Antarès
110 pages
Français

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Description

Hiver 2012. Une terrible vague de froid s’installe sur l’Europe, puis sur le monde.
Les black-out électriques se multiplient dans les villes, obligeant les citadins à s’installer dans des abris de fortune. Les émeutes éclatent, les magasins sont pillés, et le monde s’installe peu à peu dans l’immobilisme : les entreprises ferment, les véhicules n’ont plus de carburant. Les campagnes sont désertées, et la population tente de survivre comme elle le peut. Internet s’éteint enfin, dernier témoin d’un univers vivant.
Dans ce monde de glace et de silence, Camille et Romain vivent en autarcie presque complète.
Le frère de Camille, Thomas, et sa famille, trouvent refuge chez eux. Pendant ce temps, Aïdan et Connor, leurs cousins, essaient de les rallier en faisant d’étranges rencontres sur leur route…
Leur unique lien est une étoile, Antarès, le cœur rouge de la constellation du Scorpion. Une étoile qui, dit-on, serait déjà morte depuis plusieurs siècles. Ils la suivront pourtant, morte ou pas, jusqu’à gagner leur survie – ou jusqu’à leur perte.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 septembre 2014
Nombre de lectures 678
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0026€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

ANTARÈS

Marie-Pierre BARDOU




© Éditions Hélène Jacob, 2013. Collection Littérature . Tous droits réservés.
ISBN : 979-10-91325-72-1
Préface

Il existe une étoile étrange, que l’on peut observer chaque nuit de mai à août. Le meilleur moment est donc en été, plein Sud. Le reste de l’année, il vous faut la guetter au petit matin, juste avant les premières lueurs de l’aube. Antarès est une étoile double de la Constellation du Scorpion. Une « supergéante rouge » située à quelques cinq cent vingt années-lumière de la Terre, et dont le diamètre est d’environ sept cents fois celui de notre Soleil. Les astrologues s’accordent sur le fait que cette étoile est en fin de vie.
Le jour où elle explosera, se transformant en supernova, elle deviendra alors un astre aussi lumineux que la pleine Lune pendant quelques semaines… Avant de s’éteindre, définitivement.
C’est l’une des quatre étoiles royales désignées par les Perses il y a de cela cinq mille ans, les « Gardiennes du Ciel » : Aldébaran, Antarès, Regulus et Formalhaut. Son nom arabe signifie « le cœur du scorpion ». En grec ancien, il se traduit par « rivale de Arès », le dieu de la guerre.
La rivale d’Arès ou de Mars – le dieu du combat, de l’affrontement et de la mort sur les champs de bataille – est peut-être déjà éteinte sans que les humains ne le sachent. Sa lumière nous atteint après presque six cents années de voyage… Celle que les Anciens ont considérée comme la Gardienne de la paix céleste, qui règne sur le Ciel en gage de réconciliation, est peut-être, ainsi, déjà morte depuis un demi-millénaire à nos yeux aveugles.
Nous percevons encore sa lumière d’un rouge pâle, et sa musique se mêle toujours à celle de ses sœurs sans que la symphonie du monde n’en soit altérée. Pour nous, elle est toujours là, à sa place, immuable et unique.
Mais son voyage jusqu’à nous est peut-être déjà terminé, et Arès règne en maître.
Prologue

À chaque coup de pelle, la terre résistait, inflexible. Ses épaules et ses bras douloureux encaissaient l’onde de choc qui se répercutait ensuite dans chaque fibre de son corps, comme autant de secousses telluriques.
Camille se redressa, hors d’haleine. La nuit allait bientôt tomber, et le ciel brumeux s’assombrissait de minute en minute. Elle observa le coton épais des nuages gris, lourds et opaques, qui se teintaient peu à peu de bleu marine. Il allait neiger cette nuit. Elle comptait là-dessus.
Le froid commençait à s’infiltrer sous son anorak, sous ses gants, son écharpe, son bonnet de laine et ses bottes fourrées ; ce froid mortel qu’elle ne ressentait plus depuis presque trois heures qu’elle creusait, gardé à distance par l’activité physique.
Elle transpirait ; si elle laissait le froid l’envahir maintenant, elle allait mourir.
Camille leva la pioche au-dessus de sa tête et la planta à nouveau, de toutes ses forces, dans la terre gelée et dure comme de la pierre. De ses mains jusqu’à ses talons, elle ressentit le choc et elle serra les dents.
Le trou, profond et de forme oblongue, était presque prêt.
La lune se levait derrière les nuages, et la température continuait à chuter. Seuls les échos de ses coups de pelle dérangeaient le silence austère, pur et sans âme, de cette nuit de glace. À l’horizon, les plaines enneigées se transformaient en lacs de glace noire, bouches béantes d’une nuit dont on ne voyait pas les étoiles.
Chapitre 1
Mardi 20 novembre 2012

Elle tendit la main vers la télécommande et suspendit son geste.
Il est quelle heure ?
Romain lui répondit sans même lever la tête, plongé dans son journal :
Vers vingt heures, je suppose.
Tu as vérifié les lumières, dans la maison ? Tout est éteint ?
Elle le vit hausser les épaules :
Évidemment.
Elle eut encore une hésitation. Le salon était dans une demi-pénombre ouatée, propice à une douce mélancolie. La source de lumière principale venait de la cheminée où un feu de bois lançait ses lueurs rouge et jaune, faisant danser des ombres magiques sur les murs. Une lampe solaire était posée sur la table près de laquelle Romain lisait, diffusant un halo blanc à peine suffisant pour la lecture. Elle soupira. Ça devrait aller ; rien d’autre n’était branché au système électrique de la maison : le congélateur et le frigo étaient mis hors service depuis des semaines, les aliments se conservaient parfaitement dans la remise derrière la cuisine. Le froid glacial qui s’était abattu sur toute l’Europe avait au moins cet avantage ! – le seul, d’ailleurs.
Camille reprit en main la télécommande, lovée comme une chatte dans le grand canapé d’angle. Elle respira profondément, envoya une prière muette au Ciel et appuya sur le bouton rouge.
L’écran s’anima. Elle retint son souffle, attendit une longue minute, puis inspira enfin : aucun fusible n’avait sauté. Elle monta le son.
« Depuis ce matin, vingt-cinq communes supplémentaires ont été placées en état d’urgence. Nous vous rappelons les mesures obligatoires qui ont été prises pour votre propre sécurité : vous ne devez vous déplacer qu’en cas d’extrême nécessité. Vous ne devez plus utiliser vos appareils électriques, mis à part les indispensables, et ce uniquement en alternance. Si vous m’écoutez en cet instant, aucun autre appareil électrique ne doit être en train de fonctionner, sous peine de surcharge. L’utilisation des lave-vaisselle, des lave-linge et sèche-linge est interdite jusqu’à nouvel ordre. La température de votre logement ne doit pas excéder dix-huit degrés si votre chauffage est à gaz ou électrique. Une dérogation pour les parents d’enfants de moins de trois ans est disponible, téléchargeable sur le site gouv.net. Passons maintenant aux nouvelles… »
La présentatrice avait débité son discours, le même qu’elle ânonnait depuis maintenant trois semaines, sans qu’aucun muscle ne semblât bouger sur son visage. Camille, comme presque tous les habitants de France et d’Europe, pouvait d’ailleurs le répéter de mémoire… Au beau visage de la fille, succéda une série d’images également familières : des villes blanches, des champs blancs, des routes blanches… et vides. Le monde était devenu un immense désert blanc.
Depuis trois semaines, une tempête s’était abattue sur l’Europe, s’étendant maintenant au reste du monde. Des températures descendant jusqu’à moins quinze degrés Celsius, du jamais vu pour des pays tempérés ! Et les prévisions météo n’étaient pas optimistes, certains prévoyant même une aggravation de la situation. EDF n’arrivait plus à suivre. Des mesures draconiennes avaient été prises au bout de trois jours de saturation des lignes, plongeant dans le froid et l’obscurité des milliers de foyers : l’interdiction d’utiliser certains appareils électriques, des horaires d’utilisation des lumières très stricts variant d’un département à l’autre, l’obligation de modérer le chauffage dans les habitations… Et depuis quinze jours, la police était devenue le chien de garde d’EDF, débarquant chez les particuliers pour vérifier qu’ils se conformaient bien aux directives. Pour les contrevenants, c’était pire qu’une amende ou une peine de prison : on leur coupait l’électricité et le gaz pendant une semaine. La mort assurée, s’insurgeaient les associations de défense des consommateurs. La survie de tout le monde, répondait le gouvernement. Les malheureux contrevenants étaient donc obligés de se réfugier ailleurs, famille ou amis… ou dans les camps de fortune mis en place par l’armée pour recueillir tous les sans-abri.
Mais ces mesures drastiques ne suffisaient pas, et tous les jours des communes perdaient leur accès au dieu électricité.
Camille regardait ces images de familles entières jetées sur les routes enneigées, ou se réfugiant dans d’immenses tentes dressées sur les places publiques dans lesquelles l’Armée du Salut, la Croix-Rouge et les Restos du Cœur officiaient comme ils le pouvaient. Des images d’Apocalypse, que Camille ingérait chaque soir comme pour se punir.
Éteins ça.
Elle sursauta. Romain s’était assis à côté d’elle et il lui prit la télécommande pour éteindre le poste. Il entoura ses épaules, l’attirant contre lui :
Tu te fais du mal pour rien, tu le sais.
Ça fiche tellement la trouille…
Je sais. Viens, il est temps d’aller au lit, non ?
La lampe solaire restait allumée toute la nuit, accrochée entre eux deux au-dessus du lit pour leur permettre de lire et servir de veilleuse. La chambre était aussi équipée d’une cheminée, et Camille lut pendant deux bonnes

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