Critique de la raison sociologique
249 pages
Français

Critique de la raison sociologique , livre ebook

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249 pages
Français

Description

Il existe dans la culture savante occidentale des catégories de combat ; ces « formes » dominantes de la connaissance qui font socle, s'originent dans les écrits de maîtres penseurs aussi différents que Platon, Aristote, Descartes, Spinoza, Rousseau, Kant, Nietzsche, Marx, Bourdieu… Ces multiples systèmes ont pour enjeu la promotion et l'imposition d'une vision et d'une maîtrise du monde. Ces formes, qui hantent la sociologie dans un perpétuel combat d'école, sont ici mises en perspective.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2012
Nombre de lectures 32
EAN13 9782296480209
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1050€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

CRITIQUE DE LA RAISON SOCIOLOGIQUE
Le conflit des formes de la connaissance
© L’Harmattan, 2011 5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-56792-4 EAN : 9782296567924
Francis FARRUGIA
CRITIQUE DE LA RAISON SOCIOLOGIQUE
Le conflit des formes de la connaissance
L’Harmattan
Logiques Sociales Série Sociologie de la connaissance dirigée par Francis Farrugia
En tant que productions sociales, les connaissances possèdent une nature, une origine, une histoire, un pouvoir, des fonctions, des modes de production, de reproduction et de diffusion qui requièrent descriptions, analyses et interprétations sociologiques.  La série vise à présenter la connaissance dans sa complexité et sa multidimensionnalité : corrélation aux divers cadres sociaux, politiques et institutionnels qui en constituent les conditions empiriques de possibilité, mais aussi, de manière plus théorique, analyse des instruments du connaître dans leur aptitude à produire des « catégorisations » savantes ou ordinaires, à tout palier en profondeur et dans tout registre de l’existence. Attentive à la multiplicité des courants qui traversent cet univers de recherche, ouverte à l’approche socio-anthropologique, intéressée par les postures critiques et généalogiques, cette série se propose de faire connaître, promouvoir et développer la sociologie de la connaissance. Elle s’attache à publier tous travaux pouvant contribuer à l’élucidation des diverses formes de consciences, savoirs et représentations qui constituent la trame de la vie individuelle et collective.
Dernières parutions
MOREAU DE BELLAING Louis,Des sociologues dans la soute, 2009. NAMER Gérard,Machiavélisme et mondialisation en crise, 2009. CHARMILLOT Maryvonne, DAYER Caroline, SCHURMANS Marie-Noëlle (dir.),Connaissance et émancipation, 2008. JANNE Henri,Le système social,2008. MOREAU DE BELLAING Louis,L’enthousiasme de Madame de Staël, 2007. NAMER Gérard,Karl Mannheim, sociologue de la connaissance. La synthèse humaniste ou le chaos de l’absolu, 2006. SAINT-LOUIS Fridolin,Georges Gurvitch et la société autogestionnaire, 2006. FARRUGIA Francis (dir),L’interprétation sociologique. Les auteurs, les théories, les débats, 2006.
« Il faut, avant tout, dresser le catalogue le plus grand possible de catégories ; il faut partir de toutes celles dont on peut savoir que les hommes se sont servis. On verra alors qu’il y a encore bien des lunes mortes, ou pâles, ou obscures, au firmament de la raison ».
Marcel MAUSS
« C’est la plus grande erreur qui ait été commise, la véri-table fatalité de l’erreur sur la terre : on a cru avoir dans les catégories de la raison un critérium de la réalité, alors qu’elles devaient servir à se rendre maître de la réalité, à se tromper intelligemment au sujet du réel ».
Frédéric NIETZSCHE
Introduction
L’obscur objet de la raison sociologique
Autoproduction de la sociétéet construction collective des formes sociétales
« Tous les sociologues, de par leur existence même, sont engagés dans le combat qui met aux prises l’obscurantisme et les Lumières. Dans notre monde, faire de la sociologie, c’est faire la politique de la vérité ».
Wright MILLS
L'existence des collectivités humaines (societas generis humani) n'est pas grégaire mais politique et sociale. Elle n’est 1 pas naturelle, mais fondée sur un contrat et des conventions explicites et/ou implicites ; « contrat social » qui appelle une
. 1 « Rousseau a admirablement vu qu’un acte d’unanimité est la condition théorique de l’existence d’une société. (…) Certes, la volonté générale n’est pas, chez lui, la volonté de la totalité, ou de la majorité de la population, exprimée en des occasions particulières ; c’est la décision latente et continue par laquelle chaque individu accepte d’exister en tant que membre d’un groupe. (…) Je crois que Rousseau, dans leContrat social – puisque c’est auContrat socialque nous pensons en ce moment – a formulé l’idée la plus profonde et la mieux susceptible d’être généralisée, c’est-à-dire vérifiée sur un très grand nombre de sociétés, de ce que peuvent être l’organisation politique, et même, les conditions théoriques de toute organisation politique possible. ». Claude LÉVI-STRAUSS,Entretiens avec Claude Lévi-Strausspar Georges Charbonnier (1959), Paris, 10/18, 1961, pp. 42-43.
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Introduction
2 archéologie . Ce contrat qui est unpacte, c’est-à-dire une conclusion de paix sur fond de guerre potentielle, adopte de multiples formes selon les sociétés considérées : vie commu-nautaire des sociétés dites primitives, vie coutumière des socié-tés traditionnelles, vie étatisée et régie par le droit des sociétés industrialisées ou hyperindustrialisées. Je souhaite, au sujet de cette réalité sociétale qui occupe le discours sociologique, tenir un langage qui privilégie la notion deforme,afin decomprendre la manière dont notre tradition com-prendun certain nombre d’événements humains fondamentaux. Cesformesd’existence collective que sont les diversifiées diverses sociétés ont fait, en leurs contextes et en leurs tem-poralités respectifs, la preuve de leur effet stabilisateur de la vie collective sur la longue durée. Cette socialité volitive multi-forme s’est construite, s’adapte et se maintient dans le conflit. L’affrontement des sociétés et des civilisations est toutefois la règle de l’histoire humaine, qui voit se succéder des guerres incessantes, visant toujours à assurer la suprématie des formes de vie jugées par chacune les plus « vraies » et les plus « justes ». «Homo homini lupus: qui aurait le courage, en face de tous les enseignements de la vie et de l'histoire, de s'inscrire en faux contre cet adage ? (…) Quiconque évoquera dans sa mémoire les horreurs des grandes migrations des peuples, ou de l'inva-sion des Huns ; celles commises par les fameux Mongols de Gengis Khan ou de Tamerlan, ou celles que déclencha la prise de Jérusalem par les pieux croisés, sans oublier enfin celles de la dernière guerre mondiale, devra s'incliner devant notre 3 conception et en reconnaître le bien-fondé ». 2. Francis FARRUGIA,Archéologie du pacte social, Des fondements éthiques et sociopolitiques de la société moderne, Paris, L'Harmattan, collection Logiques sociales, 1994. 3. SigmundFREUD,Malaise dans la civilisation, Paris, PUF, 1971, pp. 64-65.
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La vie sociale et politique de l’anthropos perdure donc sur terre de manière plurielle et conflictuelle. Cette survie collec-tive se perpétue – d’une part grâce à la reproduction concrète de nom-breusesformes civilisationnellesqui s’expriment dans les multi-plesmatérielles formes historiquement adoptées par l’espèce humaine. Par la vertu de ces formes sociétales constituées sous la pression de la nécessité intérieure et extérieure, chaque groupement se maintient comme forme encastrée dans les formes contraignantes de la nature (géologie, géographie, cli-mat, végétation, etc.), qu’elle transforme plus ou moins pour les adapter à ses besoins. Ces formes anthropiques construites sur le temps long des civilisations sont autant de pratiques éprouvées de survie, pra-tiques collectives et individuelles à la fois, mémorisées et transmises. Ce sont là autant de solutions techniques efficaces ajustées aux formes naturelles qui constituent des milieux de vie changeants. Ces formes sociétales – techniques vitales col-lectives intégrées – sont des constructions intelligentes, des formes de vie certes, mais en tant que telles, desformes de connaissancepar un long usage collectif issu de générées l’adaptation de l’Homme au Monde. Par ces formes de connais-sance le monde s’anthropise, tout autant que l’homme se mon-dialise (au sens d’une ouverture à l’extériorité du monde). Ce sont ces modes concrets de vie – supposant autant de savoirs, de savoirs faire, de modes d’existence (cueillette, chasse, pêche, agriculture, élevage, sédentarité, nomadisme, commerce, industrie, exploitation de la nature à des degrés divers) – que l’existence commune perpétue dans leur syn-chronicité et leur diachronicité tout en les renouvelant sans cesse en réponse aux conditions changeantes du milieu tout autant qu’aux pressions sociales internes aux groupes. Il convient en effet que ces diverses formes, que ces différents
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Introduction
manières d’être-au-monde – qui présupposent autant de for-mes de connaissance et de catégorisation du réel – changent souvent, afin que ne change pas l’adaptation juste de l’espèce humaine à la réalité mouvante du monde. Je vise donc ici par la désignation de cesformes, entendues en de multiples sens, ce que l’on pense habituellement sous le terme detechniquesau sens le plus large du terme, avec tout ce que cela présuppose et implique d’organisations politiques, économiques et sociales afférentes. La notion aristotélicienne detechnêqui se pose comme un savoir particulier lié à l’acte de production, nous laisse d’ailleurs entrevoir la part active prise par l’humain dans la mise en place de formes savantes et effi-cientes qui transforment anthropiquement la nature. Mais la vie sociale et politique perdure – d’autre part grâce à la production historique – elle aussi – de différentesformes culturelles: institutions, normes et lois multiples qui régulent et codifient le rapport primordial que la société entretient avec la nature en même temps qu’avec elle-même, selon ce même principe de changement immobile qui, par sonœuvre lente fait 4 advenir, etinstalleunmonde. Toute collectivité humaine entretient pour ce faire, et ritua-lise un rapport de soi à soi qui est historial, identitaire et mémoriel à la fois, générant des formes politiques différentes selon les temps et les lieux : oligarchie, démocratie, tyrannie, monarchie, théocratie, république, etc.
4. « Être-œuvre signifie donc : installer un monde. (…) Là où se décident les options essentielles de notre Histoire, que nous recueillons ou délaissons, que nous méconnaissons ou mettons à nouveau en question, là s’ordonne un monde. Une pierre n’a pas de monde. Les plantes et les animaux, également, n’ont pas de monde, mais ils font partie de l’afflux voilé d’un entourage qui est leur lieu. ». Martin HEIDEGGER,Chemins qui ne mènent nulle part, Paris, Gallimard, 1980, pp. 47-48.
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