BLIZZARD ETERNEL ( Extraits)
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Description

Au décès du patriarche, un des fils, disparu depuis trente ans, réclame sa part d'héritage. Une sale affaire resurgit, insidieuse, attise la haine dans la fratrie.
Elle, jeune femme de trente-cinq ans, aventurière, élégante de cœur, quelquefois cruelle, au passé accidenté , rencontre un homme. L.K, personnage incisif, rugueux et attachant, porteur du devenir d'une famille de hobereaux ambitieux.
Elle qui, de toute son existence ne cesse de combattre les compromissions, ne jure que par la transparence, la pureté du sentiment, l'intensité de la pleine lumière, plonge dans l'obscur.
Autour de ces deux-là, gravitent d'autres forts caractères, imbriqués dans le dénouement de secrets
destructeurs.
Un pays sauvage abrite leurs existences, les enracine corps et âme.

Informations

Publié par
Publié le 16 mars 2013
Nombre de lectures 51
Langue Français

Extrait

BLIZZARD ETERNEL ( extraits)
 Clara pousse l'épaisse porte de verre, dehors le vent hurle. Courbée sous la bourrasque, peu vêtue en cette fin d'été, elle cherche à se protéger, longe le mur. Elle sent bien qu'elle titube, ses jambes flageolantes la portent à peine. Elle a bien trop bu, à cause de ces deux idiots de touristes arrogants qui l'ont abordée et aussi parce qu'il faut bien qu'elle pense à autre chose qu'à lui. Se sachant tenir l'alcool, elle décide de les saouler à mort. De tournée en tournée, encouragés par Françoise, la patronne du bar, ils ont tous largement abusé. Le plus grand rapidement lâche prise, s'écroule en ronflant sur la banquette de moleskine. L'autre encaisse bien le choc, verre après verre, il commence à tenir des propos de plus en plus incohérents avant de s'endormir à son tour. Le chemin pour rejoindre la maison, l'oblige à longer la falaise sur à peu près cent mètres avant de bifurquer dans une venelle perpendiculaire à la côte. Avec précaution, elle marche sur le bord étroit du sentier, dans la faible clarté de la lune, obscurcie par de gros cumulus de tempête, sent sous ses pieds le gravier crisser, le grès friable ne lui inspire guère confiance. A revers, une voiture roulant au pas, s'approche. Juste le temps d’apercevoir la couleur vert anglais d’un cabriolet, l'image d'un homme les cheveux au vent, qui apparaît sous la lueur d'un réverbère. Un choc violent au niveau de la cuisse, la projette dans le vide.
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 Passé le portail orné de fleurs de fer, au détour du virage, le domaine disparaît, des larmes glissent sur des joues trop graciles. Comme de coutume il l'a touchée, à une différence, sa dignité l’emporte dans leur passion chaotique.
Une mésintelligence grossière, face à sa féminité à fleur de peau, la rapatrie sans délais dans un microcosme ange gardien, où elle s’ombrage de son agressivité destructrice. Un homme d’apparence dure qui l’abandonne souvent. Elle tente d’apaiser ses emportements, en vain. Malgré son acharnement à le fuir, ses angoisses se dissipent à son contact d'une façon incompréhensible, lui procurant une sérénité rare, méconnue dans son enfance : auguste personnage. Inlassablement, elle sonde ce sens bienfaiteur qui l’enrobe d'une étrange douceur, quand elle passe le portail du Manoir, sans en contracter quelque explication rationnelle. Un anthropoïde terrorisant les trois quarts de son entourage, tant ses humeurs sont des bourrasques légendaires. Quiconque ose aborder Kensingthon se hasarde à la perspective d'un animal pris dans sa fulmination, un art de contorsion à l’obstacle s’avère nécessaire, indispensable à un repli de survie. A quelle géométrie, où souplesse se vouer, comment déverrouiller le loquet de la malédiction ? Découragé, certains jours, il assigne congé, vocifère dans l'air irrespirable d'une morne journée, la rabroue, malhabile, invectivant son destin ! Henri bougonne sans raison apparente, lutte à son propre drame, tisse le tableau d'un voile opaque, qui s’étire et plonge le lieu dans une pâleur crépusculaire. Un coup de gueule dans la cour, le bruit sourd de caisses renversées dans le lointain, à la lisière du bois, la silhouette courbée s’échappe, solitaire, hostile au genre humain. L-K vient de dépasser la ligne, le geste trop fort, les nerfs ont pris le dessus. Un concentré d’énergie d'une rare densité, enveloppe le Manoir d'une atmosphère confinée, irrespirable, plombant chaque recoin, en une image figée dans l’éternité.
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 Les visites présidentielles, la bataille pour la centrale, où CRS aux trousses, les manifestants, la peur au ventre, luttent, courent sous les coups de matraque, dans l'odeur âcre des grenades lacrymogènes, avec la sensation d'exister, le sentiment de résistance chevillé au corps. -Hors de question de capituler ! Rapidement elle acquiert une bonne connaissance du terrain, se forge une carapace. Contrainte de dérober de la nourriture pour garder un peu de son maigre salaire, elle rode entre les rayons de l'hypermarché. Planquée sous son pull, la viande congelée lui tord les viscères, elle surmonte, qu'importe ! L'inflation grandissante augmente le prix des denrées, voler devient une nécessité, il faut tenir à tout prix, elle ne retournera pas en arrière. Dans ce marasme économique, elle enchaîne des petits boulots, s'engueule avec ses patrons, se fait virer. Arrêtée à plusieurs reprises par des patrouilles de nuit, mineure solitaire errant dans la nuit pluvieuse, elle côtoie leurs univers. Plusieurs fois en garde à vue, elle sympathise avec des flics, moins hermétiques à l’époque. Après une sortie de bar plus bruyante que d'habitude, salement éméchée, elle termine en cellule, maugrée des insultes. Présentée au juge des mineurs, elle n'en mène pas large. Un ami lui a donné un conseil. - « Imagine le tout nu sur les chiottes. » L'homme l'impressionne. Il est très fort, imposant, elle le voit comme un sumo, elle esquisse un petit sourire.
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 Durant de longues années, elle évite tout contact parental. L'alcool l’escorte en parfait amant, lors de soirées très arrosées, servant d’exutoire. Ces soirs-là, pour parachever la brûlure, elle ratisse large les quartiers du port, solitaire, de temps à autre
chaperonnée. Une poignée de mégères narquoises, le nez à la fenêtre, cachées derrière leurs rideaux en faux crochet, toise ce brin de fille. -Qu' elles aillent au diable, ces langues de vipères ! À vingt ans, la vie devant soi se déplie en aire de jeux, où se distraire participe à la montée des marches, le tapis rouge en moins, ce sera pour plus tard. Écumer les pubs enfumés, les bars malfamés lui va à merveille. Elle y côtoie des oiseaux de nuit au langage raffiné, où d’intrigantes scènes ponctuées d’intermèdes cocasses, dignes de vieux films noirs, rythment un microcosme en marge. Elle trouve sa famille, un genre humain tout cabossé, comme elle. Au fil du temps la lassitude la gagne, épuisée, à l'aube, elle renoue avec son lit. -Que faire d’autre ? Une répétition de week-ends, telles de véritables épopées, où à l’avance ne s’anticipent pas les signes précurseurs d’authentiques rencontres, en dépit des risques encourus. Le sac en bandoulière, des bottines aux pieds, Clara arpente le macadam, respire le dehors, telle une nomade. -Salut la belle, grande virée ce soir. Du voyage ? -Du voyage ! -Rendez-vous à huit heures, au Zinc du père Bombé. À ce soir. À l'arrière de la berline, l'équipée insolite longe le ruban d’asphalte à l’aventure, tissant un parchemin d’existence. Des souvenirs précieux d’individus solidaires constituent une vraie cartographie de mémoire, aujourd'hui encore. Après d’interminables années d’errances, de boulots dérisoires et services en tout genre, elle décroche une fonction administrative dans un Office de tourisme. Un salaire suffisant à la location d'un studio et à bâtir un horizon, a priori plus serein. Arpenter les rues désertes la calme, dans le crépuscule, aux
alentours de six heures. Quotidiennement, elle entame ses marches, chargées de lieux insolites, rythme d’imprévus ses soirées, souvent peuplées de personnages hétéroclites et fascinants. Un réseau d’amitié solide se tisse. Une seule fois, deux types essayent d’abuser d'elle. Pendant un festival, elle ne se méfie pas, ils l’entraînent entre deux remorques de matériel, derrière la scène. Quand elle comprend, elle sort le petit cran d'arrêt qu'elle porte toujours sur elle, un cadeau de Jeff « pour éplucher les pommes ». Elle attaque le plus proche, lui entaille la cuisse, et d'un même élan porte une estafilade au cou du deuxième, s'enfuit dans la foule. L'alcool abolit la peur, mais maintenant enfermée dans sa voiture, elle tremble, trouve refuge chez son oncle ce soir-là. Au décès de son père, empêtrée dans une histoire mesquine, convenue, une relation constamment conflictuelle avec un bipède plus âgé, riche et cultivé, obsédé par ses orifices, genre gynécologue amateur, s’achève bruyamment dans un accident de voiture. Avec la somme laissée par son géniteur, elle enclenche ce qu'elle appelle « sa vitesse de libération »,
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 Une fois dans l'eau, elle nage en mouvements courts, rapides, évitant de s’engourdir, gagne au plus vite le grand rocher, s'y hisse et reprend sa respiration. Un exercice quotidien, drastique, qu'elle se fixe, qui contribue à retrouver une tonicité vitale, à renforcer sa carcasse. Là, juchée sur son caillou, la côte se révèle minuscule, les plages longilignes s’étendent d'un bout à l'autre, en forme d’éventail. Attirés par la forme énigmatique des roches, les nageurs solitaires y font
escale le temps d'une pause. Leurs sommets maquillés de guano, surtout par temps gris, leur donnent des airs envoûtant de repères de pirates. Les mouettes renfoncées dans les creux, à l’abri des vents dominants, l'air incrédule, scrutent ces curieux bipèdes d'un jour. Clara contemple l’écume blanche qui se brise en saccade sur leurs contours, une paix propice à la réflexion règne en maître. Les récits des vieux marins trouvent ici un ton sinistre, évoquant d'obscures histoires de naufrageurs. En écho le souffle étrange du vent atteste de leurs tristes entreprises. Jadis, quelques bandits allumaient des feux sur la grève, trompant les navires qui venaient se fracasser sur ces récifs. Ils massacraient les naufragés, s’emparaient de la cargaison. On décapitait ceux que l'on arrivait à confondre, l’extrême pauvreté de la population en menait toujours plus au crime. Quelques frissons la parcourent, la presse de rentrer, mais l'ambiance intemporelle de ce sanctuaire l'emporte, la renverse de sensations mêlées, troublée par la beauté originelle intacte, qui émane de cet îlot de fortune. Les yeux rivés sur la voûte bleu, les brisants qui s’écrasent, arriment le lieu à une côte perdue à l’infini.
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 À l'aube, Henri accoste Charles. -Ne l’approche plus, évite-la, ou je ne réponds pas de mes actes, elle est en dehors de nos histoires ! D'une allure droite, posée, son flegme habituel accroché aux pas, il se dirige à la cuisine, se sert un bol de café. La sonnerie du téléphone, retentit. -Allô ? Henri. C'est Denise, ta voisine. L-K et son mari, Jean Mellec, ne sont pas en bon terme, mais
Denise et Henri ont grandi ensemble. -Bonjour Denise. -Il y a deux types bizarres qui viennent de traverser ma prairie, ils vont chez toi. Elle raccroche. Kensingthon saisit un fusil à lunette dissimulé sur l’armoire familiale, près du cellier, à l'écart du râtelier des fusils de chasse. À pas de loup, il sort, se poste en embuscade dans un buis. De sa position, il visionne toute la façade. Des coups retentissent à la porte. Charles ouvre. Les deux hommes se jettent sur lui, le traînent sur le perron, le plaquent à terre. Charles n'est pas du genre à céder. Il se rebiffe, repousse l’un des agresseurs. Le plus jeune recule, sort un Magnum court. À peine l’arme levée, Henri lui loge une balle dans la tempe. Simultanément il recharge, s’apprête à mettre en joue, mais l'autre lâche prise, jure en espagnol et dégaine son arme. Faisant feu vers Henri, il bat en retraite, disparaît derrière la bâtisse. -Tu vas bien ? On appelle la police, Charles. -Trente ans pour t’entendre dire cette phrase ! Quelle ironie ! Pourquoi ne l’as-tu pas fait lors de l'accident ? L-K pose son fusil, le jauge. Des lèvres couvertes de salive blanche de son frère, sortent en postillons des fleuves de haine, éructe une horrifiante répugnance. Sur ses épaules, un fardeau l’habite d'une démesure qui fait peur. -Tu vas me le payer ! -S'il le faut ! On oublie la police, il y a d’autres solutions. Notre mère soupe chez sa sœur, Georges est absent, il est sorti. Fermes les portes, je m’occupe du corps. -Tu veux faire à ta manière, comme d’habitude !
-Ton type n'est pas là par hasard, tu le mets où ? Tu diras quoi aux flics ? -C'est un Mexicain ! Ils ont un contrat sur moi. S’ils m'ont trouvé, ils reviendront. Il me faut le pognon, et vite que je me tire d'ici. -Je m'en charge ! Va te coucher. Dépité, Charles empoigne une bouteille d'eau-de-vie, se verse un plein verre. Avant de monter, il regarde son aîné. -Aucune trahison dans la douceur de ce breuvage, à ta santé, mon frère. Henri, médusé le scrute, plus rien ne le touche. Il traîne le tueur jusqu'au hangar, le hisse dans son Land, attrape une couverture pour le dissimuler, vérifie les alentours. A grands pas, il contourne les bâtisses, s'assure de la fermeture des grilles du manoir, comme chaque soir. D’en bas, il aperçoit l'ombre de Charles à travers les rideaux, une bouteille à la main, occupé à ingurgiter tout son saoul. La tête baissée, il renonce, va se coucher. Demain, il fera jour. Dans la ferveur de leur discussion, ils ne se préoccupent pas du départ du Mexicain, le deuxième, qui s’éclipse à couvert. Surpris du coup de fusil, de sa précision, il appelle son patron, lui relate la scène. -Il y a eu un problème Don Pedre, une perte. Il me faut du matériel et des petites fournitures. La partie est plus difficile que prévue, il en profite pour faire tripler sa prime, en lui exposant un nouveau plan. -Vas voir notre ami, à Tanger. Il sera au courant et te remettra tout ce qu'il te faut. -Merci Don Pedre, vous ne serez pas déçu. -Il vaut mieux pour toi, il s'agit de mon fils. Au levé du jour, Henri enfile son imper, se chausse de ses bottes. Le Land file à travers la campagne, l'aube se lève doucement, le ciel se pare d'une multitude de traînées roses et bleues.
Il repense à sa discussion avec Jeff, à ses commentaires sur la scène entre Charles et Clara, la rage lui brûle le ventre. Il accélère, autant faire vite. De temps à autre, il lorgne le sac à l'arrière. Il se gare près d'une ancienne porcherie délabrée, repérée lors d'une battue, avance jusqu'à la fosse à lisier, ouvre la trappe de visite au-dessous de vieilles tôles effondrées, la déplace avec peine. Un chien aboie dans le lointain, il y a une ferme pas loin. Il vérifie les abords des bâtiments, ouvre la porte arrière, sort le Mexicain auquel est attachée une pierre, lâche le corps qui coule à pic dans un bouillonnement, plus rien. Seuls les premiers rayons de l'aube viennent miroiter sur lasurface du liquide lisse et noir. Il s'assure qu'il gît bien au fond, ne remonte pas, attend une dizaine de minutes, replace les tôles, lorgne une dernière fois les parages, s'éloigne. Le moteur au ralenti, il s'engage sur un sentier. À deux kilomètres environ, il bifurque dans une garenne, coupe le contact. Une clairière entourée de grottes, veille au milieu des bois. Son grand-père s'y cache de longs mois pendant la guerre avec d'autres maquisards. Un endroit de recueillement, où il lui relate souvent la folie meurtrière de ces années. Fasciné par le courage de ces gars, les mouvements de résistance, la libération place d’Italie, les gens heureux, Henri l'écoute évoquer cette sacrée tranche d’histoire, s'interroge sur la folie des hommes, leur acharnement à créer des guerres. -Ah, grand-père, tu me manques, on aurait refait le monde. Il pense aussi à Clara, il la sait plus intransigeante que lui, plus courageuse, plus proche de l'esprit qui hante ce lieu. Lui se permet quelques compromissions, elle reste droite, incapable de supporter tout ce qui marche au pas. Mais elle n'a rien à perdre, pas une famille à défendre. Nostalgique, il démarre. Le soleil pointe, éclaire l'aube sereine, le guide sur la départementale où il tourne en direction du
village le plus proche du domaine, à l’affût du moindre indice du deuxième tueur. La place déserte, est paisible. L-K contourne le calvaire. L’échappée de Charles si tôt aux aurores ne le rassure pas, bien au contraire. -Quelle idée absurde peut germer dans sa drôle de caboche, Il prend le pouls au bar tabac du petit bourg. Rien, même pas l'évocation des coups de feu d’hier soir. La journée lui paraît interminable. Il passe chez le notaire vers dix-huit heures. Au manoir, pas de Charles, le souper est silencieux, La nuit tombe, il n'arrive pas à se concentrer sur les documents de la succession. Il la sent en danger, n'y tenant plus, il monte dans le Land, prend la direction de la côte. Une intuition sourde le pousse à accélérer.
…................................................. Extraits de « Blizzard Eternel » disponible sur amazon ( Kindle), thebookedition (pdf et papier) : 234 pages.
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