Juré d assises
92 pages
Français

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Description

Ce livre retrace, à partir d'une expérience personnelle, le vécu d'un juré d'assise. Entre les deux séquences, l'ouvrage décrit la liturgie d'un procès telle que la vit un juré au travers de ses droits et devoirs. Il fait ressortir aussi l'expérience humaine que constitue la vie en vase clos d'un jury avec les phénomènes de groupe qui l'accompagnent. Il insiste, enfin, sur les paramètres qui génèrent et conditionnent "l'intime conviction".

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 décembre 2012
Nombre de lectures 219
EAN13 9782296990289
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Titre
Pierre-Marie ABADIE







JURÉ D’ASSISES


Témoignage d’une expérience citoyenne et humaine
Copyright
Du même auteur
La quête du partage : une utopie permanente,
Editions du Panthéon, 2012














© L’Harmattan, 2012
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
EAN Epub : 9782296990289
A mon fils Florian,
Remerciements
Toute ma gratitude s’adresse, d’abord et surtout à Gisèle, mon épouse, qui, avec un soin exceptionnel, continue à superviser mes textes et à procéder à leur mise au point jusqu’à la « délivrance » de l’édition.
Elle va aussi à tous les lecteurs de mon premier ouvrage qui, par leur intérêt, m’ont apporté un soutien indirect et l’énergie de la motivation.
Ma pensée s’étend à la présidente de la Cour d’assises qui m’a formé, pendant 3 semaines, à l’art de juger. Je n’ai pas toujours été un bon disciple mais je fus à bonne école. Ce professionnel m’a beaucoup appris.
Je n’oublie pas la confiance de mon éditeur.
Maintenant que j’ai été jurée et que j’ai vu la justice de l’intérieur, je suis beaucoup plus tolérante, beaucoup plus humaine, plus à l’écoute des Autres, beaucoup moins dure. C’est presque religieux. Avec l’humanité et l’amour que cela vous donne, si tout le monde agissait comme cela, le monde serait meilleur. Quand vous vivez cette expérience, vous devenez meilleure. Cela, je me le dis tout le temps. Il y a eu un déclic. Pour moi, il y a un avant et un après. Cette expérience est si forte que j’en suis transformée.
En étant juré, on se rend compte qu’il ne faut pas grand chose pour qu’on soit, un jour, dans l’un ou l’autre camp, soit la victime, soit l’accusé.
(Paroles de jurés)
Introduction
Ce livre se veut informatif et témoignage à la fois, à partir du vécu d’un juré lors de quatre procès d’assises.
Informatif pour tenter de réduire, un peu, le décalage paradoxal entre, d’un côté, l’image surexploitée de la cour d’assises, théâtre idéal de passions et d’émotions utilisé ad nauseam par les médias, et, d’un autre côté, la méconnaissance du citoyen sur le fonctionnement réel de cette institution républicaine essentielle.
Informatif car personne, ou presque, avant de l’être ne sait véritablement ce que recouvre la fonction de juré en charge émotive, en exigences fortes, en expérience de vie, en pouvoirs reconnus, en moments de solitude, mais aussi en rapports de forces qui se nouent parfois, en particulier avec les magistrats, les avocats et les autres acteurs du prétoire.
Témoignage pour clamer les grandeurs et servitudes de la fonction de juré que cette parenthèse de vie marquera à jamais. On ne sort pas indemne de cette expérience qui condamne « à perpétuité » à considérer la vie autrement et peut-être les gens différemment aussi.
Témoignage pour affirmer que la volonté de la République de créer une justice populaire telle que le voulaient les initiateurs de 1791 lors de la première création de jurys aux assises, a été graduellement dévoyée. Mon témoignage se joindra à ceux d’anciens jurés qui dénoncent, comme je le fais, l’influence déterminante des magistrats de la cour au cœur du procès comme lors de la décision finale en chambre des délibérations.
La collaboration de non-professionnels à la justice pénale découle d’abord de l’héritage laissé par la philosophie antique selon laquelle la justice doit être l’émanation du peuple, en application de l’adage bien connu « vox populi, vox dei » .
Elle est ensuite l’œuvre des Constituants pour qui « le jury était dans l’ordre judiciaire comme le corps législatif dans l’ordre politique : la voix de la nation », ce qui a fait dire à Bernard Schnapper que « Le jury mieux qu’une création de la Révolution en fut avant tout le symbole » .
Cette collaboration à caractère collégial constitue, enfin, une institution politique à haute teneur démocratique puisqu’elle réalise la participation du citoyen à la chose publique par un processus rare de démocratie directe. Elle assure un lien étroit entre justice et société et offre des vertus civiques et pédagogiques irremplaçables : la participation du citoyen à une fonction régalienne majeure permet à ce dernier de découvrir, de l’intérieur, les rouages cachés de la justice et de mesurer la difficulté de juger.
Je me suis aperçu de l’existence de deux réactions très marquées et radicalement opposées face à la possibilité d’être juré. Divers témoignages sur internet et au travers de blogs illustrent abondamment cette dualité de population que confirment des études universitaires et des sondages. Existent ceux pour qui être juré est une chance. J’en suis. En contrepoint, on trouve ceux pour qui la simple perspective de pouvoir l’être un jour constitue déjà un total repoussoir. Lorsque les deux populations cohabitent en intégrant la cour, elles se fondent très vite en une seule car je n’ai vu que des jurés conscients de leur rôle avec une motivation empreinte de gravité, parfois même de fierté.
Être juré est une rupture de vie. Le juré vit dans une bulle le temps d’une cession judiciaire. Il est hors de son contexte, dans l’interdiction de communiquer, à tout le moins avec certains acteurs au procès, dans un monde inconnu et nouveau, investi d’un pouvoir (pas n’importe lequel !), en prise à une expérience de groupe qui se déroule en vase clos. C’est immense et terrifiant à la fois. C’est d’autant plus déstabilisant que le terme de l’expérience sera brutal. Le groupe se dispersera. Le pouvoir du juré sera dissout. Les accès au palais se fermeront. Ce qui vous a été donné vous est repris. Sans ménagement. Sans palier de décompression. Reste un grand vide. Domine alors un sentiment de solitude. C’est presque la tristesse post coïtum qui succède à ce qui vous a tant subjugué et élevé.
Ce livre cherche à dépeindre le juré dans tous ses états. Ecrit à partir d’une expérience de quatre procès, il ne prétend pas épuiser le sujet. Il est une approche des assises vues par le citoyen désigné pour juger, une approche sans doute partielle et subjective, mais réalisée à partir d’un vécu, enrichie de témoignages d’autres citoyens jurés. Il s’agit d’une « expérience de terrain ». Parce que celle-ci m’avait profondément marqué, j’ai voulu la prolonger par des lectures académiques et d’ouvrages (relativement rares) abordant les problématiques liées au thème que je voulais développer. J’espère avoir pu ainsi enrichir mon témoignage d’éléments informatifs qui m’ont servi moi-même à mieux comprendre, a posteriori, ce que j’avais vécu pendant trois semaines.
J’ai cherché à privilégier, mais sans trop, compte tenu de la brièveté de mon expérience qui lui confère une valeur relative, un thème particulier. L’influence prédominante des magistrats sur les jurés constitue, ainsi, le fil rouge qui traverse les pages de ce livre. Elle naît au cours des débats ; elle atteint son paroxysme en salle de délibérations lors du choix final de la sanction. C’est un constat et une conviction. Ce n’est pas un jugement sur son aspect positif ou non. C’est une réalité vécue. Le lecteur appréciera et en tirera sa propre conclusion. On peut simplement dire que cette constatation met en défaut le caractère populaire que le législateur de 1791, dans les brumes de la Révolution, voulait donner à la décision de justice et dont l’affirmation s’est poursuivie, depuis, au travers des Républiques successives. La conception révolutionnaire cherchait à ce que « la sanction pénale ne soit plus l’expression d’un pouvoir souverain arbitraire, mais la décision de la collectivité rassemblée autour du pacte social ». Les tentatives récentes de réformes judiciaires accentueraient plutôt la tendance à une justice d’experts et de professionnels

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