L oeil de Samuel
87 pages
Français

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L'oeil de Samuel , livre ebook

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Description

Vie privée, vie publique, deux domaines également minés pour cet ancien partisan de Cromwell, régicide et puritain. La voie est étroite et sinueuse pour s'introduire et survivre au sein de la Cour de Charles II. D'un œil d'entomologiste Samuel Pepys découvre ses faiblesses et les expose sans jamais essayer de les minimiser. D'où l'impression qu'a le lecteur d'être un voyeur surtout lorsque ce sont ses obsessions sexuelles qu'il expose sans retenue.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 décembre 2011
Nombre de lectures 15
EAN13 9782296474734
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L’ŒIL DE SAMUEL


SEXE ET POUVOIR
SOUS LA RESTAURATION ANGLAISE


JOURNAL DE SAMUEL PEPYS
(1660 -- 1669)
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-56655-2
EAN : 9782296566552

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Nelly Mareine


L’ŒIL DE SAMUEL


SEXE ET POUVOIR
SOUS LA RESTAURATION ANGLAISE


JOURNAL DE SAMUEL PEPYS
(1660 - 1669)


L’Harmattan
INTRODUCTION
A l’école, je n’aimais pas l’histoire. Passe encore pour l’histoire de l’Égypte avec ses défilés de serviteurs en jupettes marchant de profil et portant des plateaux d’offrandes à leur défunt pharaon ou encore l’histoire de la Grèce avec ses éphèbes nus noirs sur le fond ocre de vases ventrus, mais ces personnages à barbe plus ou moins chenue, qu’ils soient de France, d’Angleterre ou d’Espagne, avec toutes ces batailles et toutes ces dates à retenir, non merci ! On avait du mal à croire que ces figures du passé eussent été faites de chair et de sang avec une famille, des voisins à détester, des collègues à jalouser ou à admirer.
Taine, historien philosophe, avait bien vu que l’histoire véritable n’apparaît que quand l’historien commence à mettre au jour, à travers les siècles passés, l’Homme vivant qui peine, en proie à des passions, prisonnier de ses coutumes, l’Homme avec sa voix, ses traits, ses gestes et ses habits, aussi distinct et complet que le quidam que l’on vient de croiser dans la rue. Or, voilà que, miraculeusement surgi de deux cents ans de ténèbres, un manuscrit est révélé au monde littéraire, qui nous restitue un tel homme.
Ce n’est pas un document historique à proprement parler ; c’est un spectacle où les acteurs sont des personnages qui ont fait l’histoire de la Révolution anglaise qui défile sous nos yeux. Le metteur en scène de ce spectacle, l’auteur du Journal de Samuel Pepys, est également acteur dans cette société de courtisans, parlementaires, petits employés et hommes de la mer. Qui plus est, sa fonction le place dans l’entourage immédiat du souverain dont il a l’oreille. C’est ainsi que, outre l’indéniable intérêt historique de ce manuscrit – cette période de presque dix ans couvre des événements tels que la Restauration de la Monarchie après l’épisode du Commonwealth, l’apparition de la Peste, le grand incendie de Londres – on est témoin de la vie quotidienne d’un « bourgeois » de Londres, avec ses intérêts, ses jugements sur ses collègues et surtout ses propres faiblesses. Tout cela est raconté sans détour, avec une surprenante candeur qui donne parfois au lecteur l’impression d’être un voyeur. Grâce à ce témoignage, l’Histoire prend véritablement vie. Malheureusement pour nous, sentant sa vue faiblir rapidement, il mit un terme à son œuvre en 1669. Il reste l’image d’un homme qui, bien qu’ayant vécu au 17 ème siècle, a tous les traits de nos contemporains, d’un homme comme vous et moi.
LE FABULEUX DESTIN D’UN MANUSCRIT
P our mesurer la chance que nous avons de pouvoir lire aujourd’hui le JOURNAL, il faut connaître le chemin tortueux qu’il a suivi pour nous parvenir. La première surprise vient du fait que le Journal a été écrit en code, la tachygraphie de Shelton. Les six volumes, reliés de cuir marron, comme tous les ouvrages de la bibliothèque de Samuel Pepys, furent déposés à la mort de l’auteur, selon sa volonté, à la bibliothèque du Magdalene College à Cambridge et enregistrés dans un catalogue. En mai 1728, un visiteur de l’Université se montra intéressé par ces volumes mais… il était pressé et ne voulait pas déranger le gardien de la bibliothèque. Il informa de sa trouvaille son ami John Byrom qui, lui aussi, était passionné d’écrits codés. Mais ce dernier ne donna pas suite. Samuel Pepys n’était pas entièrement inconnu au 18 ème siècle : sa collection de ballades parut en 1765 et sa relation de la fuite de Charles 1 er fut publiée en 1766. Mais il était loin de la célébrité. C’est alors qu’un jeune maître, George Neville, dont l’oncle connaissait un peu la sténographie, fut nommé à Magdalene College. Ils eurent la conviction que le travail de traduction serait facile et ils le confièrent à un jeune étudiant de 20 ans impécunieux et déjà père de famille. Pendant trois ans, John Smith se consacra à la traduction, produisant 9325 pages à partir des 3102 pages de l’original, y travaillant parfois plus de douze heures par jour. Ironie du sort, ils ne savaient pas que la clé du code se trouvait aussi à la bibliothèque du College. Il n’omit que quelques passages licencieux qu’il indiquait sur la page de gauche comme étant « obj », « objectionable » (choquant). Les mots grossiers tels que « bloody » apparaissent en abrégé sous la forme « b…y » par exemple et « y…d » pour « yard » qui représente le mot « pénis ». Pour cette tâche de trois ans, il ne reçut que 200 livres.
Mais ceci n’est que le début de l’odyssée du Journal. En effet, la traduction fut transmise à un autre membre de la famille Neville, Richard Neville qui devint Lord Braybrooke, lequel se fit son éditeur officiel et… bourreau. Il mutila l’œuvre, supprimant les du texte et réécrivant des passages entiers pour obtenir ce que son éditeur moderne a appelé un « travesti » de l’original. De plus, il mentionna à peine John Smith, lequel vivait misérablement d’une cure dans le Nord avec sa femme invalide. Ce n’est qu’en 1832 que le malheureux obtint sa propre paroisse avec un revenu décent.
L’œuvre de Braybrooke fut publiée en 1825 et suscita un grand intérêt. Une édition plus complète parut en 1848 et 1854, de laquelle le nom de John Smith avait disparu. Ce dernier mourut en 1870, sans avoir publié son « Histoire du Journal » qu’il disait avoir écrite. Comme le fait remarquer le critique George Sampson, John Smith est l’un des héros méconnus de la littérature anglaise.
Alors, nous n’aurions qu’une version mutilée du Journal ? Non. Après la mort de Braybrooke, un professeur au Magdalene College, Mynors Bright, entreprit une nouvelle traduction à partir de l’original, qui suscita des critiques hostiles pour avoir inclus des détails contraires à la bienséance. Seul, Robert Louis Stevenson (Dr Jekyll…) prit la défense de ce Journal qu’il compare à l’œuvre d’un Rousseau ou d’un Hazlitt, allant jusqu’à dire qu’un génie comme Montaigne pourrait lui envier son art de la description. De nombreuses rééditions se sont succédé depuis mais c’est seulement en 1976 qu’une nouvelle traduction fut publiée dans son intégralité, nous donnant le Journal tel que Samuel Pepys l’a écrit il y a 300 ans. Et dire que S.P. avait envisagé de le détruire avec d’autres documents plus personnels !
DES ANNEES FOLLES
S elon l’historien français Hippolyte Taine, la Restauration anglaise débuta par une véritable boucherie (sans jeu de mots…). Ceux qu’il appelle des « bulldogs » n’eurent aucune pitié pour leurs ennemis. Les Lords dirigèrent les procès des Républicains avec une cruauté et un excès de rancœur extraordinaires. Par exemple, pendant son procès, Sir Harry Vane fut flanqué du bourreau, de noir vêtu et une corde à la main ; on voulait lui donner un avant-goût de la mort. On le descendit du gibet encore vivant et il put voir ses entrailles jetées au feu, puis il fut écartelé et on lui arracha le cœur, qui battait encore pour le montrer à la populace. On sait que les corps déjà décomposés de Cromwell, Ireton et Bradshaw furent déterrés nuitamment et leurs têtes plantées sur des piques à Westminster Hall. Les dames assistaient à ces honteux spectacles et les courtisans composaient des chansons pour les célébrer.
En même temps que la vengeance aveugle, la débauche se répandit parmi les courtisans. L’auteur du Journal s’en inquiète maintes fois au cours des dix années pendant lesquelles il observe et rapporte les faits et gestes du cercle d’aristocrates qu’il approche parfois de très près.
En bon historien qu’il est, Taine analyse les causes de cette folie collective. L’origine en est, selon lui, le fanatisme puritain qui avait sévi pendant la période précédente. Pendant des années, l’imagination maladive des Anglais en proie à des terreurs religieuses avait détruit la vie des hommes. Finalement, tous s’étaient détournés des plaisirs, horrifiés à la découverte de leurs instincts naturels, enchaînés par les imprécations de l’Ancien Testament, n’écoutant que les menaces et le tonnerre d’un Dieu terrible. Le portrait qu’il fait du puritain typique est en tous points di

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