Le Noyer-Seul
102 pages
Français

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Le Noyer-Seul , livre ebook

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Description

La tempête de décembre arracha le noyer solaire à sa terre féconde. Un peu en amont, de l'autre côté du chemin, demeurait son semblable, son frère. Il échappa à la fureur du ciel, au noir fracas de ce déluge mortel. Il devint le noyer-seul, fidèle vigie de la mémoire, contemplant, hagard, l'espace vide du noyer perdu. Les calles de son écorce assombrie recueillirent les éclats de lumière épars du noyer abattu. Un jour, peut-être, le noyer-seul recouvrirait les fruits de sa jeunesse.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 septembre 2009
Nombre de lectures 132
EAN13 9782296679801
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LE NOYER-SEUL
François Augé


LE NOYER-SEUL
© L’Harmattan, 2009
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-09304-1
EAN : 9782296093041

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
L’arbre abrite la chambre noire
de nos illusions perdues.
L’arbre, donné à voir

L’arbre nous est donné à voir. Mais nous le regardons rarement. Nous sommes des passants ordinaires, passifs, de peu de passion. L’absence de l’arbre nous ferait réagir. Tardive conscience de la beauté offerte. L’œil apprend le paysage lorsqu’il en ressent la nécessité. Cette nécessaire curiosité peut naître si nous nous sommes préparés dans l’intime cabinet de nos réflexions…

… Se préparer à voir…

Implantés dans les racines de nos regards, les arbres sont des passeurs d’éternité. Liants entre l’invisible et le visible. Conjonctions fluides entre le fait et le non-fait. Ce que nous voyons d’eux, leur surface verticale, tronc, branches et feuilles, reste toujours une vraie merveille. Cette vie ondulante, qui frémit, se laisse contempler interminablement, sans perception de lassitude. Il y a dans cette verticale boisée, une force authentique nourrie des éléments du cosmos.

Racines en terre et racines en l’air comme autant de branches irriguées de sève. Quand explosent les feuilles et les fruits, l’air alentour se change en printemps et se charge de senteurs sauvages.

L’arbre inspire, l’arbre expire : nous vivons.
Lucrèce
Vois donc dans ce grand être une sorte de fleuve.

Tityre
Un fleuve ?

Lucrèce
Un fleuve tout vivant de qui les sources plongent dans la masse obscure de la terre les chemins de leur soif mystérieuse. C’est une hydre, ô Tityre, aux prises avec la roche, et qui croît et se divise pour l’étreindre ; qui de plus en plus fine, mue par l’humide, s’échevèle pour boire la moindre présence de l’eau imprégnant la nuit massive où se dissolvent toutes choses qui vécurent. Il n’est bête hideuse de la mer plus avide et plus multiple que cette touffe de racines, aveuglément certaines de progrès vers la profondeur et les humeurs de la terre. Mais cet avantage procède, irrésistible, avec une lenteur qui le fait implacable comme le temps. Dans l’empire des morts, des taupes et des vers, l’œuvre de l’arbre insère les puissances d’une étrange volonté souterraine.

Paul Valéry , Dialogue de l’arbre
A Christian, mon frère.
Le Noyer
Vertèbres
Je suis penché
je suis tordu
je suis abîmé
je suis éclaté
je suis esseulé.
Je cherche les étoiles
au fond de la terre
au bout de mes racines
en étirant mes branches
en tendant mes feuilles et mes fruits
dans l’air
en perpétuel mouvement.
Je cherche
à être qui je suis
la terre et l’air
l’eau et le feu.
Les vertèbres de mon fût
s’inclinent insensiblement
ni chute, ni affaissement
mes branches
ailes larges et belles
accomplissent leur voyage
immobile.
Ecorces vives
Les peaux du noyer
cinglées de vent et de pluie
sèchent sous la paume allumée
du soleil.

Paysages ravagés par le temps.

Paradoxale beauté
venue de souffrances
de sacrifices.

Sous les maux
la mer calme des nervures
reste bien au sec.
Souffles
Le bois
la terre
le ciel et l’eau
les nuages et le soleil
les branches et les feuilles
la coque et le fruit
l’ombre et la lumière
l’herbe et les fleurs
le regard et l’émotion
le silence
l’arbre.
Nux
Les fruits de tes cheveux
épars
attendent
la lumière bleue
du ciel
pour sortir de leur nuit
fleurie
bourgeon, fleur
coque caparaçonnée
casques jumeaux
protégeant ton secret
en amande.
Noyer sous la pluie
Ruissellement de l’eau
filets soyeux
dans les stries de ta peau
humidité et souplesse
retrouvées.
L’écorce et les feuilles lavées
renvoient la lumière
de chaque grain de matière.

L’arbre éponge
la bassine du ciel.
Michelangelo
Le vent d’ouest
dessine la chevelure ébouriffée
de l’arbre aux noix.
Le souffle échauffé du printemps
ranime le tapis d’herbes souples.
Terreau exacerbé.
Un rayon de soleil étend son doigt
créatif
sur cette vie nouvelle.
Plan large
Largesse du feuillage
l’arbre s’étale et grandit
sur les champs.

La lande
tachetée de dômes
d’herbes rougies
s’éclaire du jaune des genêts.

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