Le monastère de Peyrefort
157 pages
Français

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Le monastère de Peyrefort , livre ebook

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Description

L'auteur interroge une gfois encore son thème favori, la solitude. Le héros de ce livre éprouve ces solitudes que la vie lui impose, celle de l'enfance dans la montagne cévenole, celle de la jeunesse au milieu du tourbillon de l'université ou du service militaire, celle enfin du choix définitif qui le fixe pour toujours entre les murs de Peyrefort. Ces solitudes, pourtant, n'excluent pas la vie. La vie pure de la montagne, la vie multiple des livres, les vies de Jacques et Martine, de Pierre et Solange, de Maurice et de Brigitte...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2011
Nombre de lectures 47
EAN13 9782296801684
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le Monastère de Peyrefort
© L’Harmattan, 2011 5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-296-54237-2 EAN : 978229542372
Paul Fabre
Le Monastère de Peyrefort roman L’Harmattan
DU MÊME AUTEUR
La Fara-Alès : Las Castanhadas (tròces causits), Montpellier, Centre d’études occitanes, 1970. L’Affluence hydronymique de la rive droite du Rhône. Essai de micro-hydronymie, Montpellier, Centre d’études occitanes, 1980. Noms de lieux du Languedoc, Paris, Bonneton, 1995. Les Noms de personnes en France, Paris, Presses universitaires de France, collection « Que sais-je ? », 1998. Au Sens large, Paris, L’Harmattan, 1999. e Dictionnaire des noms de lieux des Cévennes, Paris, Bonneton 2000 ; 2 édition 2009. Diagonalement vôtre, Montpellier, Amicale des Diagonalistes de France, 2001. Expressions du cyclisme, Paris, Bonneton, 2004 (préface de Jean Bobet, dessins de Ségolène de La Gorce). Le Pays de là-haut, Saint-Jean-de-Valériscle, GabriAndre, 2005. Petit Dictionnaire de la littérature occitane du Moyen Âge, Montpellier, Centre d’études occitanes, 2006. Le Grand Ruisseau, Clermont-Ferrand, Éditions de l’Écir, 2008. Rue Daguerre, Paris, L’Harmattan, 2010. Anthologie des troubadours, Orléans,Paradigme, 2010. Chez l’auteur : Mes Vélos…, Alès, 1987 (préface de Jean Bobet, dessin de couverture de Jacques Faizant). Saint Eddius, priez pour nous…, Alès, 1989 (préface de Raymond Poulidor, dessin de couverture de Jacques Faizant). Du haut des cieux…, Alès, 1990 (préface d’Yves Berger, dessin de couverture de Jacques Faizant). Chemin à trois voix, Alès, 1997 (dessin de couverture d’Henri Tamiatto).
 Pour Sylvie et Philippe,  Affectueusement.
 « Parfois l’envie le prenait de s’en aller n’importe où, de disparaître complètement ; il souhaitait une retraite sombre et solitaire où il resterait seul avec ses pensées et où personne ne saurait le retrouver. »Dostoiëvski,L’Idiot,III, 2.
1 LA PIERRE Je suis né, il y a maintenant bien longtemps, dans un petit hameau, pauvre et retiré, caché dans la montagne où mon père était berger. Nous vivions dans une masure de pierre, près d’un relief de rochers gris ; les pâturages étaient en aval, jusqu’à la rivière. Ma mère mourut, j’avais six ans à peine. Mon père ne se remaria point et s’occupa de moi, comme on s’occupait alors des enfants, quand on était berger, veuf et montagnard. J’appris bientôt à garder les bêtes, avec mon père d’abord, tout seul ensuite, quand il me loua dans une proche ferme des environs, d’où, chaque samedi, je rapportais à la maison ma paie et ma fatigue de la semaine. Je traversais à pied des bois sombres qui me terrorisaient, l’hiver surtout, quand le vent hurlait dans les arbres, quand la forêt animait ses fantômes. Et longtemps, j’ai eu peur de mon ombre et du bruit de mes pas. Le dimanche, j’allais à la messe, au village, avec mon père. Puis, tandis qu’il allait boire au café de la place son verre de vin dominical, je gagnais le presbytère où, avant son repas, le prêtre m’accordait une petite heure pour m’apprendre, à lire et à écrire d’abord, puis devant mon goût pour l’étude, quelques rudiments de latin et de grec. Et je devins bientôt un petit berger presque savant. Le bon curé me prêtait quelques livres et, tout en gardant mes bêtes, je découvris des poètes et des écrivains, Mme de La Fayette, Racine, La Fontaine, Fénelon ; je lus même, en traduction, lesÉgloguesde Virgile, et quelques pages de laGuerre des Gaules. Le soir, je contemplais le ciel et ses merveilles ;
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j’apprenais aussi le nom des étoiles et des constellations ; je savais Bételgeuse, Véga, la Lyre, Cassiopée ! Je savourais un décor magique, j’inventais des mécanismes, j’imaginais des mondes. Et je regardais toutes ces pierres qui, dans le silence et le mystère des ténèbres, me
regardaient aussi… Mon savoir, néanmoins, était aussi rudimentaire que passionné. Je n’ai jamais bien su, en effet, les noms précis que les savants donnaient à chaque pierre ; il aurait fallu, pour que j’apprenne tous ces termes, que je sois l’élève de quelque géologue compétent ! Mais dans ma montagne solitaire, il n’y avait que des bergers. Peu à peu, je devinais avec émotion que les pierres jalonnaient la vie des hommes. De la pierre sur laquelle s’élevait la croix de nos chemins jusqu’à la pierre de nos tombes, la pierre accompagnait et résumait nos jours. Et je songeais déjà qu’elle disait notre misère, avec ces pierres sur quoi rien ne saurait pousser jusqu’à ces pierres que l’on disait précieuses et qui restaient pour nous, pauvres bergers, autant d’étoiles lointaines que nous n’atteindrions jamais. Et je songeais encore, en essayant de me le persuader, que chaque pierre devait avoir sa raison d’être, sa partition à jouer, son rôle à tenir. Et rêvant aux signes qui autour de moi expliqueraient le monde, je demeurais des heures entières à contempler silencieusement ce que chez nous on nommait desclapaset descante-merle. Aussi, lorsque mon père – je ne sais plus trop en quelle occasion – m’emmena au monastère de Peyrefort, je restai interdit devant les pierres de l’enclos, les pierres du cloître, les pierres de l’église, les dalles qui partout formaient le sol. Si je ne vis là alors que la marque évidente du savoir-faire des hommes, j’y vis plus tard le signe fort de leur permanence et de leur fragilité ; et aujourd’hui, j’en devine les symboles et j’en goûte les pouvoirs. Les pierres me disent chaque jour, sans haine et sans prétention, qu’elles me survivront et qu’elles assureront tout naturellement la pérennité d’un monde que bientôt je devrai sans doute quitter. Elles m’apprivoisent ma pierre dernière… C’est cet amour des pierres qui m’a conduit sans doute où je suis maintenant, entre ces murs où je file lentement les dernières mailles d’un ouvrage commencé depuis tant de longues années. Sans que je sache définir avec précision la valeur réelle de mon travail, qui est
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