La mémoire vive des mystiques chrétiens

Gérard Fomerand

Description

Les mystiques chrétiens semblent appartenir à un passé révolu, quand le sacré imprégnait la vie quotidienne. Ce livre a pour ambition de montrer qu'une autre voie discrète a, dès l'origine, coexisté avec les formes instituées du christianisme. Les mystiques chrétiens sont catholiques, protestants, évangéliques, orthodoxes, ou d'ailleurs, mais ils ont tous vécu l'expérience d'une naissance à la présence. Habillés de secret, ils nous indiquent la voie de nos métamorphoses.

Sujets

• Catholicisme
• Religión
• Christianisme

Informations

• Publié par: L'Harmattan
• Date de parution: 01 février 2012
• Nombre de lectures: 38
• EAN13: 9782296483217
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 2 Mo

Extrait

La mémoire vive
des mystiques chrétiens
























GÉRARD FOMERAND






La mémoire vive
des mystiques chrétiens

Naissance à la présence


















L’HARMATTANDu même auteur

Crise des valeurs et mutation de l’État, Paris, Éditions Loysel,
1994.

L’audit des collectivités locales en France et dans les pays
francophones, Paris, L.G.D.J., 1991.


Écrits universitaires :

Intervention administrative et libertés publiques au Second
Empire – le cas des libertés religieuses, thèse, faculté de Droit
de Nice, 1973.

Les catholiques français face au Concile de Vatican I, mémoire
de Sciences politiques, I.E.P. d’Aix-en-Provence, 1969.




















© L'HARMATTAN, 2012
5-7, rue de l'École-Polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
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ISBN : 978-2-296-96589-8
EAN : 9782296965898 A mes enfants
et, à travers eux,
aux générations à venir.« Le Christianisme étant institutionnalisé
depuis des siècles, il importait non pas de le
quitter, mais de le redécouvrir dans sa
profondeur, en abandonnant ses caricatures
qui l’ensevelissaient en le défigurant.»

M.M. Davy,
Le désert intérieur
« …Et ces hommes sont loin d’eux-mêmes,
comme ivres de boisson, ivres en esprit de
mystère et de Dieu. »
Pseudo-Macaire,
Homélies spirituelles
« La rose est sans pourquoi…elle fleurit
parce qu’elle fleurit. »
«Dieu est un éternel présent. »
Angélus Silesius,
Le pèlerin chérubinique Note liminaire
A propos des traductions de la Bible utilisées dans cet
ouvrage et des abréviations.
La Bible est sans doute le livre le plus édité et le plus traduit
dans des centaines de langues et d’idiomes. Dans ses versions
françaises, très nombreuses, trois traductions ont été utilisées
dans ce livre. En premier lieu, la Bible dite de Jérusalem et la
traduction de Louis Segond servent de repères bibliques.
La version récente d’André Chouraqui nous a servi aussi de
référence. Elle a pour singularité d’être, du moins pour le
Nouveau Testament, la première à avoir été traduite par un fils
d’Israël. Son originalité réside dans la sensibilité particulière
d’André Chouraqui à saisir, derrière les textes grecs et latins,
qui seuls ont survécu au naufrage du monde antique, les
substrats hébraïques sous-jacents. La probable disparition d’un
Evangile original en hébreu en a souvent faussé la
compréhension. La diffusion des Evangiles a eu lieu en latin et
en grec alors que leurs auteurs pensaient, vivaient et écrivaient
en hébreu. La traduction d’André Chouraqui redonne aux textes
chrétiens une sève et une saveur qu’ils avaient en partie
perdues.
Pour les lecteurs non avertis des usages des biblistes, les
abréviations suivantes ont été adoptées, conformément à la
pratique dominante, comme par exemple
Ancien Testament :
- Gn (Genèse)
- Dt (Le Deutéronome)
- R (Livre des Rois)
- Ct (Cantique des Cantiques)
- Is (Isaïe)
- Dn (Daniel)
11Nouveau Testament :
- Jn (Evangile de Jean)
- Mt (Evangile de Matthieu)
- Lc (Evangile de Luc)
- Mc (Evangile de Marc)
- Ac (Actes des Apôtres)
- Co (Epître de Paul aux Corinthiens)
- Ga (Epîtraul aux Galates)
- Ap (Apocalypse de Jean)
12Préface polyphonique
ès ses débuts, cette voie de lumière qu’est le christianisme Da été une et multiple. Les épîtres de l’apôtre Paul, datées
autour de l’an cinquante, nous remettent ce fait constamment en
mémoire. Des courants aux tonalités différentes traversaient les
eaux naissantes de ce qui allait devenir un large fleuve aux rives
couvertes de vastes forêts. Certains voulaient rester dans la
stricte observance des pratiques juives, d’autres désiraient
s’ouvrir aux cultures romaine et hellénique de l’époque. Mais
une immense fraternité dépassait ces contrastes apparents. Tout
était mis en commun et partagé dans un seul cœur/ esprit dont le
nom se trouvait sur toutes les lèvres, le Christ vivant, ce grain
de blé moulu afin de nourrir leur humanité et la faire grandir.
Durant vingt siècles, la dualité-unité continua. Par delà les
blessures historiques, la parole de l’Evangile resta la pierre
d’angle de millions de personnes. Une communion persista dans
une symphonie des personnes et des visages. En ce temps actuel
de recomposition de cette histoire, la parole évangélique se
libère à nouveau. Le mal-être des Eglises est curieusement
d’une incroyable vigueur printanière. Il traduit non pas une
mort annoncée, mais un nouvel horizon. Une page se tourne
amorçant l’écriture de pages encore blanches : quoi de plus
beau qu’un texte vide ouvrant les pistes d’un univers sans
borne ? Le blanc n’est-il pas traditionnellement la couleur de
l’infini ? le lieu de tous les possibles ?
Cette blancheur incandescente est la couleur des mystiques :
elle est lumière et éblouissement, absence et présence, car le
soleil éclaire et brûle les vallées et les monts dans des brumes
de chaleur les magnifiant et les effaçant. Lors de sa culmination
au zénith, il aveugle et noie le paysage dans une opalescence
laiteuse où se dissolvent les arbres et les animaux. Les pinèdes
d’un vert sombre se dorent à l’été de rayons lumineux, puis
disparaissent sous les ardeurs du soleil.
13Dans ces lieux solaires paradoxaux, mélange de tout et de
son contraire, évoluent les mystiques. Avouons-le, ils n’ont pas
forcément bonne presse car ils sont largement incompris. Leur
attitude surprend parfois avec leur côté insaisissable ou
inclassable, du moins pour l’opinion commune. L’étiquetage est
si important de nos jours ! Les termes de « nomenclature » et de
« formatage » n’appartiennent pas à leur vocabulaire. Au vent
du grand large qui les porte, s’en vont en feuilles mortes les
certitudes et les sécurités, les normes et les repères.
Il était dès lors important en début de parcours de bien
préciser ce qu’est réellement un (ou une) mystique. La première
évidence est qu’ils ne se vivent absolument pas comme des
mystiques et en refusent le qualificatif. Ils se perçoivent comme
des personnes ordinaires vivant intensément un présent de
silence et réagissant à leur environnement par une empathie
profonde. Une seconde caractéristique les marque : une humilité
radicale, le refus de paraître ou d’apparaître, de parler ou
d’écrire. Leur seul souhait est le plus souvent de s’ensevelir
dans une autre dimension. La plupart le font effectivement.
D’autres, plutôt rares, laissent des textes, connus en général
seulement après leur mort quand ils n’ont pas été détruits par
des disciples préservant le désir d’anonymat de leur maître.
Pour un mystique connu du public, dix mille ne le sont pas du
tout.
Le silence est leur seule règle de vie, un silence qui libère
une Parole vraie, pétrie d’intériorité. Chaque mot, quand il est
prononcé, surgit d’ailleurs, de la profondeur de l’être. Il est rare,
percutant, illuminant. Parfois, un bref regard de leur part suffit à
déclencher un bouleversement chez la personne rencontrée. Les
récits abondent de visiteurs sortant transformés d’un entretien
très peu verbalisé avec ces mystiques. Ils sont happés par une
Présence subtile. Leur monde habituel est renversé.
Le mystique porte sur sa chair le sceau du caché et du