L almanach des vertiges
115 pages
Français

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L'almanach des vertiges , livre ebook

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115 pages
Français

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Description


Empruntant avec brio au genre épistolaire du XVIIIe tout autant qu'au langage contemporain, entrelaçant époques et personnages, L'Almanach des vertiges questionne le sens et la fonction de la création artistique.




PRAGUE, automne 1787.



Casanova, parvenu au seuil de la vieillesse, éblouit les salons et commence l'édition de ses Mémoires. Au même instant, Mozart achève la création de Don Giovanni. Hanté par la mort et la désaffection des Viennois envers sa musique, il transforme l'opéra-bouffe en drame de la faute et de la rédemption. Casanova est ulcéré par cette vision noire du mythe de Don Juan.



PRAGUE, automne 2006, année Mozart.



Venue passer une semaine d'amour à Prague, Juliette est aussitôt délaissée par son nouvel amant, Franz. L'apaisement et la réconciliation avec elle-même lui viendront d'Angus, un curieux personnage qui semble si bien connaître les détails de l'affrontement entre Casanova et Mozart qu'on pourrait croire qu'il l'a vécu. L'anecdote de la rencontre de Casanova et Mozart a excité, depuis l'origine, l'imagination des historiens et des romanciers.









Septembre 2006. Juliette s'est offert une semaine d'amour avec son nouvel amant, Franz. Pour cette échappée, Franz a choisi Prague où l'on fête l'année Mozart : deux siècles plus tôt, le 29 octobre 1787, y fut créé Don Giovanni. Franz a une passion pour Mozart. Hélas, il suffit d'une nuit praguoise pour que Juliette découvre que ce Franz intelligent et sensible ne veut plus la toucher. Pourquoi être obligé de faire l'amour ? demande-t-il. Ça gâcherait tout entre nous.



Au matin suivant, déboussolée, Juliette sent peser sur elle le regard insistant d'un homme plus tout jeune. Elle en est amusée, n'y reste pas insensible. Le hasard gouvernant parfois les destins, elle retrouve cet admirateur dans l'un des beaux cafés de Prague : il se nomme Angus Farel et, comme tout le monde, il se trouve à Prague en cet automne à cause de Mozart. Antiquaire à sa façon, il possède quelques souvenirs de ce riche mois d'octobre 1787 avec lesquels il compte faire quelques bonnes affaires...



La nuit suivante, Juliette fuit le lit où dort Franz et va frapper à la porte d'Angus. Il l'accueille sans grand étonnement, mais avec gentillesse et attention. Elle se sent en confiance, découvre l'antre étrange de son admirateur. Une sorte d'atelier où règne une grande malle regorgeant de peintures, de lettres manuscrites, de placards et d'ouvrages anciens, tout un fatras qu'Angus appelle son " Almanach ".



Dans les jours qui suivent, une étrange relation se noue entre eux. Elle lui confie son désarroi et sa colère face au comportement de Franz. En réponse, Angus sort des portraits et une longue correspondance de son Almanach. Il raconte les intrigues qui entourèrent Mozart tandis qu'il écrivait difficilement la fin de Don Giovanni. C'était qu'était présent à Prague, ce même automne, celui que toute la bonne société prenait pour le modèle de Don Juan : Giacomo Casanova de Seingalt.



Deux belles femmes, la comtesse Pachta et la baronne de Balt-Farousse, ancienne amante de Casanova, poussent à la rencontre des deux hommes. Une rencontre qui tourne aussitôt au combat.



Hanté par l'inéluctable pouvoir de la mort (il mourra trois ans plus tard), en quête de la puissance mystique de la musique, Mozart considère le libertinage comme le nœud dramatique et érotique qui assemble désir et faute. Don Giovanni sera donc l'expérience de la faute, comme celle de la délivrance spirituelle. Mais à sa manière : avec le rire, la légèreté de la grâce autant que la violence du drame.



Casanova, atteignant alors la soixantaine, en est outré. Pour lui qui quêta sans répit la beauté, en libre individu, sans autre faute que d'assumer la puissance de la séduction, ce Don Giovanni tombe comme une condamnation.



Prise au charme de son conteur, Juliette n'est pas sans douter. Angus livre-t-il la vérité ou suit-il la danse de son imagination ? D'où tient-il les lettres et les portraits de son Almanach ? S'agit-il de reliques véritables ou du fruit de ses talents de faussaire ?



Qu'importe, elle aime l'entendre. Et elle aime le regard qu'il porte sur elle. Elle lui demande de faire son portrait tandis qu'il lui fait écouter Mozart, bien sûr, et lui raconte Casanova. Un érotisme évident enveloppe leurs rencontres, qui apaise et réconforte Juliette. En faisant dans le regard d'Angus l'expérience du Don Giovanni, elle panse la blessure ouverte par son incapable amant. Elle découvre ce qu'au fond elle était venue chercher dans ce voyage en espérant l'amour : sa place et son estime de soi dans le fourmillement chaotique du regard des hommes.



Et c'est peut-être cela le pouvoir de l'art, qui nous fait écouter aujourd'hui encore la musique de Mozart comme si elle pouvait nous apprendre à vivre.










Informations

Publié par
Date de parution 13 juin 2013
Nombre de lectures 29
EAN13 9782221138908
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

DU MÊME AUTEUR
 
La Falaise , roman, Bernard Barrault, 1987.
L’Orage des chiens , nouvelles, Bernard Barrault, 1987.
La Peau de l’autre , roman, Bernard Barrault, 1989.
Bâtards , roman, Bernard Barrault, 1991 (Villa Médicis, prix Léonard-de-Vinci).
De beaux jours pour aimer , roman, Flammarion, 1994.
Le Galop de l’ange , roman, Robert Laffont, 1997 (Prix Jean-d’Heurs du roman historique).
Le Valet de peinture , roman, Robert Laffont, 2004.
 
Sous le pseudonyme de A.B. Daniel
Trilogie Incas , avec Antoine Audouard et Bertrand Houette, romans, XO, 2001.
T. 1 : La Princesse du soleil ,
T. 2 : L’Or de Cuzco ,
T. 3 : La Lumière du Machu Picchu .
Reine de Palmyre , romans, XO, 2005
T. 1 : La Danse des dieux .
T. 2 : Les Chaînes d’or .
Les Roses noires , roman, XO, 2007.
 
Essais et collaborations
Soigner l’autre , Emmanuel Hirsch, Belfond, 1998.
La vie est une maladie sexuellement transmissible et constamment mortelle , Willy Rozenbaum, Stock, 1999.
La Petite Morale à l’école , avec Michel Jeury, Robert Laffont, 2001.
 
Traductions de l’anglais
Le Regard de l’antilope , Gregory James, Robert Laffont, 1996.
Vivre à Hébron , June Leavitt, Robert Laffont, 1998.
Jean-Daniel Baltassat
L’ALMANACH DES VERTIGES
Premier mouvement : Don Giovanni
Roman
« Cette œuvre est protégée par le droit d’auteur et strictement réservée à l’usage privé du client. Toute reproduction ou diffusion au profit de tiers, à titre gratuit ou onéreux, de tout ou partie de cette œuvre, est strictement interdite et constitue une contrefaçon prévue par les articles L 335-2 et suivants du Code de la Propriété Intellectuelle. L’éditeur se réserve le droit de poursuivre toute atteinte à ses droits de propriété intellectuelle devant les juridictions civiles ou pénales. »
© Éditions Robert Laffont, S.A., Paris, 2009
En couverture : © Beaubelle et Oxygen64/Fotolia.com
EAN 978-2-221-13890-8
Ce livre a été numérisé avec le soutien du CNL.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
Pour Bernard et Thérèse Baltassat, por fin
« Je crois fondamentalement qu’il y a dans le réel moins de matérialité qu’il ne semble et plus de réalité dans l’imaginaire qu’on ne croit. Le réel est pris en sandwich entre deux imaginaires : le souvenir et l’imagination. Quant à la réalité humaine, elle n’est ni le réel ni l’imaginaire, mais l’un dans l’autre. »
Edgar Morin, Débats et Combats
1
Un couple comme un autre

Cela pourrait commencer à Prague un jour de fin septembre en l’an 2006 aussi bien que de l’an 1787, l’une ou l’autre étant l’année de Wolfgang Amadeus Mozart, la première ayant conduit Angus Farel, taille moyenne et apparence de la soixantaine, à louer pour l’automne un logement modeste tout près de l’église Saint-Castullus, dans le quartier Josefov qui fut et qui est toujours le quartier juif.
Il est à peine plus de neuf heures du matin. Le soleil se maintient dans la tendresse de l’été de Bohême. Agrippés aux murs qui surplombent la cour de l’hôtel Faroussi, encavée entre les immeubles voisins à la manière d’un patio, des angelots lancent des ombres immobiles sous leurs ailes de terre cuite. Depuis ses fenêtres notre Angus en possède une vue imprenable. Au fil des jours, en homme gourmand de l’univers, il a pris l’habitude d’y jeter un coup d’œil.
Jusqu’à ce matin, ce fut sans surprise : toujours les mêmes poignées de touristes y achevant leur petit déjeuner. Les visages et les détails des apparences varient à peine au gré des provenances, la plupart du temps Amérique du Nord, Allemagne, Japon. Quelques Français, Italiens ou Espagnols, compensant par la voix et les gesticulations leur handicap du nombre. Tous lunettes de soleil sur le nez, s’élançant dès potron-minet dans la course à l’exotisme local. Tenues adéquates de rigueur, colorées, légères, coûteuses, le guide de la ville entre assiettes et tasses, rires de l’impatience.
Sauf ces deux-là qui attirent aujourd’hui son attention.
À première vue un couple comme un autre. Homme jeune, femme jeune. L’homme, on ne le voit que de dos, mais la femme lui fait face.
Ils ne s’adressent pas la parole. Pas de rires, pas de gesticulations. Des corps désœuvrés. C’est à peine si leurs yeux se croisent. Comme les autres, ils ont déposé un plan de Prague entre les reliefs de leur continental breakfast épars sur la nappe bleue qui recouvre le guéridon. Ils n’y touchent pas. Ni elle ni lui.
Angus, va savoir pourquoi, s’en intrigue. Retient le réflexe qui veut, d’ordinaire, qu’après sa petite inspection il retourne à ses lectures, griffonnages ou songeries de paresse, sa manière à lui d’étoffer son almanach.
Soudain la jeune femme s’étire. La tête relevée, le bras droit jeté en arrière, le visage dans le soleil du menton aux cheveux qu’elle a très noirs. À peine un sourire sur les lèvres. Ou on est trop loin pour le deviner. Quoique sa poitrine tendue sous la chemise d’homme qu’elle porte, on la devine parfaitement.
Et sans doute à cet instant, elle aussi, derrière ses lunettes de soleil, nous découvre à son tour. Elle réprime un petit mouvement de surprise. Choisit cependant de demeurer ainsi, dans cette posture étirée qui vous fait songer illico à une posture de femme dans un lit, à l’appui des oreillers, dans le délassement d’un corps satisfait.
Du moins, notre Angus y songe-t-il. La curiosité pour cette inconnue d’un coup plus aiguisée. Se gavant de cette image qu’elle lui offre, sachant qu’il va pouvoir la conserver sur sa rétine pour quelque temps.
Celui qui brise le tableau, c’est lui. L’homme, le compagnon de voyage, l’époux, l’amant, la passade, va savoir quoi ? Il se lève. Grand, la trentaine, minceur d’adolescent, tee-shirt sur pantalon large à grosses poches pendantes, les cheveux en vagues soignées jusque sur les épaules. On imagine son visage fin et long, sans traits nets ni marques de soucis.
Il s’écarte du guéridon. En apparence sans un mot pour elle qui, derrière ses lunettes noires, le regarde s’éloigner, ne change rien à sa posture, toujours dans cet étirement qui n’offre soudain plus rien d’intime.
Le Va-savoir-quoi, on le remarque, se dirige vers la rue et non vers les chambres. D’un pas léger, quasi aérien, comme s’il ne pesait pas plus qu’une soucoupe volante. Et tout aussi prompt qu’un ovni à disparaître derrière la porte vitrée de l’hôtel.
La jeune inconnue n’en semble pas déconcertée. Une temporaire séparation plus convenue qu’il n’y paraît, songe notre Angus qui la voit abandonner sa pose d’alanguie, basculer son buste en avant. Ses cheveux de jais masquent maintenant son visage. S’il y a une émotion à y découvrir, on ne le saura pas.
Elle esquisse un mouvement de la main vers le guide de Prague. Va-t-elle suivre le Va-savoir-quoi ?
Non. Elle ôte ses lunettes noires, repousse sa chevelure écran, en libère son front et ses tempes. Et, surprise, surprise, lève son visage vers le curieux de la fenêtre, comme pour s’assurer qu’il a bien vu la scène.
Deux, trois, une poignée de secondes. Comme ça, les yeux dans les yeux. D’assez loin, bien sûr, mais pas assez pour que cela empêche d’y lire ce qu’on nous offre.
Voilà notre Angus dans l’embarras. Un peu de discrétion ne nuirait pas. Il hésite à se détourner. Ne le fait pas. Ce visage de l’inconnue lui fait oublier la politesse. Un visage qu’on a déjà vu dans les plâtres peints de Mantegna. Une détresse belle à voir.
Au bout du compte c’est lui, l’Angus inquisiteur, qui fait un signe, un bref salut de la main, un zeste de sourire. Complice, à la manière d’un vieux bonhomme qui en a vu d’autres.
Là-bas, elle ne bouge pas.
On a un doute. Peut-être qu’elle ne nous voit pas ? Qu’elle est tout entière dans ses songeries, ses affaires avec le Va-savoir-quoi ?
On se résout à s’écarter de la fenêtre, à revenir au fatras de la table de travail, aux griffonnages, dessins et aquarelles, aux paquets de lettres précieuses, rares et coûteuses, notre vade-mecum pour ce séjour d’automne à Prague et qui devraient être rangées

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