Les Roses sauvages du maquis
179 pages
Français

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Les Roses sauvages du maquis , livre ebook

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Description

Alors que la Seconde Guerre mondiale est terminée, Vincent, jeune maquisard et horticulteur, trouve sur son chemin de retour une boîte en métal enfouie dans la terre : elle contient de l'or et un bijou symbolique juif. Durant plusieurs années, il tente de retrouver celle qui a possédé ce bijou, tout en élevant sa fille et en désirant devenir un rosiériste reconnu.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 26
EAN13 9782812933844
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0071€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Martine Pilate



Les Roses sauvages du maquis

















En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage sans autorisation de l’éditeur ou du Centre français d’exploitation du droit de copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris.

© De Borée , 2017
© Centre France Livres SAS, 2016
45, rue du Clos-Four - 63056 Clermont-Ferrand cedex 2







I.




L’obscurité envahissait peu à peu la forêt. Cette longue journée de début d’été 1944 s’achevait. Les arbres prenaient des allures de géants menaçants derrière lesquels pouvait se dissimuler l’ennemi. Valentin avançait à pas mesurés, tendant l’oreille au moindre bruit. Le chien sur ses talons. À plusieurs reprises, il avait tenté de le repousser. Tout aussi attentif que lui, le chien n’avait eu cure de ses gesticulations et s’imposait dans ses pas.
Le jeune homme s’immobilisa. Un froissement de feuilles provenait d’un bosquet sur sa droite. Il jeta un œil inquiet sur l’animal, craignant une réaction qui trahirait leur présence. Mais celui-ci ne bougea pas et se contenta de lever son regard vers lui. Valentin épaula son fusil en direction du bruissement. Un hérisson pointa son nez fureteur hors des branchages. Le jeune homme soupira. Il redoutait ces échauffourées où, seule, la mort de l’autre lui assurait sa survie. Il examina les alentours. Tranquillisé, il remit son arme en bandoulière.
« Tu as de la chance d’être loin de tout, sinon j’en connais qui n’hésiteraient pas à te faire finir à la braise », se prit-il à penser tandis que le petit mammifère poursuivait son chemin sans crainte.
La peur et la révolte ne le quittaient pas. Le risque était toujours présent. La victoire semblait pourtant proche depuis que les forces alliées, débarquées en Normandie, progressaient sur le territoire français. Cependant, combien de pertes humaines la hargne et la vindicte allemandes allaient-elles causer encore ? Les nazis traquaient les maquisards, les torturaient, les massacraient. Tout comme ils venaient de le faire au mas de Pallières, un point de rencontre, où, la veille, il n’avait trouvé que trois corps mutilés par le feu d’une artillerie lourde. L’examen rapide des alentours l’incita à penser que le drame avait dû se dérouler deux ou trois jours auparavant.
Le seul survivant était ce chien qui avait gémi à son approche pour l’alerter de sa présence. Il l’avait découvert dissimulé sous un amas de fagots de sarments de vigne, l’épaule sanguinolente. Une plaie plus spectaculaire que profonde : un pan de peau déchiré qui avait dû saigner abondamment maculant son pelage. L’animal blessé s’était laissé soigner sans rechigner, s’abandonnant aux mains de l’homme. Une ou deux fois, il avait relevé la tête pour exprimer sa douleur, mais n’avait émis aucun grognement.
Après un bref repos, le jeune maquisard envisagea de poursuivre son chemin. Le chien qui ne l’avait pas quitté des yeux se leva péniblement et entreprit de lui emboîter le pas. Il claudiquait sous les élancements que lui causait la marche, mais il s’efforçait de suivre.
– Je ne peux pas te prendre avec moi, surtout dans ton état. Reste là à te retaper !
Devant ce mélange étonnant de volonté et de soumission qu’il décelait dans le regard de ce compagnon improvisé, il avait renoncé à l’éloigner de lui. Il n’était pas bien grand et ne pesait pas lourd. Il réfléchit un instant puis l’installa dans son havresac aux trois quarts vide. Dans ce monde de barbarie où les sentiments en demi-teinte n’existaient plus, où les hommes l’avaient meurtri, il lui avait fait confiance et s’en était remis à lui. Il ne pouvait pas l’abandonner.
Finalement, il appréciait la présence du « Chien », comme il l’appelait puisque l’animal, qui s’était rapidement rétabli, semblait ne vouloir répondre qu’à cette dénomination. De toute façon, il n’avait pas l’intention de l’adopter. Chemin faisant, il trouverait bien un fermier pour le garder auprès de lui.

Il avait pris conscience que son existence allait basculer quand, en février 1943, Pierre Laval, après avoir temporisé, avait fini par céder au recrutement imposé par Fritz Sauckel, « le négrier de l’Europe », pour pallier le manque de soldats allemands envoyés massivement sur le front de l’Est où la situation du Reich ne cessait de se dégrader. Le chef du gouvernement pétainiste avait alors instauré le service obligatoire du travail qui allait devenir le STO.
Pendant quelques mois, il avait réussi à se faire oublier des autorités locales peu enclines à coopérer avec l’ennemi. Mais il avait dû se résoudre à quitter les siens à l’hiver 1943, lorsque les groupes Brandebourg, formés par de jeunes collaborateurs français qui opéraient tantôt sous l’uniforme allemand, tantôt en civil au côté de la Gestapo, avaient intensifié la traque aux réfractaires. Il avait alors compris qu’il ne tarderait pas à devoir venir gonfler les rangs des ouvriers contraints de partir travailler en Allemagne. L’idée de servir l’envahisseur et de s’éloigner des siens le répugnait. À cette époque, il était encore Vincent, ce prénom qui lui avait été donné à sa naissance.
Il avait été approché discrètement par un certain Roger qui se déclarait étudiant en journalisme. Il l’avait croisé à plusieurs reprises lorsqu’il allait livrer l’épicier de Cuers, cette bourgade provençale colorée de la vallée du Gapeau où vivaient ses parents. Bien que méfiant, l’homme lui avait d’emblée paru sympathique. Ils avaient fini par échanger quelques mots d’abord sibyllins puis plus cordiaux malgré l’habituelle réserve de Vincent. Jusqu’au jour où l’inconnu se fit plus précis.
– J’ai bien compris votre discrétion et les renseignements que j’ai pu avoir sur vous me confirment que j’ai raison.
À cette remarque, il resta médusé :
– Renseignements ? Qu’est-ce que vous voulez dire ?
Le soi-disant étudiant recherchait des hommes pour, lui avoua-t-il, réceptionner avec des maquisards des parachutages anglais qui, dans la perspective de la lutte finale, allaient s’intensifier. Alors que Vincent croyait avoir trouvé en lui un bon camarade, il s’aperçut qu’il n’était qu’un simple pion et ne put cacher sa déception.
– Ne vous méprenez pas ! Nous avons tous besoin les uns des autres, vous comme nous. La situation actuelle nous soude et nous apportera certainement l’amitié une fois la paix revenue. Pour l’instant, la priorité est de nous unir.
Une évidence qui balaya la contrariété de l’aveu.
– Je ne vous demande pas une réponse aujourd’hui même. Réfléchissez et parlez-en à vos proches en toute discrétion. Mais communiquez-la-moi rapidement. Les choses évoluent vite.
– Et si je dois vous contacter ?…
– Ne vous inquiétez pas ! C’est moi qui le ferai d’ici peu. Et soyez assuré que je respecterai votre décision même si je devais la regretter.
Ils s’étaient quittés sur ce que Vincent avait ressenti comme une dernière bravade. À grandes enjambées, il s’était rendu au domicile de ses parents, les Bourdelle. Il avait besoin de leurs conseils et il lui fallait prendre du recul avant de présenter l’évidence à Mariette, sa femme.

Lorsqu’en juin 1940 Paris était déclarée ville ouverte tandis que les Allemands franchissaient la Loire et que le gouvernement se déplaçait à Tours, les Français s’étaient retrouvés plongés dans l’hébétude de la défaite. Pour Pétain et Weygand, commandant en chef de l’armée française, l’effondrement du front de Somme marquait l’échec de la bataille de France et signifiait clairement que la guerre était perdue et que la survie du pays passait par un armistice.
Justin Bourdelle, le père de Vincent, qui avait vécu la Grande Guerre dans l’enfer des tranchées, avait pleuré à l’écoute de la déclaration radiophonique du Maréchal, le 16 juin 1940 : « C’est le cœur serré que je vous dis aujourd’hui qu’il faut cesser le combat. » Il savait trop bien ce q

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