Lamarckiens et Darwiniens : Discussion de quelques théories sur la formation des espèces/II/V
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Félix Le DantecDEUXIÈME PARTIE. – Néo-darwiniens et hérédité des caractèresacquis1899CHAPITRE VL’EMBOÎTEMENT DES GERMESLa génération humaine a de tout temps étonné les philosophes et l’on trouve dansles ouvrages les plus anciens des tentatives d’explication de ce phénomèneextraordinaire. Ces tentatives ne présentent aujourd’hui qu’un intérêt historique, aumoins autant qu’elles sont antérieures à la découverte des éléments sexuels, maisl’on ne peut nier cependant qu’elles aient eu une influence considérable sur lamanière dont les premiers observateurs au microscope ont interprété les résultatsde leurs observations. Lorsque Leuwenhœk eut découvert le spermatozoïde,mobile et par conséquent vivant, les idées anthropomorphiques régnantesamenèrent naturellement Hartsœker à supposer que cet être microscopiquecontenait un petit homme complètement formé ; quelques années aprèsDalempatius vit ce petit homme et le dessina d’après nature ! Quoi de plus naturel,n’est-ce pas, puisque le chevreau devient chèvre en grandissant, que le chevreau[1]lui-même dérive d’un tout petit chevreau semblable à lui-même . Sic canibuscatulos similes ! Il est vrai, qu’en y regardant de près, l’homme n’est pas seulementun enfant grandi ; il y a d’autres modifications que des accroissements de parties.Cela est encore plus caractéristique pour la mouche qui provient d’un ver aveclequel elle a fort peu de ressemblance, etc. Mais on n’était pas arrêté pour si peu ;l’œuf maternel ...

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Félix Le Dantec DEUXIÈMEPARTIE. – Néo-darwiniens et hérédité des caractères acquis 1899
CHAPITRE V L’EMBOÎTEMENT DES GERMES
La génération humaine a de tout temps étonné les philosophes et l’on trouve dans les ouvrages les plus anciens des tentatives d’explication de ce phénomène extraordinaire. Ces tentatives ne présentent aujourd’hui qu’un intérêt historique, au moins autant qu’elles sont antérieures à la découverte des éléments sexuels, mais l’on ne peut nier cependant qu’elles aient eu une influence considérable sur la manière dont les premiers observateurs au microscope ont interprété les résultats de leurs observations. Lorsque Leuwenhœk eut découvert le spermatozoïde, mobile etpar conséquent vivant, les idées anthropomorphiques régnantes amenèrent naturellement Hartsœker à supposer que cet être microscopique contenait un petit homme complètement formé ; quelques années après Dalempatiusvitce petit homme et le dessina d’après nature ! Quoi de plus naturel, n’est-ce pas, puisque le chevreau devient chèvre engrandissant, que le chevreau [1] lui-même dérive d’un tout petit chevreau semblable à lui-même. Sic canibus catulos similes ! Il est vrai, qu’en y regardant de près, l’homme n’est pas seulement un enfant grandi ; il y a d’autres modifications que des accroissements de parties. Cela est encore plus caractéristique pour la mouche qui provient d’un ver avec lequel elle a fort peu de ressemblance, etc. Mais on n’était pas arrêté pour si peu ; l’œuf maternel n’était qu’un milieu nutritif où le spermatozoïde croissait progressivement jusqu’à devenir visible et capable de vivre par lui-même. D’où provenait cespermatozoïde homunculus ?Il préexistait dans le spermatozoïde précédent et ainsi de suite jusqu’au père Adam ; de même existent à son intérieur tous les spermatozoïdes des générations futures. C’est la théorie de l’emboîtement des germes spermatiques, longtemps soutenue par ceux qu’on a appelés pour cela lesspermatistes. À côté d’eux, une école antagoniste, l’écoleoviste, attribuait à l’œuf la propriété de former à lui seul le nouvel être ; la fécondation donnait seulement une excitation physique déterminant le développement, et les œufs étaient emboîtés les uns dans les autres, depuis la mère Ève jusqu’à la dernière des générations à venir.
Sous l’une ou l’autre de ces formes, la théorie de l’emboîtement des germes, attribuait à l’unseulementdes éléments sexuels un rôle important dans la formation de l’individu. Indépendamment de l’emboîtement même dont nous trouverons un souvenir plus ou moins net dans les plasmas ancestraux de Weissmann, il reste à retenir de cette théorie bizarre l’hypothèse de lapréformationl’adulte dans de l’élément microscopique d’où il provient.
Voilà une hypothèse dont la genèse est bien explicable ainsi que je l'ai déjà fait remarquer. Elle provient naturellement de la tendance que nous avons à considérer commesimplesles phénomènes qui nous sont familiers. Nous voyonsgrandir les jeunes animaux et, par suite, nous concevons facilement qu'ils proviennent eux-mêmes, et par le même procédé, d'animaux semblables et plus petits, tellement petits même qu'ils ne soient plus visibles à l'œil nu. Et cependant, si l'on mettait devant nous, à côté du germe microscopique de l'animal futur, la masse totale des aliments aux dépens desquels se constituera son corps adulte, nous serions bien embarrassés pour nous rendre un compte exact de la manière dont s'effectuera le développement, même si nous découvrions au microscope dans le germe, l'image réduite et parfaite du corps qui en proviendra. N'est-ce pas à ce besoin d'explication que répond le vieux cliché : « Les corps vivants diffèrent des corps bruts en ce qu'ils s'accroissent par intussusception » ? Cela est tout simple et puisque cettepropriété(?) spéciale met les êtres vivants en dehors de la physique et de la chimie, pourquoi nous entêter à vouloir chercher dans ces sciences précises une explication des phénomènes vitaux auxquels elles ne sont pas applicables ? On ne doit expliquer la vie que par la vie, et puisqu'il est notoire que les animaux jeunesgrandissent, tout le développement se comprend sans peine.
Ce raisonnement, les partisans de la préformation l'ont fait implicitement sans s'en apercevoir ; il est donc naturel que leur théorie ne les ait conduits à aucun résultat puisque cette théorie considérait d'emblée comme insolubles les grands problèmes de la biologie. Comme conséquence d’une telle erreur de méthode, on a encore vu au commencement de ce siècle les descriptions extravagantes du [2] grand micrographe Ehrenberg. Dans les plus simples des protozoaires, cet anthropomorphiste irréductible a signalé les organes les plus variés, une constitution aussi compliquée que celle des hommes. Il a essayé d’expliquer les amibes par l’homme et c’est le contraire qu’il faut faire, car les fonctions de l’homme sont loin d’être simples quoiqu’elles nous soient très familières et que nous sachions les raconter avec des mots courants, parce que notre langage y est précisément adéquat.
1. ↑Mais comment le chevreau devient-il chèvre ? Quels sont les phénomènes de l’accroissement? À quoi bon s’en préoccuper, c’est là un phénomène familier, donc il nous paraît tout simple et peut servir àen expliquer (?) d’autres ! 2. ↑Ehrenberg,Die Infusionsthierchen als vollkommene Organismen, Leipzig. 1838.
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