L industrie stéphanoise : de l espionnage industriel à la veille technologique 1700-1950
210 pages
Français

L'industrie stéphanoise : de l'espionnage industriel à la veille technologique 1700-1950 , livre ebook

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210 pages
Français

Description

L'industrialisation des 18e et 19e siècles a engendré de grands bouleversements techniques, dont les transferts de technologie entre les différents espaces industriels constituent le fondement. Au sein de ces relations industrielles, la figure de "l'espion" hante l'imaginaire. Cette image cache une réalité plus complexe obligeant les entrepreneurs à se procurer l'information nécessaire au développement de leur activité. Les industriels stéphanois comprennent rapidement cet enjeu et se lancent, dès le 18e siècle, dans une course à l'information.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 octobre 2009
Nombre de lectures 314
EAN13 9782296229884
Langue Français
Poids de l'ouvrage 10 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L’INDUSTRIE STÉPHANOISE: DE LESPIONNAGE INDUSTRIEL À LA VEILLE TECHNOLOGIQUE1700-1950
Luc ROJAS
L’INDUSTRIE STÉPHANOISE: DE LESPIONNAGE INDUSTRIEL À LA VEILLE TECHNOLOGIQUE1700-1950
L’HARMATTAN
«Ainsi, pour le moulin à eau, la poudre à canon, le téléphone ou le phonographe, les créateurs ne sont pas uniques, et les procès en antériorité, mené aux Etats-Unis au cours de ces dernières années, ont montré la vanité de ce type de recherches. Oui, depuis les temps les plus reculés, depuis les premiers pas de l’agriculture ou de la métallurgie jusqu’aux découvertes les plus récentes, l’histoire des techniques est un enchaînement constant d’avancées où chaque technique évolue sur la base d’une culture existante pour créer des innovations successives 1 et cumulatives.»
Cette réalité s’affirme avec force au sein d’équipe de recherche industrielle telle que le MenloPark fondé parEdison e pour l’électricité industrielle, à la fin du XIX siècle, réunissant de multiples compétences tant scientifiques que pratiques.
L’isolement d’un savoir et d’une entreprise conduit irrémédiablement à la sclérose. La bonne connaissance d’un marché, d’une technologie constitue la conditionsine qua nonde la réussite industrielle. Toutefois la concurrence économique entre les acteurs a pu ou peut s’apparenter à une véritable « guerre économique » dans laquelle, à l’instar des conflits armés, l’information technologique semble un atout non négligeable.Acquérir des renseignements techniques fut longtemps synonyme d’espionnage industriel.Ce phénomène conduit les états ou les entreprises vers des stratégies agressives de recherche de connaissances techniques et, parallèlement, à des politiques de protection des innovations et du savoir-faire. Le décorum de l’espionnage industriel est en place : la mission des agents réside dans la collecte évidemment discrète des connaissances et du savoir-faire des concurrents mais également des alliés ! Toutes les figures sont a priori envisageables. Cependant, s’arrêter à cette figure romanesque de l’espion reviendrait à travestir la réalité. Si ce phénomène est pertinent en
1 Jacomy (1990) p. 12.
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certaines circonstances, il ne reflète pas l’étendue des situations industrielles.
Toutefois cette notion d’espionnage industriel fait écho à bien des égards à la pratique de veille technologique qui s’établit au cours de l’industrialisation.Cette veille, queDaniel Rouach 1 qualifie desixième sensde l’entreprise , a pour ambition de suivre les évolutions susceptibles d’influer sur le devenir d’un métier. Les moyens employés ici, contrairement à l’espionnage industriel, apparaissent comme légaux : recherche d’informations disponibles dans la sphère publique, organisation de mission d’étude… Si cette distinction semble de nos jours clairement définie, cela n’a pas toujours été le cas : l’industrialisation, notamment, a longtemps été un vaste champ d’expérimentation dans le domaine du recueil d’informations techniques.
Afin de saisir toute la complexité de ce phénomène il faut avoir à l’esprit que l’acquisition d’informations et la réflexion qui s’en suit n’est qu’un stade préparatoire à l’innovation proprement dite. MichelCotte précise que la circulation de l’information :
«n’implique pas nécessairement le passage à l’acte technique, pouvant rester une simple spéculation ou bien se conclure par un abandon du projet. Par contre, elle forme une étape dont les innovateurs ne se passent en réalité 2 jamais.»
Ces modestes lignes ont pour objectif d’explorer une vaste et complexe question : la circulation des idées techniques. Michel Cotte dans son ouvrageDe l’espionnage à la veille…a déjà largement défriché le sujet, il serait donc inutile de proposer un ouvrage analogue. Toutefois s’atteler à analyser la circulation des idées techniques au sein d’un bassin industriel paraît un exercice pertinent.En effet comprendre le comportement et la culture des industriels choisissant l’innovation comme approche du marché nous renvoie obligatoirement à la notion de bassin industriel. Certes cette dernière est depuis quelques années fortement
1 Rouach (1996). 2 Cotte (2005) p. 11.
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remise en cause et ce à juste titre, néanmoins il ne faut pas méconnaître les logiques d’alliances et de réseaux qui naissent souvent du fait territorial. Il est plus évident pour un industriel de passer alliance avec un voisin qu’avec un entrepreneur quelconque situé à l’autre bout de la France. A cette notion de bassin fait écho le concept de réseau relationnel : si des collaborations entre des entrepreneurs implantés dans des bassins industriels différents voient le jour, il est bien souvent question de liens et de stratégies sociales.Celles-ci sont donc à considérer dans une réflexion liée à la circulation des idées techniques au sein d’un bassin industriel.
Une telle pensée ne remet-elle pas en cause l’image romanesque de l’espion qui sévirait au sein des entreprises ?Ne faut-il pas nuancer cette vue caricaturale ?Bien au-delà de ces clichés, comprendre la circulation des idées techniques au sein d’un bassin industriel en épousant le regard des acteurs (ingénieurs, industriels, techniciens…), en s’immisçant dans leur logique, est une des ambitions majeures de cette recherche.
Notre enquête historique s’étale volontairement des années 1710 à l’entre-deux guerres afin de saisir l’évolution de la pensée des acteurs quant à la circulation de l’information technique au sein de ce bassin stéphanois. Par ce biais là nous abordons également la période « pré-industrielle » qui est, malgré les apparences et les préjugés, riche dans le domaine de la circulation des idées techniques et qui à bien des égards explique les changements liés à l’industrialisation. Pousser jusqu’à l’entre-deux guerres s’est également apprécier la continuité de ce phénomène social, culturel et intellectuel : les pratiques des industriels stéphanois découlant de ce passé.
La trame globale de cet ouvrage est induite par l’impératif premier d’analyse et de description de l’évolution d’une pratique de recueil de l’information technique.Ainsi elle obéit d’abord à la chronologie.Ce découpage temporel met en exergue deux périodes au sein desquelles la circulation des idées techniques dans le bassin industriel stéphanois est analysée et décrite.Ceci constitue le premier et le troisième temps qui sont séparés par un second dévolu à l’analyse des facteurs facilitant et incitant la circulation des informations techniques.
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