature de prendre soin d’elle et de se maquiller. Elle y prenait d’autant plus de plaisir quand c’était spécialement pour son homme. Il lui disait souvent pour la taquiner qu’elle devrait plutôt se marier avec son stylo eyeliner et emménager dans la salle de bain. Mais on n’a rien sans rien, il le savait. Et il savait surtout très bien lui rendre la pareille. A la fois doux et attentionné, il aimait prendre son temps pour la déshabiller et il avait vraiment un don pour faire monter la température. Ils avaient déjà fait un bon bout de chemin ensemble et elle appréciait toujours autant s’envoyer en l’air avec lui. Rosalia enfila un petit chemisier rose qui laissait deviner ses formes avantageuses, puis elle réajusta la longue cascade d’ébène tombant sur ses épaules et sortit de la pièce. Toutes les lumières étaient éteintes dans l’appartement sauf les lampes qui éclairaient doucement la chambre à coucher juste à côté. - Me voilà ! annonça-t-elle en rentrant. Je ne t’ai pas trop… La jeune femme ne termina pas sa phrase et resta figée devant le lit. Il n’était plus là. Elle regarda autour avant d’appeler : - Jah ? Etant donné qu’il n’y avait personne d’autre qu’elle dans la pièce, elle n’obtint aucune réponse. Pourtant, le joint d’herbe qu’avait roulé son compagnon était accoudé dans un cendrier sur la petite table en bois de son côté et celui-ci était encore fumant.   
2
- Jahmal, t’es où ? Si c’est une blague, elle n’est pas très drôle ! Toujours pas de réponse. Rosalia fit le tour du salon et de la cuisine en appelant, puis elle regarda dans la salle de bain et les toilettes. Personne. L’appartement était vide et Rosalia se mit alors à paniquer. Elle sauta dans un pantalon jean qu’elle avait laissé trainer, puis courut vers la porte d’entrée. S’apprêtant à sortir de l’appartement, elle appuya sur la poignée et constata que la porte était toujours verrouillée. Les clés se trouvaient sur la serrure. La jeune femme refit donc un tour rapidement. Toutes les fenêtres étaient également fermées de l’intérieur, mais Jahmal n’était plus là. Les larmes commençaient à lui monter aux yeux. Rosalia se précipita dans la chambre et attrapa le téléphone portable posé sur sa table de chevet, puis composa le numéro de son compagnon. Elle sursauta lorsqu’un cellulaire sonna juste derrière elle. La mélodie était étouffée, mais Rosalia la reconnaissait parce que c’était leur musique à tous les deux. Celle-ci provenait de la grande penderie où elle rangeait tous ses vêtements. Il s’était donc caché à l’intérieur. - Ça va, tu m’as bien eu ! Tu peux sortir de là maintenant ! Rosalia attendit devant le placard, mais il ne se passa rien et la mélodie finit par s’arrêter. Elle se décida alors à poser une main sur la poignée de la glissière, puis se figea de nouveau. Etreinte par une terrible appréhension, elle ne pouvait s’empêcher de craindre le pire et son cœur battait la chamade. Elle était morte de trouille, mais elle ne pouvait pas rester ainsi sans savoir. Malgré la voix dans sa tête qui lui criait de ne pas le faire, Rosalia inspira profondément avant d’ouvrir la porte. Ce qu’elle vit à l’intérieur de la penderie n’avait rien d’anormal. La jeune femme se tenait devant des manteaux et des vestes accrochés sur des cintres. Elle relâcha sa respiration et ce fut juste à ce moment-là qu’une chose sombre passa soudainement entre les habits pour s’enrouler autour de son cou. En baissant les yeux, elle se rendit compte avec une profonde horreur qu’il s’agissait d’un tentacule. Mais Rosalia n’eut pas le temps de réagir lorsque son partenaire sortit de la garde-robe et la plaqua sur le lit. Appuyé de tout son poids sur elle, il l’empêchait de bouger et de respirer. Son regard obscur brillait d’une lueur malsaine et elle l’entendait rire à gorge déployée tandis qu’il était en train de l’étrangler. La jeune femme luttait, mais il était beaucoup trop fort et elle asphyxiait. Elle se réveilla en sursaut à l’instant où elle se voyait mourir, mais le cauchemar n’était pas terminé pour autant. Elle était toujours paralysée et elle pouvait à peine respirer. La silhouette qui se tenait au-dessus d’elle continuait de l’écraser et elle suffoquait. Elle savait que Philippe était en train de dormir juste à côté d’elle, mais elle ne pouvait pas hurler pour le prévenir. Elle était totalement impuissante face à cet agresseur maléfique et elle allait réellement mourir. Soudain, la sonnerie d’un réveil retentit. Et l’ombre s’évapora lorsque la lumière inonda la chambre quelques secondes plus tard. Rosalia sentit alors des mains tapoter son visage et reconnut celui qui était au-dessus du sien. C’était le visage doux d’un ange aux yeux bleus et
  
3
aux cheveux blonds mi longs. Avec une barbe attestant qu’il avait oublié de se raser depuis plus d’une semaine. Il la serra dans ses bras quand elle s’effondra en sanglot. - C’est fini, Rosa. C’est fini . - C’est fini jusqu’à quand ?! cria-t-elle. Je n’en peux plus ! Je vais finir par crever ou devenir complètement folle ! Il était encore là et… - Non, il n’y avait personne quand j’ai allumé la lumière. - Je te dis qu’il était là ! Il était en train de m’étouffer et je ne pouvais plus bouger ! - Tu sais bien que c’est impossible. On a vérifié ensemble hier soir que tout était fermé. Tu t’en souviens ? - Oui, mais…  - Non, écoute-moi. J’ai fait des recherches sur le web pendant que tu dormais et j’ai découvert quelque chose. Tu veux bien venir voir, s’il te plait ? Rosalia jeta un œil sur l’écran digital du réveil posé sur sa table de chevet. Il était un peu plus de trois heures du matin, exactement comme les nuits précédentes. Tous les deux se levèrent et passèrent dans le salon. Philippe l’invita à s’assoir sur une chaise en bois devant le bureau, puis il s’installa à côté d’elle. Il ralluma un joint d’herbe qu’il avait laissé sur le bord du cendrier et il bougea ensuite la souris de l’ordinateur, ce qui eut pour effet de faire apparaître un article sur l’écran. Rosalia s’approcha un peu plus près pour pouvoir lire. Il s’agissait d’un article de Wikipédia qui portait sur un trouble du sommeil : La paralysie du sommeil se caractérise par le fait que le sujet, sur le point de s’endormir ou se réveiller, se trouve dans l’incapacité d’effectuer tout mouvement volontaire. A cette sensation sont couramment associées des hallucinations visuelles ou auditives ainsi que des impressions d’oppression, de suffocation, de présence maléfique et de mort imminente… C’était donc ça. Cet article décrivait mot pour mot ce qu’elle était en train de vivre depuis quelques nuits. Elle poursuivit sa lecture : … La paralysie du sommeil est mentionnée dans les t raités médicaux depuis l’Antiquité. Son caractère étrange et déconcertant a été à l’origine de nombreuses superstitions, au cours des âges et à travers les diverses cultures. Aspects cliniques … La personne est consciente et réveillée, mais ell e se retrouve presque complètement immobilisée. L’épisode de paralysie du sommeil dure entre quelques secondes et quelques minutes. L’impossibilité de faire un mouvement, de crier, de prévenir son entourage et, dans certains cas, l’apparition d’hallucinations ou l’impression d’étouffement font que cette expérience est souvent associée à des sentiments de peur et d’angoisse…    
4
Prévalence dans la population La prévalence est très variable en fonction du groupe ethnique... Diverses études ont établi que 25 à 60 % de la population générale expérimente la paralysie du sommeil sous une forme légère une fois dans sa vie. Seulement 0,3 à 6,2 % des cas l’expérimentent de façon régulière sous une forme plus ou moins sévère. La paralysie du sommeil apparaît le plus souvent à l’adolescence et reste également répandue quels que soient l’âge et le sexe. La plupart des cas se produisent chez un sujet ne présentant aucun trouble clinique… Facteurs favorisants Il a été noté que divers facteurs, comme le fait de dormir sur le dos, le manque de sommeil, les irrégularités du rythme de vie, le stress, le surmenage sont susceptibles de favoriser ou d’exacerber l’apparition de ce trouble du sommeil. Hallucinations associées … Leur origine est à rapprocher de celles des rêves qui caractérisent le sommeil paradoxal. Ces hallucinations visuelles, auditives, tactiles, tournent souvent autour du thème de la présence menaçante d’un intrus dans la chambre. Elles sont parfois intenses... Si l'hallucination la plus caractéristique et la plus fréquente est la sensation d’une présence, les hallucinations visuelles sont bien moins courantes… Les hallucinations auditives, tactiles et cénesthésiques (sensation de « sortie du corps ou de lévitation), les impressions d’étouffement et d’écrasement par un poids sur le torse, sont rapportés par plus de la moitié des sujets… Des hallucinations. Ça paraissait pourtant tellement vrai. Rosalia avait du mal à le croire, mais elle se sentait à présent un peu plus rassurée. Il n’y avait donc pas d’inconnu dans son appartement quand elle dormait et c’était elle qui débloquait. Son regard s’attarda sur une image liée à l’article. Il s’agissait d’une toile d’Heinrich Füssli intituléeLe cauchemar. Celle-ci représentait une femme en train de dormir sur le dos avec un démon au sourire méphitique qui se tenait assis en boule sur sa poitrine. Rosalia termina de lire la page : Gérer les paralysies du sommeil La paralysie du sommeil n’est pas obligatoirement un phénomène effrayant. Il semblerait que l’aspect terrifiant des hallucinations dépend en grande partie de l’état d’esprit du sujet : Le fait de se sentir immobilisé provoque la panique et la panique induit le caractère cauchemardeux des hallucinations. En faisant disparaître la peur, on fait également disparaître les expériences désagréables. Un conseil est donc de maîtriser ses émotions et d’éviter de lutter. Il est aussi possible de modifier ses sentiments en évoquant des émotions positives. Certaines techniques permettent de provoquer rapidement un réveil complet. L’une consiste à pratiquer des respirations profondes à un rythme régulier. Tousser volontairement conduit au même résultat.   
5
Lorsqu’elle se retourna vers son partenaire, Rosalia s’aperçut qu’il n’était plus là. Alors une vague d’angoisse la submergea. Non, ce n’était pas possible. Elle était bien réveillée cette fois, alors ça ne pouvait pas recommencer. La jeune femme regarda autour d’elle en s’efforçant de ne pas paniquer. Philippe n’était pas dans le salon, mais il était forcément quelque part dans l’appartement. Pas dans la penderie, de préférence. Ne pouvant s’empêcher de repenser à son mauvais rêve, elle se leva et marcha lentement vers le couloir de l’entrée. D’où elle était, elle voyait bien que la lumière était éteinte dans la chambre à coucher juste en face. Rosalia se déplaça silencieusement jusqu’au coude du couloir et ce fut à ce moment-là qu’elle vit le rai de lumière provenant de la cuisine, un peu plus loin sur sa droite. La porte était légèrement entrebâillée et il n’y avait pas un bruit. Rosalia s’approcha sur la pointe des pieds. Arrivée devant la porte, elle tendit à nouveau l’oreille et écouta. Des marmonnements. Il lui semblait bien entendre Philippe marmonner, mais le son de sa voix était à peine audible. Et l’angle d’ouverture n’était pas assez large pour pouvoir observer quoi que ce soit. Rongée par la peur, la jeune femme poussa très lentement le battant. Elle découvrit son compagnon installé devant le plan de travail en bois qui était calé contre le mur au fond de la pièce. Dessus était posée la grande bouteille en verre dans laquelle nageait son poisson combattant. Rosalia le voyait observer l’animal en remuant les lèvres, comme s’il était en train de parler. Elle toussota volontairement, alors il tourna la tête : - Ha ! Je ne t’ai pas entendu arriver, dit-il en la voyant. Alors ? T’as fini de lire l’article ? Tu en penses quoi ? - C’est bien ça. Ça ne me dit pas pourquoi je fais toujours le même cauchemar à trois heures du matin, mais c’est bien la maladie du sommeil. - Et t’as lu le passage sur les facteurs favorisants ? Manque de sommeil, stress et surmenage. Ça serait peut-être bien que tu prennes quelques jours pour souffler. Rosalia secoua négativement la tête :  Non, pas en ce moment. Une collègue est déjà en arrêt maladie et on ne peut -pas se permettre d’être en sous-effectif. - C’est toi qui voit, mais t’es en train de jouer avec ta santé. Je dis juste que t’aurais besoin de te reposer un peu plus et je ne pense pas avoir tort. D’ailleurs, ça ne te dirait pas de retourner se coucher ? - Je n’ai plus vraiment sommeil, mais bon… Philippe l’attrapa par la main et elle se laissa convaincre de le suivre. Cependant, elle ne trouva pas le sommeil et resta éveillée quasiment jusqu’au petit matin. Lorsque le réveil sonna à 8H00, elle eut donc du mal à émerger et ce fut non sans un extrême effort qu’elle parvint à se convaincre de sortir du lit. Rosalia se sentait fatiguée, mais elle n’avait pas refait cet horrible rêve. Une fois par nuit était amplement suffisant. Comme d’habitude, Philippe était déjà parti au boulot et il lui avait laissé un adorable petit mot sur la table de la cuisine. Il n’avait pas non plus oublié de prendre son poisson avec lui. Elle le trouvait vraiment bizarre depuis quelques temps. Rosalia   
6
mangea sans appétit deux tartines grillées et un yaourt nature, puis elle avala un jus d’orange avant de s’enfermer dans la salle de bain. Une heure plus tard, elle se trouvait sur les lieux du travail à la Défense. La journée apporta son lot quotidien de clientes. Des pétasses et des femmes embourgeoisées, c’était ce qu’il aurait dit. Il n’était plus là maintenant et elle avait mis du temps à se remettre de leur rupture, mais il revenait la hanter alors qu’elle commençait tout juste à s’épanouir avec un autre. Pourquoi faisait-elle cet horrible cauchemar ? Etait-ce parce qu’elle éprouvait inconsciemment des remords ? C’était pourtant lui qui avait décidé de l’abandonner. Elle savait que Jahmal ne voulait pas rester sur la région parisienne, mais son départ avait été si soudain. Toutes les questions qu’elle se posait pouvaient se résumer à une seule : Pourquoi ? Pourquoi, pourquoi, encore et toujours pourquoi. Ce pourquoi lui martelait l’esprit et le pia-pia des acheteuses parvenait à ses oreilles comme un vague son lointain. Rosalia n’était pas dans le bain. Se sentant flotter entre deux eaux, elle quitta le travail une heure plus tôt. Sa chef avait bien vu qu’elle n’était pas en forme et c’était même elle qui avait insisté pour qu’elle aille se reposer. Il était juste 18H00 quand Rosalia monta dans le RER. Elle sortit deux stations plus loin à Nanterre et marcha ensuite quelques minutes dans la rue Victor Hugo avant de sonner à la porte d’une maisonnette. L’homme qui ouvrit la porte, un colosse sud-américain âgé d’une trentaine d’années, fut surpris de sa visite et l’invita à rentrer : - Désolée de passer sans prévenir, Nando. - Non, pas de problème. C’est l’heure de l’apéro, alors tu vas m’accompagner. Fernando Esposito prépara deux téquilas sunrise et tendit un verre à son invité-surprise. Ils trinquèrent, puis il se mit à rouler un joint sur la table basse. Rosalia se leva donc avec son verre à la main et se rendit devant le bureau sur lequel était posé un terrarium. Comme toujours, le caméléon était perché sur la branche la plus haute pour se faire dorer la pilule dessous la lampe UV. Peu importe son propriétaire, il n’y avait jamais eu aucun changement dans le mode de vie de ce reptile et tout allait bien pour lui du moment qu’il avait sa ration journalière de grillons. Rosalia lâcha un sourire triste. Elle se retourna alors vers son ami et demanda : - Dis, Nando… Est-ce que… Est-ce que ça t’arrive to ujours de penser à lui ?  - Je suppose que tu parles de Jah. Evidemment que je pense toujours à lui, quelle question ! Il était mon meilleur pote. Le géant alluma son joint, puis il le lui tendit avant de reprendre : - Ça fait un petit moment qu’on ne s’est pas vu et j’aurais presque juré que tu m’avais oublié. Rosalia baissa la tête et commença à balbutier : - Pardon, je… Je ne sais pas quoi dire… J’ai été as sez occupée ces derniers temps et je…
  
7
- Arrêtes, coupa-t-il. Tu sais bien que je te charrie, Rosa. Ça fait toujours plaisir de te voir, mais on dirait bien que tu n’as pas trop la pêche. Si tu me disais plutôt ce qui t’amène ici ? La jeune femme revint s’assoir en face de son interlocuteur. Elle but deux grandes gorgées du cocktail, tira longuement sur le joint et se décida à parler. Elle lui raconta en détails le rêve qu’elle faisait depuis quelques nuits. Fernando l’écouta avec attention avant de se prononcer : - Jah n’avait aucune raison de t’en vouloir ainsi et tu n’as rien à te reprocher. Il tenait beaucoup à toi, autant que tu tenais à lui. Mais vous souffriez tous les deux de votre relation et il a donc décidé d’y mettre un terme. - Je… Je sais… Mais il ne serait pas parti comme ça en laissant tout derrière lui ! Tu le connaissais aussi bien que moi ! Esposito la regarda avec un air navré, puis il haussa les épaules : - On a fait ce qu’on a pu. Je sais que c’est difficile à accepter, mais on a fait ce qu’on a pu. On a dit aux flics qu’il était parti à la recherche de son pote Maxence et qu’il était probablement à Haïti ou au Mexique. Il y a très certainement un lien entre lui et l’effondrement du site maya de Chichén Itzá, mais sa disparition a été classée sans suite et on ne peut rien faire de plus. - Oui, mais… Ce cauchemar… C’est la quatrième nuit que je fais le même cauchemar et je me réveille à chaque fois totalement paralysée à trois heures du matin ! Je sais que c’est la paralysie du sommeil, mais il y a autre chose ! C’est comme si… - Comme si quoi ? l’interrompit-il. - Je ne sais pas trop… J’ai l’impression que… Le va udou. Jahmal pratiquait des rites vaudous avec son pote. Les dernières paroles de Rosalia firent bondir le colosse de sa chaise : - Putain de merde, Rosa ! J’étais sûr que t’allais me sortir ces conneries ! C’est du placébo, tout ça ! Ça marche uniquement si t’y crois ! - Alors je suis folle, c’est ça ?! - Ce n’est pas ce que j’ai dit ! Jahmal est parti, mais il n’avait aucune raison de chercher à te faire du mal ! Comment peux-tu penser une chose pareille ?! Même si vous vous preniez souvent la tête, il t’aimait ! - Il… Il m’aimait. - Oui, il t’aimait. S’il y a une chose dont tu peux être certaine, c’est bien ça. La jeune femme vida son verre d’une traite et le posa sur la table, puis elle repassa le joint à son ami. - Je t’en sers un deuxième ? proposa-t-il. - Oui… Oui, je suis toute seule ce soir. J’en veux bien un autre, s’il te plait.    
8
Rosalia partit vers 21H00, après avoir ingéré une certaine quantité d’alcool. Ça lui avait fait du bien de parler, mais elle se sentait légèrement brassée et les téquilas sunrise ne lui avait pas fait oublier ses soucis pour autant. Heureusement qu’elle n’habitait pas loin et qu’elle pouvait encore marcher droit. La jeune femme fit le chemin jusqu’à son appartement situé dans la rue du Docteur Foucault. Ce bol d’air frais lui avait finalement ouvert l’appétit. Dès qu’elle fut rentrée, elle se prépara un plateau repas et s’installa devant la télé. Il n’y avait pas grand-chose à regarder. Rosalia mangea une assiette de crudité et un sandwich au pastrami devant une série qu’elle avait déjà vu. Perdue dans ses pensées, elle n’y prêta guère d’attention. Elle s’occupa ensuite des pieds de cannabis qu’elle faisait pousser dans une tente à côté de son bureau. Ses plantes étaient en bonne santé et il n’y avait pas grand-chose à faire, à part réajuster le pH de la solution nutritive. Elle versa quelques millilitres de pH + dans le bac hydroponique, puis immergea la sonde du pH-mètre pour vérifier la nouvelle valeur. Ce fut à ce moment-là que la lumière de la lampe sodium se mit à grésiller. Rosalia vérifia le branchement ainsi que les fils. Il n’y avait pourtant pas de faux contact. Bizarre. Elle tapota doucement sur l’ampoule et l’éclairage se stabilisa. Peut-être que celle-ci commençait tout simplement à fatiguer. Avant de ressortir de la tente, Rosalia fouilla dans le bac réservé à son matériel hydroponique et trouva un programmateur. Elle retourna ensuite dans la chambre avec le petit appareil entre les mains. La jeune femme débrancha alors sa lampe de chevet et inséra la prise de celle-ci dans le programmateur, puis elle brancha ce dernier et effectua un réglage pour que la lumière s’allume automatiquement à trois heures du matin. Il fallait bien qu’elle puisse se débrouiller seule cette nuit puisque Phil participait à un tournoi de poker. Une fois l’appareil réglé, elle retourna dans le salon et s’installa devant son ordinateur portable. Rosalia se connecta au web pour rechercher des témoignages sur la paralysie du sommeil. Ce qu’elle trouva était édifiant. Un nombre incalculable de personnes avaient déjà vécu la même expérience et elle était donc loin d’être un cas isolé. La plupart étaient des adolescents et beaucoup parlaient de la présence d’un intrus terrifiant alors qu’ils étaient totalement paralysés dans leur lit en pleine nuit. C’était complètement dingue. Comment des milliers de gens à travers le monde pouvaient-ils avoir les mêmes hallucinations ? Existait-il une explication rationnelle à ce phénomène aux frontières du paranormal ? Les discussions à ce sujet allaient bon train sur les forums. Certains étaient convaincus d’être attaqués par des mauvais esprits, d’autres disaient qu’il fallait absolument garder son calme et faisaient part de leurs recettes pour « chasser les présences maléfiques ». Fermer les yeux si c’était possible et compter jusqu’à dix, se forcer à avoir des pensées positives, etc. Merde. Pourquoi fallait-il que ça lui arrive à elle ? Rosalia n’était pas du genre à se lamenter sur son sort, mais elle n’avait vraiment pas besoin de ça. Des pensées positives ? Mon cul, oui. Rosalia quitta Internet et ouvrit le dossier où elle rangeait toutes ses photos. Elle navigua dans quelques sous-dossiers, puis cliqua sur l’une des images miniatures et celle-ci s’afficha alors sur tout l’écran. C’était la dernière photo où ils étaient ensemble. Elle datait du premier de l’an, une semaine avant qu’il ne la quitte et disparaisse sans laisser aucune nouvelle. Sur celle-ci, Rosalia portait la couleuvre de Jahmal autour de la nuque et ce dernier se tenait derrière elle avec la tête posée  
 
9
sur son épaule. Tous les deux paraissaient heureux et regardaient l’objectif en souriant à pleine dents. Elle pouvait encore entendre lecheeeeese dans résonner cette ambiance festive qui lui paraissait si loin. La jeune femme se mit à pleurer silencieusement. Ce fut alors qu’elle vit dans le reflet de l’écran une ombre traverser le salon. Son sang ne fit qu’un tour et Rosalia se retourna vivement. Terrorisée, elle regarda partout autour. Un son tonitruant éclata alors brusquement dans le salon. Son regard se tourna aussitôt vers le mobilier sur lequel était posée sa télé. A l’intérieur du meuble, l’écran de sa petite chaîne stéréo était éclairé.I must stand. La chaîne venait de s’allumer toute seule pour diffuser à tue-têteI must standd’Ice T. C’était un morceau que son ancien partenaire adorait. - Bordel de… Non, ce n’est pas possible. Je… Je doi s certainement… Rosalia se donna quelques tapes sur les joues. Non, ce n’était pas un rêve. Mais elle pouvait bouger, alors elle se leva d’un bond et éteignit la chaîne. Le silence revenu dans la pièce, elle retourna s’assoir sur la chaise. Ne pas paniquer. Peut-être qu’il s’agissait juste d’un problème électrique et… Elle cherchait désespérément à se rassurer, mais elle savait bien que ce n’était pas normal. Alors que devait-elle faire, bon dieu de merde ? Que devait-elle faire pour que ça s’arrête ? Rosalia sursauta lorsque la musique explosa à nouveau. Elle se releva et arracha la prise de la chaîne stéréo, puis elle s’adossa au mur et se laissa tomber le long de celui-ci. Ses nerfs lâchaient, alors elle se mit à sangloter. Recroquevillée sur elle-même, elle resta un long moment sans bouger. Puis elle finit par redresser la tête et bredouilla : - Jah… Jahmal, s’il te plait… Je… Je sais que c’est toi… Je ne sais pas si tu peux m’entendre, mais… Je… J’aimerais que tu me laisses tranquille maintenant et… Qu’est-ce que tu veux ?! Qu’est-ce que tu veux, putain de merde ?! Pour répondre à sa question, la lumière du salon se mit elle aussi à clignoter. Alors Rosalia vit l’ombre. Celle-ci se tenait dans le couloir, à quelques mètres d’elle. Tandis que les ampoules du plafonnier continuaient de grésiller, la silhouette menaçante avançait lentement. Le regard rivé sur elle, Rosalia se plaqua davantage contre le mur. L’ombre était de taille et de forme humaine, mais il était impossible de discerner le moindre détail quant à sa physionomie. A chaque fois que la lumière revenait, elle était un peu plus proche. Lorsque Rosalia sentit un contact glacé, elle se releva en hurlant et se précipita dans le couloir. Elle courut vers la porte d’entrée. Mais au moment d’actionner la poignée, sa main resta bloquée. Pas de clé dans la serrure. Merde, les clés ! La jeune femme en proie à la panique fouilla dans les poches de son tailleur et de sa veste. Elle ne trouva rien. Putain de merde ! Elle avait laissé son trousseau dans la chambre ou le salon. Rosalia se retourna et vit alors l’ombre qui arrivait dans le coude du couloir. Elle se rua dans la cuisine sur sa droite, puis ouvrit la fenêtre. La rue se trouvait trois étages plus bas. C’était impossible, elle ne pouvait pas sauter d’une telle hauteur ! Sans perdre plus de temps, elle fouilla dans un tiroir du placard juste à côté d’elle et sortit un grand couteau de cuisine avant de se
  
10
retourner. La silhouette menaçante se tenait à présent dans l’embrasure de la porte. Terrifiée, Rosalia brandit son couteau et cria : - N’approchez pas ! Sinon je… je… Restez où vous êt es ! N’approchez pas ! L’ombre continua d’avancer. - Je vous en prie ! Pitié ! supplia-t-elle. Cherchant une échappatoire, son regard s’arrêta sur le pot de gros sel qui trainait sur le plan de travail. Elle l’ouvrit aussitôt et jeta une poignée sur la présence maléfique. Il n’y eut aucun effet. Rosalia vida tout le reste sur le lino de la cuisine et forma hâtivement un cercle autour d’elle. La silhouette était maintenant juste au-dessus. Elle s’apprêtait à la toucher lorsque Rosalia donna un coup de couteau. Cependant, la lame affutée ne fit que traverser le vide obscur. Sentant à nouveau l’effroyable contact glacé, elle recommença encore et encore. Vainement. Le froid envahissait tout son être et ses membres s’ankylosaient peu à peu. Quand ses jambes ne parvinrent plus à la soutenir, la jeune femme tomba. Elle tenta de garder les bras devant elle pour se protéger, mais ils étaient devenus trop lourds eux aussi et elle dut abandonner la lutte. Elle ne pouvait plus bouger. Le regard fixe empli d’une profonde horreur, Rosalia n’avait d’autre choix que de voir cet être qui s’insinuait en elle. Il l’écrasait, il l’étouffait. Elle ne pouvait plus respirer et elle allait sombrer. Elle avait beau se répéter qu’elle allait se réveiller d’un moment à l’autre, sa vie était en train de la quitter. Elle se sentait partir hors de son enveloppe charnelle. Puis elle se vit morte. Un rictus de terreur figé sur son visage, Rosalia Mendez venait de mourir le 25 Aout 2012 à l’âge de 28 ans. Lorsqu’elle retrouva ses esprits, la jeune femme fut surprise de se retrouver allongée sur le sol de la cuisine. Il faisait nuit et la lumière était allumée dans le couloir de l’entrée. Rosalia avait mal partout. Ses jambes et ses bras étaient encore engourdis, mais elle n’était plus paralysée. Elle se releva péniblement, puis alluma la lumière dans la pièce. Il y avait du sel partout sur le lino ainsi qu’un couteau de cuisine. Peu importe ce qu’elle avait essayé de faire, tout était fini à présent. Rosalia se rendit dans sa chambre. La lampe de chevet était allumée et le réveil indiquait qu’il était un peu plus de trois heures du matin. Elle attrapa son téléphone portable, puis appela son compagnon : - … - Oui, c’est bon. - …   - Ok, laisse-moi juste le temps de me changer et je descends.  … -- Ça marche. A tout de suite. Rosalia raccrocha et fouilla dans sa penderie. Un bas de survêtement, un tee shirt et un pull feraient l’affaire. Elle troqua son costume pour cet ensemble qui n’était pas   
11
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents