Islam, médias et opinions publiques
117 pages
Français

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Islam, médias et opinions publiques , livre ebook

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Description

Depuis le 11 septembre 2001, un fossé s'est creusé entre les opinions européennes et l'islam. L'objectif de cet ouvrage est de faciliter un dialogue multiforme entre musulmans et non-musulmans, entre Orient et Occident. En étudiant l'état de l'opinion publique dans différents pays européens, en s'interrogeant sur la perception de l'islam et des musulmans, les contributeurs de cet ouvrage tentent de mesurer les principaux points d'incompréhension et de peur et ce qui a changé au cours des dernières décennies.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2006
Nombre de lectures 234
EAN13 9782336282800
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Islam, médias et opinions publiques
Déconstruire le "choc des civilisations"

Didier Billion
© L’HARMATTAN, 2006
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
L’HARMATTAN, ITALIA s.r.l. Via Degli Artisti 15 ; 10124 Torino L’HARMATTAN HONGRlE Könyvesbolt ; Kossuth L. u. 14-16 ; 1053 Budapest L’HARMATTAN BURKINA FASO 1200 logements villa 96 ; 12B2260 ; Ouagadougou 12 ESPACE L’HARMATTAN KINSHASA Faculté des Sciences Sociales, Politiques et Administratives BP243, KIN XI; Université de Kinshasa – RDC
http://www.librairieharmattan.com harmattan1@wanadoo.fr
9782296002937
EAN : 9782296002937
Sommaire
Page de titre Page de Copyright PRÉFACE XVe ET XVIIIe SIÈCLES : L’ENNEMI TURC POURQUOI LA TURQUIE FAIT PEUR À L’EUROPE L’IMAGE DES MUSULMANS, MIROIR NATIONAL FRANÇAIS LE CHOC DES CIVILISATIONS VU PAR TF1 ET FRANCE 2 FRANCE, ESPAGNE, GRANDE-BRETAGNE : VISIONS SÉCURITAIRES APRÈS LE 11-SEPTEMBRE PAYS-BAS : DE L’EXEMPLE AU REJET ETATS-UNIS : LA NOUVELLE GUERRE FROIDE ENTRE « ISLAM » ET « OCCIDENT » SAMUEL HUNTINGTON CONTRE LES HISPANIQUES BIBLIOGRAPHIE
PRÉFACE
Depuis le 11 septembre 2001, un fossé s’est creusé entre les opinions européennes, américaine et l’islam. Une peur diffuse s’est emparée des esprits. On s’interroge gravement sur la compatibilité entre l’islam et les principes de liberté, de démocratie, de pluralisme, sur la possibilité d’intégrer les musulmans aux sociétés occidentales. Certains n’hésitent pas à parler de « guerre de civilisations ».
C’est contre cette vision que s’inscrit ce livre. Il rappelle d’abord, à travers l’exemple de l’empire ottoman, comment s’est construite, de manière parfois contradictoire, une vision de la Sublime Porte (Géraud Poumarède), vision reprise et transformée à travers le débat sur l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne (Didier Billion).
Stéphane Rozès explique, pour sa part, l’attitude contradictoire de l’opinion française à l’égard de la religion et des musulmans, tandis que Thomas Deltombe s’appuyant sur une étude approfondie des deux principales chaînes de télévision, met en lumière leur contribution à la création d’une certaine image de l’islam. Si les médias portent une responsabilité dans ces déformations, on ne peut négliger l’image façonnée, notamment depuis le 11-Septembre, par les services de renseignement, que ce soit en France, en Grande-Bretagne ou en Espagne (Laurent Bonelli). Ce changement de climat a accéléré l’étonnante évolution de l’opinion aux Pays-Bas, jusque-là connue pour sa tolérance et qui se rallie désormais largement aux thèses les plus contestables (Marie-Claire Cécilia). Aux Etats-Unis, on assiste à la fabrication d’une nouvelle guerre froide par la construction de deux pôles rivaux, « l’Islam » et « l’Occident » (Emran Qureishi).
Enfin, le texte de Marie-Agnès Combesque permet de mesurer que ce refus de l’Autre ne vise pas seulement les musulmans, même s’ils sont la cible prioritaire. Samuel Huntington, qui a popularisé l’idée du « choc des civilisations », l’étend pour les Etats-Unis aux hispaniques, notamment d’origine mexicaine, installés aux Etats-Unis et accusés de mettre en danger le credo des pèlerins fondateurs de la nation américaine.
La Commission
XV e ET XVIII e SIÈCLES : L’ENNEMI TURC
Géraud Poumarède
Les relations entre l’Europe et l’Empire ottoman revêtent durant la période moderne l’allure d’un paradoxe. Alors que le péril turc alimente la peur en Occident et suscite la formation d’une véritable culture de l’antagonisme à l’égard du monde ottoman, des souverains toujours plus nombreux s’efforcent d’établir des relations stables et durables avec les sultans de Constantinople. Ainsi, l’adversaire se transformerait progressivement en partenaire, à mesure que les Turcs feraient leur entrée dans le concert des nations. Une telle évolution est cependant plus complexe et chaotique qu’il n’y paraît. Le temps des rapprochements et des alliances avec les Turcs coïncide avec celui de la confrontation et des affrontements, au point que ces phénomènes, bien loin de se succéder, paraissent au contraire constituer deux facettes contradictoires des liens tissés avec la Porte. Dans le même temps, si l’intensité de ces relations paraît finalement plaider pour une intégration européenne de l’Empire ottoman, celle-ci reste limitée et inachevée à la fin du XVIII e siècle 1 .

La crainte de l’expansion ottomane
Avec la prise de Constantinople par Mehmed II en 1453, s’ouvre une période marquée par une confrontation directe entre la Chrétienté occidentale et l’Empire ottoman. Une décennie est encore nécessaire pour que les derniers vestiges des souverainetés grecques d’Orient disparaissent totalement : les despotats de Morée sont définitivement conquis en 1460 et l’empire de Trébizonde, sur les bords de la mer Noire, sombre l’année suivante. La Méditerranée et l’Europe centrale et balkanique se comptent désormais parmi les directions privilégiées de l’expansion turque. Mehmed II commence à laminer la présence latine en mer Égée, s’attaquant aux seigneurs génois, détruisant ce qui restait du duché florentin d’Athènes, prenant Nègrepont aux Vénitiens en 1470. En 1480, ses navires tentent sans succès un débarquement dans l’île de Rhodes, détenue par les chevaliers de l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Ils sèment aussi la terreur en Italie en s’emparant de la ville d’Otrante, qui est mise à sac. Sur terre, la progression se fait au détriment des royaumes de Serbie et de Bosnie qui sont soumis peu à peu, tandis que l’Albanie est pacifiée après plusieurs décennies de révolte et que la Valachie entre dans l’orbite ottomane.
Les successeurs de Mehmed II poursuivent dans cette voie. Bâyezîd II étend sa domination sur la Moldavie et conquiert la plupart des points d’appuis vénitiens dans le Péloponnèse, au terme d’une guerre engagée contre la Sérénissime de 1499 à 1503. Les premières décennies du XVI e siècle apportent encore leur lot de succès : Belgrade tombe en 1521, Bude est prise en 1526 et trois ans plus tard, Süleymân met le siège devant Vienne. La plus grande partie de la Hongrie royale est désormais sous contrôle et le même sort attend la Transylvanie.
A l’Est, les possessions des Habsbourg, et plus au Nord, la Pologne servent dorénavant de frontières à la Chrétienté latine. Sur mer, Rhodes tombe en 1522, l’île de Chio, dernier vestige de la présence génoise, est investie en 1566, et les Vénitiens perdent entre 1537 et 1540 les deux dernières places qu’ils contrôlaient en Morée et la plupart des îles de la mer Égée qui demeuraient encore sous leur autorité.
Trente ans plus tard, en 1570-1571, Chypre leur est ôtée par les troupes de Selîm II. Les côtes de l’Italie, l’île de Malte, où se sont repliés les chevaliers de Saint-Jean, la Sicile, la Sardaigne et la Corse, ainsi que les littoraux espagnols sont les nouvelles frontières maritimes de l’Occident. Ces rivages sont d’autant plus exposés que les Ottomans eux-mêmes ont étendu leur influence le long de la Méditerranée, anéantissant les Mamelouks de Syrie et d’Égypte en 1516-1517, et se dotant ensuite de points d’ancrage en Afrique du Nord. Seule Tunis, prise par Barberousse en 1534, et reprise par Charles Quint en 1535, résiste encore. Elle n’est perdue qu’en 1574. Cette expansion formidable se réalise au détriment de souverains chrétiens comme d’Etats musulmans. Elle conduit à une très grande simplification de la configuration géopolitique de l’Europe et de la Méditerranée orientales, laissant la Chrétienté occidentale face à un monde ottoman aux frontières dilatées.
Un tel processus de conquête favorise en Occident une prise de conscience du péril turc qui se cristallise autour de la crainte d’une subversion totale et inexorable. Comme autant de jalons de l’expansion des Ottomans, des appels au secours et des avertissements s’élèvent des pays progressivement conquis. Alors qu’il s’était rendu à Constantinople pour y recueillir la proclamation de la réunion de l’Église grecque à celle de Rome, le cardinal Isidore de Kiev assiste à la prise de la ville par les soldats de Mehmed II. Dans une série de lettres qu’il écrit par la suite, il attire l’attention des souverains européens sur le drame qui vient de se dérouler sur les rives du Bosphore.
« Toutes les rues, les avenues et les ruelles, confie-t-il ainsi au cardinal Bessarion, étaient pleines de cadavres éventrés et massacrés » 2 . Et d’exhorter Chacun à s’armer sans tarder, car désormais « le précurseur de l’Antéchrist, le prince et seigneur des Turcs est tout proche » 3 .

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