Vivre en Europe
300 pages
Français

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Description

L'Europe est devenue un espace aux frontières incertaines dans lequel font irruption les problèmes les plus divers : politiques d'immigration, d'hygiène, de santé et de sécurité... Ces domaines ressortent de plus en plus de la compétence de l'Union, réduisant la marge de manoeuvre des pays membres, et devenant ainsi l'objet d'une nouvelle citoyenneté, encore à construire, floue et discriminatoire. La vie en commun a besoin de se nourrir d'idées qui ne s'épuisent pas dans la pratique quotidienne, elle a besoin de voix qui, au-delà de l'urgence des décisions, prennent de la distance.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2010
Nombre de lectures 108
EAN13 9782336260587
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1050€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© L’ Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
9782296104167
EAN : 9782296104167
Vivre en Europe

Bertrand Ogilvie
Ouvrage publié avec le concours du Collège international de philosophie, du Département de philosophie de la Freie Universität Berlin et du Centre de philosophie des sciences de l’Université de Lisbonne
Sommaire
Page de Copyright Page de titre Introduction - Vivre en Europe : une présentation Critiques, perspectives et utopies
Cosmopolitisme, internationalisme, cosmopolitique De l’homme-primate à l’homme-termite Essai sur l’affaiblissement du langage Utopies politiques - La politeia de l’Église selon Denys l’Aréopagite (~500) et l’Internationale de l’intelligentsia religieuse selon Hugo Ball (1886-1927) L’idée de l’Europe
Économies de la vie et de la société
« Le vivant n’est pas une marchandise » Quelques réflexions en marge d’un slogan L’économie politique à venir en tant que science thérapeutique
Différend, conflit et violence
Le droit, les politiques et le pouvoir d’État : les situations extrêmes dans une approche de lutte des classes / lutte de libération Soulèvement et terrorisme : expériences de la vie et de la mort Le corps du terrorisme Témoignages du politique : actualité de Lyotard Le mythe de l’autorité : Ubu ou l’impuissance politique
Notices biographiques
Introduction
Vivre en Europe : une présentation
Bertrand Ogilvie
Diogo Sardinha Frieder Otto Wolf

Nous avons réussi, avec ce recueil de textes sur l’Europe actuelle – c’est-à-dire sur ce que nous sommes nous-mêmes et ce que nous devenons – différents paris. D’abord, nous avons rassemblé des intellectuels de trois pays – d’Allemagne, de France et du Portugal – qui tracent ainsi sur la carte de la pensée continentale une sorte d’axe Nord-Sud. Si nous voulons penser les guerres d’autrefois et la paix d’aujourd’hui, le déchirement de l’Europe dans le passé et son unification dans le présent, l’Allemagne et la France seront, dans leurs relations historiques, une source inépuisable d’idées et d’expériences. Les théories des droits de l’homme et du cosmopolitisme y sont nées, autant que certaines idées sociales, libérales et même néolibérales, qui nous gouvernent à présent. Par ailleurs, si nous souhaitons réfléchir sur l’expérience de la colonisation et de la décolonisation comme sur la post-colonialité, la France et le Portugal auront, eux aussi, des leçons à nous apprendre. Leurs acquis sont essentiels pour comprendre les vagues d’immigration vers l’Europe, originaires souvent d’une Afrique francophone et lusophone, de plus en plus aussi du Brésil. Le Portugal a lui-même été, pendant la longue dictature à laquelle la révolution des œillets a mis fin en 1974, un fournisseur de main-d’œuvre pour les pays plus au Nord, que ce soient la France, la Suisse, le Luxembourg ou bien la Hollande. Dans notre axe de la pensée, ces liens historiques entre le Nord et le Sud fournissent la première plate-forme de travail.

Deuxième pari réussi, nous avons mené ce travail non pas de manière froidement théorique, mais aussi de façon – pourquoi hésiter à employer le mot ? – sentimentale. Presque tous les contributeurs au présent recueil ont eu, et ont encore, des liens intenses avec au moins l’un des deux autres pays. Ainsi Frieder Otto Wolf, venu de Berlin, a-t-il vécu et enseigné au Portugal, à Coimbra, dans les années après la révolution des œillets, intervenant dans de multiples débats publics de cette période aussi perturbée que riche. À son tour, avant de rentrer à Lisbonne, José Gil a longtemps vécu et travaillé à Paris, ayant enseigné à Vincennes aux côtés de François Châtelet et de Gilles Deleuze, et a été un membre actif parmi les premiers animateurs du Collège international de philosophie. La plupart des textes rassemblés ici portent les marques de ces engagements comme des voyages qui les ont rendus possibles et leur ont donné un sens.

À ce défi biographique s’en ajoute un troisième, générationnel. De nous jours, des gens nouveaux se frayent un chemin entre ces trois pays, voyageant et prenant le risque d’écrire et de penser dans d’autres langues que la leur, non nécessairement en anglais. C’est le troisième succès de ce travail que de mettre côte à côte des auteurs dont on sait que depuis quelques années déjà ils écrivent sur leurs pays et sur l’Europe – Étienne Balibar rejoint ici Frieder Otto Wolf et José Gil – et une nouvelle génération, dont l’argumentation rigoureuse et les propos souvent hardis trouvent entièrement leur place dans ce dialogue au carrefour d’âges différents.

Pendant que nous menions ce travail, nous nous apercevions combien l’Europe est plus que l’Europe. D’une construction économique et politique, elle se transforme sous nous yeux en un espace aux frontières incertaines, en un champ d’expériences sur lequel font irruption les problèmes les plus divers : les vagues d’immigration de l’Est et du Sud, l’accueil fait aux nouveaux venus ou bien le refus de les accueillir, les politiques d’hygiène et de prévention de pandémies (grippe aviaire, maladie dite « de la vache folle », grippe A), les mécanismes de sécurité mis en place contre les menaces terroristes, les positions à prendre face aux conflits militaires dans différentes régions du monde. Dans ces domaines, chaque pays membre dispose désormais d’une marge de manœuvre bien restreinte, car ceux-ci ressortent de plus en plus de la compétence des instances de l’Union. C’est dire qu’ils sont désormais l’objet d’une nouvelle citoyenneté qui, étant encore floue et souvent discriminatoire dans ses modes d’exercice et même dans sa définition, est elle aussi à construire, à étendre à tous ceux qui vivent en Europe et à remplir par des contenus concrets.

Précisément dans leur condition de citoyens de l’Union européenne, les auteurs de ce recueil tiennent ici leurs discours. Philosophes, scientifiques, écrivains, ils débattent d’affaires « politiques », mais ils ne sont pas pour autant des femmes ou des hommes politiques. La vie en commun a besoin de se nourrir d’idées qui ne s’épuisent pas dans la pratique quotidienne. Elle nécessite des rapprochements inattendus, du recul historique, de l’audace conceptuelle, de l’expérimentation à la lisière de multiples savoirs. Elle a besoin de voix qui, au-delà de l’urgence des décisions, prennent un peu de distance pour regarder la vie sous un jour imprévu. Ce jour, nous avons voulu le répandre sur ce que nous avons appelé, de façon qu’il convient de définir brièvement, la vie en Europe .

Si on accepte que le gouvernement du monde soit avant tout un gouvernement exercé sur des hommes et des femmes ; qu’il s’occupe avant tout de ce qui constitue les conditions sous lesquelles la vie est à la fois possible et toujours en question ; en un mot, que dans son cœur la politique est devenue une biopolitique, alors force sera de reconnaître que l’immigration ou le droit d’asile, la liberté de déplacement et les contrôles qui l’encadrent, l’environnement et l’écologie politique, les pratiques de santé et la bioéthique, la technologie et la science sont autant d’objets prioritaires pour la réflexion. Une philosophie attentive au présent doit les scruter et se maintenir en eux, si vraiment elle aspire à dégager ce qui s’y joue de plus radical pour notre monde. À partir de là, l’espace est ouvert pour la critique de la situation présente, mais aussi pour l’esquisse des voies qui nous font défaut. C’est la tâche dont nous essayons de nous acquitter, en trois moments.

Premièrement, nous nous consacrons à certains concepts abstraits, mais dont les contreparties réelles ne sont pas moins concrètes : la crise du cosmopolitisme, le devenir mondial de la politique, le rôle imparti à l’Europe dans un contexte marqué par le « terrorisme international », le « multiculturalisme », « l’effondrement du mondialisme », la « renaissance du nationalisme », comme l’analyse Étienne Balibar. Pour António Vieira, qui s’inspire entre autres de Derrida et de Blanchot, la fin de l’histoire ayant été décrétée, nous vivons dans un monde où le libéralisme s’éloigne de plus en plus de la liberté, et la politique se confond de façon grandissante avec la police. Regardant vers le passé récent de notre Europe élargie, António Vieira parle du « communisme d’inspiration marxiste, cette branche sèche du christianisme », idée que Wiebke-Marie Stock interprète et relance à sa façon, lorsqu’elle revient sur les utopies politico-religieuses à travers les siècles, depuis l

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