La  Garde d Isis
164 pages
Français

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Description

"Le mystère du règne de la pharaonne Hatchepsout... Ou comment Marie Yemer, se considérant comme sa digne héritière, va tenter de lui ressembler, n’hésitant pas à écraser quiconque qui oserait se mettre en travers de son chemin. Joseph Yolfa, bien malgré lui, va se trouver confronté à l’empire de cette femme, le conduisant dans de nouvelles aventures à vous couper le souffle. L’éternel combat entre le féminin sacré et le masculin arrogant, cette éternelle lutte de pouvoir qui va emmener notre héro à passer les plus terrifiantes nuits blanches de sa vie... Mais en finalité, qui s’en sort vainqueur, y a- t-il une réelle supériorité de tel ou tel genre ? Joseph Yolfa lui-même en a été à se poser cette question au cours de cette enquête, qui une fois de plus, l’a emmené au travers de pays paradisiaques tout en rencontrant des personnages exceptionnels. Une aventure mêlant secrets historiques et réalité contemporaine, un voyage dont personne ne sortira indemne."

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Informations

Publié par
Nombre de lectures 14
EAN13 9782374471150
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

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LA GARDE D’ISIS

Roman

 

 

 

 

Jean-Marc FAYOLLE

 

 

 

 

 

 

 

 

LA GARDE D’ISIS

Roman

 

 

Image279.PNG 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ISBN 978-2-37447-115-0

Dépot Légal Septembre 2016 - Imprimé en France

Erato-Editions -Tous droits réservés

Cette œuvre est protégée par le droit d’auteur et strictement réservée à l’usage privé du client. Toute reproduction ou diffusion au profit de tiers, à titre gratuit ou onéreux, de tout ou partie de cette œuvre, est strictement interdite et constitue une contrefaçon prévue par les articles L 335-2 et suivants du Code de la Propriété intellectuelle. L’éditeur se réserve le droit de poursuivre toute atteinte à ses droits de propriété intellectuelle devant les juridictions civiles ou pénales

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-1-
PROLOGUE

THEBES, EGYPTE, 1470 avant JC : Hatchepsout restait songeuse, dans sa chambre, en train de se faire coiffer par son esclave. Un sentiment de lassitude l’avait envahie depuis plusieurs jours et elle ne savait pas de quoi cela provenait. Elle avait pourtant tout pour être satisfaite. Son règne, en sa qualité de Vème pharaon de la XVIIIème dynastie, se déroulait sous les meilleurs auspices des dieux, la haute et la basse Egypte prospéraient, la crue du Nil était exceptionnelle, les greniers étaient pleins… Que pouvait donc ternir le soleil que les Dieux offraient chaque jour à la détentrice de la double-couronne ?....

 

Elle claqua des mains et demanda que l’on aille chercher son conseiller Senènmout. Ce dernier, ami d’enfance et amant de la reine, était le seul à pouvoir lire dans ses pensées et elle se remettait totalement à lui, corps et âme. Il était à l’opposé de son époux royal, Thoutmosis II, qui ne brillaient que par sa paresse, son goût pour les filles nubiennes et surtout, sa jalousie envers les pouvoirs de sa femme. Senènmout devait être sur le chantier du palais de la reine, de l’autre côté du Nil, en train de superviser la construction du plus bel édifice jamais construit jusqu’alors.
Ce futur palais semblait sortir de la falaise en étalant de grandes terrasses en escaliers qui magnifiaient la construction. Cet architecte, formé par le Grand Inéni, était béni des Dieux et Hatchepsout ne prenait aucune décision sans l’avoir consulté, il était devenu son ombre, sa tête pensante, son ami, son amant…. Et quel amant !

 

Elle sourit au souvenir de la dernière nuit passée avec lui et dut lutter pour chasser ces belles images de son esprit. Il fallait qu’elle ait une discussion sérieuse avec lui. La survie de son règne en dépendait. Elle ne savait pas exactement ce qu’elle ressentait, mais elle avait la conviction que quelque chose allait survenir, des évènements qui, si elle n’en prenait pas garde, pouvaient la perdre au bénéfice de son époux, qui n’attendait qu’un faux pas de la reine pour lui prendre le pouvoir.

 

Senènmout mit une heure pour rejoindre le palais royal et quand il entra dans la chambre de la reine, il la vit dans un tel état d’énervement qu’il préféra garder ses distances. Il fit une révérence respectueuse en s’avançant un peu :

– Ma douce reine, vous m’avez fait appeler. Que puis-je faire pour combler vos désirs ?

Hatchepsout le foudroya du regard et lui répondit :

– Cela fait une heure que je t’ai fait appeler ! Où étais-tu donc ? Crois-tu que tu peux te permettre de me faire patienter ? Je devrais te châtier pour cela !

Senènmout écoutait sans répondre, la tête baissée. Il connaissait par cœur sa reine et savait que, quand elle était confrontée à des craintes internes ou à des peurs, elle s’emportait et faisait montre d’une autorité excessive, avant de s’effondrer subitement. Il attendit qu’Hatcheptsout passe sa colère. Il ne fallut que peu de temps pour que la reine s’affala dans un de ses fauteuils en éclatant en sanglots. Senènmout était la seule personne devant laquelle elle pouvait se permettre de montrer ses failles, ses faiblesses, sa fragilité. Elle avait la possibilité de baisser la garde, de se laisser aller, sans risquer que quelqu’un n’en profite. Senènmout s’approcha doucement de la reine, s’assied à ses côtés et la prit doucement par les épaules. Elle se laissa enlacer, entourant de ses bras les épaules viriles de son conseiller, et pleura, pleura encore, de tout son saoul et de toutes ses forces. Ils restèrent ainsi de longues minutes, sans parler, profitant de ce moment d’intimité qu’ils n’avaient que trop rarement entre eux. Senènmout se serait tué pour sa reine, elle était sa seule raison de vivre, son oxygène. Hatchepsout le savait, et si elle en profitait parfois, son amour pour cet homme lui faisait rapidement revenir à des sentiments réels et non calculés. Senènmout s’écarta doucement de sa reine et lui demanda :

– Que se passe-t’il ma reine ? Qu’est ce qui vous met dans cet état ? Vous m’inquiétez, vous la fille des Dieux, la reine des deux pays, ma bien-aimée. Que puis-je faire pour alléger votre cœur pur ?

Hatchepsout reprit ses esprits et en allant s’installer devant son miroir doré, répondit :

– Mon fidèle Senènmout, il n’y a que toi qui peux me comprendre. Je suis lasse de devoir me battre au quotidien contre tous ces vautours qui m’entourent à la cour, ou encore ces prêtres qui n’ont jamais accepté qu’une simple femme puisse accéder au trône et se déclarer fille des Dieux, et mon frère….. ce félon de frère, qui est mon mari et que je suis obligée de supporter pour partager cette double-couronne qui me pèse si lourd…. Je n’en peux plus mon bien-aimé, je sens que je vais baisser les bras et m’exposer ainsi à la vindicte de tous ceux qui rêvent de me voir disparaitre.

 

Senènmout fut pris d’un tremblement de rage. Cette colère s’immisçait en lui à chaque fois qu’il côtoyait ou entendait le nom de Thoutmosis II, frère et mari d’Hatchepsout, et qui ne rêvait que de se débarrasser d’elle pour pouvoir régner seul en maître. Sa fonction de pharaon ne lui suffisait pas. La popularité d’Hatchepsout était telle qu’elle projetait une ombre sur cet homme sans caractère, manipulateur, fainéant et jaloux de surcroît. Senènmout avait souvent rêvé de lui transpercer le torse avec une flèche, tirée d’un endroit discret qui ne permettrait pas à la reine d’être tenue responsable de cet homicide. Mais Hatchepsout lui avait toujours formellement interdit, quitte à ce qu’elle soit elle-même en danger de mort. Elle disait que les Dieux avaient désiré cette situation et qu’elle devait s’y soumettre, si dure cette tâche était-elle. Il s’approcha de la reine et lui dit :

– Ma reine, il ne faut pas faillir, vos sujets comptent sur vous, les deux Egypte n’ont jamais été aussi prospères que sous votre règne. Essayez de tenir jusqu’à votre voyage dans le Pount. Vous allez être absente de cet enfer doré pendant plusieurs mois et vous pourrez enfin vous reposer.

Hatchepsout se retourna brusquement vers son amant et courut se réfugier dans ses bras en criant :

– Mais justement, Senènmout ! Mes ennemis auront tout loisir de fomenter derrière mon dos pendant mon absence. Comment vais-je retrouver le palais à mon retour ? Occupé par mon frère et ses félons de prêtres mysogines ? J’ai bien réfléchi Senènmout, je ne vais pas accompagner cette mission dans le Pount. Je vais rester ici afin de veiller à ce que les volontés de mon père soient exaucées, que jamais Thoutmosis ne s’empare du pouvoir seul, cela signifierait la perte de l’Egypte…

Senènmout était pris entre deux feux. Il brûlait d’envie d’hurler à la reine de rester au palais, afin de pouvoir la voir tous les jours, la protéger. D’un autre côté, la raison d’état s’imposait. Il fallait que la reine entreprenne ce voyage dans ce pays inconnu, au gré des dangers que représentaient ce voyage, car elle devait rencontrer les dirigeants de ce pays lointain. Il fallait sceller une alliance de paix, comme elle l’avait fait avec la Nubie. De plus, elle pourrait ramener des cadeaux pour les Dieux égyptiens, comme cette essence de myrrhe ou encore ces petits arbres dont l’odeur des fleurs envoutait tout le palais quand les commerçants arrivaient à en livrer. Ce fut la mort dans l’âme qu’il répondit à sa bien-aimée :

– Ma reine, ma douce, il faut que vous meniez cette mission. Les Dieux comptent sur vos offrandes, la population compte sur cette paix, les commerçants comptent sur cette ouverture de marché…. Ce voyage va, certes vous rendre absente pendant plusieurs mois et il est vrai aussi que le voyage est extrêmement dangereux, mais vous devez l’entreprendre et montrer à ce pays qui est le Pharaon, maître des deux Egypte et fille des Dieux du monde. En votre absence, nous saurons veiller à ce que votre pouvoir ne soit pas dissolu et à votre retour, la population sera tellement heureuse de vous revoir qu’une année entière de festivités ne suffira pas à apaiser sa joie !

 

Hatchepsout sourit à ce que venait de dire Senènmout. Cet homme avait le don de l’apaiser, de lui redonner courage et de requinquer ses forces quand elle pensait ne plus en avoir. Il avait d’autres dons bien sur, mais ceux-ci lui appartenaient à elle-seule, lors des nuits qu’ils passaient ensemble. Elle se reprit et répondit doucement à son amant :

– Tu as raison, mon bon ami. Va chercher mes plus fidèles conseillers et amène-les ici avant le dîner de ce soir. Je te laisse l’entière liberté de choisir les personnes qui seront à tes côtés pour défendre mes intérêts pendant mon absence. Je te nomme Intendant Général et personne, ni-même Thoutmosis II mon frère, ne pourra aller à l’encontre de tes décisions. Va, et presse-toi.

 

Une fois Senènmout partit, elle appela deux de ses esclaves pour la laver et la préparer. Elle avait encore une chose importante à faire, une chose vitale…. Elle pria pour que les Dieux l’accompagnent dans sa démarche et qu’ils lui donnent la force nécessaire pour mener à bien sa dernière manipulation, manipulation qui lui permettra d’être en sécurité pendant ce long voyage… Il lui fallait pour cela convoquer de toute urgence la belle Isset dans ses appartements, afin d’éviter toute fuite. Elle envoya un coursier la chercher et put enfin se prélasser sous les caresses connaisseuses de ses esclaves qui savaient comment la détendre dans sa toilette.

 

Isset arriva avant la tombée de la nuit. Quant elle fut introduite dans les appartements de la reine, elle se mit à genoux et le front posé au sol, attendit que le Pharaon daigne lui ordonner de se relever. Surtout ne pas la regarder dans les yeux, ne jamais parler sans son accord…. Isset se remémorait tous les conseils de son précepteur à l’époque où elle étudiait les écritures. Depuis, elle avait bien avancé dans sa carrière et après avoir été Scribe Publique, elle avait été promue Scribe du Trésor, en charge de l’inventaire de tous les greniers à blé du pays. Un travail incommensurable mais qui passionnait Isset.

La reine la fit se relever et vint près d’elle en lui prenant la main :

– Viens, entre ma belle Isset. N’ai pas peur, je ne vais pas te manger, voyons. Assied-toi et déguste avec moi une boisson fraiche…

Elle claqua des mains et une esclave magnifique, vêtue d’un seul pagne blanc laissant sa petite poitrine apparente, vint leur servir deux carafes de bière fraiche. Malgré l’heure avancée de l’après-midi, il faisait encore très chaud et Isset apprécia cet intermède. Hatchepsout observait à la volée la jeune scribe. Elle était de toute beauté et sous ses airs timides, on pouvait déceler une farouche volonté d’arriver à ses fins. La reine entreprit de briser ce moment de détente :

– Isset, comment te sens-tu dans tes fonctions de Scribe du Trésor ? Arrive-tu à gérer tous ces hommes qui, j’imagine, n’attendent qu’une erreur de ta part ?

Le jeune fille sourit et répondit :

– Oui ma reine, ce métier me plait vraiment ! Je ne vous serais jamais assez reconnaissante de m’avoir laissé ma chance. Certes, ce n’est pas toujours facile dans ce milieu masculin, mais j’arrive à me faire respecter et à imposer à ces rustres ma façon de voir les choses.

– Je n’en attendais pas moins de toi, Isset, répondit la reine. Et je dois remercier mon conseiller Senènmout de m’avoir convaincue de t’engager à ce poste. Et crois bien que je ne le regrette pas, tu as dépassé toutes mes espérances. Avec toi, les stocks nationaux ont plus que doublé, enfin je veux dire sur les rapports, bien sur. Tes prédécesseurs avaient la mauvaise habitude de minimiser ces stocks et de monnayer le reste. Aussi, et eut égard à la confiance que j’ai en toi et que tu as réussis à gagner, je veux te nommer Scribe Royale. Tu es la seule personne dans mon entourage qui en est digne et en qui j’ai entière confiance. Tu n’auras de comptes à rendre qu’à moi-même, et tu seras toujours à mes côtés. Qu’en penses-tu ?

Isset ne sut que bredouiller :

– Ma reine, je ne sais quoi répondre. C’est une responsabilité énorme et je ne sais pas si je suis digne de votre confiance…

– Laisse-moi en juger, répondit Hatchepsout. Ma décision est prise. Je vais faire porter cette nouvelle, ainsi que la nomination d’Intendant Général de Senènmout, par des hérauts à travers le pays. Je te laisse le choix de t’entourer des personnes que tu auras choisies. Mais attention tu devras répondre de chacune d’elles ! Allez, va, j’ai à faire.

Isset se leva, et à reculons en courbant la tête, quitta la chambre de la reine. Une fois la porte passée, elle ne put réprimer des larmes de joie et c’est le visage humide qu’elle quitta le palais pour aller rejoindre son amie Miatet avec qui elle vivait. Elles partageaient une petite maison en bordure du centre historique de Thèbes, et cela faisait plusieurs mois que ces deux jeunes filles défrayaient la chronique en s’affichant ensemble, ne cachant en rien leur amour mutuel. La réaction de son amie fut moins enthousiaste. Elles étaient déjà souvent séparées de par les fonctions d’Isset, et cette promotion risquait de ne rien arranger à cette situation. Isset sourit devant la réaction de son amie et en l’embrassant tendrement, lui chuchota à l’oreille :

– Tu es adorable ma Miatet…. Ne t’inquiète pas, jamais je ne te délaisserais. Au contraire, la reine me permet de m’entourer des personnes que je désire. Et devine à qui j’ai pensé en premier en entendant le mot « désir » ?....

Miatet éclata de rire et promit à Isset que jamais rien ne pourrait plus jamais les séparer, que leur amour était éternel et qu’elle était la femme la plus heureuse de ce pays.

Hatchepsout avait convoqué tout son gouvernement avant le dîner dans la grande salle de réunion du palais. Senènmout, assis dans l’assemblée, observa sa reine et remarqua qu’elle avait bien préparé sa réunion. Elle s’était habillée de façon solennelle afin de montrer à tout le monde qui commandait. Sa barbe postiche, la double-couronne sur la tête et le sceptre à la main, elle toisait du haut de son trône tous les hommes présents. Chacun restait la tête baissée et seul Thoutmosis II, assis à côté d’Hatcheptsout, avait l’air de s’ennuyer et on le sentait pressé de partir rejoindre la dernière nubienne trouvée qui devait l’attendre dans sa couche.

 

Hatchepsout prenait un malin plaisir à faire attendre ses ministres. Quand elle prit enfin la parole, tout le monde fut surpris par le ton employé par la reine. Même Thoutmosis, ne s’intéressant jamais aux problèmes de la vie du pays et assistant aux réunions en toute dilettante, devint attentif.

– Messieurs, vous n’êtes pas sans savoir que je vais me rendre dans deux semaines dans le pays de Pount afin d’y rencontrer mon homologue. Ce voyage revêt d’une importance capitale pour notre futur car nous pourrons développer notre commerce et surtout assurer une paix durable dans cette zone.
Il est évident que ce voyage m’éloignera de l’Egypte pendant plusieurs mois et je ne tiens pas à ce que ce pays soit livré à lui-même pendant ce laps de temps. Aussi, j’ai pris des décisions et je vais vous faire part de mes directives que chacun, je dis bien chacun, devra appliquer à la lettre sous peine d’être lourdement puni. Et ne croyez pas que je laisse mon pays sans surveillance, car tous les rênes vont être transférés à une seule et même personne, afin d’éviter tout malentendu.

A l’entente de ces mots, Thoutmosis II se redressa un peu en attendant que sa sœur et épouse royale le nomme à la tête de l’Egypte en son absence. Il tomba de haut quand il entendit la suite des propos de la reine :

– J’ai donc nommé mon conseiller Senènmout, ici présent, Intendant Général et c’est lui qui aura la lourde tâche de diriger le pays en mon absence. Il devra également me rendre compte, rien qu’à moi, de tout ce qui ce sera passé ici et au-dehors de mon palais, depuis le nord jusqu’aux confins du sud du pays. Il pourra s’appuyer sur tous les ministres en place afin de remplir sa mission et n’aura de compte à rendre à personne d’autre que moi.

Thoutmosis II bondit de sa chaise en s’écriant :

– C’est inadmissible, je ne suis pas d’accord. Tu ne peux pas laisser les rênes de notre pays à ce rustre, qui n’a même pas de sang royal dans les veines !

Les prêtres présents, tous à la solde de Thoutmosis, opinèrent du chef sans oser prendre la parole. Le frère de la reine continua :

– Je ne peux accepter cela. Pendant ton absence, c’est moi qui dirigerait et personne n’osera se mettre sur mon chemin, et ce jusqu’à ton retour ! Si tu reviens bien sur….

Hatchepsout avait prévu cette réaction et au lieu de se fâcher, comme toute l’assistance s’y attendait, elle sourit et répondit sur un ton calme, ferme et déterminé :

– Mon cher époux. Inutile de te fâcher et d’éructer. J’ai pris cette décision pour le bien de notre pays et à l’exception des prêtres que j’avais bannis et que tu as fais revenir pour les avoir à ta solde, aucun ministre ici présents ne saurait me contredire. N’est ce pas Messieurs ?

 

Personne n’osa braver la reine et les ministres restèrent ainsi, prostrés sur leur chaise, la tête baissée. Hatchepsout approuva de la tête et enchaîna :

– Tu vois mon cher, tout le monde est d’accord avec moi… D’ailleurs, j’ai également pris cette décision pour t’épargner tous les soucis du quotidien et ainsi tu pourras continuer à passer ton temps à la chasse ou dans des bras accueillants. Ceci étant dit, je conclus simplement en prévenant que toute personne qui irait à l’encontre de ces directives serait de suite punie de mort, que ce soit un ouvrier, un ministre, ou bien même un mari de Pharaon… Senènmout a reçu des consignes en ce sens et ne devra en aucun cas justifier les sanctions éventuelles qu’il aura à donner. Suis-je assez claire ?

 

Thoutmosis se leva brusquement et, suivi de ses prêtres, quitta la salle en jurant que cela ne se passerait pas comme ça. Après quelques secondes de silence, le doyen des scribes leva la main pour demander la parole. La reine lui fit signe qu’il lui était inutile de se lever.

– Mon brave Tokaret, reste assis, je te prie. Je te sais déjà gré d’avoir assisté à cette réunion. Je sais que tu es très fatigué et que la saison humide n’arrange pas les choses. Parle, mon brave.

Le vieillard, qui avait été Scribe Royal à l’époque de Thoutmosis Ier, le père d’Hatchepsout et de Thoutmosis II, était respecté par tous et quand il prenait la parole, ce qui était extrêmement rare, personne n’osait le contredire tant son savoir et son expérience étaient grands.

– Ma reine, merci de me laisser m’exprimer. Comme vous le savez tous, j’ai travaillé pour le grand Pharaon, votre père, et je me peux me vanter de savoir ce qu’il désirait, l’ayant moi-même retranscrit. Aussi, je voudrais préciser qu’il serait très fier de votre courage, ma reine, et que rien n’aurait pu le rendre plus heureux que de vous voir partir pour cette aventure. Mais il désirait aussi que vous dirigiez le pays, sans le laisser aux mains de personnes avides et incompétentes. Votre idée me parait donc séduisante, à savoir effectuer ce long voyage et continuer à diriger les deux Egypte, en déléguant cette dernière tâche à quelqu’un qui ne fera qu’appliquer vos ordres. Une seule question me taraude : Si vous laissez ici l’ensemble de vos ministres, je m’interroge sur la personne qui sera en charge de relater vos exploits. J’ajoute que je ne saurais vous accompagner, vu mon âge avancé… Et à l’exception d’une seule personne, je ne vois pas qui, en dehors du gouvernement, saurait assurer ce rôle.

Hatchepsout sourit à la question du vieil érudit. Sans le savoir, il l’emmenait exactement sur le sujet qu’elle voulait aborder. Elle reprit d’une voix forte :

– Je reconnais bien là ta perspicacité et ton sens de l’organisation, Tokaret. En effet, il est totalement exclu que le rôle de scribe soit dévolu à un prêtre à la solde de mon frère. Aussi, et sachant par avance que tu refuserais de m’accompagner pour des raisons de santé, j’ai nommé la jeune Isset Scribe Royale, et elle prend ses fonctions à partir de ce jour.

Les ministres restèrent bouche-bée et seul, Tokaret ne put s’empêcher de sourire. Il dit à Hatchepsout :

– Ma reine, je n’osais espérer meilleure personne pour vous accompagner. Isset est surdouée et je suis persuadé que cette mission sera relatée jusque dans ses moindres détails. De plus, c’est une organisatrice hors-pair, et ce voyage va pouvoir se dérouler sans encombre avec cette personne présente.

Un des ministres présents, le plus courageux, leva la main pour demander la parole :

– Ma reine, ne craignez-vous pas qu’avec ses mœurs bizarres, cette personne ne donne une mauvaise image de notre beau pays, image d’une harmonie humaine ?

Avant que la reine ne puisse répondre, Tokaret, avec une énergie inattendue pour son âge, bondit de sa chaise et hurla :

– Comment oses-tu, toi le petit scribouillard que j’ai eu à éduquer et qui ne sait même pas déchiffrer les exploits de nos aïeux sur les monuments ? Qui es-tu pour critiquer la jeune Isset ? C’est la personne la plus douée que j’ai eu dans ma classe ! Et quant à ses mœurs dissolues, comme tu le sous-entends, au moins, nous n’aurons pas le risque qu’un petit ministre engrosse une fille de nos hôtes, nous mettant dans une position délicate !

Hatchepsout buvait du petit lait… Elle dut intervenir afin de faire preuve d’autorité, mais elle remerciait au fond d’elle-même le vieux scribe.

– Allons Messieurs, suffit ! Tokaret, même si je partage votre avis sur Isset, je ne vous permets pas de perturber le fil de cette réunion. Quant à vous, cher Marout, ce n’est pas parce que vous êtes ministre de la justice que vous pouvez discuter mes choix. Cela suffit, je vous demande maintenant de vous mettre sous les ordres de l’Intendant Général afin qu’il vous informe sur ce qu’il attend de vous. Et je rappelle à tous que Senènmout parle en mon nom, ne l’oubliez jamais ! Allez !

Alors que tout le monde se levait, Tokaret s’approcha de Senènmout et lui dit :

– Mon cher ami, je te souhaite beaucoup de courage et surtout, beaucoup d’intuition car tu vas être confronté à bien des dangers.

Senènmout, qui avait cet homme en grande estime, répondit :

– Merci mon ami, j’en suis bien conscient. Mais sache que je m’inquiète plus pour la reine que pour moi….

En lui posant la main sur l’épaule, Tokaret chuchota :

– Ne t’inquiète pas, Intendant. Avec les personnes qui vont accompagner Hatchepsout, ce sont les hommes que je vais plaindre…. Crois-moi, pendant cette expédition, ils n’auront qu’à bien se tenir !

 

Les préparatifs de l’expédition avançaient à grand pas. Isset, assistée de Miatet, avait formé une équipe de choc. Les plus observateurs remarquèrent qu’elle n’était composée que de femmes. Et les unes plus belles que les autres…. Les marins et soldats qui participaient à cette aventure furent enviés à cause de la présence de ces jeunes filles…. On se battait pour servir sur un des trois navires et jamais une expédition n’avait provoqué un tel engouement. Pensez-donc, sur quatre-vingt dix personnes réparties sur trois navires, soixante quinze étaient des femmes…. Un paradis pour les volontaires, qui se transformera vite en enfer….

 

 

 

 

 

 

 

-2-
IMAGE DU BONHEUR

 

 

BOULOGNE-BILLANCOURT, 1987 : Joseph Yolfa et Cathy Scherp vivaient le parfait amour. Depuis leur mariage, tout leur souriait et Cathy ne regrettait pas d’avoir changé de vie pour être avec Joseph. Elle était maintenant responsable du département des secrets industriels de la régie nationale automobile. Quant à Joseph, il continuait à gérer de main de maître le service compétition de cette même régie, et ses voitures de course raflaient toutes les coupes sur les circuits d’endurance à travers le monde. Il était comblé, Cathy était une épouse dont rêvent tous les hommes, et la maman de Joseph, Nadège, qui s’était remariée le même jour que son fils (lire « Peur sur la croix ») vivait sur un nuage avec son nouvel époux, le ministre de l’intérieur Gilbert Micheler.

 

Lors d’un déjeuner dominical dans la maison de Nadège et Gilbert, alors que nos quatre tourtereaux profitaient du moment, le téléphone sonna et Gilbert se leva pour répondre. Nadège fit la grimace en disant :

– Qui peut donc nous appeler un dimanche à l’heure du déjeuner ? J’espère que ce n’est rien de grave…

Personne n’eut le temps de répondre pour rassurer Nadège car Gilbert revenait déjà, tout sourire aux lèvres. Il dit en reprenant sa place à table :

– Figurez-vous que c’était Pierre Gatonais, votre directeur mes enfants. Il m’a demandé s’il pouvait venir nous rejoindre après manger car il a une grande nouvelle à nous annoncer.

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