L an 3000 - Rêve
170 pages
Français

L'an 3000 - Rêve , livre ebook

-

170 pages
Français

Description

A la recherche de la société juste et heureuse, la seconde moitié du XIXème siècle a multiplié les utopies. L'an 3000 du pathologiste italien Paolo Mantegazza est, en 1887, l'une des ultimes expressions de la confiance en l'effort et dans le génie humain. Lue à la lumière des tragiques expériences du XXe siècle, cette optimiste vision de l'avenir, pour la première fois traduite en français, prend pour le lecteur moderne les allures inquiétantes d'une anti-utopie scientifique où sont éliminés sans remords les êtres inadaptés et où la pensée même est soumise au dirigisme impitoyable de l'Etat.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2004
Nombre de lectures 276
EAN13 9782296343368
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L'An 3000
RêveUtopies
Collection dirigée par Michèle Madonna Desbazeille
La collection Utopies se propose de publier des études sur l'utopie.
Elle sera particulièrement attentive à une approche rigoureuse du
concept d'utopie, qui touche à la fois à la philosophie politique,
l'histoire, la littérature, la sociologie, l'art et les religions.
Selon les moments de l'histoire, l'utopie a suscité l'enthousiasme ou
la méfiance. Si les années 70 ont favorisé un nouvel élan utopique,
depuis la chute du mur de Berlin on a décrété la mort de l'utopie pour
l'avoir trop longtemps identifiée aux socialismes totalitaires. Il s'en est
suivi un usage abusivement erroné du terme. La crise actuelle de toute
perspective d'application pratique de l'utopie exige une réflexion et
une formulation nouvelles sur le sujet.
La collection publiera également des textes utopiques introuvables.
Déjà parus
Jacqueline DUTTON, Le chercheur d'or et d'ailleurs, L'utopie
de J.M G. Le Clézio, 2003.
Raymond TROUS SON, Du paradis à l'enfer, sciences
techniques et cité idéale, 2003.
Lise DUMASY et Chantal MASSOL, Pamphlet, utopie,
manifeste (XIXe-XXe siècles), 2001.
Catherine PITIOT, Mondes sages, mondes fous dans l'Italie de
la Renaissance et de l'âge baroque, 2001.
Adelin CHARLES FIORATO, La cité heureuse, 2001.
Nadia MINER VA, Jules Verne aux confins de l'utopie, 2001.
François CHIRPAZ, Raison et déraison de l'utopie, 1999.
Raymond TROUS SON, D'Utopie et d'utopistes, 1998.
Françoise SYL VOS, Nerval ou l'antimonde. Discours et
Figures de l'utopie, 1826-1855, 1997.
Philippe RIVIALE, Fourier et la civilisation marchande, 1996.
Michèle MADONNA DESBAZEILLE (textes réunis par),
L'Europe, naissance d'une utopie ?, 1995.Paolo MANTEGAZZA
L'An 3000
Rêve
Traduction, introduction et notes
par
Raymond Trousson
L'Harmattan L'Harmattan Hongrie L'Harmattan Italia
5-7, rue de l'École-Polytechnique Hargita u. 3 Via Bava, 37
75005 Paris 1026 Budapest 10214 Torino
FRANCE HONGRIE IT ALlE@ L'Harmattan, 2003
ISBN: 2-7475-5559-3INTRODUCTION
Peu d'hommes de science ont connu, à la fin du XIXe siècle,
une renommée comparable à celle de Paolo Mantegazza.
Professeur de médecine et de pathologie générale, il fut aussi un
vulgarisateur scientifique infatigable dont les ouvrages, plusieurs fois
réédités, étaient traduits en une douzaine de langues de l'anglais au
hongrois, de l'allemand au polonais et au portugais, du français au
grec, au croate, au russe, au hollandais... Ses traités d'hygiène, ses
écrits - un peu sulfureux pour l'époque - sur la femme ou l'amour
ont beaucoup fait parler de lui. Mais encore romancier, journaliste,
grand voyageur - jusqu'en Laponie et aux Indes -, anthropologue
de réputation internationale, passionné de botanique, adepte de
l'évolutionnisme darwinien et de la théorie de la sélection naturelle
en un temps où cela faisait encore scandale chez les bien-pensants,
auteur d'études savantes sur le coca, la zoospermie de la grenouille
ou la dipsomanie, mais aussi partisan de Cesare Lombroso, le
célèbre criminaliste qui soutenait qu'il existe des criminels-nés,
déterminés par l'hérédité, produits de l'atavisme. La réussite
récompensa cet éclectisme: des centaines d'articles nécrologiques lui
rendirent hommage un peu partout dans le monde.
Paolo Mantegazza est né à Monza, le 31 octobre 1831, dans une
famille aristocratique aisée d'opinions libérales 1. Sa mère, Laura
Solari, connue pour son patriotisme, l'encouragea à prendre
partmodestement, en tant que courrier, mais il n'avait que seize ans -
aux « Cinq Jours» de 1848 au cours desquels les Milanais
chassèrent les occupants autrichiens. Après ses études secondaires à
Milan, il s'inscrit cette même année 1848 à la Faculté de médecine de
1 Pour les données biographiques, voir: C. Reynaudi, Paolo Mantegazza. Note
biografiche, Milano, Treves, 1893 - Dizionario biografico degli scrittori
contemporanei, Firenze, 1879 - Dictionary of Scientific Biography, 1. IX, New York,
1974.l'Université de Pise, mais passe l'année suivante à Pavie, où il
décrochera en 1853 son diplôme. Étudiant peu banal qui, à dix-neuf
ans, présente à 1'Istituto Lombardo un mémoire sur la génération
spontanée. Il aspire au succès et à la notoriété, mais il se sent sous
l'emprise des siens, en particulier sous la coupe de sa mère, vit mal
ses problèmes sentimentaux, partagé, comme nombre de jeunes
bourgeois de son temps, entre la chasteté et la fringale sexuelle. À
dix-neuf ans à peine, il est impatient d'évasion, de départs, et songe
à s'en aller en Amérique pour y fonder une colonie italienne et,
confie-t-il à son journal, y « faire de l'argent »2. Le projet se
précise lorsqu'en août 1853, se croyant atteint de tuberculose, il pense
qu'un long voyage en mer lui serait salutaire. Un élément décisif
intervient en décembre de cette année, quand il lui faut renoncer à
épouser Ernestina Robecchi, les parents de la demoiselle ne l'ayant
pas considéré comme un assez bon parti. Le 23 janvier 1854, il fait
une tentative de suicide à l'opium et, rétabli, décide de couper les
ponts avec le passé et de tenter l'aventure: le 9 juin 1854,
Mantegazza s'embarque à Southampton pour Buenos Aires.
Pourquoi l'Amérique du Sud? Le jeune homme ne semble pas
avoir d'intentions précises ni d'objets de recherche scientifique
bien définis. Il fuit ses déceptions, sa famille, espère se faire un
nom: « Je veux remercier mes parents des soins qu'ils m'ont
prodigués, dit-il dans son journal, mais je veux parvenir à la gloire et à
la fortune comme je veux et comme il me plaît. L'indépendance
m'est aussi nécessaire que la nourriture». Ambitieux, il refuse un
statut médiocre et prétend faire son chemin à sa guise. Des
projets? Des rêves plutôt, qu'il aimerait faire partager à ceux qui
auraient les moyens, croit-il, de les réaliser, mais des rêves qu'il
nourrira toujours en pleine maturité. Séjournant à Paris avant son
départ pour l'Argentine, il a voulu s'en ouvrir à un homme pour
qui il a, dit-il, de la « vénération », « un des plus grands génies du
siècle» qu'il admire depuis son enfance et à qui il écrit: «Non
seulement je vous adore mais je vous aime ». Cet homme, c'est
2 Sur les années de jeunesse de Mantegazza, voir A. Aimi, « Gli anni giovanili deI
Mantegazza: l'interesse per l'antropologia, i rapporti con il Museo di Storia
Naturale di Milano, la memoria sulla coca », dans Paolo Mantegazza e il suo tempo:
l'origine e 10sviluppo delle science antropologiche in Italia. Convegno di studio,
Firenze 30-31 maggio 1985, Milano, Ars Medica Antigua Editrice, 1986, pp.
3955.
8Alphonse de Lamartine, l'initiateur officiel du romantisme en
France, l'illustre poète des Méditations, des Harmonies poétiques
et religieuses, de Jocelyn, de La Chute d'un ange, de Graziella ou
de l'Histoire des Girondins. Mais Lamartine, aux yeux de
Mantegazza, c'est aussi l'homme politique passé du légitimisme à la
gauche, le chef du gouvernement provisoire en 1848, promoteur d'une
politique progressiste pénétrée, il est vrai, d'esprit évangélique.
Dans son essai de 1831 Sur la politique rationnelle, Lamartine
s'est montré partisan d'une démocratie tout en cherchant les
moyens de prévenir la violence d'un prolétariat misérable par des
réformes sociales importantes, sans toutefois toucher au principe
sacré de la propriété. Il est convaincu, comme Michelet, que la
France du XIXe siècle doit prendre l'initiative du progrès qans tous
les domaines. Il conçoit l'Histoire comme une avance organique et
nécessaire mais aussi comme progressif dévoilement d'un projet
divin, perspective qui n'est sans doute pas celle du jeune Italien,
partisan déjà d'un progrès « laïcisé» et qui devrait plus à la science
et aux techniques qu'au « christianisme rationnel» du poète.
Toujours est-il que Mantegazza écrit à Lamartine, le 10 avril
1854, une lettre dont il vaut la peine de citer de longs extraits parce
qu'elle c

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