Résister dans le travail et dans la migration (Volume 5)
296 pages
Français

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Résister dans le travail et dans la migration (Volume 5) , livre ebook

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Description

Dans ce cinquième volume, la colère est envisagée sur le terrain du travail et de la migration. Qu'y a-t-il de commun entre les politiques du travail, du chômage, de la migration et du droit d'asile aujourd'hui ? Ces contributions décrivent des mécanismes d'exploitation, de surexploitation, de répression, de violence à l'oeuvre dans l'ensemble de ces politiques, leurs causes et leurs conséquences.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2011
Nombre de lectures 56
EAN13 9782296804579
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

RÉSISTER DANS LE TRAVAIL
ET DANS LA MIGRATION
Colère , courage et création politique
Sous la direction de
Marie-Claire Caloz-Tschopp


Volume 5


RÉSISTER DANS LE TRAVAIL
ET DANS LA MIGRATION
Colère , courage et création politique



Actes du colloque international
de théorie politique

Université de Lausanne
Institut d’Études Politiques et Internationales (IEPI)
23 – 24 – 25 avril 2010
© L’H ARMATTAN, 2011
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-54507-6
EAN : 9782296545076

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Pouf des millions d’hommes : le sentiment d’être agi dans le travail
Anders Günther
Philosophe


« Plus rien à faire. Depuis que Doblin, il y a vingt ans, a décrit avec Biberkopf l’homme condamné à l’inactivité et, de ce fait, privé de monde, « l’activité » est devenue, sous l’action de divers facteurs historiques, encore plus problématique. Non pas, par exemple, parce que le nombre des chômeurs aurait augmenté – ce qui n’est d’ailleurs pas le cas –, mais parce que des millions d’hommes, qui ont effectivement un emploi, ont désormais le sentiment d’« être agis » : ils sont actifs, mais sans fixer eux-mêmes l’objectif de leur travail, voire sans même pouvoir le comprendre ; ou bien ils sont actifs tout en accomplissant un travail suicidaire. Bref, la dépendance est si totale que l’activité est devenue une variante de la passivité et que , même là où l’on se fatigue à mort, quand on ne se tue pas tout simplement à la tâche , elle a pris la forme d’une activité pour rien, voire d’une inactivité Personne ne peut nier qu’Estragon et Vladimir, qui ne font absolument rien, sont représentatifs de millions d’hommes actifs.
Mais s’ils sont représentatifs, c’est seulement parce qu’en dépit de leur inactivité et de l’absurdité de leur existence, ils veulent « continuer » et n’ont aucune vocation à être de tragiques candidats au suicide. Ils sont aussi éloignés du pathos déclamatoire des désespérés de la littérature du XIX e siècle que de l’hystérie des personnages de Strindberg. Ils sont plus vrais : aussi peu pathétiques, mais aussi inconséquents que la moyenne des hommes de masse. Car ceux-ci ne mettent pas fin à leurs jours, même au milieu de l’absurdité la plus totale. Les plus nihilistes d’entre eux veulent encore vivre, ou du moins ne veulent pas « ne plus vivre » mais cette formule négative et volontariste est encore trop dogmatique : car, au fond, Estragon et Vladimir ne continuent à vivre que parce qu ’ils vivent absurdement, parce que la décision de ne pas continuer à vivre, la liberté d’en finir, est déjà paralysée par l’habitude de l’inactivité, c’est-à-dire par l’habitude de ne plus même agir. Ou en fin de compte, sans même invoquer ce mobile spécifique, ils continuent à vivre parce que, maintenant, ils sont là et que, pour la vie, rien d’autre ne compte en fait que d’être là.
C’est donc de cette sorte de « vie » de l’homme qui reste parce que, maintenant, il est là, que parle Beckett. Mais il en parle d’une façon qui diffère fondamentalement de toutes les descriptions antérieures du désespoir » {1} .
PREFACE Éclats de colère, éclats de monde
André Tosel
Professeur émérite de philosophie Université, CNRS, Nice


Quel chemin pourrait aujourd’hui nous conduire de la colère au courage et du courage à une création politique capable d’inverser la course à l’abîme de la mondialisation impulsée par le supercapitalisme liquide et réfléchie par cette conception totale du monde qu’est le néolibéralisme ? Telle est l’interrogation inquiète mais militante qui parcourt les sept volumes de ce qui fut un colloque aussi singulier qu’original, conçu et organisé par Marie-Claire Caloz-Tschopp et son équipe et qui s’est tenu à Lausanne du 23 au 25 avril 2010.
Ce colloque en quelque sorte a permis de réaliser une encyclopédie portative des savoirs de résistance à cette course à l’abîme ; et cette encyclopédie s’est constituée en mêlant et hybridant les uns par les autres les témoignages réfléchis d’acteurs sociaux, de victimes des violences de notre monde et les élaborations de spécialistes, chercheurs ou universitaires de tous ordres et de plusieurs nationalités. Ce mixte volontairement impur et fécond a évité tout académisme et a manifesté le simple fait que tous, militants, artistes, chercheurs, étudiants, assistances, étaient unis par la quête passionnée d’une citoyenneté politique, sociale, civile, en mesure de répondre aux défis du siècle. Il fut ainsi rappelé et montré que l’interrogation politique réellement démocratique passe par l’appropriation des savoirs et des expériences des uns et des autres sans avoir à se soumettre aux préjugés des prétendus compétents. Les compétences ne sont pas la propriété d’une caste auto-proclamée comme celle des économistes et des politiciens néolibéraux qui conduit le monde à l’abîme.
Pourquoi la colère qui est une passion ou un affect apparemment négatif a-t-elle été prise pour point de départ ? Pourquoi un tel début qui s’enracine dans une anthropologie des passions tristes ? Une raison majeure est à l’origine de ce choix. Elle réfère à notre situation d’époque, celle qui devient de plus en plus intolérable pour des multitudes d’hommes et de femmes. Notre monde est une manufacture de la tristesse ; il produit et multiplie des situations où la puissance d’agir et de penser de ces multitudes est toujours davantage entravée, limitée au-delà de ce qui est historiquement justifiable, voire souvent détruite. Notre monde –si la catégorie de monde renvoie à l’espace commun produit par les hommes pour être habitable par eux, pour abriter leur existence, pour permette leur manifestation finie-est devenu un non monde, comme l’avait compris Hannah Arendt en reformulant un thème heideggerien, en interrogeant notre être en commun non pas du point de vue d’une existence authentique définie comme être pour la mort mais depuis la perspective de la naissance et du commencement. Ils sont nombreux et nombreuses ces hommes et femmes qui ont des raisons de se mettre en colère.
Une simple recension de sens commun est éclairante. Elle inclut une pluralité de colères, celle de tous ceux et celles qui sont exclus du monde, rejetés dans la pauvreté ou l’exil, celle de tous ceux et celles qui doivent vivre comme un privilège le fait d’être exploités par un capital voué à la reproduction aveugle de son impératif d’accumulation de profit, celle de tous ceux et celles qui sont privés de ce triste privilège et se voient condamnés au rang infâme d’humains devenus superflus celle de toutes les acteurs réduits à être des « victimes » de la guerre globale, des racismes et des états de guerres endémiques qui montent les unes contre les autres des populations qui se divisent souvent en majorités prédatrices et minorités condamnées à des luttes identitaires sans issue véritable, celle de tous ceux et celles qui assistent sans pouvoir résister encore à la dé-démocratisation rampante des régimes occidentaux et à la négation sournoise des droits civils sociaux et civiques, celle de ceux et celles qui subissent dans l’impuissance la dévastation d’une terre qui transformée par l’ hubris du non monde sanctionne ces démesures en rendant de plus en plus problématiques et inégales les conditions de la reproduction de notre vie en ce non monde.
Aujourd’hui sont massives et diverses les raisons de la colère. Sonne, sans dimension théologique aucune, dans l’immanence du non monde, l’heure la colère, l’heure d’un Dies irae terrestre. Aujourd’hui est jour de colère, d’une colère qui saisit tous ceux et celles qui subissent, qui se sont engagés dans les résistances à cette catastrophe et qui tous deviennent des enragés parce qu’ils sont saisis par l’impuissance à inverser le cours des choses alors qu’il y a urgence à supprimer les maux qui affectent notre être en commun sur cette terre. Ceux-là ne peuvent pas

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