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ense, argumenté et inscrit dans l’actualité, le nouvel ouvrage d’Emmanuel D Aubin sur le droit de la fonction publique territoriale livre plusieurs clés de compréhension des évolutions actuelles de cette fonction publique créée il y a 25 ans. En premier lieu, une analyse de l’architecture originale des principes et des modes d’action de la FPT. Cet ouvrage se place dans le sillon des Traités sur la « fonction publique de l’État » (ciaprès, FPE). Audelà des explications précises sur l’ensemble des règles constituant l’armature de cette fonction publique, l’auteur présente avec force détails l’ensemble des règles statutaires applicables avec leur finalité, leur mode d’emploi, leur interprétation jurispru dentielle. Approfondissant son précédent mémento publié à la faveur de l’acte II de la décentralisation en 2003, il définit, avec beaucoup de rigueur juridique, le lien indissoluble entre le développement de la décentralisation, l’accroisse ment des compétences et responsabilités des collectivités locales et le choix d’une fonction publique propre. À cet égard, le plan de l’ouvrage traduit bien le dessein de l’auteur : étudier la FPT dans ses particularités (son anatomie) tout en l’inscrivant totalement dans l’histoire de la fonction publique au service de la République et de ses institu tions (ses obligations statutaires et déontologiques). L’étude minutieuse de ces obligations statutaires, ainsi que le système de responsabilités applicables aux fonctionnaires territoriaux, rappelle avec force le caractère dérogatoire au droit commun des relations employeur public–agent, régi par le droit public : la « travaillisation » de la fonction publique, que l’auteur décèle avec beaucoup de justesse dans les réformes innombrables mises enœuvre depuis 1982, trouve, ici, ses limites fondamentales et spécifiques, que la jurisprudenceCadot et Blancoborde toujours. La spécificité de la FPT, souvent présentée en mode mineur des autres fonctions publiques (État et hospitalière), trouve ici une explication décisive et globale, au regard même des principes du titre I de la loi du 26 janvier 1984. Le choix de sa structure en cadres d’emploi, son évolution en métiers caractérisent, selon l’auteur, la modernité de cette FPT, désormais modèle majeur de la réforme de la FPE. À l’appui de cette observation, l’ouvrage développe une étude du rapport Silicani sur l’avenir de la fonction publique, avec ses sources et ses analyses, qui, fort de la souplesse de cette FPT, sert désormais de bous sole aux réformes de la FPE (fusion des corps, classement en 8 ou 9 « filières »,
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DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE
prise en compte de la fonction ressources humaines, etc.). Autres exemples de l’originalité de la FPT présentés, le rôle du Conseil Supérieur de la FPT, à travers le mécanisme d’autosaisine, la « fabrication » de la filière sportive à travers le « dialogue collège employeurs/collèges des agents ». En deuxième lieu, ce manuel offre une présentation claire et complète du contenu des règles, dans le souci de faire partager la compréhension et les connaissances nécessaires aux futurs et actuels agents de la FPT. Sa grande facilité d’accès, son exhaustivité (avec un soin particulier apporté dans l’analyse des réformes en cours comme, par exemple le chapitre sur « les contrats d’emploi dans les collectivités territoriales »), sa rédaction fluide et précise, ses encarts synthétiques, permettent à tout candidat, dans sa préparation solitaire ou collec tive, de s’approprier le contenu nécessaire à l’évaluation de ses connaissances par un jury dans un contexte marqué par la réforme du contenu des épreuves, par exemple, du concours d’attaché territorial (décret du 22 juin 2009). L’ouvrage n’est pas réservé aux seuls candidats juristes, il intéressera également les autres candidats des spécialités ouvrant l’accès aux concours externes et internes des différentes filières. Le futur ingénieur, le futur adjoint technique, le futur médecin ou le futur policier municipal, le futur animateur, ont tout à gagner à s’imprégner de ce qui sera leur statut dans l’exercice de leurs fonctions ! L’000 employeurs potentiels, apparaîtunité de la FPT, malgré ses quelque 60 ainsi une garantie à tout futur candidat fonctionnaire. Le choix de travailler dans le service public territorial, sous la responsabilité d’un exécutif territorial circonstancié, devient compatible avec cette diversité. L’auteur sait mettre en lumière, audelà de la sécheresse des règles, l’attractivité de cette fonction publique. Il choisit ses exemples dans la grande diversité des situations profes sionnelles des agents qu’il a pris soin de relever en se référant à ses interventions dans les formations du CNFPT. Audelà de cette « cible », l’ouvrage est forte ment recommandé à tout agent territorial qui souhaite mettre à jour les réponses aux questions statutaires qu’il se pose, ou qui souhaite se projeter dans un dérou lement de carrière, dont les règles sont ici rendues particulièrement explicites. À noter, par exemple, le chapitre sur l’obligation d’obéissance et ses limites, qui approfondit le contenu de l’obligation de discrétion professionnelle, du secret professionnel ainsi que le devoir de signalement pour certains fonctionnaires territoriaux. Cet ouvrage s’inscrit aussi dans les sources indispensables à tout montage pédagogique d’une action de formation sur le statut, que le CNFPT a vocation à construire. Ainsi, la qualité de ses sources, de son choix de la juris prudence étudiée, est un atout pour les formations d’pourintégration organisées tout nouvel agent recruté sur liste d’aptitude, quelles que soient sa filière et ses catégories. Enfin, Emmanuel Aubin, par son parti pris de traiter la FPT comme un objet d’développe une problématique de nature à nourrir laautonome », étude « réflexion du lecteur désireux de s’Par sa facicitoyen ». engager dans un débat « lité de lecture, cet ouvrage apporte une connaissance structurée de la FPT et de ses éléments fondamentaux. Il développe, en effet, une grille de lecture aisément
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compréhensible pour tout « curieux » de la chose publique. En cela également, il place la FPT dans le mouvement plus général des réformes des institutions publiques et permet de mesurer les enjeux financiers et humains de la probable « réforme » des collectivités territoriales à l’automne 2009. Dans l’hypothèse d’sur le modèle du ballon dlibérale », une forte approche « ’essai de la proposi tion de loi du 21 janvier 2009 « sur la liberté de recrutement par les collectivités territoriales », l’auteur, par annotations successives mais aussi par sa solide analyse juridique globale, trace la ligne rouge audelà de laquelle le fondement du pacte républicain, auquel participe la FPT, serait atteint. À côté de la figure e des « hussards de la République » chère à la III République, celle du secrétaire de mairie n’est pas loin et symbolise les racines historiques de la FPT. Emmanuel Aubin présente avec justesse les insuffisances de certaines disposi tions statutaires et les pistes de réforme possibles, mais il les replace dans la problématique de « la construction statutaire évolutive » chère au Professeur Bourdon, inlassable commentateur de la FPT. Merci donc à Emmanuel Aubin d’avoir si bien mis en valeur la FPT comme l’outil démocratique et républicain de la gestion du service public territorial au service de l’intérêt général. Bernard Manceau Directeur du Centre de Formation Interne du Centre National de la Fonction Publique Territoriale