Essai sur la laïcité postchrétienne
226 pages
Français

Essai sur la laïcité postchrétienne , livre ebook

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226 pages
Français

Description

En un temps où la formation des maîtres se trouve privée d'espace de formation, ce livre indique des parcours et des lieux d'analyse susceptibles de conforter, aussi bien les pédagogues et les éducateurs que le citoyen, dans l'idée que certains détours de lecture et de pensée donnent de l'air, de l'espace, des appuis pour préserver et repenser, en retour, les tensions constitutives de l'exigence laïque.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 juillet 2012
Nombre de lectures 6
EAN13 9782296500099
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

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Extrait

Essai sur la laïcité postchrétienne
Mouvement des savoirs Collection dirigée par Bernard Andrieu  L’enjeu de la collection est de décrire la mobilité des Savoirs entre des sciences exactes et des sciences humaines. Cette sorte de mobilogie épistémologique privilégie plus particulièrement les déplacements de disciplines originelles vers de nouvelles disciplines. L’effet de ce déplacement produit de nouvelles synthèses. Au déplacement des savoirs correspond une nouvelle description. Mais le thème de cette révolution épistémologique présente aussi l’avantage de décrire à la fois la continuité et la discontinuité des savoirs : un modèle scientifique n’est ni fixé à l’intérieur de la science qui l’a constitué, ni définitivement fixé dans l’histoire des modèles, ni sans modifications par rapport aux effets des modèles par rapport aux autres disciplines (comme la réception critique, ou encore la concurrence des modèles). La révolution épistémologique a instauré une dynamique des savoirs. La collection accueille des travaux d’histoire des idées et des sciences présentant les modes de communication et de constitution des savoirs innovants. Déjà parus Benoit GRISON,Bien-être / Être bien ?, 2012. Matthieu QUIDU (dir.),Les Sciences du sport en mouvement, Innovations et traditions théoriques en STAPS, 2012. Isabelle JOLY,Le corps sans représentation. De Jean-Paul Sartre à Shaun Gallagher, 2011. Yannick VANPOULLE, Epistémologie du corps en STAPS, 2011. M. G. IGUALADA,Anarchisme, traduit et préfacé par Guillaume DEMANGE, 2010, Denis LELARGE,L’Encyclopédie sociale d’Otto Neurath, 2009. Henri VIEILLE-GROSJEAN,De la transmission à l’apprentis-sage : contribution à une modélisation de la relation pédagogique, 2009. Gérard FATH,Laïcité et pédagogie, 2009. Antoine ZAPATA,Pratiques enseignantes : Agir au service de valeurs, 2009. Monique MANOHA et Alexandre KLEIN (dir.),Objet, bijou et corps. In-corporer, 2008.
Gérard FATH Essai sur la laïcité postchrétienne Préface de Pierre-André Dupuis L’Harmattan
à C., toujours, à Grégoire, à Pierre-André, amis précieux, à l’équipe d’un certain lieu de formation, aux étudiants, à tous ceux pour qui l’exigence laïque est vitale. © L’HARMATTAN, 2012 5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-296-99454-6 EAN : 9782296994546
Préface de Pierre-André Dupuis C’est évidemment un honneur pour moi de préfacer ce livre, à la fois beau et important. Ces quelques lignes voudraient seulement témoigner de l’ancienneté et de la profondeur de son ancrage dans une expérience de la formation exceptionnellement vivante et exigeante. Avant d’être son collègue en Sciences de l’Education à l’Université Nancy2, j’ai travaillé pendant plus de dix ans avec Gérard Fath au Centre Régional de Formation des Maîtres pour l’Adaptation et l’Intégration Scolaires (CRF-MAIS) de Lorraine, dont il était le jeune Directeur d’Etudes. A cette époque (début des années 1970) où il fallait tout inventer, il a été, dès le début, guidé par des intuitions qui se sont étayées et diversifiées ensuite en se mettant à l’épreuve des exigences du terrain. Pour faire face aux problèmes complexes de l’« enfance inadaptée », Gérard Fath, par différence avec le « soutien » (rattrapage, tel qu’on le comprenait alors), a ouvert les voies d’une pédagogie dudétour, ou de l’écart, rendant possibles d’autres accès aux apprentissages, et surtout un déblocage et une confortation du désir d’apprendre lui-même. Cette pédagogie a pour caractéristique de reposer sur des agencements, de formats variables, inspirés surtout de la pédagogie Freinet ou de la Pédagogie Institutionnelle, et elle demande des maîtres ou des rééducateurs une formation très solide, attentive à l’expressivité sensible selon plusieurs registres (corporels, langagiers, techniques, artistiques). La première thèse de Gérard Fath a établi alors dans le détail les caractéristiques d’une « pédagogie de l’imaginaire » déjà au moins partiellement mise en œuvre sur le terrain, réfléchie, et référée de façon entrecroisée à Gaston Bachelard, Gilbert Durand et Ludwig Binswanger. L’imaginaire, dans le déploiement d’un spectre qui met en résonance la sensorialité et la parole, y acquiert un statut de composante anthropologique fondamentale. Ce travail trouve toute sa mesure dans l’élaboration ultérieure du concept d’«espace axiologique» (sa thèse d’Etat) où se conjuguent les quatre dimensions (cognitive, expressive, axiologique, éthique) à partir 5
desquelles la classe ou l’espace de la rééducation peuvent être vécus et compris comme desséjours, des lieux d’hospitalité, de travail et de vie, favorables aux élaborations cognitives et symboliques sans lesquelles il ne peut y avoir de relation durable, non pas aux « savoirs » seulement, mais aussi aux « connaissances » que l’on s’est appropriées. Rarement s’est à ce point vérifié ce que suggère la parenté étymologique de la curiosité et du soin (cura). La curiosité s’alimente et s’entretient de la relation à l’inconnu et du remaniement des références ou des expériences anciennes. La durée de la formation permettait de conjuguer l’ouverture culturelle, la plongée dans des lectures longues, la mise au point progressive et évolutive du rapport entre le «commun» qui se reçoit, qui se construit, et le «singulier» qui se découvre, qui s’invente. L’écritureson frayage, ses (dans reprises et les échanges auxquels elle peut donner lieu) est la façon privilégiée de constituer et de faire varier cette mise en relation si délicate, et Gérard Fath a poursuivi, selon d’autres modalités, ce travail à l’Université, en particulier dans la formation des enseignants, celle des formateurs, et les directions de thèses qu’il a assurées. A partir des situations de terrain, de son propre travail, et des évolutions historiques qui produisent de nouveaux contextes, c’est l’exigence laïque aujourd’hui, dont l’enjeu est celui d’un vivre-ensemble possible à la fois pourtousetchacun,qui s’est affirmée comme le foyer intégrateur à partir duquel s’est déployée une œuvre d’ouverture dialogique et de mise au point qui a donné lieu à trois livres que l’on peut lire indépendamment l’un de l’autre mais qui constituent aussi une sorte de triptyque :Ecole et Valeurs : la table brisée ? Laïcité et pédagogie(L’Harmattan, 2006),Laïcitéet pédagogie. Croire et savoir : à quelle enseigne ? (L’Harmattan, 2009), et l’ouvrage qui est proposé aujourd’hui. Les valeurs dont il est question ne sont pas seulement des « valeurs emblématiques », des « enseignes », mais des « valeurs concrètes » et même de « micro-valeurs » dont l’ordinaire de la vie quotidienne est la pierre de touche. Or l’un des points les plus vifs est, ici, la tension entre la question dusenset celle de lavérité. Le sens, support d’énigme, est ce rapport à quelque chose d’autre qui empêche les
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significations de se clore sur elles-mêmes. Il maintient l’insistance des questions et leur excès sur les problèmes que l’on a d’abord cherché, à juste titre, à délimiter, à circonscrire. Mais, au revers de cette « retenue » du sens dans des significations (au détriment de ses autres dimensions : sensation, manifestation, indication, référenciation, orientation, direction), la postmodernité se caractérise aussi par la « fuite » et l’entropie du sens. Préserver l’inquiétude du sens, c’est poursuivre une intention de vérité qui dépasse les marques pourtant nécessaires, mais comme transitoires, de l’exactitude, du doute, et de la certitude. Cette intention s’exprimeen associant la probité intellectuelle, un mouvement vers l’Un (enôsis, selon le mot de Plotin) qui relance le mouvement de la pensée « en avant de soi », et le critère de la plus grandejustesse possible. S’engage alors untravaildu sens qui maintient le hiatus entre savoir et vérité, et rend possible undéplacementdans la façon de poser les problèmes. Ici, ce qui se déplace dans une discussion qui porte plus habituellement sur les rapports entre croyance et foi, est dû à l’introduction de la position et du statut de l’incroyance. La compréhension de la laïcité est renouvelée à partir de la complémentarité de topiques qui accueillent chacune un« site de l’étranger » (Fédida) : celui de la croyance ou de la foi depuis l’incroyance, celui de l’incroyance pour ceux qui témoignent d’une foi ou d’une « ultime espérance ». Paradoxalement et sur un autre plan, ne retrouve-t-on pas ce que disait Niels Bohr en pensant la complémentarité dans la physique contemporaine :vérités« Les profondes sont les propositions dont le contraire contient aussi une vérité profonde »? Et en même temps, ce livre fait découvrir un visage de ce que peut être la subjectivité dans le monde d’aujourd’hui, une subjectivité exposée, qui est aussi une figure de générosité dans la pensée et l’existence Pierre-André Dupuis, Professeur émérite, Université Nancy2.
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Et après ?
Essai sur les aspirations à une laïcité postchrétienne
Introduction Ritournelle : elle serait perdue, dépassée, lamodernité. Tourne manège : tout le monde s’y assied, s’en laisse conter, apprécie la griserie dutour après tourqui esquisse un mouvement vers l’avant artistement contenu et scandé. On peut toujours reprendre un tour, tant qu’on peut prendre des billets. Les grandes familles de pensée en achètent en nombre. C’est moins cher. Etrange facilité de penser, sans cesse réactivée par l’usage de quantité de termes purement descriptifs, qui égayent la postmodernité de variantes subtiles –hyper/sur/non/ultra-modernité,on entend mêmepost-postmodernité…1 Certes, on peut, à l’instar de Frédéric Lenoir , décliner comme en un panorama, la modernité en phases : 2 « Que sontles premiers modernes? Des gens comme Pic de la Mirandole, pour qui l’homme doit être parfaitement libre de ses actes et de ses choix, y compris de ses choix religieux - ce qui, à l’époque, est une révolution considérable -, chacun doit exercer sa raison, son esprit critique... mais cela ne le ferme pas au sacré, bien au contraire ! L’être libre, conscient de son incomplétude, est en quête de quelque chose de plus grand que lui. Il se passionne pour toutes les sciences, toutes les langues, toutes les traditions. Il relit la Bible, plonge dans la kabbale, expérimente l’alchimie, l’astrologie et tous les langages symboliques qu’ont explorés les cultures humaines et dont il découvre, ébloui, qu’ils sont à sa disposition. Cette émergence à la liberté de conscience, ce désir de tout expérimenter, s’accompagnent d’une immense soif de
1  Frédéric Lenoir, in Entretien,Nouvelles Clés,Propos recueillis par Marc de Smedt et Patrice van Eersel,www.cles.com-2006,suite à son ouvrage «Les métamorphoses de Dieu,Plon, 2003. 2 C’est moi qui surligne. 9
tolérance. Là, nous trouvons Montaigne, qui sait allier ses convictions catholiques profondes avec une acceptation des opinions les plus différentes, voire les plus opposées à la sienne.Cettemodernité première, je pense que nous sommes en train d’en retrouver l’esprit en ce moment même, mais riche de cinq siècles de folle traversée - d’où ma proposition de l’appeler “ultra-modernité” : ce n’est pas une “post-modernité” qui serait en rupture avec les idéaux de la Renaissance, bien au contraire : la caractéristique n°1 n’a pas changé, c’est l’autonomie du sujet, l’individu reste LA référence. En revanche, je la distingue d’une modernité seconde, qui a lentement émergé au 17ème siècle, s’est affirmée au 18ème, pour devenir hégémonique au 19ème...Avec Descartes en effet, on scinde le monde en deux: d’un côté la foi en Dieu, l’imaginaire, le symbolique, qui deviennent des affaires privées, sans prise sur le monde physique ; de l’autre côté, la science, en pleine ascension, qui étudie une nature désenchantée, habitée par des hommes-machines doués de raison, et qui va prendre le pouvoir. Cedeuxième temps de la modernité est systématisé par les Lumières. Kant ou Voltaire sont aussi croyants que Descartes, mais leur Dieu, lointain et froid architecte de l’univers, n’a plus qu’un ascendant moral sur les hommes. Leur quête principale, guidée par la raison, entièrement accaparée par une laïcisation du décalogue (la loi kantienne) et par la recherche scientifique, n’a plus rien à faire du symbolique ou de la Kabbale. Un siècle plus tard, le scientisme règne, moteur des grands systèmes athées et aboutissement logique de la scission entre foi et raison. Feuerbach, Marx, Nietzsche, Freud, chacun à sa façon, tirent la leçon des Lumières : si le “grand architecte” n’a plus de rapport réel avec le monde, si l’on ne peut même plus raisonner sur lui, c’est donc qu’on peut se passer de lui, il n’est plus qu’une idole ! C’estl’apothéose du mythe de la modernité. Sa caricature. L’homme ne se rend pas compte qu’il se coupe de la nature, de son corps, pour ne plus être qu’une sorte de cerveau qui, finalement, a réponse à tout et peut apporter le bonheur à l’humanité entière. L’illusion du progrès rationnel triomphe avec le marxisme et ses lendemains radieux... Là-dessus, l’humanité se prend sur la figure le siècle le plus violent de l’histoire humaine - d’Auschwitz au
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