La maison sans fin
71 pages
Français

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La maison sans fin , livre ebook

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Description

Ce recueil de nouvelles traduit, dans les thématiques qu'il développe et en usant du genre du fantastique, les maux dont souffre actuellement le continent noir (avarice, égocentrisme, mysticisme obscurantiste) .

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 décembre 2010
Nombre de lectures 68
EAN13 9782296707719
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0424€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

La maison sans fin
Elvis Njiké Nouemsi


La maison sans fin


Nouvelles


L’Harmattan
© L’H ARMATTAN, 2010
5-7, rue de l’École - Polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-12902-3
EAN : 9782296129023

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
A ma mère qui malgré son absence a su
m’inspirer,
A mon père qui a été pour nous bien plus qu’un
père,
A mes frères et sœur Paulin, Alain, Lionel et
Carine,
A Lionel Kamsu pour tout ce qu’il est,
A mes frères de cœur Eric Théophane
Fotso,
Moïse Mbey Makang et Téguia Bogni,
A Milau Ninkam Tayou
Je vous dois à tous d’être celui
Qu’aujourd’hui je suis.
LA MAISON SANS FIN
Autrefois, il y a bien longtemps aujourd’hui, un homme s’était fait connaître de ses congénères par sa tendance à être prétentieux. Il prétendait toujours pouvoir faire ce que personne dans le village ne parvenait à réaliser. Il avait été orphelin très tôt – à l’âge de neuf ans – car ses parents avaient été tués dans un incendie qui avait ravagé la case familiale. Sa mère lui avait toujours conseillé l’humilité parce qu’elle avait senti monter en lui, alors qu’il n’était encore qu’un enfant, des relents acerbes de suffisance.
N’ayant pas écouté les conseils de sa mère, il vivait reclus et ne reconnaissait pas l’autorité du chef de village. Il avait voulu épouser la fille de ce dernier à son insu. Lorsqu’il en avait été informé, le chef était entré dans une colère folle et n’en était sorti que grâce au souvenir de l’amitié réelle et longue qui l’avait profondément lié aux parents du jeune homme. Il l’avait néanmoins condamné à vivre aux confins du village, coupé de toutes relations avec les autres villageois. On ne devait lui adresser la parole que s’il s’agissait de sa survie. Il lui fut signifié par le chef et le conseil des notables, qu’il ne serait réintégré que s’il demandait pardon et se repentait de ses fautes en présence de tous les habitants du village, car il les avait heurtés par son comportement.
Le jeune homme qui n’avait quasiment jamais eu d’ami ne s’en sentit pas plus mal. Au début, il était heureux de tout cet espace qui lui était offert à l’autre bout du village, là où les gens ne se rendaient jamais. Il se nourrissait de fruits qu’il avait cueillis, d’animaux rôtis à même la braise qu’il avait tués pendant ses journées de chasse, et de feuilles qu’il pilait. Très vite, sa vie devint ennuyeuse. Chaque jour, il percevait au loin, provenant du village, des cris d’enfants qui jouaient en toute innocence, les échos des pilons, qui dans des mortiers, martyrisaient de nombreuses feuilles de manioc ; il aurait voulu se joindre à cette vie qui avait été la sienne, qu’il n’avait pas su apprécier et qui maintenant lui manquait, mais imbu de sa personne, il se refusait à faire ce premier pas qui le conduirait à la contrition. Lorsque sa solitude se fit trop pesante, il décida de reprendre la route du village, non sans avoir au préalable mis sur pied un stratagème lequel, pensait-il, lui permettrait de se faire accepter de nouveau sans avoir besoin de se répandre en excuses.
Il fit par l’intermédiaire des enfants, appeler et rassembler tout le monde sur la grande place du village et annonça son intention de réaliser quelque chose d’exceptionnel. Il allait construire une maison sans fin, dans laquelle personne à part lui ne saurait s’orienter. Les villageois qui étaient tout d’abord sceptiques – parce qu’ils pensaient tous que le jeune homme cherchait le moyen de se rendre intéressant et par-là de se faire pardonner – ne voulurent pas le prendre au sérieux. Ils lui rirent au nez lorsqu’ils se rendirent compte qu’il l’était. Qui donc aurait le pouvoir doublé de l’idée folle de construire une maison sans fin, dans laquelle personne ne saurait s’orienter du tout ? Furieux de voir avec quelle légèreté ces derniers accueillaient son projet, il s’énerva, s’en retourna dans son exil en proférant des jurons et en promettant d’entamer sa gigantesque œuvre six jours plus tard.
Le jour du début de la construction de son édifice arriva ; les villageois se dirigèrent en grand nombre vers les confins du village, à l’endroit où personne n’allait en principe jamais, mais où le jeune homme avait pourtant établi sa demeure depuis de nombreux jours. Une fois sur place, ils furent stupéfaits de voir avec quelle précision avait été défrichée une immense étendue de terrain par le jeune homme et qui s’étendait à perte de vue. Sans même leur adresser la parole, le garçon se mit à l’ouvrage en commençant par la construction des fondations. Lorsque la journée s’acheva, les villageois s’en retournèrent chez eux pour préparer des provisions de nourriture. Le lendemain, dès le lever du jour, le village tout entier se déporta sur le lieu du chantier ; ce fut aussi le cas du chef qui était curieux de voir de lui-même ce qui jusqu’ici ne lui avait été que raconté. Le jeune homme travaillait tous les jours à proximité des villageois qui n’en finissaient pas de commenter cette entreprise folle. Il lui fallut deux semaines pour achever la construction des fondations. Il décida alors de se lancer dans l’élévation des murs – malgré les réticences du chef – suivant un plan qu’il avait au préalable établi. Il prévoyait de construire toute la façade avant et de continuer ensuite vers l’intérieur, ayant ainsi la certitude que personne ne pourrait intérioriser les contours de ce gigantesque labyrinthe que lui seul maîtriserait. Il ne prit donc aucune précaution particulière pour pouvoir retrouver la sortie car il avait le plan dessiné sur sa paume de main. Il avait été interdit aux enfants de s’approcher de cet immense édifice. Au soir du premier jour, il sortit sans peine, sous les applaudissements nourris des villageois. Il en fut de même le deuxième, le troisième et le quatrième jours. Il allait de plus en plus loin dans sa construction, s’avançant chaque jour un peu plus dans son labeur. Son travail devenait un peu plus épuisant chaque jour. Il suait maintenant énormément. Au soir du cinquième jour, lorsqu’il voulut sortir, il se rendit compte du fait que le plan qu’il avait soigneusement dessiné sur sa main avait été effacé par les effets conjugués des efforts qu’il avait fournis et de la sueur qui dégoulinait de son corps. Il paniqua, cria, appela à l’aide en vain. Pendant longtemps, il chercha la sortie, mais ne la trouva pas. A l’entrée de la maison, on s’inquiétait de ne pas le voir revenir. Les villageois veillèrent toute la nuit, mais le jeune homme ne reparut pas. Trois jours passèrent ainsi sans que l’on n’ait plus de nouvelles. Quelques jeunes hommes se proposèrent d’essayer de le retrouver, mais le chef du village s’y opposa en pensant qu’il leur serait difficile voire impossible de retrouver la sortie alors qu’ils n’avaient aucun plan de la construction. Le jeune homme mourut ainsi de soif, de faim et de fatigue. Il avait longtemps marché en cherchant la sortie sans parvenir à la trouver. Il fut ainsi victime de ses propres présomptions ; ses turpitudes eurent raison de lui.
Une semaine après la disparition du garçon, le chef ordonna le retour de tout le monde au village ; il décida d’interdire formellement et définitivement toute activité dans cette partie de son territoire. Le temps passa. On en parlait de moins en moins et lorsque l’on s’en rappelait, c’était désormais comme d’une légende dont on déformait volontiers les contours pour faire peur aux enfants et les inciter à l’obéissance.
AU-DELA DU REEL
Kamsu était une fille très curieuse, c’était de notoriété publique au village. Elle était sans cesse à la recherche de sensations fortes ; et son être lui imposait bien malgré elle de transgresser tous les interdits que lui fixaient ses parents. Pour lui interdire quelque chose, il fallait la lui autoriser ; et là, tout le plaisir qu’elle éprouvait à chercher s’envolait, faisant place à une vaine satisfaction. L’interdiction était pour elle source de motivation et le mystère lui-même n’avait plus rien à lui cacher, plus aucun secret. Cette obstination paraissait étrange et quelque peu malsaine de l’avis de toutes les personnes qui l’avaient déjà rencontrée. Et pour oublier cette manie qu’elle avait de tout vouloir savoir, tout de suite, on accusait son enfance et son éducation trop libertines, peu disciplinées mais viriles : car elle avait grandi essentiellement entourée de garçons. C’est pourtant cette manie au début innocente qui allait l’amener à voir ce que jamais elle n’aurait dû voir.
Elle avait huit ans lorsque son frère était décéd

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