L épistémologie d Emile Meyerson
224 pages
Français

L'épistémologie d'Emile Meyerson , livre ebook

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224 pages
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Description

Cet ouvrage répond au double objectif de contribuer à une intelligence contemporaine de l'épistémologie d'Emile Meyerson, et d'en souligner un enjeu politique majeur : celui de l'auto-constitution/auto-intuition d'un "ordre public" endogène en Afrique.

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Informations

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Date de parution 01 juin 2012
Nombre de lectures 27
EAN13 9782296495968
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

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Extrait

L’épistémologie d’Émile Meyerson
Problématiques africaines Collection dirigée par Lucien AYISSIIl s’agit de promouvoir la pensée relative au devenir éthique et politique de l’Afrique dans un monde dont on proclame de plus en plus la fin de l’histoire et de la géographie. L’enjeu principal de cette pensée à promouvoir est la réappropriation conceptuelle, par les intellectuels africains (philosophes, politistes, et les autres hommes et femmes de culture), d’un débat qui est souvent initié et mené ailleurs par d’autres, mais dont les conclusions trouvent dans le continent africain, le champ d’application ou d’expérimentation. La pensée à promouvoir doit notamment s’articuler, dans la perspective de la justice et de la paix, autour des questions liées au vivre-ensemble et aux modalités éthiques et politiques de la gestion de la différence dans un espace politique où la précarité fait souvent le lit de la conflictualité. La collection « Problématiques africaines » a également l’ambition d’être un important espace scientifique susceptible de rendre de plus en plus présente l’Afrique dans les débats mondiaux relatifs à l’éthique et à la politique. Déjà parus Joseph EPEE EKWALLA,Développement social des entreprises camerounaises, 2012. Jean-Baptiste DJOUMESSI,Société civile. L’autre voie du développement de l’Afrique, 2011. Marcien TOWA,Identité et transcendance, 2011. Pascal MANI,Le vade-mecum du chef de terre. Comment réussir une carrière dans la préfectorale, 2010. Serge-Christian MBOUDOU,de la peur chez Hans L'heuristique Jonas. Pour une éthique de la responsabilité à l'âge de la technoscience, 2010. Aaron Serge MBA ELA II,Chroniques philosophiques d’un pédagogue, 2010. Roger Bernard ONOMO ETABA, Le tourisme culturel au Cameroun, 2009. André Liboire TSALA MBANI,Les défis de la bioéthique à l’ère éconofasciste, 2009.
Jacques Chatué L’épistémologie d’Émile Meyerson
Éléments pour une réception politiste africaine
Du même auteur
-Basile-Juléat Fouda. Idiosyncrasie d'un philosophe africain,Préface de Philippe Laburthe Tolra, Paris, L'Harmattan, coll. Etudes africaines, 2007. -Senghor philosophe. Cinq études. Préface de Charles-Robert Dimi, Yaoundé, CLE, 2009, -Epistémologie et transculturalité1:, tome Le paradigme de Lupasco; tome 2,Le paradigme de Canguilhem, Paris, L'Harmattan, coll. Histoire et philosophie des sciences, Préface de Laurent Bove, 2010. © L’Harmattan, 2012 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-296-9906-23 EAN : 9782296990623
Pour Colette Njiki Chatué
Avant-propos
Argument pour un détour stratégique L’épistémologie ne peut être indifférente aux conséquences que l’activité scientifique doit supporter, parmi lesquelles l’acception même de la politique n’est pas des moindres. Devant le défi maintenu d’une désaliénation du devenir des peuples issus de la colonisation, il n’est guère aisé de trouver des alliances épistémologiques proprement dites. Nous nous proposons de montrer qu’un détour technique par l’épistémologie d’Emile Meyerson peut aider, à cet égard, à sortir du cadre de pensée assimilationniste d’une rationalité de type cartésien, fondée sur une heuristique d’« inspiration » mathématique, mais qui s’avère quasi inquisitive : violente. Un tel détour se doit alors d’être patient. Car on ne peut par les seuls argumentaires culturaliste et idéologique, revenir des conséquences inouïes de l’idée d’une suprématie absolue du mode de pensée mathématique, alléguée de Descartes à Bachelard, en passant par Comte ou Brunschvicg. Ces conséquences portent ultimement sur la détermination de l’humain de l’humain, dont nous prétendons ici qu’elle ne peut se passer de ladécisiondes peuples. On trouve chez Meyerson une pratique de l’épistémologique qui ne relève ni de la « philosophie scientifique », ni d’une « science des sciences », mais qui, défiante à l’égard du strict internalisme, participe d’unephilosophie de l’esprit laissant apparaître que l’activité scientifique n’est guère une singularité absolue et absolument supérieure, ni une fin en soi, mais un « cheminement » inscrit dans une anthropologie irréductible à ses seules figures philosophiques.
Car l’obstination de l’explication, opposée aux réductions légalistes/prévisionnistes de l’activité scientifique, doit être elle-même expliquée et jugée, maisautrement. De cela se préoccupe Emile Meyerson dans toute son oeuvre. Il nous semble alors qu’on peut en inférer des enjeux politiques, notamment par le
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truchement de la problématique de l’« espace public » en tant qu’il résulte, depuis Francis Bacon, Hugo Grotius ou Baruch Spinoza, des leçons analogiques ou ontologiques de la physique moderne.
Comme espace socialisé, l’espace public est le dehors d’un dedans auquel il reste lié par un lien analogique autorisant l’hypothèse d’une continuité relative, entre espace privé et espace public, plutôt que d’une rupture absolue, qui travaille la conception de l’espace public de Jürgen Habermas et celles de 1 ses principaux contempteurs, notamment Hannah Arendt .
L’enjeu de ces conceptions est de décider si l’espace public doit être pensé indépendamment de l’expérience que les peuples peuvent en avoir sans forcément ladire. Il ne s’agit pas alors simplement de s’en faire le porte-parole, mais de faire l’apologie, en matière politique, de lanon-parole, d’où l’on puisse envisager d’autres modes de la parole et de la prise de parole. S’en faire le porte-parole reviendrait, comme chez Habermas, à ouvrir l’espace public à une opinion publique marginalisée. Il ne s’agit pas non plus, dans une perspective spinoziste, de porter au centre de l’espace public une opinion publique des multitudes (définies en fonction de leur pouvoir d’autoconstitution) en le subordonnant à la possibilité éthique de leur passage du régime de l’imagination à celui de la raison. Ne peut-on, plus radicalement, explorer la possibilité politique 2 d’une propre rationalité de cet imaginaire public ?
1  Tout au long de multiples écrits, leur perspective commune est celle de la critique de la transcendance absolue d’une sphère quasi ésotérique du pouvoir public, qu’il soit monarchique (Habermas) ou totalitariste (Arendt). La liberté ainsi requise contre les mystifications du pouvoir peut à son tour se constituer en recours anti-démocratique… Sur les débats y relatifs, voir notamment Bernard Miège,La société conquise par la communication, Presses Universitaires de Grenoble, 1989. 2  Poser la question en ces termes c’est se montrer méfiant à l’égard des critiques réductrices du grand rêve des Lumières, centré sur la perspective de l’usage public de la raison, critiques qui apparaissent sous les plumes incisives de Homi K. Bhabha (Les lieux de la culture. Une théorie postcoloniale, 1992, 2007, Paris, Payot et Rivages) notamment, comme une contestation finale du rationalisme, ainsi que sous celles, non moins incisives, des tenants du
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Cette idée d’une propre rationalité de l’imaginairepublic (à distinguer des conceptions suggérées par les théories récentes du « tiers symbolisant », qui rattachent l’imaginaire public à un fonds privé) devrait permettre, à terme, de solliciter plus avant le concours des sciences empiriques telles que la géographie politique (irréductible, comme on sait, à la géopolitique), ou de l’ethnolinguistique, y compris celle des littératures orales… (dont les procédures rationnelles plus ou moins tenues en mépris pourraient bien ne pas relever de pratiques méthodologiques de suppléance, mais d’une rationalité alternative, imposée du réel à la pensée), pour refonder la représentation de l’espace en fonction des aires culturelles, mais sans évacuer le bénéfice du recours à l’épistémologie des sciences de la nature dans la construction moderne du champ politique, tel qu’à l’œuvre chez Bacon ou chez Spinoza. Ceta priorise ramène d’une certaine manière à épistémologique l’axiomatisation d’un primat éternel de la physique mathématique de leur temps, et dont le privilège persiste au regard d’enjeux idéologiques et/ou culturels historiquement et géographiquement déterminés. Par exemple, comment envisager une conception conséquente de ces répliques que révèlent, de proche en proche, à partir des postures anthropologiques de l’ethnolinguistique et de la littérature orale, les représentations diaprées de l’espace dans les cultures africaines, qui ne sont pas sans effets sur leur rapport actuel non seulement à l’Etat, mais aussi à l’histoire et à la géographie ? Car on ne saurait séparer la représentation scientifique et politique de l’espace de ses métaphorisations culturelles, au moins. Les métaphores, en tant qu’elles participent du « texte » social, infléchissent la perception de l’espace public en suscitant des dispositions bien diverses, comme la disposition à socioconstructivisme, ramenant le rationalisme à un mythe moderniste artificiellement mis en route depuis Platon. Les vertus du rationalisme ne sont pas épuisées du fait des miasmes de son histoire interne et externe. Précisément, Meyerson offre l’occasion de repenser le social en fonction de présuppositions épistémologiques relevant d’un rationalisme en dissidence, mais d’un rationalisme tout de mêmemaintenu.
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l’appréhension, ou, plus souvent, à la préhension ; la disposition à la participation, ou, plus souvent, à la subjectivation ; la disposition à la dissension, et, plus souvent, à la sacralisation ; 3 etc.C’est dans cette perspective que nous proposons ici une manière de plaidoyer pour une prise en compte culminante de la notion d’« ordre public », préalablement à celle d’« espace public », dans la problématique de la construction de l’espace démocratique, notamment dans les pays issus de la colonisation, où l’Etat précède la nation en instituant, entre gouvernants et gouvernés, un espace véritablementacosmique, qui risque de contribuer, longtemps encore, à l’éloignement d’une forme de gouvernement faiblement comptable de ses actes auprès de ses mandants « internes ». On en attend, au mieux un Etat pédagogue et paternel, et au pire, un régime inducteur de barbarie, de torpeur et de servitude. Comment donc, à partir de l’épistémologie d’Emile Meyerson, rejoindre cette notion d’ordre public, en tant qu’elle devrait précéder, axiologiquement, celle d’espace public ? Telle est notre préoccupation dans cette sorte d’expérience de lectureque constitue le présent ouvrage. Le long détour par le texte d’Emile Meyerson se justifie entre autre par la nécessité de se défier politiquement du succès théorique des épistémologies de la rupture, succès imputable, à notre avis, à une influence latente, mais profonde, du tranché spinoziste entre science et non science, en dépit de la tempérance éthique de ce tranché par la perspective d’une récupération pratique de la connaissance dite « du premier genre ». Nous ne préjugeons donc pas, ici, de la portée intrinsèquement politique de l’épistémologie d’Emile Meyerson.Sans doute donc, disons-nous, l’étude attentive de l’épistémologie d’Emile Meyerson permet-elle, d’un côté, de
3 Sur la question de la représentation de l’espace dans les cultures africaines, voir par exempleJournal des Africanistes, t. 79, Fascicule 1, intitulé « L’expression de l’espace dans les langues africaines », éditions Sociétés des africanistes, Paris, 2009.
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