Le professeur Bidia M Bidia   ROMAN
172 pages
Français

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Le professeur Bidia M'Bidia ROMAN , livre ebook

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172 pages
Français

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Description

De retour dans son pays après de longues années d'études en France, le professeur Bidia M'Bidia est frappé par la misère de la population qui croupit silencieusement sous une dictature impitoyable. Retenu enseignant à l'université de Kinshasa, il tente d'ouvrir les yeux de ses jeunes étudiants. Le régime tente en vain de l'intimider. Il accepte finalement un poste ministériel dans l'espoir de changer les choses de l'intérieur. Combien de temps tiendra-t-il au coeur même de l'intrigue, de la corruption, de l'achat des consciences et du drame familial ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juillet 2011
Nombre de lectures 58
EAN13 9782296467446
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le Professeur
Bidia M’Bidia



Lewis KALOMBO


Le Professeur

Bidia M’Bidia


Roman





L’H ARMATTAN- RDC
© L’H ARMATTAN, 2011
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-56051-2
EAN : 9782296560512

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
CHAPITRE I
M AMAN B ILONDA se passa une nième fois du rouge sur les lèvres. Une fois de plus elle essuya en se frottant vigoureusement avec le pouce, toujours indécise.
Elle semblait étonnée, voir effarouchée, devant l’image que lui renvoyait le tesson de miroir qu’elle tenait dans une main.
Depuis le lever du jour elle était comme le jouet d’un cyclone étourdissant où ses belles sœurs tournoyaient sans arrêt, la rabotant, la moulant, tout en la tarabustant….Pour quelqu’un dont la toilette depuis belle lurette déjà était rarement allée au-delà d’une douche rapide suivie d’une friction vite fait avec une lotion bon marché avant d’enfiler une camisole, c’était plutôt époustouflant. Mais ses belles sœurs ne voulaient pas lâcher prise. Pour une fois elles avaient oublié la hache de guerre. Elles semblaient déterminées à faire surgir de cette vieille jeune mère, une vraie diva.
Il faut dire que le jeu en valait la chandelle pour ce matin : Après quatre années d’absence son mari était enfin dans l’avion qui le ramenait à la maison ! Elle avait du mal à le croire ! Que de larmes elle avait versées! Que des prières et des jeûnes pendant ces longues années passées seule avec ses trois enfants, pour ainsi dire séquestrée dans une belle famille avec des belles sœurs toujours promptes aux quolibets et à la querelle.
Je vais enfin le revoir ! Je vais enfin vivre !
Elle avait tant et tant rêvé à l’avènement de ce jour dans sa solitude stoïque avec fois en la justice Divine. Et à présent elle remerciait le Ciel.
Cependant elle était la proie des sentiments mitigés. Un mélange de bonheur et d’anxiété : Quel homme allait-elle découvrir après tant d’années de séparation ? Ne dit-on pas que l’Occident métamorphose tout ce qui entre en contact avec lui ? Déjà au fil du temps elle avait sentit le changement dans le ton de ses lettres. Le moelleux du début s’était enraidit progressivement. Vers la fin il était presque autoritariste. C’était des ordres, des directives d’un chef d’entreprise conscient que sans lui, sans son insistance rien n’était à mesure de marcher.
Si vous continuez à traîner le pas comme cela nous finirons par être en retard ! retentit une voix masculine au dehors.
Quelques minutes plus tard, une vieille Fourgonnette de location embarquait la quasi-totalité de la famille.
Madame, l’avion était à l’heure. La famille était montée au balcon du restaurant de l’aéroport pour profiter du spectacle des avions qui décollaient et atterrissaient dans un rugissement assourdissant. Pour nombreux d’entre eux c’était la toute première fois qu’ils voyaient ces appareils d’aussi prêt.
Dès que l’homme apparut en haut de la passerelle tout le petit monde se mit à hurler de joie en faisant de grands gestes des mains. Il ne s’en aperçut pas. Il traversa allégrement le tarmac, le nez au vent, visiblement heureux de retrouver la chaleur de son sol natal.
La file des voyageurs disparut sous le bâtiment de l’aérogare. Un temps fou passa avant de le revoir réapparaître de l’autre côté.
Enfin il surgit dans le hall, en sueur, la cravate de travers, fulminant contre les traditionnelles tracassantes formalités. Il bouscula violemment un petit agent qui essayait encore de s’agripper à sa valise et se retrouva enfin dehors.
Tous se jetèrent sur lui au même moment, l’étouffant presque.
Dites donc ! s’écria sa mère ; vous voulez me l’achever ou quoi ? Laissez le respirer au moins !
L’étreinte se desserra un peu.
Grand frère ! Grand frère ! ne cessaient de répéter ses sœurs et frères en le contemplant ; Comme vous avez pris du poids ! Et quel teint ! Ca c’est vraiment l’Europe.
Son épouse se tenait timidement à ses côtés. Il se tourna vers ses enfants restés à l’écart
Dans les bras de Papa, mes chéris !
La cadette poussa un cri et s’en fut se cacher dans les pagnes de sa grand-mère
En voilà une façon d’accueillir Papa, fit cette dernière en secouant la petite ; on ne peut pas lui donner tord de toute façon ; c’est la première fois qu’elle te voit.
Il y eut un éclat de rire général.
Vous pensez ! Renchérit Mr Bidia M’Bidia ; moi-même j’ai difficile à le croire : Regardez Jerry ! Il est devenu un grand garçon ! Et sa petite sœur Laetitia ! Tu n’avais pas deux ans quand je t’ai laissée ! Je suis vraiment heureux de vous revoir tous.
Bidia M’Bidia prit pace à l’avant de la ‘’combi {1} ’’, à côté de sa femme et du chauffeur. Tous les autres s’entassèrent tant bien que mal à l’arrière, sur les étroite banquettes de bois. Comme attirés par un aimant leurs regards revenaient et revenaient encore vers les grosses malles superposées dans le fond du taxi bus. Elles faisaient rêver, ces malles arrivées tout droit de « Mikili {2} ». C’était à qui se voyait déjà habillé ‘’Armani’’, ‘’Ungaro’’ ou ‘’Versace {3} ’’. Mais les plus septiques chuchotaient, un sourire narquois aux lèvres :
« Qu’est se que vous croyez que puisse amener un intello comme lui ? Rien que des bouquins, mes chers frères, je vous parie que toutes ces malles ne contiennent que des livres.
Bidia M’Bidia, qui ignorait tout de ces paris qui se faisaient dans son dos, était absorbé en de sombres pensées.
Il y avait du monde, trop de monde le long du boulevard de Kingasani. Décidément c’est à juste titre que ce faubourg était appelé « Chine populaire ».
Comment vivent ils dans ce fatras? Se demandait-il, le cœur contrit.
Cela faisait bien longtemps qu’il avait perdu contact avec ce micmac faisandé des badauds en haillons flânant nonchalamment ou dansant, l’air débonnaire, devant des buvettes bruyantes, des vendeuses vociférant derrière leurs étalages dérisoires, des petites boutiques aux enseignes mirifiques, des maisons délabrées, des immeubles inachevés….Son Pays était comme une caricature du monde qu’il venait de quitter
Cependant le vieux taxi bus se frayait le chemin en pétaradant, au sein d’une jungle de ferrailles roulants qui semblaient jouer au saute-mouton, les uns doublant les autres, s’arrêtant brusquement sans signaler, au gré de receveurs exaltés, perchés, un pied dedans un pied dehors, à la portière entrouverte, à l’affût des clients. Ni les coups de klaxon ni les vociférations des autres automobilistes n’émoussaient leur ardeur. « Ils criaient à tue tête : Zando ! Zando ! Gambela ! Gambela ! Ou encore Rond Point Ngaba ! Rond Point Ngaba {4} ! » Aux clients empressés. Tous signalaient les arrêts et les départs en martelant du poing la carrosserie rouillée et bosselée de leurs taxi bus..
Le Professeur Bidia M’Bidia ne pouvait s’empêcher de faire le parallélisme avec l’Europe qu’il venait de quitter ; un monde pensé, mesuré, réglé dans les moindres détails ; un monde ou tout était taillé, sculpté, créé jusqu’à la sublimation.
Oh ! Non ! Fulminait-il ; ce n’est pas de la fatalité ! Mais comment s’y prendre pour changer ce pays ? par où commencer ?
Et en se posant ces questions il avait un sentiment d’impuissance. De cette impression montait une ferme résolution de se battre de toutes ses forces pour que son beau Pays accède un jour à un peu plus de dignité.
La fourgonnette avait traversé le pont de la Njili. La circulation devenait plus fluide, plus régulière. Le chauffeur donna un coup d’accélérateur qui fit vibrer dangereusement la vieille carcasse. Puis le moteur fit un raté et s’arrêta net à quelques pâtées de la tour inachevée de l’échangeur.
Vite ! le ‘’ mitiger {5} ’’ , vite ! fit le chauffeur, impassible, à son receveur.

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