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Description
Sujets
Informations
Publié par | L'Harmattan |
Date de parution | 01 juillet 2014 |
Nombre de lectures | 5 |
EAN13 | 9782336352299 |
Langue | Français |
Poids de l'ouvrage | 1 Mo |
Informations légales : prix de location à la page 0,1350€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
Couverture
4e de couverture
Ouverture philosophique
Collection dirigée par Aline Caillet, Dominique Chateau,
Jean-Marc Lachaud et Bruno Péquignot
Une collection d’ouvrages qui se propose d’accueillir des travaux originaux sans exclusive d’écoles ou de thématiques.
Il s’agit de favoriser la confrontation de recherches et des réflexions qu’elles soient le fait de philosophes « professionnels » ou non. On n’y confondra donc pas la philosophie avec une discipline académique ; elle est réputée être le fait de tous ceux qu’habite la passion de penser, qu’ils soient professeurs de philosophie, spécialistes des sciences humaines, sociales ou naturelles, ou… polisseurs de verres de lunettes astronomiques.
Dernières parutions
Sous la direction d’Aline CAILLET et Christophe GENIN, Genre, sexe et égalité , 2014.
Benoît QUINQUIS, L’Antiquité chez Albert Camus , 2014.
Catherine MONNET, La reconnaissance. Clé de l’identité , 2014.
Jean PIWNICA, L’histoire : écriture de la mémoire , 2014.
Jacques ARON, Theodor Lessing, Le philosophe assassiné , 2014.
Naceur KHEMIRI & Djamel BENKRID, Les enjeux mimétiques de la vérité. Badiou « ou /et » Derrida ? , 2014.
Pascal GAUDET, Philosophie et existence , 2014.
Pascal GAUDET, Penser la politique avec Kant , 2014.
Pascal GAUDET, Penser la liberté et le temps avec Kant , 2014.
Aklesso ADJI, Ethique, politique et philosophie , 2014.
Christian MIQUEL, Apologie de l’instant et de la docte ignorance , 2014.
Paul-Emmanuel STRADDA, L’Être et l’Unité , 2 volumes, 2014.
Carlo TAMAGNONE, La philosophie et la théologie philosophale , 2014.
Jacques POLLAK-LEDERER, L’Ontologie écartelée de Georges Lukács , 2014.
Titre
Marc DURAND
Médée l’ambigüe
*
Approches plurielles d’une figure de légende
L’HARMATTAN
Copyright
© L’HARMATTAN, 2014
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
www.harmattan.fr
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
EAN Epub : 978-2-336-70240-7
Dédicace
Nepti meae Gaïae,
deliciosissimae puellularum…
I – Introduction
Mêdeia legetai pollakhôs
Pour paraphraser Aristote qui affirme à plusieurs reprises de l’être qu’il peut être dit de multiples façons 1 , on pourrait, sans se tromper outre mesure, annoncer : Mêdeia legetai pollakhôs , « Médée peut être racontée de multiples façons ».
Nous rejoindrions ainsi par là l’opinion d’Homère qui décrit dans l’ Odyssée l’ Argô pasi melousa 2 , l’Argô chantée par tous.
Il n’y a pas, en effet, de mythe si souvent dit, par les logographes, les poètes qu’ils soient épiques, tragiques, idylliques, comiques, si souvent décrit par les historiens, les mythographes, les philosophes, les grammairiens, glosé par les scholiastes. 3 , avec des ampleurs 4 , des tonalités différentes, certes, mais qui, à tout le moins, déclinent tous le même mythème 5 : la vengeance terrible d’une femme bafouée. Si Alain Moreau 6 ne relève pas moins de cent cinquante œuvres antiques, littéraires, sculptées ou picturales ayant traité du mythe de Médée, pour Duarte Mimoso-Ruiz, c’en est plus de trois cents qui sont comptabilisées entre 1210 et 1983. Pour notre part, nous avons colligé les références de cent trente-cinq auteurs littéraires antiques significatifs que l’on a regroupées au sein de notre Annexe I.
Nous voudrions tout d’abord, dans une partie introductive, ordonner un peu tous les membra disjecta qui concernent les œuvres anciennes, conservées ou fragmentaires, depuis les poètes de la haute période épique, Homère, Créophylos, Hésiode. jusqu’aux latins chrétiens tardifs comme Dracontius.
Ce projet a déjà été mené, notamment par Henri Joseph Guillaume Patin, par L. Schiller et par Léon Mallinger 7 au siècle dernier. Les deux premiers se sont surtout axés sur la tragédie. Le suivant s’est attaché à tous les modes d’expressions littéraires antiques et modernes, allant des prosateurs aux rhéteurs en passant par l’épopée et la poésie lyrique dans un inventaire qui, sous couvert de littérature comparée, confine souvent à la collection formelle et semble n’avoir d’autre projet que celui de la recherche de l’exhaustivité maximale.
En 1927, un article de Louis Séchan 8 fait date dans les recherches sur Médée. Si les précédents auteurs composaient des œuvre de pure étude littéraire, le réviseur du célèbre dictionnaire d’Anatole Bailly utilise, lui, toutes les ressources de l’herméneutique et de l’exégèse textuelles scientifiques (Wilamowitz, C. Robert, Goedhardt, Seelinger.), de l’épigraphie, de la statuaire et de la céramique pour mener à bien son projet.
Les études ont succédé, montrant des approches aussi nombreuses que variées. Ainsi, P. Friedlander, C. Robert, L. Rademacher, U. Von Willamowitz-Mollendorf 9 , se sont penchés sur le mythe en lui-même, cherchant sa généalogie, tant du point de vue des matériaux de base, que de sa construction elle-même, ainsi que de son interprétation ; K. Meuli 10 , quant à lui, faisant un parallèle entre l’ Odyssée et Les Argonautiques a amené E. Delage 11 à s’interroger sur la géographie du parcours des Argonautes ; R. Bacon 12 , pour sa part s’intéressait, à l’aspect religieux du mythe et V. Haas 13 , aux aux relations que peut entretenir cette légende avec les mythes orientaux en particulier ceux des Hittites.
Il faudrait en outre citer K. Schefold, H. Von Steuben, K. Fittchen, M. Vojatzi 14 .
Plus proche de nous, Alain Moreau a étudié Médée et Jason sous l’angle du mythe en lui-même et de sa signification, étudiant cette forme de récit qui, à l’instar d’un être vivant, possède un acte de naissance, une vie et une mort. Il fait œuvre de philosophie et de sémiologie ou encore de psychologie sociale.
Toutes ces études montrent une diversité étonnante dans la variété des auteurs anciens et dans leur approche du personnage de Médée. Comme Protée elle se métamorphose sous leur calame, leur plume ou leur stylet ; elle est insaisissable et l’on pourrait sûrement reprendre sur son compte l’opinion d’E. Legouyé : « les héroïnes ressemblent à des Sphinx ; elles ne disent jamais leur dernier mot 15 ». Les auteurs racontent tous une Médée véridique, mais qui n’épuise jamais tout à fait la légende. Ils sont pris dans un contexte artistique, religieux, culturel et géopolitique qui explique leurs visions différentes de l’héroïne.
En conséquence, ainsi qu’on peut s’y attendre, les anciens et les modernes ne concordent pas tous, loin de là. Et l’on veut bien croire Diodore de Sicile 16 lorsqu’il affirme :
« Les anciens mythes sont loin d’être simples ni d’accord entre eux. C’est pourquoi il ne faut pas s’étonner si quelques uns des faits que nous rapportons ne s’accordent pas avec le récit de tous les poètes et historiens… »
Et cependant, nous ne pourrons totalement nous résoudre à dire avec lui 17 :
« En général les poètes tragiques ont beaucoup orné de leurs fictions l’histoire de Médée [...] Et il serait trop long et inutile de consigner ici tout ce que les mythologues ont dit de Médée ».
Car chacun d’entre eux a quelque chose d’important à dire. En effet, comme l’écrit Alain Moreau 18 , « le récit du plus humble des mythologues est chargé d’autant de valeur qu’une tragédie de Sophocle » ; chaque variante enrichit la légende de l’héroïne qui devient ainsi, à l’instar de la figure qu’elle décrit, plus indéterminée et plus insaisissable, poikilos 19 comme le poulpe d’Oppien, chatoyant, changeant de forme et de couleur selon le support sur lequel il est couché 20 .
Il existe cependant un tournant important, une « brisure épistémologique », pour reprendre une expression de Bertrand Russel, dans l’appréhension de la figure de Médée. L’auteur qui inaugure cette révolution semblerait bien être Euripide, qui, en 431 donna la pièce éponyme, consacrée à notre héroïne, la décrivant sous un jour tout à fait nouveau. Nous disons qu’Euripide « semble » être l’auteur qui nous a