S. comme usine
156 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

S. comme usine , livre ebook

-

156 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

Voici la lutte d'une jeune femme, déléguée du personnel dans une usine d'hommes, et de ses compagnons d'insoumission. Ils s'engageront dans un conflit de plusieurs mois en 1979, puis auront à affronter les multiples mesures répressives mises en oeuvre par la direction lancée dans une politique de réorganisation des forces de travail. Du passé ? Au printemps 2006, Mittal Steel prit possession d'Arcelor... une fusion appelée à supprimer de nombreux emplois. Des travailleurs payeront le tribut de la valorisation sans frein de la domination sans partage du capital.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2008
Nombre de lectures 277
EAN13 9782296653467
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

S. comme usine
© L’Harmattan, 2008
5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris

http://www.l ibrairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-05373-1
EAN : 9782296053731

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Geneviève Masséna


S. comme usine


L’Harmattan
Histoire de Vie et Formation
Collection dirigée par Gaston Pineau
avec la collaboration de Bernadette Courtois, Pierre Dominicé,
Guy Jobert, Gérard Mlékuz, André Vidricaire et Guy de Villers

Cette collection vise à construire une nouvelle anthropologie de la formation, en s’ouvrant aux productions qui cherchent à articuler "histoire de vie" et "formation". Elle comporte deux volets correspondant aux deux versants, diurne et nocturne, du trajet anthropologique.
Le volet Formation s’ouvre aux chercheurs sur la formation s’inspirant des nouvelles anthropologies pour comprendre l’inédit des histoires de vie. Le volet Histoire de vie , plus narratif, reflète l’expression directe des acteurs sociaux aux prises avec la vie courante à mettre en forme et en sens.

Dernières parutions

Volet : Histoire de vie
Jean-François GOMEZ, L’éducation spécialisée, un chemin de vie , 2007.
Association des Anciens Responsables des Maisons Familiales Rurale (coord. par J.-C. Gimonet), Engagements dans les Maisons Familiales Rurales , 2007.
Marie-Odile de GISORS et Joffre DUMAZEDIER, Nos lettres tissent un chemin , 2007.
Michèle PELTIER, Le couchant d’une vie. Journal d’une cancéreuse croyante et coriace , 2007
Jacqueline OLIVIER-DEROY, Cœur d’enfance en Indochine , 2006.
Jeannette FAVRE, En prison. Récits de vies , 2005.
Françoise BONNE, A.N.P.E. MON AMOUR, 2006.
Christian MONTEMONT et Katheline, Katheline , 2005.
David JUSTET, Confessions d’un hooligan , 2005.
Renée DANGER, Mon combat , leurs victoires , 2005.
Danièle CEDRE, La porte-paroles. De Elles à… Elle , 2005.
Guy-Joseph FELLER, Les carambars de la récré ! Une école de village en Pédagogie Freinet dans les années 60, 2005.
Marie-Claire GRANGEPONTE, (sous la dir. de), Classes nouvelles et gai-savoir au féminin, 2004.
Cela faisait bien longtemps que la sidérurgie n’avait plus fait la une des médias. Depuis plus de 30 ans, les effectifs des principales usines européennes rassemblées dans un groupe unique fondaient dans la discrétion d’une « optimisation » permanente. La diminution des effectifs avait pris le rythme d’une déperdition au long cours, juste repérable sur les courbes des experts. Parmi tant et tant de « dégraissages », de fermetures brutales d’entreprises survenues depuis, la grande braderie de la sidérurgie qui, après celle des mines, saigna cette industrie de 50 000 emplois dans les décennies 60 et 70, était vraiment du passé.
Qui se souvient de l’année noire de 1979 où, en 18 mois, près de 22 000 emplois, dont 14 000 dans le bassin lorrain, furent supprimés ? Qui se souvient de la formidable lutte des sidérurgistes, de leur vaillance et de leur échec ? Qui se souvient que, suite à la faillite des maîtres de forges, on nationalisa les pertes pour, toute honte bue, reprivatiser les profits dès que la rentabilité fut retrouvée ?
Ceux qui subirent se souviennent : la Lorraine sinistrée, des villes entières, Longwy d’abord, mais aussi Thionville, la quasi-totalité des usines des vallées de la Moselle, de l’Orne, de la Fensch, mais aussi le Pas-de-Calais avec Denain et Valenciennes, la Normandie et Mondeville, autant de lieux et d’hommes qui vivaient des mines et de la sidérurgie furent vidés de leur substance, privés d’existence, dans cette gigantesque faillite.
Des luttes, encore plus oubliées, allèrent de pair avec ces liquidations : celles des grandes usines sidérurgiques « performantes » de Dunkerque et de Fos-sur-mer à qui, entre automatisation et intensification du travail, fut imposée une baisse drastique des coûts de production.
Du passé !
Au printemps 2006, Mittal Steel lançait une OPA sur Arcelor. La nouvelle fut d’abord accueillie par des cris d’orfraies de sa direction au nom d’un patriotisme économique (de quels pays ?) qui sentait surtout la perte de pouvoir de quelques-uns. Le gouvernement français y joignit sa tartuferie en donnant brièvement de la voix. Leur « résistance » dura le temps de réaction des marchés financiers qui, bientôt ralliés, convainquirent les actionnaires de l’impérative nécessité de cette « alliance ». La fusion Arcelor – Mittal eut lieu. Elle pourrait, prédit la presse, entraîner près de 30 000 suppressions d’emplois, négligeable facture pour des actionnaires. Près de 30 ans après, le même mot de « restructuration » resurgit pour couvrir les mêmes méfaits.
Sentiment amer d’un éternel recommencement dans cette société capitaliste où les mêmes, toujours les mêmes, payeront la facture. Quelles usines seront cette fois rayées de la carte ? Quelles régions seront plombées par leurs disparitions ? Quels travailleurs de France ou d’ailleurs payeront le tribut de la valorisation sans frein et de la domination sans partage du capital ?
Janvier 2008 : Gandrange, la Lorraine encore, ouvre la liste.
Prologue
« Il y a quelqu’un, il y a quelqu’un ? » Ma voix résonnait dans des couloirs déserts sur lesquels s’ouvraient des portes de bureaux, vides en ce samedi matin d’une fin de mois de juin d’avant vacances. Nous avions manqué un panneau indicateur et la voie qui bifurque à gauche vers « l’Audience », et nous roulâmes plusieurs kilomètres sur la voie rapide avant de pouvoir faire demi-tour. J’avais oublié depuis 25 ans cette route, cette bifurcation empruntées pourtant 5 jours sur 7, en car ou en voiture, pendant plus de 6 ans. Le portail principal était fermé et nous errâmes quelques minutes avant de trouver une entrée et la salle de conférence où nous nous rendions. L’habitude, à l’époque, m’avait rendu les accès familiers et je ne me souvenais plus de l’extrême discrétion avec laquelle l’usine était signalée. Il fallait prêter une grande attention pour apercevoir un panneau maison de petite dimension placé à 200 mètres du portail portant l’inscription « S. Méditerranée ». Certes, les cheminées des deux hauts fourneaux, la masse compacte de l’aciérie, les entrelacs des bandes transporteuses de minerai profilaient le paysage depuis la voie rapide. Mais, à cette distance, leurs contours embrumés et fantomatiques ne permettaient pas à un étranger aux lieux d’imaginer que fonctionnait là l’une des usines sidérurgiques les plus importantes d’Europe. Dans une société qui pratique une exhibition attentatoire de ses panneaux publicitaires les plus dérisoires, cette discrétion délibérée faisait contraste. Plus que l’inutilité d’une information dont le personnel concerné n’avait nul besoin, je la reçus comme la volonté de tenir à distance toute visite incontrôlée et de décourager les importuns éventuels. Pour les habitants des environs, l’usine était englobée dans une vaste zone industrielle et portuaire qui, après Berre, La Mède, Lavéra, s’était emparée de tout le territoire de Port-de-Bouc à Port-St-Louis et dont chaque élément se fondait dans une pollution banalisée. Pour les autres, les passants, ce paysage industriel aux cathédrales inesthétiques était le tribut à payer, tel un octroi obligé, pour mériter, avec ou sans tour-opérateurs, l’accès à la « vraie » nature de Camargue.
L’usine se laissait voir pourtant, lors de visites organisées par le Service Communication. Elles s’adressaient de préférence à un public jeune, pour lequel l’objectif pédagogique autorisait que l’on montrât l’existence de lieux de travail. Une fois par mois, ces visites s’ouvraient aux proches du personnel sidérurgiste, sorties familiales où les maris, partagés entre fierté et fatigue, amenaient leur femme et leurs enfants pour qu’ils se rendent compte. C’est à l’un de ces groupes que nous devions, mes enfants et moi, nous joindre pour une dernière visite avant l’été. 25 ans ! J’avais fui d’abord cette zone comme on s’échappe d’un air trop lourd qui asphyxie pour reprendre ailleurs sa respiration. Je m’étais longtemps inconsciemment interdit de ne jamais emprunter la route à grande circulation d&#

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents