1 PRINCESSE Cesse Princesse De geindre de pleurer de te plaindre que L'on te laisse Princesse Derrière des grilles des barreaux de fer Qui te blessent Princesse Ta prison tu l'as bâtie dans tes moments D'ivresse Les hommes que tu as jetés sans Délicatesse Princesse Sont tombés du haut des remparts de Ta forteresse Est-ce de te savoir vieillissante Qui t'oppresse ?
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Princesse N'est-ce Pas le début de la fin de ta Jeunesse ? Tu restes jour et nuit à quêter De la tendresse Princesse Personne ne semble croire vraiment à Ta détresse Hormis le soleil moins rancunier dont Les caresses Princesse Te rappellent insolemment quand tu n'avais De cesse Princesse De brûler sous celles de tes amants
2 SOLITAIRE Solitaire Sur la terre Car il n'a Plus personne Sa déesse Sa princesse Son ange Sa Madone Est morte n e Emportant Leur amour Immortel Et ruisselle Eau de pluie Qui pourrit Les dentelles
Mille cierges À la Vierge Ont brûlé Tout l'automne C'est odieux Quand le Dieu Qu'on prie nous Abandonne Quel mépris Pour la vie Quelle erreur Quelle offense Assassi-Ner ainsi Une fée Sans défense
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Plâtre bleu Dédaigneux Moisis dans Ta chapelle Tes habits Décrépits Poussiéreux Se craquèlent Figurine Anodine Qui part à La poubelle Et ruisselle Eau de plui e Qui pourrit Les dentelles
3 TAXI Taxi Je sors d'une longue nuit Fais-moi quitter la ville La ville Taxi j'ai touché le bout de ma vie Tout froissé, tout démoli Tout cassé dans mon sprit e Du sang et du whisky Bouillonnant dans ma tête Taxi C'est la mort qui me poursuit C'est la mort ordinaire Ordinaire Taxi un souffle froid sur mes habits Maintenant tu me conduis Au diable ou au paradis Mais loin de tous ces cris Résonnant dans ma tête
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Taxi J'ai mis mon corps au défi Il a peine à me suivre Me suivre Taxi il me fait payer le prix Il se venge Par une brûlure étrange Des braises d'incendie Crépitant dans ma tête Taxi L'alcool était un ami Au début si fidèle Fidèle Taxi des étincelles des courts-circuits Je le quitte Je dois partir au plus vite Mon meilleu nnemi r e Me griffe dans la t t ê e
4 LA DEMOISELLE On pourrait croire que je mens Ou que j'invente des histoires Mais je sens depuis quelques temps Quelqu'un rôder dans ma mémoire Non non non non Ce n'est pas elle La demoiselle Est partie depuis Trop longtemps Les matins sont si différents Comme un vide qui m'embarrasse Car pendant mon sommeil je sens Quelqu'un vient rêver à ma place Non non non non Ça n'est pas elle La demoiselle Oubliée depuis Trop longtemps
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Dans les miroirs qui me reflètent Mon image souvent s'efface Laissant place à la silhouette De quelqu'un d'autre dans la glace Non non non non Ça n'est pas elle La demoiselle Disparue depuis Trop longtemps Et quand mon dernier jour viendra Est-ce un fantôme compassé Qui près de moi s'allongera ? Une ombre surgie du passé ? Non non non non Ça n'est pas elle La demoiselle Est morte depuis Trop longtemps
5 DEUX MOINS TOI Deux moins toi Égale moi Qui rampe partout par terre Deux moins moi Égale toi Qui as joué la sorcière Deux c'est peu Mais c'est mieux Que de rester solitaire Deux plus moi Égale trois Ça s'appelle l'adultère Trois moins moi
C'est comme ça Il faut savoir se soustraire Un c'est rien Mais c'est bien Mieux qu'une vie mensongère Trois moins moi Régale-toi Cette addition est sévère Toi plus moi N'étaient pas Pour toi les bons chiffres pairs Et toi deux N'est qu'un jeu
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Pour changer de partenaires Resteras-Tu ou pas La première et la dernière Qui m'auras Fait cela Me recouvrir de poussière ? En calcul Je suis nul Un plus un c'est ridicule Hasardeux Mystérieux Mais au total ça fait deux
6 BALLADE DU BARMAN Tant de temps derrière un comptoir Il faut savoir Parti au-delà du miroir r Au fond du bar Les clients qu'on n'écoute que d'un regard Des mots morts des résidus dérisoires Des pensées bafouillées du vent du brouillard Des cendres à balayer chaque soir Tant de temps derrière un comptoir Il faut savoir Un bistrot c'est le purgatoire Des idées noires Des salauds des fachos des barjots notoires Y racontent des vies de cauchemars Restant des heures à réviser leur mémoire À ressasser du passé illusoir e
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Tant de temps derrière un comptoi r Il faut savoir Un troquet c'est un monde à part Un exutoire Des hommes sans âge aux souvenirs épars Tournent les pages de leur désespoi r La vie l'amour l'argent et toujours la gloire Rien que des fumisteries des bobards Tant de temps derrière un comptoir Il faut savoir On entre au zinc comme au parloir Pour des taulards Tous agrippés à l'amitié provisoire Aux fantômes d l'amour quelque part e Rêves roulés en vrac au fond d'un tiroir Les désirs sont bouclés dans des placards
7 UNE FILLE Une fille habite chez moi Ne me demandez pas comment Elle y est entrée ni pourquoi Je voudrais qu'elle reste longtemps Jamais je n'aurais pensé ça Non je n'y croyais plus Tout juste un petit bout d'histoi re Mais rien que le commencement D'une rencontre où le hasard Avait pris les traits d'une enfant Jamais je n'aurais pensé ça Non je n'y croyais plus Dans le parc avec ma guitare J'étais assis tranquillement Une silhouett dans le soir e Me regardait en souriant Jamais je n'aurais pensé ça Non je n'y croyais plus
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Je connais vos chansons par cœur M'a-t-elle dit en se rapprochant Près de vous j'ai passé des heures A vous écouter sur un banc Jamais je n'aurais pensé ça Non je n'y croyais plus Chaque jour à votre départ Mon cœur bat plus rapidement Mais vous passez sans un regard Alors que c'est vous que j'attends Jamais je n'aurais pensé ça Non je n'y croyais plus Quand elle eut posé ses bagages Et fait le tour de ma maison Plus un seul barreau dans ma cage Elle avait cassé ma prison Jamais je n'aurais pensé ça Non je n'y croyais plus
8 ROIS DU MONDE Rois du monde Vous ne pouvez croire une seconde Que nous garderons vos statues Jetées dans des fosses profondes Nous irons leur danser dessus Rois des villes Au fin fond dans les mines d'argile Nous aurons vite enseveli Vos reliques et vos fossiles Tout ça pourrira dans l'oubli Rois des hommes Quand vous tomberez des décorums Sur lesquels vous étiez assis Vos crânes dans des aquariums Flotteront comme des débris
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Rois de rien Nous deviendrons chacun musicien Pour composer un chant funèbre Une chanson qui dise bien Soyez maudits dans vos ténèbres Rois du monde Rois des villes Rois des hommes Rois de rien
9 TOUJOURS UN AUTRE JOUR Toujours un autre jour Tout remettre à demain La vie nous joue des tours On n'est que des pantins On doit trouver l'amour Sans l chercher trop loin e Découvrir alentours Des restes de jardin Des baisers sur nos lèvres Nos lèvres qui s'effleurent On se frôle on s'observe Entre rire et douleur
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On se trouve on se quitte On s'aimait pourtant bien Tout nous lasse trop vite À la fin on a rien Tous un genou à terre Tous à baisser les yeux Que le droit de se taire Pleurer silencieux On joue dans les décombres Oubliant trop souvent La mort tapie dans l'ombre Qui attend qui attend
10 GARE DU NORD Si peu de regards pour celui qui dort Dans les escaliers de la gare du nord Naufrag dans notre monde indécent é Honte à ceux qui passent indifférents Qui S'arrêtera ? Elle et moi Tant de gens qui se frôlent qui se pressent La foule n'a pas de délicatesse Cheveux collés sur les marches de pierre Un gisant vivant s'est mis en travers Qui Le lèvera ? Elle et moi
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Celui qui gêne celui qui dérange À tête de fou est-il un archange ? Curieux messager dans notre destin Il reste au milieu de notre chemin Qui L'écoutera ? Elle et moi
11 LES BALADES JUSQU'A LA RIVIÈRE Les balades jusqu'à la rivière Où l'on se baignait sur les graviers Nos serviettes posées sur les pierres Blanches sous le soleil de juillet Pendant nos vacances buissonnières Elle et moi On se taisait On avait douze ans et des poussières De paille jaune dans les cheveux La luzerne et sa verte lumière Les mûres rendaient nos langues bleues Revenant à l'ombre du village De la plage On se parlait peu On n'avait pas les mots qu'il faut En ce temps-là Les mots des grands qui sonnent faux parfois C'était comme ça c'était elle et moi Ensemble sans savoir pourquoi
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Combien d'heures passées côte à côte Tous les deux sans jamais effleurer Un petit bout de la peau de l'autre De peur de voir l'autre se sauver De voir l'autre se mettre à trembler En proie à un Curieux émoi Un jour elle avait vieilli plus vite Que moi resté dans mon corps d'enfant Elle était devenue érotique Tout en elle était si différent Ainsi finit le monde magique Par un salut Indifférent Tiges coupées au ras des orges Blessent les pieds Collier de ronces autour du cou Toujours serré Odeur de plui des orties mouillées e Chanson trouvée dans un grenier